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« L'état des lieux des discriminations en France» - Adheos

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ADHEOS Association d’Aide de Déf<strong>en</strong>se Homosexuelle pour l’Egalité <strong>des</strong> Ori<strong>en</strong>tations Sexuelles<br />

C<strong>en</strong>tre Gay & Lesbi<strong>en</strong> ADHEOS Char<strong>en</strong>te-Maritime La Rochelle - Saintes<br />

5, passage de l’Anci<strong>en</strong>ne Caserne 17100 Saintes<br />

Siège Social : Maison <strong>des</strong> Associations 31, rue du Cormier 17100 SAINTES<br />

E mail : contact@adheos.org<br />

Site WEB: www.adheos.org<br />

06.26.39.66.13 ou 05.46.92.98.55<br />

CONFERENCE<br />

<strong>«</strong>L’état <strong>des</strong> <strong>lieux</strong> <strong>des</strong> <strong>discriminations</strong><br />

<strong>en</strong> France »<br />

La Rochelle<br />

V<strong>en</strong>dredi 11 février 2011<br />

ADHEOS est agréée par la CNIL sous le n° 1124785 et respecte les mesures de confid<strong>en</strong>tialité.<br />

ADHEOS est une marque déposée à l’INPI de Paris SIRET n°490 678 919 00013<br />

ADHEOS est membre de la Fédération Française LGBT, de l’ILGA Europe, du RAVAD, du SNEG<br />

Déclarée sous le n° W174000019 le 07/04/2005 à la Préfecture de Saintes


Confér<strong>en</strong>ciers<br />

Maître Shabname Meralli-Ballou Monnot<br />

Avocate -Médiatrice<br />

Responsable de la commission du droit de la discrimination du Barreau de Paris<br />

Formatrice <strong>en</strong> droit de la discrimination<br />

Médiatrice familiale (diplômée d’Etat de médiation familiale)<br />

Membre de l'AME (Association <strong>des</strong> Médiateurs Europé<strong>en</strong>s), d'Yvelines Médiation et de<br />

l'Association Nationale <strong>des</strong> Médiateurs<br />

Diplôme universitaire de la faculté de médecine de Créteil<br />

Master Europé<strong>en</strong> de Médiation<br />

Certificat de Compét<strong>en</strong>ce du Conservatoire national <strong>des</strong> Arts et Métiers<br />

Diplôme de Juriste Conseil d'<strong>en</strong>treprise<br />

D.E.S.S. Droit <strong>des</strong> Affaires<br />

Certificat d'Aptitude à la profession d'Avocat, Maîtrise <strong>en</strong> droit privé général<br />

Mémoire : "Comm<strong>en</strong>taire sur la loi n° 2005-102 du 11 février 2005 pour l'égalité <strong>des</strong> droits<br />

et <strong>des</strong> chances, la participation et la citoy<strong>en</strong>neté <strong>des</strong> personnes handicapées"<br />

Mémoire: "La synergie complém<strong>en</strong>taire <strong>des</strong> avocats et <strong>des</strong> médiateurs au vue d'une justice<br />

mieux acceptée"<br />

Mémoire : "La médiation familiale face aux situations de handicap"<br />

Maître Michel Navion<br />

Avocat à la Cour au Barreau de Paris<br />

Conseiller municipal de Martizay (36220)<br />

Anci<strong>en</strong> Secrétaire général de SOS Homophobie<br />

*<br />

Page 2


Avocats<br />

* *<br />

Participants<br />

- Me Jean-Pierre Chantecaille, adjoint au maire de La Rochelle<br />

- Me Serge Donzel (Niort)<br />

- Me Marie-Noëlle Moison (Niort)<br />

- Me Anne Nerrand-Pasquier (Puilboreau)<br />

- Me Anne Paladino (Orléans)<br />

- Me Elisabeth Rabesandratana (La Rochelle)<br />

- Me Christelle Rosa (Saintes)<br />

- Me Jean-Marie Salzard (Niort)<br />

- Me Yohan Scattolin (Niort)<br />

Autres personnalités<br />

- Jean-Marie Alquier, adjoint à la mairie d’Angoulins<br />

- Vinc<strong>en</strong>t Buraud, psycho-pratici<strong>en</strong><br />

- Sylvie Colloch, conseillère <strong>en</strong> insertion<br />

- Bérangère Gille, adjointe chargée du social à la mairie d’Angoulins<br />

- Arnaud Jaulin, conseiller municipal de La Rochelle<br />

- Jean Ricou<br />

ADHEOS<br />

- Bertrand Gire, présid<strong>en</strong>t<br />

- Frédéric Hay, présid<strong>en</strong>t d’honneur<br />

- Sylvie Bord<strong>en</strong>ave, membre du conseil d’administration, référ<strong>en</strong>te de la commission<br />

Solidarité Refuge Entraide<br />

- Xavier Grillot, membre du conseil d’administration, référ<strong>en</strong>t de la commission<br />

Juridique homophobie<br />

- Jean-Pierre Nardy, membre du conseil d’administration, membre de la commission<br />

Juridique homophobie<br />

- Jean-Bernard Bressot, membre du comité d’éthique<br />

- Christian Marsault, membre du conseil d’administration<br />

- Fior<strong>en</strong>zo Laudi, membre du conseil d’administration<br />

- Dominique Vindrinet<br />

- Robert Vindrinet<br />

Association LGBT<br />

- Philippe Devaux, trésorier, Girofard Bordeaux<br />

- David Devoreix, psychologue, Girofard Bordeaux<br />

- Fabi<strong>en</strong> Leroy, Girofard Bordeaux<br />

Page 3


ADHEOS Association d’Aide de Déf<strong>en</strong>se Homosexuelle pour l’Egalité <strong>des</strong> Ori<strong>en</strong>tations Sexuelles<br />

C<strong>en</strong>tre Gay & Lesbi<strong>en</strong> ADHEOS Char<strong>en</strong>te-Maritime La Rochelle - Saintes<br />

5, passage de l’Anci<strong>en</strong>ne Caserne 17100 Saintes<br />

Siège Social : Maison <strong>des</strong> Associations 31, rue du Cormier 17100 SAINTES<br />

E mail : contact@adheos.org<br />

Site WEB: www.adheos.org<br />

06.26.39.66.13 ou 05.46.92.98.55<br />

www.equal-jus.eu<br />

Formation Déc<strong>en</strong>tralisée – France – Poitou-Char<strong>en</strong>tes<br />

INVITATION FORMATION<br />

EQUAL-JUS, “European Network for the legal support of LGBT rights” est une action cofinancée par la Commission<br />

Europé<strong>en</strong>ne, et qui a pour objet la promotion, le mainti<strong>en</strong> et le souti<strong>en</strong> <strong>des</strong> droits dits LGBT, savoir les droits <strong>des</strong> personnes<br />

susceptibles de discrimination au regard de leur ori<strong>en</strong>tation sexuelle ou leur id<strong>en</strong>tité de g<strong>en</strong>re.<br />

EQUAL-JUS agit dans le cadre de promotion <strong>des</strong> droits fondam<strong>en</strong>taux, <strong>des</strong> valeurs démocratiques et de la citoy<strong>en</strong>neté<br />

europé<strong>en</strong>ne. Le projet se concrétise par une action de formation <strong>des</strong> pratici<strong>en</strong>s du droit, <strong>en</strong> deux temps :<br />

Dans un premier temps, une session de formation de juristes v<strong>en</strong>us de toute l’Europe, s’est t<strong>en</strong>ue à Flor<strong>en</strong>ce <strong>des</strong> 7 au 10 octobre<br />

2010. Cette r<strong>en</strong>contre a été l’occasion d’échanges de vue constructifs liés à la lutte contre les <strong>discriminations</strong> dans divers pays de<br />

l’Union Europé<strong>en</strong>ne.<br />

Dans un second temps, <strong>des</strong> actions au niveau régional sont organisées pour permettre aux participants de relayer dans leurs pays le<br />

fruit <strong>des</strong> échanges t<strong>en</strong>us à Flor<strong>en</strong>ce.<br />

C’est dans ce cadre que l’association ADHEOS organise, le v<strong>en</strong>dredi 11 février 2011 à La Rochelle,<br />

une confér<strong>en</strong>ce sur <strong>«</strong> l’état <strong>des</strong> <strong>lieux</strong> <strong>des</strong> <strong>discriminations</strong> <strong>en</strong> France »,<br />

avec la participation de Maître Shabname MONNOT, Référ<strong>en</strong>te de la commission Discriminations du Barreau de<br />

Paris.<br />

Cette journée visera à s<strong>en</strong>sibiliser les pratici<strong>en</strong>s du droit et acteurs de terrain, notamm<strong>en</strong>t magistrats, avocats, <strong>en</strong>seignants,<br />

assistants sociaux, syndicats à la prise <strong>en</strong> compte <strong>des</strong> phénomènes de discrimination, pas toujours perceptibles, auxquels ces<br />

professionnels sont confrontés. Il sera traité <strong>des</strong> <strong>discriminations</strong> dites LGBT (Lesbi<strong>en</strong>, Gay, Bi, Trans.) <strong>en</strong> particulier mais<br />

égalem<strong>en</strong>t (car elles sont très liées) les <strong>discriminations</strong> dans leur <strong>en</strong>semble qu’il s’agisse de sexe, couleur de peau, handicap,<br />

religion etc., tous critères visés par la réglem<strong>en</strong>tation europé<strong>en</strong>ne, et peu ou prou repris <strong>en</strong> droit positif français notamm<strong>en</strong>t au<br />

code Pénal et au Code du Travail.<br />

Le séminaire sera prés<strong>en</strong>té et animé par Maître Michel NAVION, Avocat au Barreau de Paris, et par ailleurs anci<strong>en</strong> Secrétaire<br />

Général de l’association SOS Homophobie. Maître Navion a bénéficié du souti<strong>en</strong> de l’association ADHEOS dans le cadre du<br />

séminaire de Flor<strong>en</strong>ce et r<strong>en</strong>dra compte <strong>des</strong> travaux auxquels il a participé.<br />

LIEU : salle Amos Barbot 37 rue du Collège 17000 LA ROCHELLE<br />

HORAIRE : 14 – 18 heures<br />

INSCRIPTION : Inscription gratuite, un simple Email m<strong>en</strong>tionnant votre nom, organisme, téléphone suffit à <strong>en</strong>voyer à<br />

contact@adheos.org Tous r<strong>en</strong>seignem<strong>en</strong>ts au 06 26 39 66 13<br />

Les thèmes suivants seront abordés :<br />

Les <strong>discriminations</strong> au niveau europé<strong>en</strong>. Limites et perspectives.<br />

Les <strong>discriminations</strong> <strong>en</strong> droit français.<br />

Exam<strong>en</strong> de quelques cas pratiques<br />

Questions <strong>des</strong> participants.<br />

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Bertrand Gire, présid<strong>en</strong>t d’ADHEOS, ouvre la séance <strong>en</strong> remerciant les interv<strong>en</strong>ants d’avoir<br />

bi<strong>en</strong> voulu accepter de v<strong>en</strong>ir débattre d’un sujet sur lequel l’association qu’il représ<strong>en</strong>te,<br />

chargée de l’aide et de la déf<strong>en</strong>se homosexuelle pour l’égalité <strong>des</strong> ori<strong>en</strong>tations sexuelles, est<br />

particulièrem<strong>en</strong>t s<strong>en</strong>sible : celui <strong>des</strong> <strong>discriminations</strong>. C’est un domaine qui intéresse non<br />

seulem<strong>en</strong>t notre pays mais aussi l’<strong>en</strong>semble <strong>des</strong> pays europé<strong>en</strong>s et l’Union europé<strong>en</strong>ne a su<br />

jouer un rôle important, qu’il faut souligner, dans cette lutte contre les <strong>discriminations</strong>.<br />

Les orateurs ayant été prés<strong>en</strong>tés, Me Michel Navion comm<strong>en</strong>ce la discussion.<br />

*<br />

* *<br />

Me Michel Navion précise que son rôle est celui d’un avocat dont l’objectif est de faire<br />

gagner les cli<strong>en</strong>ts qui s’adress<strong>en</strong>t à lui. Ce rôle diffère beaucoup de celui d’un médiateur qui<br />

est un tiers qualifié neutre et impartial dont la mission est de procéder à la résolution amiable<br />

<strong>des</strong> différ<strong>en</strong>ds, par voie de médiation, sous l'égide de la Halde, s'agissant de discrimination.<br />

Les <strong>discriminations</strong> dans l’Union europé<strong>en</strong>ne<br />

Les <strong>discriminations</strong> n’exist<strong>en</strong>t pas seulem<strong>en</strong>t <strong>en</strong> France mais dans tous les pays<br />

europé<strong>en</strong>s. Une étude de la Commission europé<strong>en</strong>ne effectuée <strong>en</strong> juin-juillet 2006 et publiée<br />

<strong>en</strong> janvier 2007 est éclairante sur <strong>«</strong> La discrimination dans l’Union europé<strong>en</strong>ne ».<br />

Il <strong>en</strong> résulte que les Europé<strong>en</strong>s estim<strong>en</strong>t qu’il y a discrimination <strong>en</strong> Europe et les<br />

critères les plus souv<strong>en</strong>t ret<strong>en</strong>us sont les suivants :<br />

- 64 % l’origine ethnique,<br />

- 54 % le handicap,<br />

- 50 % l’ori<strong>en</strong>tation sexuelle,<br />

- 46 % l’âge,<br />

- 44 % la religion ou les convictions,<br />

- 40 % le sexe.<br />

En moy<strong>en</strong>ne, une large majorité de citoy<strong>en</strong>s de l’Union europé<strong>en</strong>ne est convaincue<br />

que le fait d’être handicapé, d’être Rom, d’être âgé, d’appart<strong>en</strong>ir à une minorité ethnique ou<br />

d’être homosexuel représ<strong>en</strong>te plutôt un inconvéni<strong>en</strong>t dans leur pays. Près de huit citoy<strong>en</strong>s de<br />

l’UE sur dix p<strong>en</strong>s<strong>en</strong>t que c’est le cas lorsqu’une personne est handicapée (79 %) ou Rom<br />

(77 %)<br />

L’étude montre égalem<strong>en</strong>t que les citoy<strong>en</strong>s de l’Union europé<strong>en</strong>ne sont consci<strong>en</strong>ts <strong>des</strong><br />

désavantages dus à un handicap, à l’ori<strong>en</strong>tation sexuelle, au sexe et à l’origine ethnique.<br />

Ainsi, ils considèr<strong>en</strong>t que le fait d’appart<strong>en</strong>ir aux groupes suivants est un désavantage :<br />

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- Personne handicapée 79 %,<br />

- Rom 77 %,<br />

- Plus de 50 ans 69 %,<br />

- Autre origine ethnique que la population 62 %,<br />

- Homosexuel(le) 54 %,<br />

- Membre d’une religion qui n’est pas celle de la population 39 %.<br />

Définition de la discrimination<br />

Au mom<strong>en</strong>t de sa création (loi du 30 décembre 2004), la HALDE (Haute autorité de<br />

lutte contre les <strong>discriminations</strong> et pour l’égalité) avait organisé une campagne invitant les<br />

personnes discriminées à la contacter et à déposer un dossier. Or, elle n’avait pas défini ou<br />

mal défini ce qu’était une discrimination. Elle s’est donc trouvée avec de nombreux dossiers<br />

qu’elle a dû écarter car ils ne relevai<strong>en</strong>t pas de sa compét<strong>en</strong>ce 1 .<br />

La discrimination pourrait se définir comme le fait pour deux personnes se trouvant<br />

dans une situation de départ id<strong>en</strong>tique de se retrouver à l’arrivée dans <strong>des</strong> situations<br />

différ<strong>en</strong>tes. Par exemple, deux salariés effectuant le même travail et ayant la même anci<strong>en</strong>neté<br />

ont <strong>des</strong> avancem<strong>en</strong>ts et <strong>des</strong> rémunérations différ<strong>en</strong>tes. La discrimination se fonde donc sur le<br />

non-respect <strong>des</strong> règles d’égalité.<br />

La discrimination se distingue <strong>des</strong> injures et <strong>des</strong> viol<strong>en</strong>ces. Traiter quelqu’un de<br />

<strong>«</strong> pédé » est une injure. Refuser l’<strong>en</strong>trée d’une discothèque à toute personne qui afficherait<br />

visiblem<strong>en</strong>t son ori<strong>en</strong>tation sexuelle est discriminant.<br />

La difficulté est que la discrimination peut être masquée. Par exemple, une <strong>en</strong>treprise<br />

exigeait que les traducteurs qu’elle recrutait euss<strong>en</strong>t le permis de conduire ; elle excluait ainsi<br />

de facto tous les handicapés. La discrimination est alors difficile à prouver. Certes, la HALDE<br />

avait mis <strong>en</strong> place <strong>des</strong> <strong>«</strong> testings » : on demande à un blanc et à un noir de se prés<strong>en</strong>ter à<br />

l’<strong>en</strong>trée d’une discothèque et on constate que le noir est systématiquem<strong>en</strong>t refusé. Toutefois,<br />

cette procédure, doit être autorisée par le parquet et être constatée par huissier pour que la<br />

discrimination soit reconnue juridiquem<strong>en</strong>t. On remarquera toutefois que le patron de<br />

discothèque ne peut se justifier <strong>en</strong> arguant du fait que les noirs ne sont pas acceptés par sa<br />

cli<strong>en</strong>tèle ou qu’il y a <strong>des</strong> troubles dès lors qu’il y a trop de maghrébins.<br />

La législation<br />

L’article 14 de la Conv<strong>en</strong>tion europé<strong>en</strong>ne <strong>des</strong> droits de l’Homme interdit toutes<br />

<strong>discriminations</strong> : <strong>«</strong> La jouissance <strong>des</strong> droits et libertés reconnus dans la prés<strong>en</strong>te Conv<strong>en</strong>tion<br />

doit être assurée, sans distinction aucune, fondée notamm<strong>en</strong>t sur le sexe, la race, la couleur,<br />

la langue, la religion, les opinions politiques ou toutes autres opinions, l'origine nationale ou<br />

sociale, l'appart<strong>en</strong>ance à une minorité nationale, la fortune, la naissance ou toute autre<br />

situation. ».<br />

Ces règles europé<strong>en</strong>nes ont été adoptées au niveau national. Toutefois, notre pays a<br />

très tôt disposé d’une législation contre les <strong>discriminations</strong>. Dès 1939, une loi peu appliquée<br />

<strong>en</strong> raison <strong>des</strong> circonstances, condamnait toute discrimination raciale. Puis, il faudra att<strong>en</strong>dre<br />

les années soixante-dix pour que le législateur s’intéresse à nouveau aux <strong>discriminations</strong>.<br />

Actuellem<strong>en</strong>t, la législation sur les <strong>discriminations</strong> est cont<strong>en</strong>ue dans le code pénal<br />

(partie législative, livre II, titre II, chapitre V, section 1 <strong>des</strong> <strong>discriminations</strong>) aux articles 225-1<br />

à 225-4. Il y est indiqué que <strong>«</strong> Constitue une discrimination toute distinction opérée <strong>en</strong>tre les<br />

1 On observera que, sur son site, la HALDE définit ainsi la discrimination : <strong>«</strong> Une discrimination est une<br />

inégalité de traitem<strong>en</strong>t fondée sur un critère prohibé par la loi, dans un domaine visé par la loi ».<br />

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personnes physiques à raison de leur origine, de leur sexe, de leur situation de famille, de<br />

leur grossesse, de leur appar<strong>en</strong>ce physique, de leur patronyme, de leur état de santé, de leur<br />

handicap, de leurs caractéristiques génétiques, de leurs mœurs, de leur ori<strong>en</strong>tation sexuelle,<br />

de leur âge, de leurs opinions politiques, de leurs activités syndicales, de leur appart<strong>en</strong>ance<br />

ou de leur non-appart<strong>en</strong>ance, vraie ou supposée, à une ethnie, une nation, une race ou une<br />

religion déterminée. Constitue égalem<strong>en</strong>t une discrimination toute distinction opérée <strong>en</strong>tre les<br />

personnes morales à raison de l'origine, du sexe, de la situation de famille, de l'appar<strong>en</strong>ce<br />

physique, du patronyme, de l'état de santé, du handicap, <strong>des</strong> caractéristiques génétiques, <strong>des</strong><br />

mœurs, de l'ori<strong>en</strong>tation sexuelle, de l'âge, <strong>des</strong> opinions politiques, <strong>des</strong> activités syndicales, de<br />

l'appart<strong>en</strong>ance ou de la non-appart<strong>en</strong>ance, vraie ou supposée, à une ethnie, une nation, une<br />

race ou une religion déterminée <strong>des</strong> membres ou de certains membres de ces personnes<br />

morales. ».<br />

A la lecture de ce texte, on s’aperçoit que le législateur n’a pas défini la discrimination<br />

<strong>en</strong> tant que telle mais qu’il s’est limité à énoncer <strong>des</strong> critères de discrimination (critères<br />

personnels et de groupe qui peuv<strong>en</strong>t se combiner <strong>en</strong>tre eux).<br />

Cela pose <strong>des</strong> difficultés pour savoir ce que recouvre chaque critère. Peut-on fonder la<br />

discrimination de personnes vivant <strong>en</strong> concubinage sur le critère de la situation de famille ?<br />

Un transsexuel peut-il être discriminé <strong>en</strong> pr<strong>en</strong>ant le critère de l’appar<strong>en</strong>ce physique ? De<br />

même, peut-on invoquer pour les obèses une discrimination <strong>en</strong> raison de leur appar<strong>en</strong>ce<br />

physique ? Le critère <strong>des</strong> mœurs a évolué dans le temps : au début, il visait uniquem<strong>en</strong>t les<br />

homosexuels.<br />

La preuve de la discrimination<br />

A partir <strong>des</strong> critères indiqués dans le code pénal, le juriste va devoir établir si les faits<br />

<strong>en</strong>tr<strong>en</strong>t dans le cadre de la discrimination.<br />

C’est souv<strong>en</strong>t très difficile à déterminer car il faut non seulem<strong>en</strong>t prouver qu’il peut y<br />

avoir discrimination (refus pour un hôtel d’accepter deux personnes de même sexe) mais il<br />

faut prouver aussi, <strong>en</strong> droit pénal, qu’il y a eu int<strong>en</strong>tion de discriminer.<br />

En droit du travail, il y a une évolution qui t<strong>en</strong>d à r<strong>en</strong>verser la charge de la preuve au<br />

profit de la victime : on demande à l’employeur de prouver qu’il n’a pas voulu discriminer<br />

telle personne au mom<strong>en</strong>t de l’embauche, ou de la sanction.<br />

Les moy<strong>en</strong>s de lutte contre la discrimination<br />

Outre les dispositions du code pénal, la législation a prévu <strong>des</strong> circonstances<br />

aggravantes (par exemple, pour homophobie) qui vi<strong>en</strong>n<strong>en</strong>t r<strong>en</strong>forcer la lutte contre les<br />

<strong>discriminations</strong>.<br />

Il ne faut pas non plus négliger le rôle <strong>des</strong> associations, notamm<strong>en</strong>t lorsqu’elles se<br />

port<strong>en</strong>t partie civile pour sout<strong>en</strong>ir <strong>des</strong> victimes de discrimination. D’abord, elles aid<strong>en</strong>t<br />

psychologiquem<strong>en</strong>t la victime à supporter une situation pénible pour elle et stressante mais<br />

elles doiv<strong>en</strong>t souv<strong>en</strong>t faire compr<strong>en</strong>dre à la victime qui voudrait obt<strong>en</strong>ir rapidem<strong>en</strong>t réparation<br />

qu’il faut comm<strong>en</strong>cer par établir les faits et voir s’ils sont acceptables <strong>en</strong> justice et <strong>en</strong>suite lui<br />

faire compr<strong>en</strong>dre que la justice pr<strong>en</strong>d du temps à se prononcer.<br />

Enfin, la sanction judiciaire n’est peut-être pas la mieux appropriée pour dissuader un<br />

auteur de discrimination de récidiver. La peine a rarem<strong>en</strong>t un pouvoir éducatif. D’où l’intérêt<br />

de rechercher <strong>des</strong> procédures plus adaptées à ces situations. La médiation <strong>en</strong> est une et il<br />

laissera la parole à Me Shabname Monnot pour développer l’intérêt d’une telle initiative.<br />

Page 7


Avant de le faire, il observe que déjà au niveau du judiciaire existe la notion de<br />

médiation : au niveau du tribunal d’instance, celui-ci peut facultativem<strong>en</strong>t t<strong>en</strong>ter une<br />

conciliation <strong>en</strong>tre les parties adverses. Au pénal, à l’initiative du procureur de la République,<br />

une médiation pénale peut être organisée. Enfin, il semble que l’on t<strong>en</strong>de à organiser une<br />

médiation curative qui fasse mieux pr<strong>en</strong>dre <strong>en</strong> compte, par l’agresseur, la gravité <strong>des</strong> faits<br />

qu’il a commis.<br />

*<br />

* *<br />

Me Shabname Monnot, après avoir remercié les organisateurs et les participants de l’avoir<br />

invitée à cette confér<strong>en</strong>ce, expose qu’elle a effectué un long cheminem<strong>en</strong>t qui l’a am<strong>en</strong>ée de<br />

son parcours professionnel d’avocat- plaidant à celui d'avocat- de médiateur. Son activité<br />

professionnelle est c<strong>en</strong>trée sur la formation, la pédagogie et la pratique de la médiation dans<br />

le droit de la famille et le droit de la discrimination.<br />

Elle s’inscrit dans un mouvem<strong>en</strong>t de contractualisation de la justice qui vise à ce que<br />

deux parties opposées vi<strong>en</strong>n<strong>en</strong>t à se r<strong>en</strong>contrer dans un espace sécurisé et à dialoguer pour<br />

résoudre leur litige conformém<strong>en</strong>t aux règles de droit et aux droits fondam<strong>en</strong>taux.<br />

La médiation permet de concilier la gestion de deux temps différ<strong>en</strong>ts que connaiss<strong>en</strong>t<br />

bi<strong>en</strong> les associations : le temps de la victime qui voudrait tout de suite réparation pour le<br />

préjudice subi et le temps judiciaire qui est long. La médiation permet, dans une certaine<br />

mesure, de concilier ces deux contraires. La victime va pouvoir ainsi se reconstruire plus<br />

facilem<strong>en</strong>t et plus rapidem<strong>en</strong>t.<br />

Les résultats obt<strong>en</strong>us <strong>en</strong> matière de médiation familiale 2 montr<strong>en</strong>t la pertin<strong>en</strong>ce de la<br />

médiation <strong>en</strong> matière de séparation et de divorce: En effet, grâce au processus de médiation<br />

familiale, les par<strong>en</strong>ts peuv<strong>en</strong>t restaurer le li<strong>en</strong> par<strong>en</strong>tal au delà du li<strong>en</strong> conjugal définitivem<strong>en</strong>t<br />

rompu. Le rôle <strong>des</strong> associations est important à titre d'exemple : la CAF, l'UDAF, l’APMF…<br />

L'objectif de la médiation familiale est judicieux et approprié, la médiation familiale permet<br />

d'’accompagner les personnes confrontées aux problématiques <strong>des</strong> ruptures familiales<br />

difficiles et douloureuses. Le cadre et le processus mis <strong>en</strong> œuvre a pour vocation de permettre<br />

aux personnes qui se s<strong>en</strong>t<strong>en</strong>t rejetées, méprisées et incomprises à trouver un espace sécurisé<br />

2 <strong>«</strong> La médiation familiale est un processus de construction ou de reconstruction du li<strong>en</strong> familial axé sur<br />

l’autonomie et la responsabilité <strong>des</strong> personnes concernées par <strong>des</strong> situations de rupture ou de séparation dans<br />

lequel un tiers impartial, indép<strong>en</strong>dant, qualifié et sans pouvoir de décision – le médiateur familial – favorise, à<br />

travers l’organisation d’<strong>en</strong>treti<strong>en</strong>s confid<strong>en</strong>tiels, leur communication, la gestion de leur conflit dans le domaine<br />

familial <strong>en</strong>t<strong>en</strong>du dans sa diversité et dans son évolution ».Définition du Conseil national consultatif de la<br />

médiation familiale.<br />

Page 8


de dialogue dans le lequel chacune <strong>des</strong> partie se s<strong>en</strong>tira respectée et reconnue dans sa dignité<br />

grâce à la place de tiers neutre et impartiale du médiateur familial<br />

L’oratrice a eu égalem<strong>en</strong>t l’occasion de mieux approfondir la médiation dans les<br />

contextes de discrimination <strong>en</strong> ayant eu <strong>des</strong> missions de médiation de la HALDE. En effet,<br />

l’article 7 de la loi du 30 décembre 2004 portant création de cette institution, dispose que<br />

<strong>«</strong> …La haute autorité peut procéder ou faire procéder à la résolution amiable <strong>des</strong> différ<strong>en</strong>ds<br />

portés à sa connaissance, par voie de médiation… ». A ce titre, la HALDE lui a confié <strong>des</strong><br />

missions de médiation dans un certain nombre d’affaires dont elle avait été saisie.<br />

Elle rappelle que la HALDE a été créée <strong>en</strong> vertu de l'application de directives<br />

europé<strong>en</strong>nes et qu’elle confie <strong>des</strong> missions de médiation à <strong>des</strong> médiateurs qualifiés qui ont<br />

contribué à résoudre <strong>des</strong> conflits de discrimination. Par exemple, grâce à la médiation, <strong>des</strong><br />

personnes ont pu conserver leur emploi ; <strong>des</strong> employeurs ont mieux compris pourquoi ils<br />

étai<strong>en</strong>t accusés de discrimination ; <strong>des</strong> personnes ont pu être <strong>«</strong> restaurées » dans leur dignité<br />

et continuer à vivre <strong>en</strong> se s<strong>en</strong>tant digne de respect et de droit.<br />

Pour que la médiation réussisse, il faut élaborer un cadre sécurisant, d’abord, afin de<br />

rassurer et de donner confiance. Les victimes demanderesses souv<strong>en</strong>t hésit<strong>en</strong>t à se confier. Il<br />

faut leur ménager <strong>des</strong> espaces de confid<strong>en</strong>tialité qui faciliteront leurs déclarations,<br />

l’expression de leurs ress<strong>en</strong>tis de leur souffrance et le dialogue pourra adv<strong>en</strong>ir. Le médiateur<br />

pourra alors leur faire compr<strong>en</strong>dre que le droit existe et qu’il est là pour les protéger.<br />

Du côté <strong>des</strong> déf<strong>en</strong>deurs qui sont mis <strong>en</strong> cause, le médiateur va pouvoir établir <strong>des</strong><br />

contacts et expliquer la position de la victime et de l'état du droit applicable à <strong>des</strong> personnes<br />

qui n’ont pas nécessairem<strong>en</strong>t la volonté de nuire et/ou qui ne compr<strong>en</strong>n<strong>en</strong>t pas qu’on puisse<br />

les accuser de discrimination. La médiation est un espace pédagogique approprié de mise <strong>en</strong><br />

place de la norme de non-discrimination pour les <strong>en</strong>treprises (notamm<strong>en</strong>t <strong>des</strong> directeurs <strong>des</strong><br />

ressources humaines) et les institutions (publiques ou privées). Là aussi, la confid<strong>en</strong>tialité est<br />

un facteur de réussite.<br />

Cette réussite l’est d’autant plus qu’elle s’accompagne le plus souv<strong>en</strong>t de la<br />

restauration de la dignité <strong>des</strong> personnes, de la dignité humaine telle qu’elle est définie au<br />

titre I de la charte <strong>des</strong> droits fondam<strong>en</strong>taux du traité de Lisbonne (<strong>«</strong> La dignité humaine est<br />

inviolable. Elle doit être respectée et protégée »).<br />

Certes, la médiation peut ne pas aboutir à une solution ; dans ce cas, il faudra aller<br />

devant le juge compét<strong>en</strong>t avec le concours d'un avocat. L'un <strong>des</strong> principaux motifs de fin de<br />

médiation résulte de l'écart incompressible qui existe <strong>en</strong>tre l’exig<strong>en</strong>ce de réparation d’un<br />

demandeur et les propositions du déf<strong>en</strong>deur.<br />

Néanmoins, la médiation est plus souple que l’action <strong>en</strong> justice et elle constitue à notre<br />

avis une première étape dans la solution du conflit de discrimination car la médiation permet<br />

de trouver <strong>des</strong> solutions appropriées, notamm<strong>en</strong>t sur la question <strong>des</strong> aménagem<strong>en</strong>ts<br />

raisonnables pour une personne handicapée dans l'emploi. Cela facilite la recherche de<br />

solutions adaptées objectives et cons<strong>en</strong>suelles.<br />

Quel rôle les avocats peuv<strong>en</strong>t-ils jouer <strong>en</strong> matière de médiation ? Les avocats ne sont<br />

pas exclus de la médiation familiale et de la médiation dans les contextes de discrimination.<br />

Les avocats peuv<strong>en</strong>t dev<strong>en</strong>ir médiateurs grâce à un parcours de formation : DEMF<br />

(diplôme de médiateur familial) ou VAE (validation <strong>des</strong> acquis de l’expéri<strong>en</strong>ce) de<br />

médiateur diplômé. En tout état de cause, il faut, préalablem<strong>en</strong>t, que l’avocat qui va<br />

pr<strong>en</strong>dre <strong>en</strong> charge une médiation soit formé à la m<strong>en</strong>er. Cette formation est organisée<br />

par les C<strong>en</strong>tres de médiation près <strong>des</strong> Barreaux et certaines Universités : par exemple,<br />

IFOMENE (Institut de formation à la médiation et à la négociation) à l'ICP (Institut<br />

catholique de Paris). Les avocats-médiateurs doiv<strong>en</strong>t savoir créer un part<strong>en</strong>ariat avec<br />

les juges pour développer les actions de médiation.<br />

Page 9


Les avocats assist<strong>en</strong>t tout au long du processus de médiation leur cli<strong>en</strong>t afin de les<br />

sout<strong>en</strong>ir, les conseiller et rédiger le protocole d'accord final de médiation. Ils vont<br />

égalem<strong>en</strong>t faire homologuer l'accord de médiation par le juge<br />

*<br />

* *<br />

Me Michel Navion estime que la médiation ne réussira que si elle amène l’auteur d’une<br />

discrimination à mieux compr<strong>en</strong>dre ce dont on l’accuse et à changer d’attitude. Le jugem<strong>en</strong>t<br />

répressif ne permet pas d’aboutir à de telles modifications de comportem<strong>en</strong>ts. La médiation<br />

est mieux adaptée à de telles situations mais elle a ses limites : la médiation peut être acceptée<br />

par le déf<strong>en</strong>deur avec l’arrière p<strong>en</strong>sée que par la suite il sera plus prud<strong>en</strong>t pour éviter de se<br />

faire à nouveau condamner pour le même sujet.<br />

Il y a aussi <strong>des</strong> cas où la médiation sera compliquée. Par exemple, un hôtelier lic<strong>en</strong>cie<br />

une personne qu’il découvre homosexuelle avant la fin de sa période de stage ou période<br />

d’essai. La personne est-elle congédiée parce qu’elle ne conv<strong>en</strong>ait pas ou est-ce uniquem<strong>en</strong>t<br />

pour son ori<strong>en</strong>tation sexuelle ? La réponse est délicate.<br />

Me Shabname Monnot précise que, pour qu’il y ait médiation, il faut l’accord <strong>des</strong> deux<br />

parties. Si l’une <strong>des</strong> deux, informée du désir d’instaurer une médiation, la refuse, celle-ci ne<br />

pourra avoir lieu. Il y a donc, à la base de la médiation, un cons<strong>en</strong>sus à établir. Pour obt<strong>en</strong>ir<br />

cet accord, nous devons démontrer à chacune <strong>des</strong> parties que la médiation est utile et qu'elle a<br />

du s<strong>en</strong>s, qu’elle va leur éviter les risques d’une action <strong>en</strong> justice.<br />

Il y a donc un rôle pédagogique et d’information du médiateur important pour convaincre et<br />

éduquer à la norme de non-discrimination. Ce n’est pas toujours aisé. Par exemple, comm<strong>en</strong>t<br />

convaincre un employeur qui a lic<strong>en</strong>cié une employée <strong>en</strong>ceinte sans, bi<strong>en</strong> sûr, m<strong>en</strong>tionner que<br />

c’est pour cette raison, d’aller <strong>en</strong> médiation et d’admettre qu’il a, peut-être, commis un acte<br />

discriminatoire ? Comm<strong>en</strong>t persuader un boucher qui ne v<strong>en</strong>d que <strong>des</strong> produits halal qu’il<br />

discrimine sa cli<strong>en</strong>tèle ?<br />

Me Michel Navion demande comm<strong>en</strong>t l’avocat et/ou l’association qui déf<strong>en</strong>d la victime peut<br />

contacter la personne qui discrimine et peut proposer une médiation plutôt qu’un procès.<br />

Me Shabname Monnot considère que, <strong>en</strong> tout état de cause, le contact <strong>en</strong>tre discriminé et<br />

discriminant doit être intelligible et accessible juridiquem<strong>en</strong>t, c’est-à-dire expliquer le droit.<br />

En effet, il arrive que l’employeur ne soit pas au courant <strong>des</strong> règles du droit du travail et qu’il<br />

ait agi de bonne foi. La demande doit donc cont<strong>en</strong>ir toutes les informations nécessaires et<br />

rester ouverte pour inciter le discriminant à accepter la médiation, sachant qu’il n’est pas<br />

obligé de le faire. Cette demande devra donc être pédagogique Socrate disait <strong>«</strong> Appr<strong>en</strong>dre,<br />

c’est s’ouvrir à tous les possibles ».<br />

*<br />

* *<br />

Page 10


Accord <strong>des</strong> parties<br />

Débat avec les participants<br />

David Devoreix (psychologue, GIROFARD) revi<strong>en</strong>t sur l’accord <strong>des</strong> parties nécessaire à la<br />

mise <strong>en</strong> place d’une médiation. N’est-ce pas être naïf que de croire que les parties sont de<br />

bonne foi ? D’ailleurs souv<strong>en</strong>t les démarches <strong>des</strong> victimes et <strong>des</strong> associations qui les<br />

souti<strong>en</strong>n<strong>en</strong>t échou<strong>en</strong>t à cause de la mauvaise volonté du déf<strong>en</strong>deur et les associations ont<br />

beaucoup de mal à adoucir les frustrations <strong>en</strong>g<strong>en</strong>drées.<br />

Me Shabname Monnot n’exclut pas l’hypothèse d’une personne de mauvaise foi acceptant<br />

une médiation. Toutefois, elle croit au rôle pédagogique de l’information. L’explicitation du<br />

droit par les avocats et associations qui déf<strong>en</strong>d<strong>en</strong>t les victimes doit inciter l’auteur d’une<br />

discrimination à aller <strong>en</strong> médiation. Celui-ci acceptera mieux cette décision si on la lui<br />

prés<strong>en</strong>te <strong>en</strong> disant qu’on veut l’informer et montrer que la médiation est un dispositif de<br />

mieux vivre <strong>en</strong>semble. Il ne s’agit pas d’être naïf mais d’expliquer qu’il y a <strong>des</strong> voies<br />

différ<strong>en</strong>tes du procès pour aboutir à un accord.<br />

Elle cite l’exemple d’une association qui demandait, depuis cinq ans, sans succès, un<br />

agrém<strong>en</strong>t pour pouvoir effectuer <strong>des</strong> interv<strong>en</strong>tions <strong>en</strong> milieu scolaire (IMS). Une médiation a<br />

été mise <strong>en</strong> place <strong>en</strong>tre le rectorat qui refusait et l’association. Le résultat a été que<br />

l’association a obt<strong>en</strong>u l'agrém<strong>en</strong>t pour faire de la formation <strong>en</strong> matière d’IMS.<br />

Toutefois, l’orateur reconnaît qu’il n’existe pas d’instances d’évaluation <strong>des</strong> médiations qui<br />

permettrai<strong>en</strong>t d’avoir <strong>des</strong> données sur les résultats obt<strong>en</strong>us par les médiateurs et, notamm<strong>en</strong>t,<br />

de tester si les personnes sont ou non de bonne foi.<br />

Me Michel Navion ajoute que la démarche d’<strong>en</strong>voyer une lettre proposant une médiation à un<br />

auteur de discrimination ne peut que prés<strong>en</strong>ter <strong>des</strong> avantages. D’abord, parce que le déf<strong>en</strong>deur<br />

peut accepter la médiation qui peut être, comme on l’a vu, préférable à un procès. Ensuite,<br />

parce que, même si le déf<strong>en</strong>deur récuse la médiation, l’avocat ou l’association qui auront<br />

prés<strong>en</strong>té la demande peuv<strong>en</strong>t <strong>en</strong> garder trace. Or, lorsqu’il s’agit d’association à compét<strong>en</strong>ces<br />

régionales, connaissant bi<strong>en</strong> les <strong>en</strong>treprises de son secteur, elle peut ressortir cette lettre dans<br />

le cas d’une affaire similaire pour prouver que ce n’est pas la première fois que le cas de<br />

discrimination se pose.<br />

Page 11


Utilité de la médiation<br />

Frédéric Hay, présid<strong>en</strong>t d’honneur d’ADHEOS, reconnaît l’utilité de la médiation pour les<br />

associations. Certes, l’association peut se porter partie civile mais la procédure est longue et<br />

coûteuse. Elle est parfois aléatoire car on manque de témoignages. L’association n’ira donc au<br />

procès que si elle a <strong>des</strong> chances sérieuses d’aboutir. La médiation semble lui ouvrir <strong>des</strong><br />

possibilités de résolution d’un conflit plus faciles et, peut-être, meilleures que celles résultant<br />

d’un procès. Elle prés<strong>en</strong>te aussi l’avantage d’être plus rapide empêchant une victime de se<br />

lasser de poursuivre <strong>en</strong> raison <strong>des</strong> l<strong>en</strong>teurs judiciaires. Enfin, il a l’impression que les actes de<br />

discrimination, <strong>en</strong> France, ne sont pas très lourdem<strong>en</strong>t punis ; la médiation peut permettre<br />

d’obt<strong>en</strong>ir une meilleure indemnisation.<br />

Me Shabname Monnot approuve ces propos et incite les associations à créer <strong>des</strong> cercles<br />

vertueux d'information sur le droit de la discrimination et de la médiation. Cela permettrait<br />

aux associations de se faire connaître et d’établir <strong>des</strong> part<strong>en</strong>ariats qui vont recommander aux<br />

parties d’aller s'informer afin de mesurer si leurs conflits peuv<strong>en</strong>t trouver une issue<br />

satisfaisante par la médiation. Travailler <strong>en</strong> part<strong>en</strong>ariat, instaurer <strong>des</strong> cercles vertueux,<br />

informer sont <strong>des</strong> principes pédagogiques qui doiv<strong>en</strong>t s’imposer à tous, tout <strong>en</strong> t<strong>en</strong>ant compte<br />

<strong>des</strong> réalités et <strong>des</strong> limites.<br />

Me Michel Navion est persuadé que la médiation peut r<strong>en</strong>dre de grands services dans <strong>des</strong><br />

affaires où il n’est pas certain que les droits de la victime soi<strong>en</strong>t reconnus par le tribunal. Il<br />

repr<strong>en</strong>d un exemple cité par Me Jean Marie Salzard : un boucher veut lic<strong>en</strong>cier un de ses<br />

employés qu’il a découvert atteint du sida. Cette maladie peut-elle contaminer les d<strong>en</strong>rées<br />

alim<strong>en</strong>taires que l’employé manipule ? L’employeur peut-il être accusé de discrimination<br />

<strong>en</strong>vers ceux qui souffr<strong>en</strong>t du VIH ? La réponse judiciaire peut varier selon les régions, les<br />

juges et les procureurs. La médiation semble préférable dans de tels cas.<br />

Me Shabname Monnot le croit d’autant plus que la médiation peut faire appel à <strong>des</strong> tiers<br />

qualifiés et donc informer sur <strong>des</strong> problèmes sanitaires que l’employeur ignore et<br />

accompagner pour pr<strong>en</strong>dre les mesures de précaution et de sécurité nécessaires.<br />

Elle a eu l’exemple d’une personne handicapée qui avait elle-même un <strong>en</strong>fant handicapé et<br />

qui souffrait de <strong>discriminations</strong> dans la fonction publique La médiation a permis de faire<br />

savoir au père handicapé qu’il pouvait bénéficier d’ai<strong>des</strong> qu’il ignorait pour élever son fils<br />

handicapé. Cette aide familiale a permis d’aider à trouver une solution à ces problèmes de<br />

discrimination dans son travail. Ainsi, <strong>en</strong> créant un large part<strong>en</strong>ariat avec tous les intéressés,<br />

une solution globale et générale aux difficultés a pu être élaborée.<br />

Médiation familiale<br />

Me Jean-Marie Salzard, avocat, souligne que la médiation familiale ne devi<strong>en</strong>dra<br />

systématique que si elle dispose de moy<strong>en</strong>s. Actuellem<strong>en</strong>t, ils sont très faibles.<br />

Me Shabname Monnot constate que la médiation familiale obti<strong>en</strong>t de bons résultats. Elle<br />

permet un autre regard sur <strong>des</strong> problèmes délicats et fait œuvre utile de pédagogie du vivre<br />

<strong>en</strong>semble dans le respect de la liberté de chacun ce qui amène les parties à changer leur<br />

attitude. On instaure ainsi un cercle vertueux <strong>en</strong> respectant les différ<strong>en</strong>ces de chacun.<br />

Prescriptions<br />

Me Jean-Marie Salzard, avocat, s’interroge sur les problèmes de prescriptions : la saisine de<br />

la HALDE ne susp<strong>en</strong>d pas la procédure pénale.<br />

Page 12


Me Shabname Monnot indique que l’article 2238 de la loi du 18 juin 2008 portant réforme<br />

de la prescription <strong>en</strong> matière civile dispose que <strong>«</strong> La prescription est susp<strong>en</strong>due à compter du<br />

jour où, après la surv<strong>en</strong>ance d’un litige, les parties convi<strong>en</strong>n<strong>en</strong>t de recourir à la médiation ou<br />

à la conciliation ou, à défaut d’accord écrit, à compter du jour de la première réunion de<br />

médiation ou de conciliation. Le délai de prescription recomm<strong>en</strong>ce à courir, pour une durée<br />

qui ne peut être inférieure à six mois, à compter de la date à laquelle soit l’une <strong>des</strong> parties ou<br />

les deux, soit le médiateur ou le conciliateur déclar<strong>en</strong>t que la médiation ou la conciliation est<br />

terminée. ».<br />

La saisine de la HALDE n’interrompt pas, <strong>en</strong> effet, la prescription mais la mise <strong>en</strong><br />

place par la HALDE d’une médiation interrompt la prescription (cf. article précité). Elle a eu,<br />

<strong>en</strong> tant que médiateur indép<strong>en</strong>dant de la HALDE, a être saisie, par cette institution, d’une<br />

médiation après que les deux parties l’ai<strong>en</strong>t acceptée. La prescription est alors susp<strong>en</strong>due.<br />

Il apparti<strong>en</strong>t aux avocats de bi<strong>en</strong> informer leurs cli<strong>en</strong>ts sur cette question délicate.<br />

Indemnisation <strong>des</strong> victimes<br />

Me Jean-Marie Salzard, avocat, note que l’action de la HALDE ne s’ét<strong>en</strong>d pas à<br />

l’indemnisation <strong>des</strong> victimes. Or c’est un élém<strong>en</strong>t important pour elles.<br />

Me Shabname Monnot précise que la médiation n’a pas pour objectif premier d’obt<strong>en</strong>ir <strong>des</strong><br />

réparations pécuniaires mais de trouver, grâce à la médiation, un espace d'écoute <strong>des</strong><br />

mal<strong>en</strong>t<strong>en</strong>dus et <strong>des</strong> ress<strong>en</strong>tis <strong>en</strong>tre deux parties Si la médiation aboutit à un protocole, celui ci<br />

peut porter sur <strong>des</strong> indemnisations qui resteront confid<strong>en</strong>tielles si les parties ne communiqu<strong>en</strong>t<br />

pas l'accord définitif à la HALDE.<br />

Me Elisabeth Rabesandratana, avocate, observe que, souv<strong>en</strong>t, s’il y a changem<strong>en</strong>t de<br />

stratégie (par exemple, on accepte une médiation plutôt qu’aller <strong>en</strong> justice), il y a changem<strong>en</strong>t<br />

d’avocats et le dossier échappe à l’avocat initial.<br />

Me Michel Navion attire l’att<strong>en</strong>tion sur les problèmes posés par l’av<strong>en</strong>ir de la HALDE.<br />

Celle-ci doit se fusionner au sein d’une <strong>en</strong>tité plus large qui sera le Déf<strong>en</strong>seur <strong>des</strong> droits. Or,<br />

jusqu’à maint<strong>en</strong>ant, la HALDE avait l’obligation de traiter tous les dossiers dont elle est<br />

saisie. Il semblerait que le législateur permettrait au nouveau Déf<strong>en</strong>seur <strong>des</strong> droits de pouvoir<br />

juger de l’opportunité de suivre ou non un dossier. Il craint donc les risques d’arbitraire et que<br />

les choix soi<strong>en</strong>t influ<strong>en</strong>cés, par <strong>des</strong> motifs politiques par exemple.<br />

Coût de la médiation<br />

Me Anne Paladino, avocate, soulève le problème du coût de la médiation. Puisqu’elle n’est<br />

pas judiciaire, les victimes ne peuv<strong>en</strong>t bénéficier de l’aide juridictionnelle et elles support<strong>en</strong>t<br />

donc tous les frais de la médiation. Les avocats doiv<strong>en</strong>t donc informer la victime que, s’il y a<br />

médiation, ce n’est pas le déf<strong>en</strong>deur qui va assumer seul les frais.<br />

Me Shabname Monnot reconnaît que c’est une vraie question et un sujet de réflexion. Il<br />

faudrait mettre <strong>en</strong> place une réflexion sur le financem<strong>en</strong>t <strong>des</strong> médiations.<br />

Les avocats -médiateurs exerc<strong>en</strong>t à titre libéral : ils ne bénéfici<strong>en</strong>t pas de dispositif de<br />

subv<strong>en</strong>tions comme les associations de médiation familiale qui pratiqu<strong>en</strong>t la médiation<br />

familiale avec <strong>des</strong> grilles de barèmes <strong>en</strong> fonction <strong>des</strong> rev<strong>en</strong>us.<br />

Les parties peuv<strong>en</strong>t aussi demander au juge de mettre dans son ordonnance<br />

l’injonction ou l'accord pour la mise <strong>en</strong> place d’une médiation et, dans cette hypothèse, elles<br />

pourront bénéficier de l’aide juridictionnelle.<br />

Page 13


Preuves de la discrimination<br />

Frédéric Hay, présid<strong>en</strong>t d’honneur d’ADHEOS, revi<strong>en</strong>t sur les difficultés à établir la<br />

discrimination. Il cite le cas d’une <strong>en</strong>treprise qui n’embauchait que <strong>des</strong> hôtesses d’accueil<br />

ayant le même profil et le même âge. La HALDE ayant été saisie, il a pu être prouvé<br />

statistiquem<strong>en</strong>t que, p<strong>en</strong>dant dix ans, aucune personne de plus de 45 ans n’avait été<br />

embauchée pour ce type de poste. L’<strong>en</strong>treprise était de bonne foi et elle a changé sa manière<br />

de recruter.<br />

En outre, il faut être consci<strong>en</strong>t que <strong>des</strong> groupes ou <strong>des</strong> personnes discriminé(e)s<br />

peuv<strong>en</strong>t être discriminant(e)s par rapport à d’autres groupes.<br />

Me Michel Navion a l’impression que les phénomènes de discrimination sont moins<br />

importants et moins graves dans les gran<strong>des</strong> <strong>en</strong>treprises que dans les petites et moy<strong>en</strong>nes<br />

<strong>en</strong>treprises.<br />

Par ailleurs, la discrimination n’est pas seulem<strong>en</strong>t le fait d’un patron ou d’un<br />

supérieur. Les collègues et les subordonnés peuv<strong>en</strong>t la créer : nous ne voulons pas travailler<br />

avec un homosexuel ; nous ne voulons pas être commandés par un homosexuel.<br />

Pour lui, les textes de lois existants sont bons et suffisants. La difficulté réside dans<br />

leur application pratique<br />

Me Shabname Monnot rappelle que la médiation peut se révéler très utile dans le milieu du<br />

travail. Dans les gran<strong>des</strong> <strong>en</strong>treprises notamm<strong>en</strong>t, peut s’instaurer un dialogue par étapes<br />

respectueux <strong>des</strong> personnes : le médiateur va r<strong>en</strong>contrer la victime. Puis, il va contacter<br />

l’employeur de la victime. Enfin, il réunira les intéressés pour trouver une solution acceptable<br />

par tous.<br />

Par exemple, dans le cas d’un harcèlem<strong>en</strong>t discriminatoire, le médiateur va r<strong>en</strong>contrer<br />

la personne qui a conduit, volontairem<strong>en</strong>t ou involontairem<strong>en</strong>t, à la situation discriminatoire.<br />

La difficulté sera qu’il ne faut pas que le supérieur se v<strong>en</strong>ge <strong>en</strong> aggravant ainsi la situation de<br />

la victime. La médiation devra donc être conduite avec beaucoup de prud<strong>en</strong>ce pour ne pas être<br />

contreproductive. Pour cela, il faudra, peut-être, que le médiateur dialogue avec l’employeur<br />

pour qu’il modifie ses métho<strong>des</strong> de managem<strong>en</strong>t. Il faudra qu’il soit pédagogique et qu’il<br />

sache établir un part<strong>en</strong>ariat <strong>en</strong>tre les parties qui ne débouchera pas nécessairem<strong>en</strong>t sur <strong>des</strong><br />

sanctions.<br />

Le médiateur n'est pas qualifié pour juger et déclarer qu’il y a eu discrimination. Il lui<br />

suffit que les deman<strong>des</strong> de la victime soi<strong>en</strong>t prises <strong>en</strong> compte.<br />

La médiation facilite ainsi la construction d’un vivre <strong>en</strong>semble pertin<strong>en</strong>t.<br />

Me Michel Navion observe que ce n’est pas toujours aisé à réussir car nos sociétés sont de<br />

plus <strong>en</strong> plus individualistes et que les citoy<strong>en</strong>s ne sont pas toujours cohér<strong>en</strong>ts dans leurs prises<br />

de position. Par exemple, ils sont pour que les handicapés ne soi<strong>en</strong>t pas discriminés mais se<br />

plaign<strong>en</strong>t qu’un obèse occupe deux places dans un transport collectif. De même, ils trouv<strong>en</strong>t<br />

que les aménagem<strong>en</strong>ts <strong>des</strong> locaux pour l’accès aux handicapés sont beaucoup trop coûteux et<br />

qu’ils ne sont pas prioritaires. Nous sommes souv<strong>en</strong>t d’accord sur les principes mais nous les<br />

refusons quand ils devi<strong>en</strong>n<strong>en</strong>t réalité. La discrimination touche à l’humain et n’est pas<br />

forcém<strong>en</strong>t logique.<br />

Sylvie Bord<strong>en</strong>ave (ADHEOS) regrette que nombre d’édifices publics ne soi<strong>en</strong>t pas adaptés à<br />

l’accès aux handicapés, alors que la loi leur <strong>en</strong> fait obligation.<br />

Frédéric Hay, présid<strong>en</strong>t d’honneur d’ADHEOS, indique que la loi du 11 févier 2005 fixe au<br />

plus tard au 1er janvier 2015 la mise <strong>en</strong> conformité pour l'accès handicapé de tous les<br />

établissem<strong>en</strong>ts accueillants du public. Le coût de cette obligation, notamm<strong>en</strong>t pour les<br />

communes, est très lourd. Dans certains cas, il faudra fermer <strong>des</strong> écoles et les rebâtir.<br />

Page 14


Me Shabname Monnot observe que la discrimination n’existe pas seulem<strong>en</strong>t au niveau du<br />

public mais aussi dans le privé. Elle cite le cas d’un copropriétaire âgé qui avait de très<br />

gran<strong>des</strong> difficultés à monter les escaliers et qui avait proposé, <strong>en</strong> pr<strong>en</strong>ant tous les frais à sa<br />

charge, d’installer un asc<strong>en</strong>seur. Les copropriétaires ont refusé et la personne a dû déménager.<br />

C’est un cas de discrimination.<br />

Médiation et négociation<br />

Frédéric Hay, présid<strong>en</strong>t d’honneur d’ADHEOS, distinguerait <strong>en</strong>tre médiation et négociation.<br />

La médiation suppose l’accord <strong>des</strong> parties et donc une approche cons<strong>en</strong>suelle. Si elle se révèle<br />

impossible, on peut essayer de négocier <strong>en</strong> utilisant les moy<strong>en</strong>s dont on dispose pour le faire<br />

<strong>en</strong> position de force. Par exemple, une association t<strong>en</strong>tera une action auprès <strong>des</strong> médias pour<br />

qu’ils relay<strong>en</strong>t ses positions et fass<strong>en</strong>t pression psychologiquem<strong>en</strong>t sur l’auteur de la<br />

discrimination, <strong>en</strong> l’incitant à évoluer dans sa position. Pour sa part, il estime que les<br />

associations LGBT (lesbi<strong>en</strong>nes, gaies, bisexuelles et transsexuelles) n’utilis<strong>en</strong>t pas assez ce<br />

moy<strong>en</strong> de pression <strong>en</strong> France.<br />

Il sera <strong>en</strong>core plus efficace si l’on peut atteindre, par ce moy<strong>en</strong>, les supérieurs<br />

hiérarchiques et géographiques <strong>des</strong> <strong>en</strong>treprises. L’échelon national et, le plus souv<strong>en</strong>t, parisi<strong>en</strong><br />

peut influer sur l’échelon régional.<br />

*<br />

* *<br />

Me Michel Navion voudrait conclure <strong>en</strong> disant que la médiation est un bon moy<strong>en</strong> de faire<br />

pr<strong>en</strong>dre consci<strong>en</strong>ce de ce qui est bi<strong>en</strong> et mal. Toutefois, la lutte contre les <strong>discriminations</strong> ne<br />

sera efficace que si elle comm<strong>en</strong>ce dès le plus jeune âge. C’est pourquoi, il est très favorable à<br />

ce que se développ<strong>en</strong>t les interv<strong>en</strong>tions <strong>en</strong> milieu scolaire.<br />

Me Shabname Monnot estime que les critères de discrimination sont <strong>en</strong> train d’évoluer. La<br />

question demeure cep<strong>en</strong>dant de savoir comm<strong>en</strong>t, dans un Etat de droit, faire appliquer<br />

l’égalité concrète <strong>en</strong>tre les personnes. Les différ<strong>en</strong>ces ne doiv<strong>en</strong>t pas être rejetées a priori, à la<br />

condition qu’elles soi<strong>en</strong>t un <strong>en</strong>richissem<strong>en</strong>t et non une forme d’exclusion.<br />

Frédéric Hay, présid<strong>en</strong>t d’honneur d’ADHEOS, se félicite que les débats ai<strong>en</strong>t montré que la<br />

lutte contre la discrimination s’inscrit dans une lutte contre <strong>des</strong> schémas établis que l’on<br />

reproduit de bonne foi sans y réfléchir mais qui peuv<strong>en</strong>t se révéler discriminatoires.<br />

Il clôt <strong>en</strong>suite le débat <strong>en</strong> remerciant les orateurs et les participants ainsi que ceux qui<br />

ont contribué à l’organisation de cette réunion.<br />

La séance est levée à 18 heures.<br />

Page 15


Annexes<br />

Page 16


www.adheos.org<br />

NATIONAL PART of PUBLICATION FOR LAWYERS 3<br />

Partie I – Introduction<br />

Tout avocat doit être inscrit dans le barreau du ressort d’un tribunal de Grand Instance ou<br />

év<strong>en</strong>tuellem<strong>en</strong>t peut l’être dans plusieurs. Il répond à <strong>des</strong> règles déontologiques<br />

notamm<strong>en</strong>t rec<strong>en</strong>sées dans le règlem<strong>en</strong>t intérieur<br />

Il est t<strong>en</strong>u au secret professionnel et peut recevoir <strong>en</strong> son cabinet tout cli<strong>en</strong>t qui le<br />

souhaiterait. Il peut faire valoir la spécialisation qui est la si<strong>en</strong>ne ou les cont<strong>en</strong>tieux<br />

dominants qu’il pratique notamm<strong>en</strong>t concernant le droit de la discrimination.<br />

Il est nécessaire de rappeler que le droit de la discrimination est réc<strong>en</strong>t et que sa<br />

transversalité impose une compét<strong>en</strong>ce spécifique qui ne relève pas d’une pratique d’avocat<br />

généraliste. Certains d’<strong>en</strong>tre eux se sont donc familiarisés à ce droit et pour certains<br />

d’<strong>en</strong>tre eux se sont regroupés au sein de réseaux d’associations de lutte contre le racisme<br />

et l’anti-sémitisme ou contre l’homophobie…<br />

Le RAVAD est issu d’une réflexion selon laquelle il fallait permettre aux victimes<br />

d’agression ou de discrimination à raison de leur ori<strong>en</strong>tation sexuelle ou de leur id<strong>en</strong>tité de<br />

g<strong>en</strong>re, ou de leur état de santé de se diriger vers <strong>des</strong> professionnels du droit spécialisés<br />

dans cette matière. .<br />

Toute victime peut donc se connecter sur un site tel que celui du RAVAD ou d’autres<br />

associations aidant les victimes pour connaître le nom d’un avocat de proximité. En effet,<br />

3 Cet article a été rédigé par Eva M<strong>en</strong>duina Gordon, assistante de recherche du RAVAD dans le cadre du projet<br />

Equal-Jus.<br />

Page 17


il est ess<strong>en</strong>tiel que les victimes puiss<strong>en</strong>t faire valoir leurs situations auprès de<br />

professionnels qui auront non seulem<strong>en</strong>t la compét<strong>en</strong>ce mais aussi l’<strong>en</strong>gagem<strong>en</strong>t militant.<br />

De façon pratique, l’avocat reçoit son/sa cli<strong>en</strong>t/e, l’invite à exposer la situation de<br />

discrimination ou l’agression dont il ou elle a été victime sans l’interrompre. Une fois que<br />

celui-ci ou celle-ci a exposé l’<strong>en</strong>semble de ses préoccupations, le conseil peut interv<strong>en</strong>ir <strong>en</strong><br />

lui donnant un avis juridique quant à la qualification <strong>des</strong> faits qu’elle expose et<br />

év<strong>en</strong>tuellem<strong>en</strong>t rejeter la notion de discrimination si le cas d’espèce l’exige.<br />

Si par exemple, le fait exposé relève d’un caractère discriminatoire alors il s’agira avec la<br />

participation du cli<strong>en</strong>t de réunir les élém<strong>en</strong>ts de fait ou de preuve pour préparer la saisine<br />

de l’autorité compét<strong>en</strong>te ou de la juridiction qui sera la plus amène de donner une réponse<br />

adaptée.<br />

S’agissant d’un harcèlem<strong>en</strong>t moral à caractère discriminatoire à raison de l’ori<strong>en</strong>tation<br />

sexuelle ou de l’id<strong>en</strong>tité du g<strong>en</strong>re dans le cadre d’une activité professionnelle, la question<br />

se posera de savoir s’il faut saisir la juridiction prud’homale ou le procureur de la<br />

République ou év<strong>en</strong>tuellem<strong>en</strong>t la Halde. A ce sujet la Halde peut être sollicitée<br />

concomitamm<strong>en</strong>t avec la saisine d’une section d’un conseil de prud’hommes afin qu’elle<br />

puisse interv<strong>en</strong>ir dans le procès. La réponse à ces questions relève d’une stratégie de<br />

déf<strong>en</strong>se la plus adaptée au litige.<br />

En matière d’agression homo-transphobe, le recours à la plainte auprès du commissariat<br />

ou du procureur de la République s’avérera nécessaire pour faire valoir les droits de la<br />

victime.<br />

Concernant les injures, provocation à la haine et diffamation, le conseil devra veiller au<br />

respect de la prescription de 3 mois, tel qu’elle figure de la loi de juillet 1881, étant précisé<br />

que la sanction de ces infractions peut être aggravée au regard de leur commission à<br />

raison de l’ori<strong>en</strong>tation sexuelle de la victime depuis la loi du 30 décembre 2004 portant<br />

création de la HALDE.<br />

Partie II – Acteurs et stratégies r<strong>en</strong>dant effectifs les droits de la<br />

non discrimination<br />

1. Le rôle <strong>des</strong> organismes chargés de lutter contre les <strong>discriminations</strong> et<br />

promouvoir l’égalité<br />

La haute autorité de lutte contre les <strong>discriminations</strong> et pour l’égalité (HALDE) est une<br />

autorité administrative indép<strong>en</strong>dante <strong>en</strong> charge de combattre toutes les <strong>discriminations</strong><br />

directes ou indirectes. Elle a été créée par la loi n°2004-1486 du 30 déc. 2004, complétée<br />

par le décret n°2005-215 du 4 mars 2005. Ses compét<strong>en</strong>ces se sont vues r<strong>en</strong>forcées par loi<br />

n°2006-396 du 31 mars 2006 et le décret n°2006-641 du 1er juin 2006.<br />

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Dans la mesure où cette institution n’est pas spécialisée dans la lutte d’un critère de<br />

discrimination précis, elle a vocation à traiter les <strong>discriminations</strong> <strong>en</strong> raison de l’ori<strong>en</strong>tation<br />

sexuelle. Elle traite aussi les cas de discrimination commis <strong>en</strong> raison de l’id<strong>en</strong>tité du g<strong>en</strong>re,<br />

<strong>en</strong> se fondant sur le critère légal <strong>«</strong> sexe » et comble ainsi le vide juridique résultant du<br />

défaut de critère propre à l’id<strong>en</strong>tité du g<strong>en</strong>re.<br />

Qui peut saisir l’institution ?<br />

La Halde peut être saisie par toute personne s’estimant victime de discrimination,<br />

directem<strong>en</strong>t ou par l'intermédiaire d'un député, d'un sénateur ou d'un représ<strong>en</strong>tant<br />

français au Parlem<strong>en</strong>t europé<strong>en</strong>. Elle peut être saisie aussi, avec l’accord de la victime, par<br />

une association régulièrem<strong>en</strong>t déclarée depuis au moins cinq ans à la date <strong>des</strong> faits, se<br />

proposant dans ses statuts de combattre les <strong>discriminations</strong> ou d'assister les victimes de<br />

discrimination (art. 4, loi 30 déc. 2004). La Halde peut <strong>en</strong>fin se saisir d'office, sous réserve<br />

que la victime, lorsqu'elle est id<strong>en</strong>tifiée, ait été avertie et qu'elle ne s'y soit pas opposée<br />

(art. 4, al. 2, loi du 30 déc. 2004). Il est important de préciser que la saisine de la haute<br />

autorité n'interrompt ni ne susp<strong>en</strong>d les délais relatifs à la prescription <strong>des</strong> actions <strong>en</strong><br />

matière civile et pénale et aux recours administratifs et cont<strong>en</strong>tieux.<br />

Quel est le rôle de la Halde ?<br />

Dans le cadre du traitem<strong>en</strong>t <strong>des</strong> réclamations individuelles, la Halde assiste, dans un<br />

premier temps, la victime de discrimination dans la constitution de son dossier. Elle<br />

dispose à ce titre d’un pouvoir d’<strong>en</strong>quête, lui permettant de demander communication de<br />

tout docum<strong>en</strong>t utile à son instruction, <strong>en</strong>t<strong>en</strong>dre toute personne <strong>en</strong> audition et procéder à<br />

<strong>des</strong> vérifications sur place. La HALDE peut égalem<strong>en</strong>t effectuer <strong>des</strong> tests de<br />

discrimination. Lorsque les deman<strong>des</strong> de collaboration de la Halde ne sont pas suivies<br />

d’effet, elle met <strong>en</strong> demeure les personnes intéressées de lui répondre dans un délai qu’elle<br />

fixe, puis une fois ce délai dépassé, le présid<strong>en</strong>t de la Halde peut saisir le juge <strong>des</strong> référés<br />

aux fins d’ordonner toutes mesures d’instruction que ce dernier juge utiles.<br />

La Halde aide, dans un second temps, la victime à id<strong>en</strong>tifier les procédures adaptées à<br />

son cas. Elle peut notamm<strong>en</strong>t procéder ou faire procéder, avec l’accord <strong>des</strong> personnes<br />

concernées, à la résolution amiable, par voie de médiation (art. 7). Elle peut aussi<br />

proposer, avant la mise <strong>en</strong> œuvre de l’action publique, au présumé coupable une<br />

transaction matérialisée par une am<strong>en</strong>de ou une autre sous forme de diffusion d’un<br />

communiqué. Les transactions doiv<strong>en</strong>t être acceptées par l’intéressé et la victime et être<br />

homologuées par le procureur de la République. L’acception de la transaction éteint<br />

l’action publique (art. 11, al. 1). Enfin, la Halde peut demander à être <strong>en</strong>t<strong>en</strong>due dans les<br />

juridictions civiles, pénales ou administratives saisies de faits relatifs à <strong>des</strong> <strong>discriminations</strong><br />

pour donner son avis, ces juridictions peuv<strong>en</strong>t l’inviter aussi à prés<strong>en</strong>ter <strong>des</strong> observations<br />

(art. 13)<br />

Page 19


La Halde aborde aussi la question de la discrimination d’un angle plus structurel, <strong>en</strong><br />

<strong>en</strong>trepr<strong>en</strong>ant <strong>des</strong> actions de s<strong>en</strong>sibilisation et de formation pour faire évoluer les pratiques<br />

et les m<strong>en</strong>talités. En ce s<strong>en</strong>s aussi, elle peut recommander <strong>des</strong> modifications législatives<br />

ou réglem<strong>en</strong>taires et être consultée par le Gouvernem<strong>en</strong>t sur tout projet de loi relatif à la<br />

lutte contre les <strong>discriminations</strong> et à la promotion de l'égalité.<br />

Délibérations relatives à l’ori<strong>en</strong>tation sexuelle :<br />

-Délibérations relatives au caractère discriminatoire <strong>des</strong> dispositifs législatifs<br />

soumettant l'ouverture du droit à p<strong>en</strong>sion de réversion à une condition de mariage, n°<br />

2010-20 du 01/02/2010 ; n° 2010-21 du 01/02/2010 ; n° 2008-107 du 19/05/2008 ; n°<br />

2008-108 du 19/05/2008 ; n° 2008-109 du 19/05/2008 ; n° 2008-110 du 19/05/2008<br />

-Délibération relative aux prestations liées aux changem<strong>en</strong>ts de résid<strong>en</strong>ce <strong>des</strong> militaires<br />

part<strong>en</strong>aires de pacte civil de solidarité (PACS) n° 2010-15 du 25/01/2010<br />

-Délibération relative au caractère discriminatoire de l'exclusion <strong>des</strong> couples pacsés du<br />

droit à la co-titularité d'un bail n° 2009-381 du 30/11/2009<br />

-Délibération relative au refus d'agrém<strong>en</strong>t <strong>en</strong> vue d'adoption opposé à une femme<br />

homosexuelle n° 2009-350 du 05/10/2009<br />

-Délibérations relatives à <strong>des</strong> faits de harcèlem<strong>en</strong>t moral <strong>en</strong> raison de l'ori<strong>en</strong>tation<br />

sexuelle du réclamant n° 2009-324 du 14/09/2009 ; n° 2009-323 du 14/09/2009 ; n°<br />

2008-174 du 07/07/2008<br />

-Délibération relative au refus opposé par un Préfet de convier officiellem<strong>en</strong>t à une<br />

cérémonie de commémoration de la déportation une association représ<strong>en</strong>tant les déportés<br />

homosexuels n° 2009-222 du 08/06/2009<br />

-Délibération relative au refus de versem<strong>en</strong>t d'une allocation décès au motif que la<br />

définition du conjoint ne s'ét<strong>en</strong>d pas au concubin ou au part<strong>en</strong>aire lié par un PACS n°<br />

2009-132 du 30/03/2009<br />

-Délibération relative à la prév<strong>en</strong>tion <strong>des</strong> <strong>discriminations</strong> et du harcèlem<strong>en</strong>t<br />

discriminatoire à raison de l'ori<strong>en</strong>tation sexuelle au collège et au lycée n° 2009-14 du<br />

12/01/2009<br />

-Délibération relative au refus d'un rectorat d'agréer une association de déf<strong>en</strong>se et de<br />

protection <strong>des</strong> personnes homosexuelles pour interv<strong>en</strong>ir <strong>en</strong> milieu scolaire <strong>en</strong> matière de<br />

lutte contre l'homophobie n° 2008-151 du 07/07/2008<br />

-Délibération relative au refus d'un recteur d'académie d'agréer une association de<br />

déf<strong>en</strong>se et de protection <strong>des</strong> personnes homosexuelles pour m<strong>en</strong>er <strong>des</strong> actions de<br />

prév<strong>en</strong>tion contre l'homophobie <strong>en</strong> milieu scolaire n° 2008-14 du 14/01/2008<br />

-Délibération relative à la lutte contre les <strong>discriminations</strong> liées à l'ori<strong>en</strong>tation sexuelle<br />

dans le milieu du travail n° 2007-371 du 17/12/2007<br />

-Délibération relative à <strong>des</strong> faits de harcèlem<strong>en</strong>t moral <strong>en</strong> li<strong>en</strong> avec l'appar<strong>en</strong>ce<br />

physique et l'ori<strong>en</strong>tation sexuelle du réclamant n° 2007-252 du 01/10/2007<br />

-Délibération relative au " congé paternité " pour les couples de même sexe n° 2007-<br />

203 du 03/09/2007<br />

-Délibération relative au refus de r<strong>en</strong>ouveler l'<strong>en</strong>gagem<strong>en</strong>t d'un maître auxiliaire à<br />

raison de son ori<strong>en</strong>tation sexuelle n° 2007-160 du 18/06/2007<br />

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-Délibération relative à l'exclusion de don de sang <strong>en</strong> raison de l'ori<strong>en</strong>tation sexuelle n°<br />

2006-17 du 06/02/2006<br />

-Délibération relative au refus de location dans un hôtel d'une chambre double à une<br />

couple homosexuel n° 2005-91 du 19/12/2005<br />

Délibérations relatives à l’id<strong>en</strong>tité du g<strong>en</strong>re :<br />

-Délibération relative à l'inadéquation <strong>en</strong>tre l'appar<strong>en</strong>ce physique d'une personne<br />

transsexuelle et son numéro de sécurité sociale n° 2008-190 du 15/09/2008<br />

-Délibération relative à <strong>des</strong> décisions d'inaptitude <strong>en</strong> raison d'une conversion d'id<strong>en</strong>tité<br />

sexuelle n° 2008-28 du 18/02/2008<br />

-Délibération relative au lic<strong>en</strong>ciem<strong>en</strong>t d'une salariée <strong>en</strong> raison de son transsexualisme<br />

n° 2008-29 du 18/02/2008<br />

2. Coopération <strong>en</strong>tre le barreau, les organismes chargés de lutter contre les<br />

<strong>discriminations</strong> et promouvoir l’égalité et les ONG’s<br />

Le droit français scelle la collaboration <strong>en</strong>tre avocats, associations, et la Halde <strong>en</strong><br />

reconnaissant à ces acteurs un rôle primordial dans le souti<strong>en</strong> <strong>des</strong> victimes de<br />

discrimination.<br />

Les associations constitu<strong>en</strong>t un rouage ess<strong>en</strong>tiel dans le combat contre les<br />

<strong>discriminations</strong> et les agressions à caractère discriminatoire par la possibilité qui leur a été<br />

offerte d’exercer les droits reconnus à la partie civile. De ce fait, il leur est recommandé de<br />

confier leurs stratégies judiciaires à <strong>des</strong> avocats.<br />

Les associations peuv<strong>en</strong>t se constituer <strong>en</strong> partie civile :<br />

- <strong>en</strong> ce qui concerne les <strong>«</strong> <strong>discriminations</strong> réprimées par les articles 225-2 et 432-7 du<br />

code pénal, lorsqu’elles sont commises <strong>en</strong> raison du sexe, de la situation de famille ou <strong>des</strong><br />

mœurs de la victimes et par l’article 123-1 du Code du travail » (art. 2-6 du Code de la<br />

procédure pénale).<br />

- <strong>«</strong> <strong>en</strong> faveur d'un candidat à un emploi, à un stage ou une période de formation <strong>en</strong><br />

<strong>en</strong>treprise ou d'un salarié dans les conditions prévues à l'article L. 1134-1, sous réserve de<br />

justifier d'un accord écrit de l'intéressé » (art. L. 1134-3 du Code du travail).<br />

- <strong>«</strong> <strong>en</strong> cas d'atteintes volontaires à la vie ou à l'intégrité de la personne et de<br />

<strong>des</strong>tructions, dégradations et détériorations réprimées par les articles 221-1 à 221-4, 222-1<br />

à 222-18 et 322-1 à 322-13 du code pénal », commis <strong>en</strong> raison du sexe ou <strong>des</strong> mœurs de la<br />

victime. L’association doit avoir reçu l'accord écrit de la victime ou, si celle-ci est un<br />

mineur ou un majeur protégé, celui de son représ<strong>en</strong>tant légal (art. 2-6, al. 3 du Code de la<br />

procédure pénale)<br />

Page 21


Pour ce faire, les associations doiv<strong>en</strong>t remplir une série de conditions :<br />

- avoir été régulièrem<strong>en</strong>t déclarée depuis au moins cinq ans à la date <strong>des</strong> faits, se<br />

proposant par ses statuts de combattre les <strong>discriminations</strong> fondées sur le sexe ou sur les<br />

mœurs<br />

- si le cont<strong>en</strong>tieux concerne <strong>«</strong> les infractions aux dispositions du dernier alinéa de<br />

l'article L. 123-1 du code du travail et à l'article 6 ter de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983<br />

portant droits et obligations <strong>des</strong> fonctionnaires, l'association ne sera recevable dans son<br />

action que si elle justifie avoir reçu l'accord écrit de la personne intéressée, ou, si celle-ci<br />

est mineure et après l'avis de cette dernière, celui du titulaire de l'autorité par<strong>en</strong>tale ou du<br />

représ<strong>en</strong>tant légal » (art. 2-6, al. 2 du Code de la procédure pénale).<br />

La création du RAVAD est une <strong>des</strong> illustrations le plus manifestes de collaboration<br />

<strong>en</strong>tre le monde associatif et les avocats <strong>en</strong> France. Crée <strong>en</strong> mai 2005 par un groupem<strong>en</strong>t<br />

d’associations de lutte contre l’homophobie et la transphobie qui voulait mutualiser les<br />

ressources associatives juridiques et de santé, ce réseau d’assistance juridique et judiciaire<br />

de proximité met <strong>en</strong> contact la victime avec un avocat proche de son lieu de résid<strong>en</strong>ce, <strong>en</strong><br />

liaison avec <strong>des</strong> associations locales. L’aide est <strong>en</strong> fonction de la nature de l’agression et de<br />

la volonté de la victime. Elle peut relever d’un simple conseil jusqu’à la prise <strong>en</strong> charge<br />

professionnelle par un avocat, <strong>en</strong> sachant que la première consultation est donnée à titre<br />

gracieux, et que les avocats s’<strong>en</strong>gag<strong>en</strong>t à interv<strong>en</strong>ir dans le cadre de l’aide juridictionnelle<br />

lorsque leur cli<strong>en</strong>t peut <strong>en</strong> bénéficier. Lorsqu’une région ou un départem<strong>en</strong>t n’est pas<br />

couverte par un professionnel du droit ou une association, le comité de pilotage pr<strong>en</strong>d le<br />

relais afin d’accompagner la victime dans ses démarches et d’agir le plus rapidem<strong>en</strong>t<br />

possible.<br />

La collaboration de la Halde avec les avocats est aussi dans l’intérêt de tous.<br />

La Halde peut être un appui considérable pour les avocats <strong>en</strong> charge d’un<br />

dossier de discrimination :<br />

-avant le procès, par ses pouvoirs d’instruction et d’<strong>en</strong>quête qui lui permett<strong>en</strong>t de<br />

réunir <strong>des</strong> preuves et de participer ainsi à la confection d’un dossier solide par l’avocat.<br />

-p<strong>en</strong>dant le procès, la Halde peut demander de prés<strong>en</strong>ter son avis au tribunal. Les<br />

victimes peuv<strong>en</strong>t mandater leurs avocats afin qu’ils saisiss<strong>en</strong>t à leur nom la Halde.<br />

Consci<strong>en</strong>ts de leurs intérêts commun, la Halde et le Conseil national <strong>des</strong> Barreaux ont<br />

souscrit le 12 janvier 2006 une conv<strong>en</strong>tion pour une durée de trois années à compter de sa<br />

signature visant à élaborer une formation spécifique <strong>des</strong> avocats qui sera proposée <strong>en</strong><br />

formation continue et <strong>en</strong> formation initiale, à constituer un groupe référ<strong>en</strong>t d’avocats qui<br />

porteront les dossiers devant les juridictions, à accueillir les élèves avocats <strong>en</strong> stage au<br />

Page 22


service juridique de la HALDE, à organiser un colloque annuel et à désigner <strong>des</strong><br />

médiateurs <strong>en</strong> cas de besoin. La Halde a égalem<strong>en</strong>t a conclu avec l’Ordre <strong>des</strong> avocats de<br />

Paris et la Confér<strong>en</strong>ce <strong>des</strong> avocats du barreau de Paris, le 9 novembre 2009 un part<strong>en</strong>ariat<br />

permettant aux personnes victimes de discrimination, vivant ou travaillant à Paris, d’avoir<br />

la possibilité d’être assistées par un avocat au titre de l’aide juridictionnelle (li<strong>en</strong> internet).<br />

3. Mo<strong>des</strong> alternatifs de règlem<strong>en</strong>t <strong>des</strong> conflits<br />

Dans le cadre d’une saisine de la Halde, la victime peut se voir proposé <strong>des</strong> solutions<br />

non cont<strong>en</strong>tieuses.<br />

Lorsqu’elle estime le délit de discrimination caractérisé ( art. 11 -1 à 11-3 de la loi du<br />

2004-1486 du 30 déc. 2004, art. D.1-1 CPP), la Halde peut proposer une transaction<br />

pénale. Une fois acceptée par l'auteur <strong>des</strong> faits ainsi que, s'il y a lieu, par la victime, cette<br />

mesure doit être homologuée par le procureur de la République. L’am<strong>en</strong>de ne peut pas<br />

excéder les 3 000 € pour une personne physique ou les 15 000 € pour une personne<br />

morale, à ce montant se rajoute l’indemnisation de la victime.<br />

La Halde peut aussi faire procéder à la résolution amiable <strong>des</strong> différ<strong>en</strong>ds portés à sa<br />

connaissance, par voie de médiation. Celle-ci est réalisée par un expert ou par un avocat<br />

indép<strong>en</strong>dant désigné normalem<strong>en</strong>t par le Conseil National <strong>des</strong> Barreaux. Il s’agit d’une<br />

voie intéressante <strong>en</strong>tre autres, lorsque la victime et le mis <strong>en</strong> cause ne veul<strong>en</strong>t pas raviver<br />

leur conflit. Dans ce cas là, les constatations et les déclarations recueillies au cours de<br />

celle-ci ne peuv<strong>en</strong>t être ni produites ni invoquées ultérieurem<strong>en</strong>t dans les instances civiles<br />

ou administratives, sans l'accord <strong>des</strong> personnes intéressées (art. 7 de la loi du 30 décembre<br />

2004).<br />

Au-delà du cadre de la Halde et dans le cadre d’un cont<strong>en</strong>tieux pénal, le procureur de<br />

la République peut avoir recours à la médiation pénale <strong>«</strong> s’il lui apparaît qu’elle est<br />

susceptible d’assurer la réparation du dommage causé à la victime, de mettre fin au<br />

trouble résultant de l’infraction et de contribuer au reclassem<strong>en</strong>t de l’auteur » ( art. 41-1<br />

du Code de la procédure pénale). Cette procédure souv<strong>en</strong>t réservée à <strong>des</strong> petites<br />

infractions paraît peu adaptée <strong>en</strong> matière de discrimination.<br />

La victime d’une discrimination ne peut pas non plus bénéficier d’une conciliation.<br />

Cette mesure instituée par le décret du 20 mars 1978 ne peut porter que sur <strong>des</strong> droits<br />

dont les parties ont la libre disposition, les délits <strong>en</strong> matière de discrimination sont alors<br />

exclus de son champ de compét<strong>en</strong>ce.<br />

Partie III – Instrum<strong>en</strong>ts légaux<br />

Page 23


En droit français, le droit communautaire et les droits et libertés cont<strong>en</strong>ues dans la<br />

CEDH sont au-<strong>des</strong>sus de la loi et, <strong>en</strong> cas de conflit, prim<strong>en</strong>t.<br />

La primauté du droit communautaire sur le droit national, dégagée par la CJCE<br />

(15 juillet 1964, Flaminio Costa c/E.N.E.L, aff. 6/64), vaut pour l’<strong>en</strong>semble <strong>des</strong> sources<br />

du droit de l’Union Europé<strong>en</strong>ne, aussi bi<strong>en</strong> pour les sources primaires (les traités), que<br />

pour les sources dérivées (règlem<strong>en</strong>ts, directives et décisions) ou pour la jurisprud<strong>en</strong>ce de<br />

la CJCE. La Cour de cassation reconnaît la primauté du droit de l’union europé<strong>en</strong>ne sur la<br />

loi française dans l’arrêt Jacques Vabre (Cass. 1ère civ., 24 mai 197 5). Le Conseil d’Etat,<br />

de son côté, adopte cette conception dans l’arrêt Nicolo (CE 20 oct. 1989, Ass. Req.<br />

N°108243) 4.<br />

Dans le droit de l’Union, les textes de référ<strong>en</strong>ce concernant les <strong>discriminations</strong> sont<br />

principalem<strong>en</strong>t la Charte <strong>des</strong> droits fondam<strong>en</strong>taux et <strong>des</strong> directives. La Charte n’est pas<br />

incluse dans le TUE mais elle est annexée depuis le traité de Lisbonne, désormais on lui<br />

reconnaît la <strong>«</strong> même valeur juridique que les traités » (art. 6 TUE). Or, dans la mesure où<br />

les dispositions <strong>des</strong> traités ont un effet direct vertical et horizontal, la charte peut être<br />

directem<strong>en</strong>t invoquée par le conseil d’un particulier aussi bi<strong>en</strong> dans les cas de violation par<br />

l’Etat <strong>des</strong> droits de la conv<strong>en</strong>tion, que dans l’hypothèse <strong>des</strong> violations de ces droits dans<br />

les relations <strong>en</strong>tre particuliers. Bi<strong>en</strong> que les directives soi<strong>en</strong>t normalem<strong>en</strong>t transposées <strong>en</strong><br />

droit interne, elles peuv<strong>en</strong>t avoir un effet direct uniquem<strong>en</strong>t vertical : <strong>en</strong> effet, un avocat<br />

pourra s’<strong>en</strong> prévaloir dans les litiges concernant les rapports <strong>en</strong>tre l’Etat et un particulier<br />

(Alitalia, CE 3 févier 1989/ arrêt Van Duyn du 4 déc. 1974).<br />

La Conv<strong>en</strong>tion de sauvegarde <strong>des</strong> droits de l’homme et <strong>des</strong> libertés<br />

fondam<strong>en</strong>tales prime sur le droit interne sur le fondem<strong>en</strong>t de l’article 55 de la<br />

Constitution. Ce droit a quant à lui un effet direct vertical et horizontal. Un avocat pourra<br />

alors l’invoquer devant les tribunaux nationaux. Une dernière stratégie de déf<strong>en</strong>se de<br />

l’avocat d’une victime de discrimination s’ouvre grâce à la ratification du protocole 11 de<br />

la Conv<strong>en</strong>tion europé<strong>en</strong>ne <strong>des</strong> droits de l’homme. En effet, ce docum<strong>en</strong>t reconnaît un<br />

droit de recours individuel <strong>des</strong> ressortissants du pays l’ayant ratifié auprès de la Cour<br />

europé<strong>en</strong>ne dans les conditions précisées par ce texte 5.<br />

1. La Constitution<br />

La non-discrimination <strong>en</strong> raison de l’ori<strong>en</strong>tation sexuelle ou <strong>en</strong> raison de l’id<strong>en</strong>tité du<br />

g<strong>en</strong>re bénéficie-t-elle d’une assise constitutionnelle ? L’article 1er de la Constitution<br />

précise que la République <strong>«</strong> assure l’égalité devant la loi de tous les citoy<strong>en</strong>s sans<br />

4 M. Fabre-Magnan, Introduction générale au droit. Cours et méthodologie, PUF, 2009, p. 84 et s.<br />

5 M. Fabre-Magnan, Introduction générale au droit. Cours et méthodologie, PUF, 2009, p. 89 et s.<br />

Page 24


distinction d’origine, de race ou de religion ». Bi<strong>en</strong> que le principe constitutionnel d’égalité<br />

soit formulé de manière générale et ne fasse aucune m<strong>en</strong>tion aux critères de l’ori<strong>en</strong>tation<br />

sexuelle et de l’id<strong>en</strong>tité de g<strong>en</strong>re, peut-on l’invoquer pour réfuter l’exclusion du mariage<br />

<strong>en</strong>tre personnes d’un même sexe ? peut-on se prévaloir du droit de m<strong>en</strong>er une vie<br />

familiale normale et du principe de protection de l'intérêt supérieur de l'<strong>en</strong>fant, protégés<br />

par les 10e et 11e alinéas du Préambule de la Constitution de 1946, pour contester les<br />

textes qui refus<strong>en</strong>t l’égalité <strong>en</strong>tre les <strong>en</strong>fants au sein d’un couple de par<strong>en</strong>ts de même sexe<br />

que ceux nés au sein d’un couple hétérosexuel ?<br />

La question se pose de manière pressante depuis la réforme constitutionnelle du 23<br />

juillet 2008, qui a inséré dans la Constitution un nouvel article 61-1 et modifié son article<br />

62 pour créer une procédure d’exam<strong>en</strong> par voie d’exception de la constitutionnalité <strong>des</strong><br />

lois. Désormais, <strong>«</strong> lorsque, à l’occasion d’une instance <strong>en</strong> cours devant une juridiction, il<br />

est sout<strong>en</strong>u qu’une disposition législative porte atteinte aux droits et libertés que la<br />

Constitution garantit, le Conseil constitutionnel peut être saisi de cette question sur le<br />

r<strong>en</strong>voi du Conseil d’État ou de la Cour de cassation qui se prononce dans un délai<br />

déterminé ». La loi organique, prévue par le second alinéa de l’article 61-1, est la loi n°<br />

2009-1523 du 10 décembre 2009.<br />

L’actualité judiciaire réc<strong>en</strong>te à apporté une réponse qui n’était pas espérée.<br />

L’Assemblée plénière de la Cour de cassation, le 8 juillet 2010 6 avait demandé au Conseil<br />

constitutionnel de se prononcer sur la constitutionalité de l’article 365 du Code civil <strong>en</strong> ce<br />

que l’interprétation ret<strong>en</strong>ue par la Cour de cassation a pour effet d'interdire l'adoption de<br />

l'<strong>en</strong>fant mineur du part<strong>en</strong>aire ou du concubin – parce que celle-ci priverait le par<strong>en</strong>t<br />

biologique de l’autorité par<strong>en</strong>tale ce qui est contraire à l’intérêt de l’<strong>en</strong>fant - alors que cette<br />

adoption est possible par le conjoint marié. Les moy<strong>en</strong>s invoqués soulevai<strong>en</strong>t la<br />

distinction de traitem<strong>en</strong>t <strong>en</strong>tre les <strong>en</strong>fants au regard de l'autorité par<strong>en</strong>tale, selon qu'ils<br />

sont adoptés par le conjoint ou par le concubin de leur par<strong>en</strong>t biologique. Le Conseil<br />

constitutionnel a jugé, le 6 octobre 2010, que l'article 365 du code civil ainsi interprété par<br />

la Cour de cassation est conforme à la Constitution. Une telle interprétation ne porterait<br />

pas atteinte au droit de m<strong>en</strong>er une vie familiale normale qui n'implique pas le droit à<br />

l'établissem<strong>en</strong>t d'un li<strong>en</strong> de filiation adoptive. Le Conseil constitutionnel a jugé qu'<strong>en</strong><br />

maint<strong>en</strong>ant cette règle ainsi interprétée, le législateur a <strong>«</strong> estimé que la différ<strong>en</strong>ce de<br />

situation <strong>en</strong>tre les couples mariés et ceux qui ne le sont pas pouvait justifier, dans l'intérêt<br />

de l'<strong>en</strong>fant, une différ<strong>en</strong>ce de traitem<strong>en</strong>t quant à l'établissem<strong>en</strong>t de la filiation adoptive à<br />

l'égard <strong>des</strong> <strong>en</strong>fants mineurs » et qu’il ne lui apparti<strong>en</strong>t pas de substituer son appréciation à<br />

celle du législateur sur une telle question.<br />

2. Provisions légales et jurisprud<strong>en</strong>ce<br />

A. Discrimination, agression et ori<strong>en</strong>tation sexuelle<br />

6 n° 10-10385 n° 10-10385.<br />

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1. Crimes ou délits homophobes<br />

Le droit français a instauré un dispositif d’aggravation <strong>des</strong> peines suite à <strong>des</strong><br />

infractions commises à raison de l’ori<strong>en</strong>tation sexuelle de la victime, réelle ou présumée,<br />

afin de r<strong>en</strong>forcer la répression <strong>des</strong> infractions à caractère homophobe. Ce dispositif est<br />

<strong>en</strong>tré <strong>en</strong> vigueur par l’approbation de la loi n°2003-239 du 18 mars 2003, codifiée dans<br />

l’article 132-77 du Code pénal. Désormais, la commission d’une infraction <strong>en</strong> raison de<br />

l’ori<strong>en</strong>tation sexuelle réelle ou présumée de la victime est une circonstance aggravante.<br />

En vertu de l’article 132-77 du Code pénal, l’aggravation de l’infraction ne s’applique<br />

que <strong>«</strong> dans les cas prévus par la loi ». La majorité <strong>des</strong> cas aggravés ont été prévus par la loi<br />

du 18 mars 2003, la liste d’infractions fut toutefois élargie par la loi 2004-204 du 9 mars<br />

2004.<br />

Désormais, les infractions commises <strong>en</strong> raison de l’ori<strong>en</strong>tation sexuelle présumée ou<br />

réelle de la victime susceptibles d’aggravation sont principalem<strong>en</strong>t <strong>des</strong> atteintes à la<br />

personne : meurtre (art. 221 -4, al. 7 du Code pénal), tortures et actes de barbarie (art.<br />

222-3-5 ter du Code pénal), mort sans int<strong>en</strong>tion de la donner (art. 222 -8-5 ter du Code<br />

pénal), viol<strong>en</strong>ces ayant <strong>en</strong>traîné une mutilation ou une infirmité perman<strong>en</strong>te (art. 222-10-5<br />

ter du Code pénal), viol<strong>en</strong>ces ayant <strong>en</strong>traîné une incapacité totale de travail p<strong>en</strong>dant plus<br />

de 8 jours (art. 222-12-5 ter du Code pénal), viol<strong>en</strong>ces ayant <strong>en</strong>traîné une incapacité de<br />

travail inférieure ou égale à 8 jours ou n’ayant <strong>en</strong>traîné aucune incapacité de travail (art.<br />

222-13-5 ter du Code pénal), viol (art. 222 -24-9 du Code pénal), agressions sexuelles<br />

autres que le viol (art. 222-30 du Code pénal) et m<strong>en</strong>aces (art. 222-18-1 du Code pénal).<br />

Il est possible aussi d’aggraver certaines infractions portant contre les bi<strong>en</strong>s,<br />

notamm<strong>en</strong>t, le vol (art. 311 -4 du Code pénal) et l’extorsion (art. 312 -2, al. 3 du Code<br />

pénal).<br />

Sur les infractions aggravées, il reste à savoir pourquoi le législateur n’a pas greffé la<br />

liste <strong>des</strong> infractions aggravées <strong>en</strong> raison de l’ori<strong>en</strong>tation sexuelle de la victime sur celles<br />

qui font l’objet d’une aggravation lorsqu’elles sont commises <strong>en</strong> raison de l’appart<strong>en</strong>ance<br />

ou de la non-appart<strong>en</strong>ance de la victime à une nation, race, ethnie ou religion. En effet, ne<br />

peuv<strong>en</strong>t pas être aggravées les <strong>des</strong>tructions, dégradations ou détériorations de bi<strong>en</strong>s (art.<br />

322-2, al. der) et les <strong>des</strong>tructions, dégradations ou détériorations dangereuses pour les<br />

personnes (art. 322-8, 3°) commises <strong>en</strong> raison de l’ori<strong>en</strong>tation sexuelle de la victime.<br />

Comm<strong>en</strong>t caractériser la circonstance aggravante ?<br />

La circonstance aggravante concerne le mobile homophobe de l’infraction.<br />

En vertu de l’article 132-77, al. 2 du Code pénal, la preuve du mobile homophobe de<br />

l’infraction est constituée d’un fait matériel et d’un élém<strong>en</strong>t int<strong>en</strong>tionnel. A défaut de ces<br />

élém<strong>en</strong>ts, la circonstance aggravante ne peut pas être ret<strong>en</strong>ue.<br />

Page 26


S’agissant du fait matériel, le législateur les énumère dans l’article 132-77 du Code<br />

pénal. Il s’agit de <strong>«</strong> propos, écrits, utilisation d'images ou d'objets ou actes de toute nature<br />

portant atteinte à l'honneur ou à la considération de la victime ou d'un groupe de<br />

personnes dont fait partie la victime à raison de leur ori<strong>en</strong>tation sexuelle vraie ou<br />

supposée ». Il est permis de déduire de la formule <strong>«</strong> actes de toute nature » que cette liste<br />

n’est pas limitative. Par ailleurs, ces faits matériels, à l’appui <strong>des</strong>quels la preuve de la<br />

circonstance aggravante peut être rapportée, ne doiv<strong>en</strong>t pas nécessairem<strong>en</strong>t être<br />

concomitants à l’infraction : ils peuv<strong>en</strong>t la précéder ou la suivre.<br />

L’élém<strong>en</strong>t int<strong>en</strong>tionnel suppose rapporter la preuve du mobile homophobe de<br />

l’infraction, cet élém<strong>en</strong>t ne peut pas être réduit à la preuve de l’homophobie de l’auteur<br />

<strong>des</strong> faits. Le contraire revi<strong>en</strong>drait à considérer qu’une personne ayant <strong>des</strong> amis<br />

homosexuels ou étant elle-même homosexuelle est à l’abri de commettre un acte criminel<br />

ou délictueux à raison de l’homosexualité de la victime. Ainsi, si l’homophobie de l’auteur<br />

de l’infraction peut être un indice qui contribue, parmi d’autres, pour rapporter la preuve<br />

de ce que l’infraction par lui commise l’a été <strong>en</strong> raison de l’ori<strong>en</strong>tation sexuelle de la<br />

victime ; la preuve <strong>des</strong> amitiés de l’auteur ou de sa propre ori<strong>en</strong>tation sexuelle ne doit<br />

donc pas suffire à exclure le mobile homophobe de son acte.<br />

Telle avait été la question qui avait été posée à la Cour d’assisses de Douai dans un<br />

procès <strong>en</strong> date du 15 octobre 2009. Un <strong>des</strong> accusés après avoir nié avoir eu une relation<br />

homosexuelle avec une <strong>des</strong> victimes durant toute l’instruction l’a finalem<strong>en</strong>t, à l’audi<strong>en</strong>ce,<br />

reconnu. D’autre part, il avait fait citer comme témoin, une jeune femme qui assumait son<br />

homosexualité, tout <strong>en</strong> lui affirmant son amitié. Maître Jean-Bernard Geoffroy, présid<strong>en</strong>t<br />

du RAVAD et avocat du collectif contre l’homophobie et pour l’égalité <strong>des</strong> droits,<br />

association qui s’est constituée partie civile avec l’accord <strong>des</strong> victimes, avait alors plaidé<br />

qu’il était nécessaire de s’intéresser à l’int<strong>en</strong>tion de l’auteur de l’agression à caractère<br />

homophobe et non pas :<br />

-à l’homophobie vraie ou supposé de l’auteur<br />

-à son homosexualité non assumée qui peut confiner à la haine de soi<br />

-à ses amitiés ou inimitiés <strong>en</strong>vers les personnes homosexuelles.<br />

En définitive, l’équilibre est subtil : L’homophobie de l’auteur de l’infraction est utile<br />

pour compléter un faisceau d’indices, elle paraît toutefois insuffisante à elle toute seule,<br />

détachée de l’infraction, pour rapporter la preuve de l’int<strong>en</strong>tion homophobe de<br />

l’infraction. Ainsi, par exemple, la cour d’appel de Montpellier juge que <strong>«</strong> s’il est<br />

vraisemblable que <strong>des</strong> propos homophobes ont été t<strong>en</strong>us par le couple M à l’occasion de<br />

cet incid<strong>en</strong>t [les prév<strong>en</strong>us], il n’est pas démontré que l’ori<strong>en</strong>tation sexuelle de Mélanie C<br />

[la plaignante] soit à l’origine <strong>des</strong> viol<strong>en</strong>ces. Au vu <strong>des</strong> attestations versées aux débats,<br />

l’incid<strong>en</strong>t semble davantage dû à une attitude inconv<strong>en</strong>ante et <strong>en</strong>vahissante de Mélanie C<br />

[la plaignante], qui r<strong>en</strong>dait sa prés<strong>en</strong>ce indésirable chez les consorts M., qu’à un rejet <strong>en</strong><br />

raison de son homosexualité. Qu’une amie du couple elle-même homosexuelle témoigne<br />

Page 27


qu’elle a toujours été accueillie chaleureusem<strong>en</strong>t avec son amie chez Monsieur et Madame<br />

M. Que dès lors, la seconde circonstance aggravante n’est pas démontrée » 7.<br />

2. Couples de même sexe<br />

En droit français, il existe deux unions légales – le mariage et le Pacs – et une union de<br />

fait – le concubinage.<br />

LE MARIAGE<br />

En l’état de la législation, le mariage reste réservé à l’union d’un homme et d’une<br />

femme même s’il n’existe pas, dans les textes, une interdiction expresse et que la loi ne<br />

précise pas non plus que la différ<strong>en</strong>ce de sexes est une condition de fond.<br />

A l’appuie de cette affirmation vi<strong>en</strong>n<strong>en</strong>t les travaux préparatoires de la loi du 15<br />

novembre 1999 relative au pacte civil de solidarité. Cette position est confirmée par l’arrêt<br />

de la première chambre civile qui <strong>en</strong> 2007 qui s’est prononcé sur la question. Faute d’un<br />

texte qui précise que la différ<strong>en</strong>ce de sexes est une condition de fond, la Cour se fonde sur<br />

la “loi française” pour affirmer que <strong>«</strong> le mariage est l’union d’un homme et d’une<br />

femme ». Elle profite l’occasion pour rappeler que <strong>«</strong> ce principe n’est contredit par aucune<br />

<strong>des</strong> dispositions de la Conv<strong>en</strong>tion europé<strong>en</strong>ne <strong>des</strong> droits de l’homme et de la Charte <strong>des</strong><br />

droits fondam<strong>en</strong>taux de l’Union Europé<strong>en</strong>ne qui n’a pas <strong>en</strong> France de force obligatoire »<br />

(Cass. 1ère civ., 13 mars 2007, publié, n°05-16627).<br />

La solution ret<strong>en</strong>ue par la Cour <strong>en</strong>térine un traitem<strong>en</strong>t différ<strong>en</strong>t fondé sur l’ori<strong>en</strong>tation<br />

sexuelle. La discrimination <strong>des</strong> couples homosexuelles est pourtant légale <strong>«</strong> lorsqu’il existe<br />

une justification objective et raisonnable et qui respecte un rapport raisonnable de<br />

proportionnalité <strong>en</strong>tre les moy<strong>en</strong>s employés et le but visé ». En l’espèce, la justification<br />

objective et raisonnable réside <strong>«</strong> dans la fonction traditionnelle du mariage,<br />

communém<strong>en</strong>t considéré comme constituant la fondation d’une famille » 8. Cet argum<strong>en</strong>t<br />

est réfutable : si la fonction du mariage était de sécuriser la filiation, il faudrait rev<strong>en</strong>ir sur<br />

la reconnaissance de la filiation naturelle ainsi que sur la possibilité d’adoption<br />

monopar<strong>en</strong>tale. Pour l’instant, la CEDH ne paraît pas pouvoir impulser un changem<strong>en</strong>t :<br />

l’arrêt Schalk et Kopf c. Autriche (n° 30141/04) r<strong>en</strong>du par la Cour europé<strong>en</strong>ne <strong>des</strong> droits<br />

de l’homme le 24 juin 2010 vi<strong>en</strong>t conforter l’idée que l’interdiction de marier deux<br />

personnes d’un même sexe ne constitue pas une violation ni de l’article 12 ni de l’article<br />

14 de la CEDH, chaque état devant évoluer dans le cadre de son propre ordre juridique<br />

sur cette question … Il faut néanmoins souhaiter un changem<strong>en</strong>t de ladite cour. D’autres<br />

saisines pourrai<strong>en</strong>t le permettre.<br />

7 CA Montpellier, ch. correct. 3, 30 oct. 2007, RG n°07/00345, Juris-data n° : 2007-366248.<br />

8 TGI Bordeaux, ch. civ. 1, 27 juillet 2004, Juris-data n°2004-246467.<br />

Page 28


Conditions pour la reconnaissance <strong>en</strong> France <strong>des</strong> mariages souscrits à<br />

l’étranger<br />

Pour que le mariage <strong>en</strong>tre personnes de même sexe célébré à l’étranger produise <strong>des</strong><br />

effets <strong>en</strong> France, il faut que le mariage ait été valablem<strong>en</strong>t célébré à l’étranger et que la loi<br />

nationale <strong>des</strong> intéressés reconnaisse ce type d’union.<br />

Dès lors, un mariage de deux français <strong>en</strong> Espagne ne produira pas d’effets <strong>en</strong> France,<br />

car la loi nationale <strong>des</strong> <strong>«</strong> époux » ne reconnaît pas cette union.<br />

Le conjoint homosexuel et les devoirs et obligations du mariage<br />

L’homosexualité d’une personne mariée constitue-t-elle une violation grave <strong>des</strong><br />

devoirs et obligations du mariage r<strong>en</strong>dant intolérable le mainti<strong>en</strong> de la vie commune et<br />

justifiant un divorce à ses torts (art. 242 du Code civil) ? Le cas échéant, l’époux victime<br />

d’un divorce prononcé aux torts exclusifs de son conjoint peut demander <strong>des</strong> dommages<br />

et intérêts <strong>en</strong> réparation <strong>des</strong> conséqu<strong>en</strong>ces d'une particulière gravité (art. 266 du Code<br />

civil).<br />

Il semblerait que l’homosexualité de l’époux n’est pas constitutive <strong>en</strong> elle-même d’une<br />

faute justifiant le divorce à ses torts. Ainsi, viole l’article 245, al. 2, la Cour d’appel qui<br />

prononce la séparation de corps aux torts exclusifs du mari qui avait <strong>«</strong> <strong>des</strong> goûts et <strong>des</strong><br />

relations homosexuelles » <strong>«</strong> sans préciser <strong>en</strong> quoi les faits imputables au mari constituai<strong>en</strong>t<br />

<strong>des</strong> violations graves ou r<strong>en</strong>ouvelées <strong>des</strong> devoirs et obligations du mariage et r<strong>en</strong>dai<strong>en</strong>t<br />

intolérable le mainti<strong>en</strong> de la vie commune ».<br />

Toutefois, <strong>«</strong> si l’homosexualité d’un conjoint ne constitue pas une faute <strong>en</strong> soi, la prise<br />

de consci<strong>en</strong>ce par celui-ci d’une modification de ses préfér<strong>en</strong>ces sexuelles ne saurait<br />

l’exonérer <strong>des</strong> devoirs et obligations du mariage auxquels il demeure t<strong>en</strong>u jusqu’à la<br />

dissolution de celui-ci » 9. Dès lors, l’attitude de celui-ci lors de la révélation de son<br />

ori<strong>en</strong>tation sexuelle peut s’appar<strong>en</strong>ter à un manque de loyauté vis-à-vis de son épouse. Est<br />

par exemple fautif le mari qui s’est livré à <strong>des</strong> <strong>«</strong> confid<strong>en</strong>ces […] adressées, sans le<br />

cons<strong>en</strong>tem<strong>en</strong>t de l’épouse, à <strong>des</strong> amis communs, dans <strong>des</strong> termes non équivoques », ces<br />

confid<strong>en</strong>ces étant <strong>«</strong> de nature à blesser l’amour propre de celle-ci dès lors que l’intimité du<br />

couple est dévoilée brutalem<strong>en</strong>t aux proches <strong>des</strong> époux ». Selon la cour d’appel, le mari<br />

<strong>«</strong> pouvait préserver le secret <strong>des</strong> motifs de la rupture qui ne concernait que les rapports<br />

<strong>en</strong>tre les époux, sans exposer ainsi sa femme à l’humiliation de subir la mise à nu de sa vie<br />

conjugale, dans son respect le plus intime. Qu’<strong>en</strong> agissant ainsi, au mépris <strong>des</strong> s<strong>en</strong>tim<strong>en</strong>ts<br />

de l’épouse, pour satisfaire un besoin de sincérité et de transpar<strong>en</strong>ce, l’époux a méconnu<br />

la loyauté et le respect dus à son conjoint » 10.<br />

9 CA Aix-<strong>en</strong>-Prov<strong>en</strong>ce, ch. 6, sect. 1, 5 nov. 2008, Juris-data n°2008-009427<br />

10 CA Aix-<strong>en</strong>-Prov<strong>en</strong>ce, ch. 6, sect. 1, 5 nov. 2008, Juris-data n°2008-009427<br />

Page 29


PACS<br />

Le PACS – pacte civil de solidarité – a été approuvé par la loi n°99-944 du 15<br />

novembre 1999, modifiée par la loi n°2006-728, du 23 juin 2006. Ouvert aux personnes<br />

de même sexe aussi bi<strong>en</strong> qu’à <strong>des</strong> personnes de sexe différ<strong>en</strong>t, il s’agit d’un <strong>«</strong> contrat<br />

conclu par deux personnes physiques majeures […] pour organiser leur vie commune »<br />

(art. 515-1 du Code civil). Dans un premier temps éloigné de la notion de couple, il s’<strong>en</strong><br />

rapproche par le nouvel article 515-4 du code civil, qui consacre <strong>des</strong> devoirs réciproques<br />

<strong>en</strong>tre part<strong>en</strong>aires – <strong>«</strong> vie commune », <strong>«</strong> aide matérielle », <strong>«</strong> assistance réciproque »,<br />

solidarité à l’égard <strong>des</strong> dettes concernant les besoins de la vie courante – et qui lui donne<br />

une véritable dim<strong>en</strong>sion extrapatrimoniale.<br />

La loi prescrit expressém<strong>en</strong>t les conditions et procédures de conclusion du Pacs (art.<br />

515-1 à 515-3-1 du C.civ.), la reconnaissance du part<strong>en</strong>ariat conclu à l’étranger (art. 515-7-<br />

1 du C. civ.), les obligations <strong>en</strong>vers le part<strong>en</strong>aire (art. 515-4), la gestion du patrimoine <strong>des</strong><br />

part<strong>en</strong>aires (art. 515-5), les droits sociaux et du travail du part<strong>en</strong>aire pacsé (art. ), les droits<br />

du part<strong>en</strong>aire survivant (art. 515-6 du Code civil) et les causes et procédure de dissolution<br />

du Pacs (art. 515-7 du C.civ.).<br />

D’un point de vue patrimonial, le Pacs s’aligne <strong>en</strong> grande partie sur les avantages du<br />

mariage. Les part<strong>en</strong>aires pacsés ne bénéfici<strong>en</strong>t pas, <strong>en</strong> revanche, de la p<strong>en</strong>sion de<br />

réversion, réservée au conjoint survivant (art. L. 353 -1 du Code de la sécurité sociale et<br />

art. L. 38 et suivants du code <strong>des</strong> p<strong>en</strong>sions civiles et militaires de retraite). La Halde se<br />

prononce <strong>en</strong> faveur de l’ext<strong>en</strong>sion du bénéfice de la p<strong>en</strong>sion de réversion aux part<strong>en</strong>aires<br />

pacsés 11.<br />

Le droit de séjour du part<strong>en</strong>aire pacsé n’est pas non plus id<strong>en</strong>tique à celui du conjoint.<br />

Il n’existe pas un visa spécifique aux personnes pacsées. Si le PACS a été conclu dans<br />

un consulat français à l'étranger, le part<strong>en</strong>aire pacsé devrait se voir délivrer un visa pour<br />

v<strong>en</strong>ir <strong>en</strong> France rejoindre son part<strong>en</strong>aire français. A l'instar <strong>des</strong> refus de visas opposés au<br />

conjoint d'un Français ou au bénéficiaire d'une autorisation de regroupem<strong>en</strong>t familial, le<br />

refus de visa devra être motivé (art. 5, 1° al. 2 de l'ordonnance du 2 novembre 1945) 12.<br />

En ce qui concerne le titre de séjour temporaire portant la m<strong>en</strong>tion <strong>«</strong> vie privée et<br />

familiale », il est octroyé de plein droit <strong>«</strong> à l’étranger ne vivant pas <strong>en</strong> état de polygamie,<br />

marié avec un ressortissant de nationalité française » sous quelques conditions (art. L. 313-<br />

11, al. 4 Ceseda) alors que les li<strong>en</strong>s issus d’un pacs constitu<strong>en</strong>t uniquem<strong>en</strong>t <strong>«</strong> l’un <strong>des</strong><br />

élém<strong>en</strong>ts d’appréciation <strong>des</strong> li<strong>en</strong>s personnels <strong>en</strong> France au s<strong>en</strong>s du 7° de l’article 12 bis de<br />

l’ordonnance du 2 novembre 1945 susvisée pour l’obt<strong>en</strong>tion d’un titre de séjour » (art. 12<br />

11 Délibération 2008-107 et 2010-21.<br />

12 Q.e. de Monique Cerisier b<strong>en</strong> Guiga, publiée dans le JO Sénat du 17/03/2005 - page 726 ; réponse publiée dans le<br />

JO Sénat du 26/05/2005 - page 1483.<br />

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de la loi du 99/994 du 15 novembre 1999 relative au pacte civil de solidarité). Les li<strong>en</strong>s<br />

personnels <strong>en</strong> France justifi<strong>en</strong>t la délivrance d’un titre de séjour lorsqu’ils sont <strong>«</strong> tels que le<br />

refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une<br />

atteinte disproportionnée au regard <strong>des</strong> motifs du refus, sans que la condition prévue à<br />

l’article L.311-7 soit exigée » (art. L. 313 -11, al. 7 Cesada). La circulaire N°<br />

NOR/INT/D/04/00134/C du ministère de l’intérieur du 30 octobre 2004 donne <strong>des</strong><br />

instructions sur l’appréciation <strong>des</strong> critères d’int<strong>en</strong>sité, d’anci<strong>en</strong>neté et stabilité <strong>des</strong> li<strong>en</strong>s<br />

personnels et familiaux 13.<br />

Enfin, le statut de pacsé à lui-même n’est pris <strong>en</strong> compte qu’indirectem<strong>en</strong>t dans la<br />

délivrance d’une carte de résid<strong>en</strong>t portant la m<strong>en</strong>tion <strong>«</strong> résid<strong>en</strong>t de longue durée-CE ».<br />

Peut <strong>en</strong> bénéficier celui qui dispose d’une assurance maladie, s’il justifie d'une résid<strong>en</strong>ce<br />

ininterrompue d'au moins cinq années <strong>en</strong> France, conforme aux lois et règlem<strong>en</strong>ts <strong>en</strong><br />

vigueur », sous couvert, <strong>en</strong>tre autres, de la carte de séjour portant m<strong>en</strong>tion <strong>«</strong> vie privée et<br />

familiale » (art. 314 -8 Ceseda). Cette même carte peut être accordée <strong>«</strong> à l'étranger marié<br />

depuis au moins trois ans avec un ressortissant de nationalité française » sous quelques<br />

conditions (art. 314-9-3° Ceseda).<br />

Il est conseillé aux lecteurs de se référer au livre de maître C. Mécary et maître F. Leroy-<br />

Forgeot, Le PaCS, collection <strong>«</strong> Que sais-je ? », n°3566, Paris, PUF, 2000.<br />

CONCUBINAGE<br />

Le concubinage est <strong>«</strong> une union de fait, caractérisée par une vie commune prés<strong>en</strong>tant<br />

un caractère de stabilité et de continuité, <strong>en</strong>tre deux personnes, de sexe différ<strong>en</strong>t ou de<br />

même sexe, qui viv<strong>en</strong>t <strong>en</strong> couple » (art. 515-8 du Code civil).<br />

Les concubins homosexuels ne bénéfici<strong>en</strong>t pas toujours <strong>des</strong> mêmes droits que les<br />

concubins hétérosexuels. Par exemple, ils ne peuv<strong>en</strong>t pas bénéficier de la procréation<br />

médicalem<strong>en</strong>t assistée alors que cette technique est ouverte aux couples hétérosexuels non<br />

mariés.<br />

3. La filiation<br />

Le droit français ne facilite pas l’accès à la par<strong>en</strong>talité d’une personne<br />

homosexuelle.<br />

Elle ne pourra pas d’une part, bénéficier d’une assistance médicale à la procréation,<br />

réservée <strong>«</strong> à répondre à la demande par<strong>en</strong>tale d'un couple » (art. L. 2141-2 du code de la<br />

santé publique).<br />

13 http://www.gisti.org/IMG/pdf/norintd0400134c.pdf<br />

Page 31


La voie de l’adoption, d’autre part, ne lui est pas <strong>en</strong> principe fermée, au regard <strong>des</strong><br />

textes. Toutefois, les autorités administratives ont parfois refusé <strong>des</strong> deman<strong>des</strong><br />

d’agrém<strong>en</strong>t <strong>en</strong> vue de l’adoption d’un <strong>en</strong>fant <strong>en</strong> fonction de l’ori<strong>en</strong>tation sexuelle de<br />

l’adoptant. Un tel refus s’appuyait sur l’article 4 du décret n°98-771 du 1er septembre<br />

1998 relatif à l'agrém<strong>en</strong>t <strong>des</strong> personnes qui souhait<strong>en</strong>t adopter un pupille de l'Etat ou un<br />

<strong>en</strong>fant étranger. Selon ce texte, <strong>«</strong> le présid<strong>en</strong>t du conseil général doit s’assurer que les<br />

conditions d’accueil offertes par le demandeur sur les plans familial, éducatif et<br />

psychologique correspond<strong>en</strong>t aux besoins et à l’intérêt d’un <strong>en</strong>fant adopté ». Or, une telle<br />

prérogative a été le fondem<strong>en</strong>t invoqué pour refuser l’agrém<strong>en</strong>t aux adoptants<br />

homosexuels, <strong>en</strong> considérant que leur <strong>«</strong> mode de vie apparaissait comme pouvant<br />

r<strong>en</strong>forcer les fragilités affectives et psychologiques d’un <strong>en</strong>fant adopté » 14 ; ou que celui-ci<br />

mettai<strong>en</strong>t <strong>en</strong> avant <strong>«</strong> défaut de repères id<strong>en</strong>tificatoires dû à l’abs<strong>en</strong>ce d’image ou de<br />

référ<strong>en</strong>t paternel » 15. Le mode de vie, sous-<strong>en</strong>t<strong>en</strong>du son ori<strong>en</strong>tation sexuelle, n’offrait pas,<br />

sur les plans familial, éducatif et psychologique, <strong>des</strong> conditions d’accueil correspondant<br />

aux besoins et à l’intérêt d’un <strong>en</strong>fant adopté.<br />

Les tribunaux ont déf<strong>en</strong>du p<strong>en</strong>dant longtemps la légitimité d’un tel refus d’agrém<strong>en</strong>t<br />

<strong>en</strong> raison de l’ori<strong>en</strong>tation sexuelle du requérant <strong>en</strong> affirmant qu’il ne s’agissait pas d’un<br />

comportem<strong>en</strong>t discriminatoire : le Conseil d’Etat le justifie <strong>en</strong> avançant que la Cour n’a<br />

pas <strong>«</strong> fondé sa décision sur une position de principe concernant les ori<strong>en</strong>tations sexuelles<br />

de la requérante » (in abstracto) mais sur la relation homosexuelle de l’adoptant <strong>«</strong> au regard<br />

<strong>des</strong> besoins et de l’intérêt d’un <strong>en</strong>fant adopté » ( in concreto) 16. Mais aucun individu<br />

homosexuel candidat à l’adoption n’offrait les garanties d’équilibre et de stabilité exigées<br />

pour cet agrém<strong>en</strong>t …<br />

Depuis, la Cour europé<strong>en</strong>ne <strong>des</strong> droits de l’homme, dans un arrêt E.B. c/ France, 22<br />

janv. 2008, a jugé que la motivation opérée par les autorités françaises pour rejeter une<br />

demande d’agrém<strong>en</strong>t <strong>en</strong> vue d’adopter viole l’article 14 et 8 de la CEDH <strong>en</strong> raison de la<br />

distinction dictée par <strong>des</strong> considérations t<strong>en</strong>ant à l’ori<strong>en</strong>tation sexuelle de la requérante.<br />

La Halde s’est aussi montrée critique <strong>en</strong>vers le refus d'agrém<strong>en</strong>t <strong>en</strong> vue d'adoption opposé<br />

à une femme homosexuelle 17. En droit interne, le premier tribunal administratif à s’aligner<br />

sur la jurisprud<strong>en</strong>ce europé<strong>en</strong>ne est celui de Besançon, qui le 10 novembre 2009 a annulé<br />

un refus d’agrém<strong>en</strong>t à l’adoption opposé à un couple homosexuel 18 .<br />

En droit français, l’accès à la par<strong>en</strong>talité par les couples homosexuels et<br />

l’établissem<strong>en</strong>t d’un li<strong>en</strong> filiation de ces couples avec leurs <strong>en</strong>fants est de nos jours<br />

impossible.<br />

14<br />

CA Lyon, ch. 4, 20 nov. 2003, n°03LY00818.<br />

15<br />

CA Nancy, 21 déc. 2000, Juris-data n°2000-145803, extrait de CE, sous-sections 1 et 2 réunies, 5 juin 2002,<br />

n°230533.<br />

16<br />

CE, sous-sections 1 et 2 réunies, 5 juin 2002, n°230533.<br />

17<br />

n° 2009-350 du 05/10/2009<br />

18<br />

Juris-data n°2009-013799.<br />

Page 32


En effet, l’interdiction du mariage aux personnes de même sexe a par ricochet l’effet<br />

de r<strong>en</strong>dre l’impossible un projet d’adoption <strong>en</strong>semble puisque que seuls les époux peuv<strong>en</strong>t<br />

demander une adoption plénière (art. 346 du Code civil). Le droit français refuse aussi aux<br />

couples de même sexe le bénéfice d’une procréation médicalem<strong>en</strong>t assistée, restreinte<br />

pour l’instant aux couples ayant <strong>en</strong>tre eux une différ<strong>en</strong>ce de sexe (art. L. 2141 -2 et L.<br />

2141-10 du Code de la santé publique). Enfin, le droit interdit la gestation par autrui et<br />

par là, la dernière possibilité de réaliser un projet par<strong>en</strong>tal <strong>en</strong> couple. Pour contourner<br />

cette interdiction, certains personnes/couples se r<strong>en</strong>d<strong>en</strong>t dans les pays étrangers où la<br />

gestation pour autrui est autorisée. Néanmoins ces couples homopar<strong>en</strong>taux pourront<br />

r<strong>en</strong>contrer <strong>des</strong> difficultés pour obt<strong>en</strong>ir la transcription sur les registres français de l'état<br />

civil <strong>des</strong> actes de naissance rédigés à l'étranger et donc pour faire reconnaître la filiation<br />

<strong>des</strong> <strong>en</strong>fants nés de la gestation pour autrui 19.<br />

Par ailleurs, il est impossible d’établir un li<strong>en</strong> de filiation <strong>en</strong>tre l’<strong>en</strong>fant du part<strong>en</strong>aire et<br />

son compagnon pacsé ou concubin. L’option de l’adoption simple de l’<strong>en</strong>fant par le<br />

membre du couple qui n’est pas juridiquem<strong>en</strong>t son par<strong>en</strong>t est fermée depuis que la Cour<br />

de cassation a cassé un arrêt de cour d’appel pour <strong>«</strong> prononcer l'adoption simple, par<br />

Mme X..., du fils de Mme Y..., né le 13 juillet 2004, <strong>en</strong> estimant que l'adoption était<br />

conforme à l'intérêt de l'<strong>en</strong>fant », <strong>«</strong> alors que cette adoption réalisait un transfert <strong>des</strong> droits<br />

d'autorité par<strong>en</strong>tale sur l'<strong>en</strong>fant <strong>en</strong> privant la mère biologique, qui <strong>en</strong>t<strong>en</strong>dait continuer à<br />

élever l'<strong>en</strong>fant, de ses propres droits » 20. Pour contourner la perte de l’autorité par<strong>en</strong>tale<br />

par le par<strong>en</strong>t biologique, certains ont <strong>en</strong>visagé un montage selon lequel l’adoption simple<br />

serait couplé avec une demande par l’adoptant d’une délégation partagée de l’autorité<br />

par<strong>en</strong>tale <strong>en</strong> faveur du par<strong>en</strong>t biologique, qui a, par l’effet de la loi, perdu ce droit. Mais<br />

cette solution a été écartée par la jurisprud<strong>en</strong>ce 21. Par ailleurs, le Conseil constitutionnel a<br />

confirmé la constitutionnalité de l’interprétation faite par la Cour de cassation, de l’article<br />

365 du Code civil 22. Ceci n’a pas empêché toutefois, la Cour de cassation de casser un<br />

arrêt qui avait refusé l’exéquatur d’une décision étrangère admettant le <strong>«</strong> partage d'autorité<br />

par<strong>en</strong>tale <strong>en</strong>tre la mère et l'adoptante d'un <strong>en</strong>fant », et ce parce qu’une telle solution ne<br />

heurte pas les principes ess<strong>en</strong>tiels du droit français 23.<br />

Face au défaut de reconnaissance du statut de <strong>«</strong> par<strong>en</strong>t » de celui qui a participé à un<br />

projet par<strong>en</strong>tale mais qui n’a ni de li<strong>en</strong>s biologiques avec l’<strong>en</strong>fant ni la qualité de par<strong>en</strong>t<br />

adoptant, le par<strong>en</strong>t reconnu d’un <strong>en</strong>fant peut rédiger une tutelle testam<strong>en</strong>taire, dans<br />

laquelle il nomme tuteur son compagnon/one (art. 403 du Code civil et s.). Cette<br />

possibilité est peu satisfaisante dans la mesure où elle ne garantit pas les li<strong>en</strong>s <strong>en</strong>tre<br />

l’<strong>en</strong>fant et le tuteur nommé par son par<strong>en</strong>t naturel, le conseil de famille pouvant s’opposer<br />

à la tutelle testam<strong>en</strong>taire (art. 397 à 401 du Code civil).<br />

19 CA Paris, 26 fév. 2009, Juris-data n°2009-000867.<br />

20 Cass. 1ère civ., 20 fév. 2007, publié, n° 06-15647.<br />

21 Cass. 1ère civ., 20 fév. 2007, publié, n°04-15676.<br />

22 Voir supra partie sur <strong>«</strong> la Constitution ».<br />

23 Cass. 1ère civ., 8 juillet 2010, arrêt publié, n°08-21740.<br />

Page 33


Le par<strong>en</strong>t reconnu d’un <strong>en</strong>fant peut aussi demander une attribution judiciaire de<br />

l’autorité par<strong>en</strong>tale à un tiers (<strong>«</strong> délégation partagée autorité par<strong>en</strong>tale »). Prescrite dans<br />

les articles 377 et suivants du Code civil, cette institution permet de régler la question du<br />

partage de l’autorité au sein d’un couple dont l’un <strong>des</strong> membres n’est pas le par<strong>en</strong>t de<br />

l’<strong>en</strong>fant, mais elle ne constitue pas une solution <strong>en</strong> cas de décès du par<strong>en</strong>t reconnu<br />

juridiquem<strong>en</strong>t ou de séparation du couple.<br />

Par ailleurs, le partage de l’autorité par<strong>en</strong>tale se décide <strong>en</strong> fonction de l’intérêt<br />

supérieur de l’<strong>en</strong>fant – apprécié in concreto par les juridictions du fond - ce qui introduit<br />

une certaine insécurité juridique. Certes, la Cour de cassation a admis que <strong>«</strong> l'article 377,<br />

alinéa 1er, du Code civil ne s'oppose pas à ce qu'une mère seule titulaire de l'autorité<br />

par<strong>en</strong>tale <strong>en</strong> délègue tout ou partie de l'exercice à la femme avec laquelle elle vit <strong>en</strong> union<br />

stable et continue, dès lors que les circonstances l'exig<strong>en</strong>t et que la mesure est conforme à<br />

l'intérêt supérieur de l'<strong>en</strong>fant » 24. Mais, l’arrêt de la première chambre civile de la Cour de<br />

cassation, le 8 juillet 2010 montre les limites de ce système 25. Tout <strong>en</strong> repr<strong>en</strong>ant l’ét<strong>en</strong>du<br />

de principe qui précise les conditions de mise <strong>en</strong> œuvre de la délégation partagée, la Cour<br />

approuve un arrêt de cour d’appel qui a refusé une telle mesure faute pour les requérantes<br />

de rapporter <strong>«</strong> la preuve de circonstances particulières qui imposerai<strong>en</strong>t une délégation<br />

d'autorité par<strong>en</strong>tale dès lors que les déplacem<strong>en</strong>ts professionnels qu'elles invoquai<strong>en</strong>t<br />

n'étai<strong>en</strong>t qu'exceptionnels, que le risque d'accid<strong>en</strong>ts n'était qu'hypothétique et semblable à<br />

celui auquel se trouvait confronté tout par<strong>en</strong>t qui exerçait seul l'autorité par<strong>en</strong>tale », que<br />

<strong>«</strong> les requérantes admettai<strong>en</strong>t elles-mêmes qu'elles ne s'étai<strong>en</strong>t pas heurtées à <strong>des</strong><br />

difficultés particulières pour pouvoir jouer auprès <strong>des</strong> tiers ou de leur <strong>en</strong>tourage familial le<br />

rôle de par<strong>en</strong>ts qu'elles <strong>en</strong>t<strong>en</strong>dai<strong>en</strong>t se reconnaître mutuellem<strong>en</strong>t », <strong>en</strong>fin, qu’elles <strong>«</strong> ne<br />

démontrai<strong>en</strong>t pas <strong>en</strong> quoi l'intérêt supérieur <strong>des</strong> <strong>en</strong>fants exigeait que l'exercice de l'autorité<br />

par<strong>en</strong>tale soit partagé <strong>en</strong>tre elles et permettrait aux <strong>en</strong>fants d'avoir de meilleures<br />

conditions de vie ou une meilleure protection quand les attestations établissai<strong>en</strong>t que les<br />

<strong>en</strong>fants étai<strong>en</strong>t épanouis ». Dans cet arrêt, la Cour de cassation se limite à contrôler<br />

l’exist<strong>en</strong>ce d’une solution motivée (<strong>«</strong> a pu ») et non pas le cont<strong>en</strong>u de la motivation, mais<br />

la frontière est t<strong>en</strong>ue … !<br />

4. Emploi et conditions de travail<br />

Bi<strong>en</strong> que l’ori<strong>en</strong>tation sexuelle relève du domaine privé, la divulgation de cette<br />

information dans la sphère professionnelle conduit parfois à <strong>des</strong> <strong>discriminations</strong> ou à <strong>des</strong><br />

harcèlem<strong>en</strong>ts moraux à caractère discriminatoire.<br />

Lorsque la victime de ces comportem<strong>en</strong>ts discriminatoires souhaite suivre la voie<br />

cont<strong>en</strong>tieuse, elle peut choisir de porter l’affaire devant le juge pénal ou devant le tribunal<br />

civil ou administratif, <strong>en</strong> fonction de si la discrimination a eu lieu dans un contexte<br />

professionnel régit par le droit privé ou par le droit public.<br />

24 Cass. 1ère civ., 24 février 2006, n°04-17090.<br />

25 Légifrance, arrêt publié, n°09-12623.<br />

Page 34


Au s<strong>en</strong>s pénal et devant les juridictions répressives, est discrimination dans les<br />

rapports de travail :<br />

-le refus d’embauche <strong>en</strong> raison d’un critère prohibé (art. 225-2, 3°)<br />

-la sanction ou le lic<strong>en</strong>ciem<strong>en</strong>t <strong>en</strong> raison d’un critère prohibé (art. 225-2, 3°)<br />

-la subordination d’une offre d’emploi, d’une demande de stage ou une période de<br />

formation <strong>en</strong> <strong>en</strong>treprise à un critère prohibé (art. 225-2, 5°)<br />

- le refus d'accepter une personne à l'un <strong>des</strong> stages visés par le 2° de l'article L. 412-8<br />

du code de la sécurité sociale (art. 225-2, 6°)<br />

Le recours peut être int<strong>en</strong>té par la victime d’un comportem<strong>en</strong>t discriminatoire aussi<br />

bi<strong>en</strong> à l’égard <strong>des</strong> employeurs de droit privé et <strong>des</strong> salariés qui travaill<strong>en</strong>t dans les<br />

conditions de droit privé, qu’à l’égard <strong>des</strong> employeurs de droit public et <strong>des</strong><br />

fonctionnaires. Les personnes morales peuv<strong>en</strong>t aussi être t<strong>en</strong>ues pénalem<strong>en</strong>t responsables<br />

d’un comportem<strong>en</strong>t discriminatoire (art. 225-4 du Code pénal).<br />

La preuve de la discrimination incombe à la partie poursuivante, procureur et/ou<br />

victime, qui doit montrer à la fois que la mesure qu’elle dénonce repose sur <strong>des</strong> motifs<br />

discriminatoires et que l’auteur de la mesure avait l’int<strong>en</strong>tion de discriminer. Cette preuve<br />

peut être rapportée par le testing, ce qui avait été admis par la jurisprud<strong>en</strong>ce, le 11 juin<br />

2002 (n°01-85559) et que le législateur a <strong>en</strong>suite confirmé (art. 225 -3-1 du Code pénal).<br />

Les conditions pour garantir la valeur probante <strong>des</strong> tests de discrimination sont précisées<br />

dans la circulaire du ministère de la justice du 26 juin 2006 26 Les juridictions répressives<br />

rest<strong>en</strong>t néanmoins souveraines pour l’apprécier.<br />

L’auteur de la discrimination peut être sanctionné à trois ans d'emprisonnem<strong>en</strong>t et de<br />

45 000 euros d'am<strong>en</strong>de. Les personnes morales subiss<strong>en</strong>t d’autres sanctions (art. 225-4 du<br />

Code pénal). Lorsque la discrimination définie à l'article 225-1 est commise à l'égard d'une<br />

personne physique ou morale par une personne dépositaire de l'autorité publique ou<br />

chargée d'une mission de service public, dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de ses<br />

fonctions ou de sa mission, la peine <strong>en</strong>courue est alourdie (art. 432-7 du Code pénal).<br />

Les situations susceptibles d’<strong>en</strong>traîner la qualification de discrimination sont plus<br />

variées au s<strong>en</strong>s civil qu’au s<strong>en</strong>s pénal : ceci s’explique d’une part, parce que le<br />

comportem<strong>en</strong>t discriminatoire ne doit pas nécessairem<strong>en</strong>t être int<strong>en</strong>tionnel et parce que le<br />

législateur sanctionne davantage de comportem<strong>en</strong>ts discriminatoires dans l’article 1132-1<br />

du Code du travail que dans l’article 225-2 du Code pénal.<br />

Au s<strong>en</strong>s du droit du travail et devant les juridictions prud’homales, est<br />

discrimination le comportem<strong>en</strong>t qui :<br />

26 http://www.halde.fr/IMG/pdf/1665-2.pdf<br />

Page 35


- écarte une personne d’une procédure de recrutem<strong>en</strong>t ou de l'accès à un stage ou à<br />

une période de formation <strong>en</strong> <strong>en</strong>treprise <strong>en</strong> raison d’un critère prohibé<br />

- sanctionne, lic<strong>en</strong>cie un salarié <strong>en</strong> raison d’un critère prohibé<br />

- fait l'objet d'une mesure discriminatoire, directe ou indirecte, telle que définie à<br />

l'article 1er de la loi n° 2008-496 du 27 mai 2008 portant diverses dispositions<br />

d'adaptation au droit communautaire dans le domaine de la lutte contre les<br />

<strong>discriminations</strong>, notamm<strong>en</strong>t <strong>en</strong> matière de rémunération, au s<strong>en</strong>s de l'article L. 3221-3, de<br />

mesures d'intéressem<strong>en</strong>t ou de distribution d'actions, de formation, de reclassem<strong>en</strong>t,<br />

d'affectation, de qualification, de classification, de promotion professionnelle, de mutation<br />

ou de r<strong>en</strong>ouvellem<strong>en</strong>t de contrat » <strong>en</strong> raison <strong>des</strong> critères prohibés.<br />

- l’harcèlem<strong>en</strong>t moral ou sexuel <strong>en</strong> raison <strong>des</strong> critères prohibés et l’injonction à<br />

discriminer (art. 1 de la loi n° 2008-496 du 27 mai 2008 portant diverses dispositions<br />

d'adaptation au droit communautaire dans le domaine de la lutte contre les<br />

<strong>discriminations</strong>).<br />

A intérêt à agir la victime d’un comportem<strong>en</strong>t discriminatoire aussi bi<strong>en</strong> à l’égard <strong>des</strong><br />

employeurs de droit privé et <strong>des</strong> salariés qui travaill<strong>en</strong>t dans les conditions de droit privé,<br />

qu’à l’égard du personnel <strong>des</strong> personnes publiques employé dans les conditions du droit<br />

privé.<br />

La victime du comportem<strong>en</strong>t discriminatoire bénéficie d’un aménagem<strong>en</strong>t de la charge<br />

de la preuve : le demandeur doit uniquem<strong>en</strong>t prés<strong>en</strong>ter <strong>«</strong> <strong>des</strong> élém<strong>en</strong>ts de fait laissant<br />

supposer l'exist<strong>en</strong>ce d'une discrimination directe ou indirecte » (art. 1134 -1 du Code du<br />

travail). La partie déf<strong>en</strong>deresse – l’employeur ou les autres salariés – est de son côté t<strong>en</strong>ue<br />

<strong>«</strong> de prouver que sa décision est justifiée par <strong>des</strong> élém<strong>en</strong>ts objectifs étrangers à toute<br />

discrimination ». La chambre sociale confirme que ce dispositif <strong>«</strong> ne viole pas le principe<br />

de l’égalité <strong>des</strong> armes » (Cass. soc., 28 janv. 2010, n°08 -41.959) et est donc conforme au<br />

droit au procès équitable. Tous les moy<strong>en</strong>s de preuve – loyales - sont recevables. Le<br />

législateur t<strong>en</strong>te de protéger d’év<strong>en</strong>tuelles représailles le salarié témoin d’un acte de<br />

discrimination au sein de son <strong>en</strong>treprise (article L. 1132-3 du Code du travail).<br />

La sanction est l’annulation de toute disposition ou acte discriminatoire (art. L1132 -<br />

4 et art. L. 1134-4 du Code du travail). La victime peut aussi demander réparation du<br />

préjudice subi. La loi prévoit que <strong>«</strong> les dommages et intérêts répar<strong>en</strong>t l'<strong>en</strong>tier préjudice<br />

résultant de la discrimination, p<strong>en</strong>dant toute sa durée (art. L. 1134 -5, al. 3 du Code du<br />

travail). Lorsqu’il s’agit d’une discrimination à l’embauche, l’annulation de la décision<br />

n’aboutit pas toutefois à l’embauche de la personne discriminée. Le contraire constituerait<br />

une atteinte à la liberté de conclure un contrat. Dans ce cas là, la victime de la<br />

discrimination doit se cont<strong>en</strong>ter de la réparation du préjudice subi.<br />

L’action <strong>en</strong> réparation du préjudice résultant d’une discrimination se prescrit par cinq<br />

ans à compter de la révélation de la discrimination (art. 1134 -5 du Code du travail). Le<br />

texte précise, de plus, que <strong>«</strong> ce délai n'est pas susceptible d'aménagem<strong>en</strong>t conv<strong>en</strong>tionnel »<br />

Page 36


et que <strong>«</strong> les dommages et intérêts répar<strong>en</strong>t l'<strong>en</strong>tier préjudice résultant de la discrimination,<br />

p<strong>en</strong>dant toute sa durée ».<br />

Le cadre légal de la discrimination dans la fonction publique garde <strong>des</strong> similitu<strong>des</strong><br />

avec celui prévu dans les rapports professionnels de droit privé. L’interdiction de<br />

discriminer est prescrite dans l’article 6, de la loi dite loi Le Pors, n°83-634 du 13 juillet<br />

1983 portant droits et obligations <strong>des</strong> fonctionnaires. L’article 2 et 6 de la loi précis<strong>en</strong>t à<br />

qui s’applique l’interdiction de discriminer : il s’agit notamm<strong>en</strong>t de fonctionnaires et<br />

d’ag<strong>en</strong>ts non titulaires de droit public employés dans <strong>des</strong> conditions du droit public.<br />

L’article 6, al. 5 de la loi dite loi Le Pors énumère les situations dans lesquels un<br />

traitem<strong>en</strong>t différ<strong>en</strong>cié est discriminatoire. La question se pose de savoir si cette<br />

énumération de situations discriminatoires est ou n’est pas une liste fermée, l’utilisation de<br />

l’adverbe <strong>«</strong> notamm<strong>en</strong>t » invite à croire qu’il s’agit d’une énumération non exhaustive.<br />

Les auteurs de ces actions sont passibles d'une sanction disciplinaire (art. 6 de la loi<br />

dite loi Le Pors). L’action <strong>en</strong> réparation du préjudice résultant d’une discrimination se<br />

prescrit par cinq ans à compter de la révélation de la discrimination (art. 7 bis, Loi dite loi<br />

Le Pors, n°83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations <strong>des</strong> fonctionnaires). Ce<br />

délai, précise le texte, <strong>«</strong> n'est pas susceptible d'aménagem<strong>en</strong>t conv<strong>en</strong>tionnel » et <strong>«</strong> les<br />

dommages et intérêts répar<strong>en</strong>t l'<strong>en</strong>tier préjudice résultant de la discrimination, p<strong>en</strong>dant<br />

toute sa durée » (art. 7 bis, Loi dite loi Le Pors, n°83-634 du 13 juillet 1983 portant droits<br />

et obligations <strong>des</strong> fonctionnaires).<br />

5. Demandeurs d’asile, droit de séjour et ori<strong>en</strong>tation sexuelle<br />

Les problématiques qui se pos<strong>en</strong>t autour de l’asile politique, de l’immigration et de<br />

l’ori<strong>en</strong>tation sexuelle sont de deux ordres : d’un côté, l’ori<strong>en</strong>tation sexuelle du demandeur<br />

d’asile peut-elle justifier l’octroi du statut de réfugié ? De l’autre côté, <strong>en</strong> cas de séjour<br />

irrégulier d’un personne sur le territoire français, dans quelle mesure son ori<strong>en</strong>tation<br />

sexuelle peut-elle jouer un rôle sur la légalité de l’arrêté de reconduite à la frontière et/ou<br />

sur la décision du pays de r<strong>en</strong>voi ?<br />

En ce qui concerne la demande d’asile politique :<br />

L’article 1er A 2 de la conv<strong>en</strong>tion de G<strong>en</strong>ève du 28 juillet 1951, dans sa rédaction<br />

résultant du protocole de New York du 31 janvier 1967 reconnaît la qualité de réfugié à<br />

toute personne qui, <strong>«</strong> craignant avec raison d’être persécutée du fait de sa race, de sa<br />

religion, de sa nationalité ou de son appart<strong>en</strong>ance à un certain groupe social ou de ses<br />

opinions, se trouve hors du pays dont elle a la nationalité et qui ne peut ou, du fait de<br />

cette crainte, ne veut se réclamer de la protection de ce pays ».<br />

Page 37


A défaut d’inscription de l’homosexualité dans les <strong>«</strong> groupes » pouvant bénéficier de<br />

cette protection, obt<strong>en</strong>ir le statut de réfugié <strong>en</strong> raison de son ori<strong>en</strong>tation sexuelle nécessite<br />

de prouver que dans le pays duquel le demandeur a la nationalité, la situation <strong>des</strong> homotranssexuels<br />

permet de les regarder comme un groupe dont les membres serai<strong>en</strong>t<br />

susceptibles de persécution. Le Conseil d’Etat reproche à ce titre à la Commission de<br />

Recours <strong>des</strong> Réfugiés (CRR) de déduire qu’un demandeur <strong>«</strong> pouvait être regardée comme<br />

appart<strong>en</strong>ant à un groupe social au s<strong>en</strong>s <strong>des</strong> stipulations de la conv<strong>en</strong>tion de G<strong>en</strong>ève, sans<br />

rechercher si les élém<strong>en</strong>ts dont elle disposait sur la situation <strong>des</strong> homosexuels <strong>en</strong> Ukraine<br />

permettai<strong>en</strong>t de regarder ces derniers comme constituant un groupe dont les membres<br />

serai<strong>en</strong>t, <strong>en</strong> raison <strong>des</strong> caractéristiques communes qui les définiss<strong>en</strong>t aux yeux <strong>des</strong><br />

autorités et de la société ukraini<strong>en</strong>ne, susceptibles d’être exposés à <strong>des</strong> persécutions » 27. Le<br />

même raisonnem<strong>en</strong>t conduit au Conseil d’Etat à approuver une décision ayant rejeté une<br />

demande de reconnaissance du statut de réfugié cette fois-ci <strong>en</strong> raison du transsexualisme<br />

du demandeur 28.<br />

En ce qui concerne le cas de séjour irrégulier :<br />

- pour que l’arrêté de reconduite à la frontière soit légal, il ne doit pas porter une<br />

atteinte disproportionnée au droit au respect de la vie privée et familiale protégée<br />

de la personne reconduite, par les stipulations de l’article 8 de la CEDH.<br />

- la décision du pays de <strong>des</strong>tination à la suite d’un arrêté de reconduite à la<br />

frontière ne doit pas méconnaître l’article L. 513-2 du Code d’<strong>en</strong>trée et du séjour<br />

<strong>des</strong> étrangers et du droit d’asile, <strong>en</strong> exposant par ce r<strong>en</strong>voi la personne à <strong>des</strong><br />

risques de torture, à <strong>des</strong> peines ou traitem<strong>en</strong>ts inhumains ou dégradants ( art. L.<br />

513-2, al. 2 du Code de l'<strong>en</strong>trée et du séjour <strong>des</strong> étrangers et du droit d'asile).<br />

Pour contester la légalité d’une décision fixant le pays de <strong>des</strong>tination, il ne suffit pas de<br />

faire état <strong>des</strong> risques <strong>en</strong>courus <strong>en</strong> cas de retour à un pays précis <strong>en</strong> raison de l’ori<strong>en</strong>tation<br />

sexuelle de la personne concernée, <strong>en</strong> mettant <strong>en</strong> avant par exemple les dispositions du<br />

code pénal et l’hostilité de la société de ce pays à l’égard <strong>des</strong> personnes homosexuelles. Il<br />

faut établir la réalité <strong>des</strong> risques auxquels cette personne serait personnellem<strong>en</strong>t exposée<br />

<strong>en</strong> cas de retour dans son pays d’origine 29. Ainsi, <strong>«</strong> que la circonstance que<br />

l’homosexualité serait passible de sanctions pénales au Cameroun ne peut, alors que le<br />

requérant ne démontre pas qu’il aurait personnellem<strong>en</strong>t été exposé à <strong>des</strong> m<strong>en</strong>aces avant<br />

son <strong>en</strong>trée <strong>en</strong> France et <strong>en</strong> l’abs<strong>en</strong>ce de pièces suffisamm<strong>en</strong>t probantes versées au dossier<br />

démontrant qu’il serait <strong>en</strong> raison de sa seule ori<strong>en</strong>tation sexuelle, personnellem<strong>en</strong>t exposé<br />

à <strong>des</strong> peines ou traitem<strong>en</strong>ts inhumains et dégradants, suffire à établir que sa reconduite<br />

dans son pays méconnaîtrait les stipulations de l’article 3 de la CEDH » 30. Il ne fournit<br />

27<br />

CE, sous-sections 10 et 9 réunies, 23 août 2006, n°272679<br />

28<br />

CE, 23 juin 1997, n°171858.<br />

29<br />

CA Bordeaux, 22 déc. 2006, n°06BX02157, CA Douai, ch. 3, 13 juin 2007, n°07DA00446 ; CA Nantes, 3 octobre<br />

2008, n°07NT02536, CA Bordeaux, 17 nov. 2009, n°09BX01542.<br />

30<br />

CA Paris, 28 mai 2008, n°07PA02282.<br />

Page 38


non plus <strong>«</strong> aucune précision ni justification probante à l’appuie de ses allégations » le<br />

requérant qui, pour contester la légalité de la décision fixant le pays de <strong>des</strong>tination, <strong>«</strong> fait<br />

valoir qu’il courrait <strong>des</strong> risques dans son pays d’origine, le Pérou, <strong>en</strong> raison de son<br />

appart<strong>en</strong>ance à la communauté homosexuelle et transsexuelle » 31. En revanche, <strong>«</strong> le préfet<br />

de police n’est pas fondé à sout<strong>en</strong>ir que c’est à tort que, par le jugem<strong>en</strong>t attaqué, le<br />

magistrat […] a annulé son arrêté […] <strong>en</strong> tant qu’il fixe l’Algérie comme pays à<br />

<strong>des</strong>tination » alors qu’il ressort <strong>des</strong> pièces du dossier du requérant, qu’il est <strong>«</strong> <strong>en</strong> tant que<br />

transsexuel exposé à <strong>des</strong> persécutions <strong>en</strong> cas de retour <strong>en</strong> Algérie et qu’il est notamm<strong>en</strong>t<br />

m<strong>en</strong>acé par <strong>des</strong> groupes islamistes » 32.<br />

B. Discriminations, agressions et id<strong>en</strong>tité de g<strong>en</strong>re<br />

Le transsexualisme/transg<strong>en</strong>re n’est plus considéré comme étant une maladie m<strong>en</strong>tale<br />

<strong>en</strong> France. En effet, le ministère de la Santé a publié le 8 février 2010 au Journal officiel<br />

un décret qui retire <strong>«</strong> les troubles précoces de l'id<strong>en</strong>tité de g<strong>en</strong>re » de la liste <strong>des</strong> affections<br />

psychiatriques (décret n° 2010 -125 du 8 février 2010 portant modification de l'annexe<br />

figurant à l'article D. 322-1 du code de la sécurité sociale relative aux critères médicaux<br />

utilisés pour la définition de l'affection de longue durée <strong>«</strong> affections psychiatriques de<br />

longue durée »).<br />

1. Changem<strong>en</strong>t d’état civil<br />

Les conditions requises pour réaliser un changem<strong>en</strong>t de la m<strong>en</strong>tion <strong>«</strong> sexe » dans l’état<br />

civil ne sont pas précisées dans <strong>des</strong> textes. Ce vide a été comblé par les arrêts de<br />

l’assemblée plénière de la Cour de cassation qui précis<strong>en</strong>t <strong>«</strong> que lorsque, à la suite d'un<br />

traitem<strong>en</strong>t médico-chirurgical, subi dans un but thérapeutique, une personne prés<strong>en</strong>tant le<br />

syndrome du transsexualisme ne possède plus tous les caractères de son sexe d'origine et a<br />

pris une appar<strong>en</strong>ce physique la rapprochant de l'autre sexe, auquel correspond son<br />

comportem<strong>en</strong>t social, le principe du respect dû à la vie privée justifie que son Etat civil<br />

indique désormais le sexe dont elle a l'appar<strong>en</strong>ce ; que le principe de l'indisponibilité de<br />

l'état <strong>des</strong> personnes ne fait pas obstacle à une telle modification 33.<br />

La solution r<strong>en</strong>due par l’Assemblée plénière laisse une marge considérable<br />

d’appréciation au juges du fond et a généré <strong>des</strong> positions diverg<strong>en</strong>tes. Une question<br />

parlem<strong>en</strong>taire au Garde <strong>des</strong> sceaux le souligne et force à ce dernier à se prononcer sur ce<br />

sujet 34.<br />

31 CA Marseille, 12 janvier 2006, n°05MA01648.<br />

32 CE 9 juin 2006, n°275887.<br />

33 AP, 11 déc. 1992, publié, n°91-11900 ; n°91-12373.<br />

34 Question n° 65910, publiée au JO le: 08/12/2009 page: 11633.<br />

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A cette occasion, le Garde <strong>des</strong> sceaux se montre favorable à une procédure judiciaire<br />

du changem<strong>en</strong>t d’état civil et confirme qu’au vu de la jurisprud<strong>en</strong>ce de l’Assemblée<br />

plénière, <strong>«</strong> il apparti<strong>en</strong>t aux tribunaux d'apprécier au cas par cas les deman<strong>des</strong> de<br />

changem<strong>en</strong>t de sexe, au regard du caractère irréversible de celui-ci ». Sur la condition<br />

d’irréversibilité, le Garde <strong>des</strong> sceaux souti<strong>en</strong>t qu’elle ne se traduit pas systématiquem<strong>en</strong>t<br />

par l’exig<strong>en</strong>ce d’une <strong>«</strong> opération de réassignation sexuelle » tant que le demandeur apporte<br />

<strong>«</strong> la preuve qu'il a suivi <strong>des</strong> traitem<strong>en</strong>ts médicochirurgicaux (hormonothérapie, chirurgie<br />

plastique...) ayant pour effet de r<strong>en</strong>dre irréversible le changem<strong>en</strong>t de sexe et de lui<br />

conférer une appar<strong>en</strong>ce physique et un comportem<strong>en</strong>t social correspondant au sexe qu'il<br />

rev<strong>en</strong>dique ». Enfin, <strong>en</strong> ce qui concerne l’expertise judiciaire ordonnée pour établir la<br />

réalité du syndrome transsexuel, le Garde <strong>des</strong> sceaux annonce que <strong>«</strong> <strong>des</strong> instructions<br />

devrai<strong>en</strong>t prochainem<strong>en</strong>t être adressées aux parquets afin de les inviter à limiter ces<br />

investigations aux seuls cas de doute sérieux sur la réalité du transsexualisme du<br />

demandeur, notamm<strong>en</strong>t <strong>en</strong> l'abs<strong>en</strong>ce d'attestations émanant de plusieurs médecins,<br />

reconnus pour leur compét<strong>en</strong>ce <strong>en</strong> la matière ou qui ont suivi la personne concernée » 35.<br />

La circulaire de la DACS n° CIV/07/10 du 14 mai 2010 relative aux deman<strong>des</strong> de<br />

changem<strong>en</strong>t de sexe à l’état civil apporte davantage <strong>des</strong> précisions sur les points soulevés<br />

par le Garde <strong>des</strong> sceaux 36. Ce texte revi<strong>en</strong>t sur l’interprétation de <strong>«</strong> la notion de traitem<strong>en</strong>t<br />

médico-chirurgical » visée par les arrêts de l’Assemblée plénière <strong>«</strong> comme exigeant<br />

l'ablation <strong>des</strong> organes génitaux d'origine et leur remplacem<strong>en</strong>t par <strong>des</strong> organes génitaux<br />

artificiels du sexe rev<strong>en</strong>diqué (opération de réassignation sexuelle) » et semble approuver<br />

l’évolution consistant à faire droit à <strong>des</strong> deman<strong>des</strong> de changem<strong>en</strong>t de sexe prés<strong>en</strong>tées par<br />

<strong>des</strong> personnes n'ayant pas subi l'opération de réassignation sexuelle (notamm<strong>en</strong>t <strong>en</strong> cas de<br />

risques médicaux d’une telle opération) au vu <strong>des</strong> pièces fournies démontrant<br />

l'irréversibilité du processus, du fait d’une hormonothérapie et d’opérations de chirurgie<br />

plastique (prothèses mammaires, chirurgie esthétique du visage...). La circulaire rappelle<br />

que <strong>«</strong> la jurisprud<strong>en</strong>ce de la Cour de cassation remonte à 18 ans et qu’il est légitime de<br />

pr<strong>en</strong>dre <strong>en</strong> considération l'évolution de la médecine et <strong>des</strong> traitem<strong>en</strong>ts hormonaux suivis<br />

par les personnes transsexuelles, de telle sorte que le caractère irréversible du processus de<br />

changem<strong>en</strong>t de sexe pourrait résulter de traitem<strong>en</strong>ts médico-chirurgicaux sans exiger pour<br />

autant l’ablation <strong>des</strong> organes génitaux ».<br />

S’agissant <strong>des</strong> expertises médicales, la circulaire constante <strong>«</strong> que la jurisprud<strong>en</strong>ce est<br />

fluctuante d’une juridiction à une autre s’agissant de l’exig<strong>en</strong>ce de recours à une expertise<br />

pour justifier de la réalité du transsexualisme, notamm<strong>en</strong>t <strong>en</strong> cas d’opérations chirurgicales<br />

réalisées à l’étranger » et prévi<strong>en</strong>t que <strong>«</strong> cette diversité <strong>des</strong> pratiques peut être source<br />

d’incompréh<strong>en</strong>sion et perçue comme discriminatoire, puisque, selon le lieu où est déposée<br />

la requête, l’expertise sera ordonnée ou non ». Ce texte exhorte les juges à ne pas<br />

<strong>«</strong> solliciter d’expertises que si les élém<strong>en</strong>ts fournis révèl<strong>en</strong>t un doute sérieux sur la réalité<br />

du transsexualisme du demandeur ». Dans tous les autres cas, l’avis <strong>des</strong> juges doit être<br />

fondé <strong>«</strong> sur les diverses pièces, notamm<strong>en</strong>t les attestations et comptes r<strong>en</strong>dus médicaux<br />

35 Réponse publiée au JO le: 02/03/2010 page: 2452.<br />

36 NOR : JUSC1012994C.<br />

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fournis par le demandeur à l’appui de sa requête, qui <strong>en</strong>gag<strong>en</strong>t la responsabilité <strong>des</strong><br />

pratici<strong>en</strong>s les ayant établis ».<br />

2. Changem<strong>en</strong>t d’état civil et conséqu<strong>en</strong>ces dans la vie familiale<br />

2.1. Possiblité de conclure un mariage postérieurem<strong>en</strong>t au changem<strong>en</strong>t d’état civil<br />

La personne ayant bénéficié d’un changem<strong>en</strong>t de la m<strong>en</strong>tion sexe dans l’état civil peut<br />

se marier avec une personne de sexe différ<strong>en</strong>t. Cette possibilité permet de vérifier<br />

l’effectivité <strong>des</strong> droits conférés par le changem<strong>en</strong>t de la m<strong>en</strong>tion sexe dans l’état civil.<br />

La seule jurisprud<strong>en</strong>ce ne s’est pas directem<strong>en</strong>t prononcée sur cette question. A tout<br />

un autre propos, il a été décidé que n’est pas <strong>en</strong> mesure d’empêcher un mariage <strong>en</strong>tre<br />

deux personnes de sexe différ<strong>en</strong>t, dont un transsexuel, l’action <strong>en</strong> tierce opposition du<br />

père de la fiancée au jugem<strong>en</strong>t de changem<strong>en</strong>t d’état civil de son futur g<strong>en</strong>re (F to H). En<br />

effet, une telle voie extraordinaire de recours <strong>«</strong> ne susp<strong>en</strong>d pas l’exécution de ce jugem<strong>en</strong>t<br />

et n’est donc pas <strong>en</strong> nature d’empêcher le mariage » 37.<br />

2.2. Sort du mariage souscrit avant le changem<strong>en</strong>t d’état civil<br />

Poussant au bout l’interdiction de marier <strong>des</strong> personnes de même sexe, on pourrait se<br />

demander si le mariage d’un transsexuel ayant obt<strong>en</strong>u postérieurem<strong>en</strong>t à son mariage un<br />

changem<strong>en</strong>t d’état civil est nul ou caduc … ?<br />

La question n’a pas été posée toutefois dans ces termes dans les tribunaux. Ceux-ci<br />

ont été <strong>en</strong> revanche saisis de la question de savoir si le transsexualisme d’une personne<br />

mariée constitue une violation grave <strong>des</strong> devoirs et obligations du mariage r<strong>en</strong>dant<br />

intolérable le mainti<strong>en</strong> de la vie commune et justifiant un divorce à ses torts (art. 242 du<br />

Code civil).<br />

La Cour de cassation ne s’est pas prononcée sur le caractère fautif du transsexualisme.<br />

Les juridictions du fond pr<strong>en</strong>n<strong>en</strong>t sur ce point, de positions diverg<strong>en</strong>tes.<br />

Exceptionnellem<strong>en</strong>t, il a été jugé que la <strong>«</strong> mutilation » du mari, par la privation <strong>des</strong><br />

attributs de sexe masculin, <strong>«</strong> doit être reconnue comme une faute ». En effet, <strong>«</strong> ceci<br />

constitue avec son comportem<strong>en</strong>t féminin et son habillem<strong>en</strong>t <strong>en</strong> femme, sa façon aussi de<br />

se faire appeler depuis plusieurs années […] une insulte à sa femme […], et objectivem<strong>en</strong>t<br />

une violation grave <strong>des</strong> obligations et devoirs du mariage r<strong>en</strong>dus impossibles du fait de<br />

son appar<strong>en</strong>ce et de son état physique ». L’acquisition du sexe féminin par le mari <strong>«</strong> oblige<br />

au prononcé du divorce puisque le mariage, et cette règle est d’ordre public, ne peut être<br />

contracté <strong>en</strong>tre personnes du même sexe ». Le divorce doit être prononcé à ses torts<br />

37 TGI Paris, 13 déc. 1983, Juris-data n°1983-000451.<br />

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exclusifs, <strong>«</strong> quand bi<strong>en</strong> même sa volonté n’y serait pour ri<strong>en</strong> » 38. Cette solution paraît peu<br />

adaptée et pose le problème de la difficulté de caractériser la faute, à défaut de pouvoir<br />

considérer qu’elle est imputable (int<strong>en</strong>tionnelle).<br />

La majorité <strong>des</strong> arrêts toutefois considèr<strong>en</strong>t que ce changem<strong>en</strong>t n’est pas constitutif<br />

d’une faute. Lorsqu’ils <strong>en</strong> une, ils le font <strong>en</strong> s’appuyant non pas sur le transsexualisme<br />

d’un <strong>des</strong> membres du couple mais sur son abs<strong>en</strong>ce de loyauté à l’égard de son part<strong>en</strong>aire<br />

et de savoir faire dans la vie sociale. Ainsi, est, selon une juridiction du fond, une violation<br />

grave et r<strong>en</strong>ouvelée <strong>des</strong> obligations du mariage, l’abs<strong>en</strong>ce de prise <strong>en</strong> compte par le<br />

conjoint transsexuel <strong>des</strong> implications conjugales créées par son nouveau statut, de même<br />

que son éloignem<strong>en</strong>t volontaire p<strong>en</strong>dant plusieurs années 39. La révélation brutale et sans<br />

tact du transsexualisme d’un <strong>des</strong> membres du couple peut constituer aussi une faute, c’est<br />

le cas par exemple lorsque l’épouse a pris connaissance de la nouvelle à la réception d’un<br />

faire-part annonçant de la part de l’intéressé sa naissance civile de femme. Bi<strong>en</strong> que <strong>«</strong> les<br />

difficultés liées au transsexualisme sont incontestables, elles ne saurai<strong>en</strong>t toutefois<br />

autoriser celui ou celle qui les subit à s’<strong>en</strong>fermer dans un comportem<strong>en</strong>t égoc<strong>en</strong>trique,<br />

sans plus t<strong>en</strong>ir aucun compte de sa vie de famille et sans se préoccuper de la place du<br />

conjoint dans sa nouvelle exist<strong>en</strong>ce » 40<br />

3. Discriminations et id<strong>en</strong>tité de g<strong>en</strong>re<br />

P<strong>en</strong>dant la phase de changem<strong>en</strong>t d’état civil, il existe un décalage <strong>en</strong>tre l’appar<strong>en</strong>ce<br />

physique <strong>des</strong> personnes trans et l’id<strong>en</strong>tité inscrite sur les docum<strong>en</strong>ts d’id<strong>en</strong>tité ou pièces<br />

officielles. De ce fait, ces personnes sont souv<strong>en</strong>t victimes <strong>des</strong> <strong>discriminations</strong> ou cible<br />

d’infractions contre leur personne ou leurs bi<strong>en</strong>s.<br />

Pour éviter <strong>des</strong> comportem<strong>en</strong>ts discriminatoires, la victime peut se prévaloir du<br />

recours pénal sanctionnant le traitem<strong>en</strong>t inégalitaire dans le domaine de l’emploi mais<br />

aussi tout refus de fourniture de bi<strong>en</strong>s et services (art. 225 -1 et s. du Code pénal). Elle<br />

peut aussi, dans le domaine de l’emploi, s’emparer du recours civil (art. 1132 -1 du Code<br />

du travail) et du recours administratif, dont les conditions de mise <strong>en</strong> œuvre sont<br />

développées dans la rubrique “ori<strong>en</strong>tation sexuelle”.<br />

Faute d’avoir prévu dans ces textes le critère d’<strong>«</strong> id<strong>en</strong>tité de g<strong>en</strong>re », les<br />

comportem<strong>en</strong>ts discriminatoires transphobes se rattach<strong>en</strong>t au critère <strong>«</strong> sexe ». C’est l’avis<br />

du Garde de sceaux. La Halde se prononce aussi dans ce s<strong>en</strong>s dans deux délibérations<br />

r<strong>en</strong>dues le 18 février 2008, n°2008-28 et 2008-29. Cette institution recommande au<br />

Gouvernem<strong>en</strong>t, par ailleurs, dans la délibération n°2008-190 du 15 septembre 2008, <strong>«</strong> de<br />

mettre <strong>en</strong> place un dispositif réglem<strong>en</strong>taire ou législatif permettant de t<strong>en</strong>ir compte,<br />

durant la phase de conversion sexuelle, de l’adéquation <strong>en</strong>tre l’appar<strong>en</strong>ce physique de la<br />

personne transsexuelle et l’id<strong>en</strong>tité inscrite sur les pièces d’id<strong>en</strong>tité, les docum<strong>en</strong>ts<br />

38 CA Nimes, ch. civ. 2, section C, 7 juin 2000, Juris-data n°2000-123736.<br />

39 TGI Ca<strong>en</strong>, 28 mai 2001, Juris-data n°2001-162327.<br />

40 TGI Ca<strong>en</strong>, 28 mai 2001, Juris-data n°2001-162327.<br />

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administratifs ou toutes pièces officielles, afin d’assurer notamm<strong>en</strong>t le droit au respect de<br />

la vie privée dans leurs relations avec les services de l’Etat et égalem<strong>en</strong>t le principe de<br />

non-discrimination dans leurs relations de travail, <strong>en</strong> vue d’une harmonisation <strong>des</strong><br />

pratiques au sein <strong>des</strong> juridictions ».<br />

Après le changem<strong>en</strong>t d’état civil, d’autres questions se pos<strong>en</strong>t : elles sont notamm<strong>en</strong>t<br />

liées au fait que le changem<strong>en</strong>t d’état civil n’est pas rétroactif et qu’une telle décision n’a<br />

donc d’effet que pour l’av<strong>en</strong>ir 41. Les conséqu<strong>en</strong>ces pratiques de ce parti pris sont<br />

importantes : par exemple, la personne ayant changé d’état civil peut difficilem<strong>en</strong>t se<br />

prévaloir <strong>des</strong> diplômes qu’elle a obt<strong>en</strong>us avant le jugem<strong>en</strong>t.<br />

4. Crimes et délits transphobes<br />

Le principe de légalité <strong>des</strong> délits et <strong>des</strong> peines dispose qu'on ne peut être condamné<br />

pénalem<strong>en</strong>t qu'<strong>en</strong> vertu d'un texte pénal précis et clair. A défaut d’une quelconque<br />

référ<strong>en</strong>ce de la loi à l’aggravation d’infractions commises <strong>en</strong> raison de l’id<strong>en</strong>tité du g<strong>en</strong>re<br />

de la victime, la question se pose de savoir si le mobile transphobe d’un acte criminel ou<br />

délictuel est une circonstance aggravante et le cas échéant, sur quel fondem<strong>en</strong>t.<br />

L’étude de la jurisprud<strong>en</strong>ce montre que les infractions commises <strong>en</strong> raison de l’id<strong>en</strong>tité<br />

de g<strong>en</strong>re de la victime sont aggravées par un rattachem<strong>en</strong>t de celles-ci au fondem<strong>en</strong>t de<br />

l’ori<strong>en</strong>tation sexuelle. Par exemple, la cour d’appel de Douai décide que l’inculpé <strong>«</strong> ne<br />

saurait sout<strong>en</strong>ir qu’il n’a pas commis ces viol<strong>en</strong>ces <strong>en</strong> raison de l’ori<strong>en</strong>tation sexuelle de la<br />

victime, puisqu’il admet devant la Cour avoir <strong>en</strong> même temps qu’il frappait (même <strong>en</strong> ne<br />

ret<strong>en</strong>ant au minimum qu’une <strong>«</strong> tape sur la tête ») proféré <strong>des</strong> insultes <strong>en</strong> direction de<br />

Casimir O [la victime], tels que transcrites dans la procédure, les termes employés tels que<br />

<strong>«</strong> pédé, travelo », <strong>«</strong> <strong>des</strong> g<strong>en</strong>s comme vous on les tue on les tape » ou <strong>«</strong> sale pute » ne<br />

laissant aucun doute sur le fait qu’il a commis les viol<strong>en</strong>ces volontaires <strong>en</strong> raison<br />

précisém<strong>en</strong>t de l’ori<strong>en</strong>tation sexuelle de la victime » 42<br />

Le garde de sceaux a récemm<strong>en</strong>t confirmé la validité de ce fondem<strong>en</strong>t pour aggraver<br />

les actes délictuels ou criminels commis <strong>en</strong> raison de l’id<strong>en</strong>tité du g<strong>en</strong>re de la victime. A<br />

l’occasion d’une question parlem<strong>en</strong>taire réclamant l’admission d’un nouveau critère<br />

prohibé, celui de l’<strong>«</strong> id<strong>en</strong>tité de g<strong>en</strong>re » pour lutter contre les comportem<strong>en</strong>ts<br />

discriminatoires, le ministre d'État, garde <strong>des</strong> sceaux, ministre de la justice et <strong>des</strong> libertés,<br />

précise <strong>«</strong> que les dispositions actuelles du code pénal et du code de procédure pénale <strong>en</strong><br />

matière de lutte contre les <strong>discriminations</strong> sexuelles s'appliqu<strong>en</strong>t aux personnes<br />

transsexuelles ou transg<strong>en</strong>res ». Ces dispositions auxquelles il fait référ<strong>en</strong>ce sont aussi bi<strong>en</strong><br />

les dispositifs visant l’interdiction de comportem<strong>en</strong>ts discriminatoires que ceux<br />

concernant la circonstance aggravante. Ainsi, ajoute-t-il que ces législations <strong>«</strong> concern<strong>en</strong>t<br />

41 CA Paris, ch. 1, sect. C, 2 juillet 1998, Juris-data n°1998-022409.<br />

42 CA Douai, ch. correct. 4, 3 déc. 2009, RG 09-00247, Juris-data 2009-019853.<br />

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<strong>en</strong> effet les <strong>discriminations</strong> commises <strong>en</strong> raison du sexe de la victime ou de son<br />

ori<strong>en</strong>tation sexuelle. Il n'est dès lors juridiquem<strong>en</strong>t pas nécessaire de modifier la législation<br />

existante pour réprimer les <strong>discriminations</strong> dont ces derniers peuv<strong>en</strong>t être les victimes,<br />

pour sanctionner de peines aggravées les agressions ou viol<strong>en</strong>ces dont ils peuv<strong>en</strong>t faire<br />

l'objet, ou pour permettre aux associations de lutte contre les <strong>discriminations</strong> de se<br />

constituer partie civile dans les procédures les concernant » 43.<br />

Or, si une telle solution prés<strong>en</strong>te l’avantage de pouvoir fonder l’aggravation <strong>des</strong><br />

infractions transphobes, le risque de ne pas reconnaître un critère propre à l’id<strong>en</strong>tité du<br />

g<strong>en</strong>re et de continuer à rattacher les mobiles transphobes au critère de l’ori<strong>en</strong>tation<br />

sexuelle n’est pas négligeable. En effet, ce parti pris se mépr<strong>en</strong>d sur ce qu’’est l’aversion à<br />

l’égard de l’id<strong>en</strong>tité du g<strong>en</strong>re et ses particularités et contribue implicitem<strong>en</strong>t à alim<strong>en</strong>ter<br />

l’idée que la transphobie est, <strong>en</strong> réalité, une manifestions particulière de l’homophobie.<br />

5. Demandeurs d’asile, droit de séjour et id<strong>en</strong>tité de g<strong>en</strong>re<br />

Les solutions ret<strong>en</strong>ues pour les personnes LGB demandeurs d’asile ou séjournant<br />

dans le territoire français sont transposables aux personnes transsexuelles ou transg<strong>en</strong>re.<br />

Des décisions ont été r<strong>en</strong>dues <strong>en</strong> ce s<strong>en</strong>s. Selon le Conseil d’Etat, la reconduite à la<br />

frontière est légale lorsqu’<strong>«</strong> il ne ressort pas <strong>des</strong> pièces du dossier que l’intéressé »,<br />

transsexuel et ayant pris une appar<strong>en</strong>ce féminine, <strong>«</strong> ait, à la date de la décision contestée,<br />

fait l’objet d’un traitem<strong>en</strong>t médical qui lui aurait imposé de rester <strong>en</strong> France ; qu’à cette<br />

date, d’ailleurs, il ne faisait état d’aucune interv<strong>en</strong>tion chirurgicale programmée » 44 A<br />

contrario, il n’est pas impossible que le traitem<strong>en</strong>t médical imposant de rester <strong>en</strong> France<br />

constitue un fait susceptible d’emporter la conviction <strong>des</strong> juges du fond sur la<br />

proportionnalité de l’arrêté de reconduite à la frontière par rapport à l’article 8 de la<br />

CEDH.<br />

S’agissant de la décision fixant le pays de <strong>des</strong>tination, <strong>«</strong> le préfet de police n’est pas<br />

fondé à sout<strong>en</strong>ir que c’est à tort que, par le jugem<strong>en</strong>t attaqué, le magistrat […] a annulé<br />

son arrêté […] <strong>en</strong> tant qu’il fixe l’Algérie comme pays à <strong>des</strong>tination » alors qu’il ressort <strong>des</strong><br />

pièces du dossier du requérant, qu’il est <strong>«</strong> <strong>en</strong> tant que transsexuel exposé à <strong>des</strong><br />

persécutions <strong>en</strong> cas de retour <strong>en</strong> Algérie et qu’il est notamm<strong>en</strong>t m<strong>en</strong>acé par <strong>des</strong> groupes<br />

islamistes » 45<br />

Conclusions<br />

Force est de constater que sont <strong>en</strong>core trop peu nombreux les avocats qui sont<br />

compét<strong>en</strong>ts <strong>en</strong> matière du droit de la discrimination et qui s’<strong>en</strong> préoccup<strong>en</strong>t même. Au<br />

43 Question écrite n° : 66424, publiée au JO le : 15/12/2009 page : 11923 - Réponse publiée au JO le<br />

: 16/02/2010 page : 1772.<br />

44 CE 10 juillet 2006, n°264960.<br />

45 CE 9 juin 2006, n°275887.<br />

Page 44


cours <strong>des</strong> étu<strong>des</strong> universitaires ou dans le cadre de la formation <strong>des</strong> avocats devrait figurer<br />

parmi les matières <strong>en</strong>seignées ce droit afin que soi<strong>en</strong>t plus nombreux les pratici<strong>en</strong>s <strong>en</strong><br />

cette matière.<br />

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Shabname M E R A L L I - B A L L O U M O N N O T<br />

Avocate – Médiatrice<br />

Certificat de Compét<strong>en</strong>ce du CNAM<br />

Spécialiste Pratiques de Médiation<br />

Master Europé<strong>en</strong> de Médiation à Paris, le 11 Février 2011<br />

Diplôme d’Etat de Médiation Familiale<br />

LA MEDIATION DE LA HALDE DANS LES SCONTEXTES DE<br />

DISCIRMINATION<br />

Cet article est représ<strong>en</strong>tatif <strong>des</strong> différ<strong>en</strong>tes expéri<strong>en</strong>ces que j’ai croisées au carrefour <strong>des</strong><br />

<strong>discriminations</strong>. Il ne se veut pas comme un exemple de techniques toutes faites mais comme<br />

un partage d’expéri<strong>en</strong>ces avec <strong>des</strong> personnes que j’ai accompagnées tant dans le secteur<br />

public que privé.<br />

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Méthode et pratique à travers une situation réelle de médiation<br />

Problématique de la mise <strong>en</strong> place de la médiation dans le contexte<br />

du handicap<br />

Acceptation de la mission à réception de la saisine de la HALDE<br />

Suite à cette délibération, j’ai reçu une mission de médiation de la HALDE. J’informe la HALDE<br />

que j’accepte cette mission de médiation, n’ayant aucun empêchem<strong>en</strong>t ni conflit d’intérêts. Je<br />

m’<strong>en</strong>gage à conduire cette médiation dans le délai de trois mois, r<strong>en</strong>ouvelable une fois à ma<br />

demande.<br />

Etude du dossier par rapport à l’articulation <strong>des</strong> questions du handicap au<br />

regard de la loi portant sur les <strong>discriminations</strong><br />

Il y a toute une préparation par l’étude <strong>des</strong> textes et de la jurisprud<strong>en</strong>ce et <strong>des</strong> chartes de bonne<br />

pratique de délibérations de la HALDE <strong>en</strong> matière d’aménagem<strong>en</strong>ts de poste et de bi<strong>en</strong> clarifier à la<br />

définition de la discrimination directe, indirecte et de harcèlem<strong>en</strong>t de façon à avoir une grille<br />

d’analyse pertin<strong>en</strong>te pour faire émerger le questionnem<strong>en</strong>t ouvert et approprié.<br />

Prise de contact avec l’<strong>en</strong>semble <strong>des</strong> parties :<br />

Dans un premier temps, je pr<strong>en</strong>ds un contact téléphonique avec les deux parties je me prés<strong>en</strong>te <strong>en</strong><br />

ma qualité de médiatrice de la HALDE.<br />

- Je précise d’emblée aux personnes que ma mission se déroule dans un cadre confid<strong>en</strong>tiel et<br />

sous le secret professionnel de façon que nos échanges puiss<strong>en</strong>t être loyaux et sincères.<br />

- Je demande à Madame ou Monsieur pour savoir quelle est sa situation actuelle et si elle est<br />

<strong>en</strong> mesure de participer à la médiation.<br />

- Je pr<strong>en</strong>ds contact égalem<strong>en</strong>t avec le responsable légal de l'Entreprise ou avec le représ<strong>en</strong>tant<br />

du service public habilité, qui compr<strong>en</strong>d parfaitem<strong>en</strong>t le s<strong>en</strong>s et la portée de ma mission.<br />

- J'organise les r<strong>en</strong>dez vous .<br />

- Il est important dans les contextes du handicap que la médiation se déroule dans un premier<br />

temps dans un espace neutre, à proximité du lieu de travail pour bi<strong>en</strong> compr<strong>en</strong>dre toutes les<br />

difficultés pratiques quotidi<strong>en</strong>nes r<strong>en</strong>contrées par la personne, et pour expliquer <strong>en</strong>suite<br />

comm<strong>en</strong>t l’abs<strong>en</strong>ce év<strong>en</strong>tuelle d’aménagem<strong>en</strong>t puisse être constitutive de discrimination.<br />

- Au cours de mon <strong>en</strong>treti<strong>en</strong>, je prés<strong>en</strong>te le déroulem<strong>en</strong>t pratique de la médiation.<br />

Et dans un deuxième temps, pour la bonne t<strong>en</strong>ue de la mise <strong>en</strong> place de la médiation, je confirme les<br />

r<strong>en</strong>dez-vous avec les parties par courrier.<br />

La problématique de la r<strong>en</strong>contre <strong>des</strong> personnes dans la médiation<br />

dans les situations de discrimination<br />

La raison <strong>des</strong> <strong>en</strong>treti<strong>en</strong>s individuels et <strong>en</strong> séance plénière de médiation: une<br />

écoute impartiale vis à vis <strong>des</strong> deux parties:<br />

Tout peut être dit au médiateur mais chaque partie doit apprécier ce qu’elle <strong>en</strong>t<strong>en</strong>d dire à l’autre<br />

avec qui il faut construire une nouvelle relation.<br />

Le médiateur a pour mission de permettre à la personne <strong>en</strong> situation de discrimination de se s<strong>en</strong>tir<br />

accueillie, écoutée et respectée.<br />

Le médiateur a pour mission de permettre au mis <strong>en</strong> cause de se s<strong>en</strong>tir respecté et non suspecté, <strong>«</strong><br />

Mis <strong>en</strong> accusation » dans le cadre de la médiation.<br />

47


Le mis <strong>en</strong> cause est <strong>en</strong> principe disposé à changer son regard et à restaurer la situation afin de<br />

faire cesser la discrimination s’il dispose lui aussi d’un temps d’<strong>en</strong>treti<strong>en</strong> individuel et confid<strong>en</strong>tiel.<br />

C’est la raison pour laquelle <strong>des</strong> <strong>en</strong>treti<strong>en</strong>s séparés avec chacune <strong>des</strong> parties dans un premier temps<br />

sont mis <strong>en</strong> place dans le cadre <strong>des</strong> premières dilig<strong>en</strong>ces du médiateur :<br />

- pour créer un climat de mise <strong>en</strong> confiance mutuelle <strong>des</strong> personnes vis-à-vis du médiateur<br />

impartial,<br />

- et pour faire émerger la problématique spécifique à résoudre <strong>en</strong> séance plénière.<br />

La séance plénière permettra d’aborder la problématique de la discrimination et de trouver grâce à<br />

la créativité <strong>des</strong> personnes les solutions adaptées et les aménagem<strong>en</strong>ts raisonnables.<br />

Le déroulem<strong>en</strong>t <strong>des</strong> <strong>en</strong>treti<strong>en</strong>s individuels<br />

La séance individuelle de médiation avec le ou la réclamante.<br />

L’expéri<strong>en</strong>ce ici vi<strong>en</strong>t nous montrer que ce que les personnes dis<strong>en</strong>t ne concerne pas spécifiquem<strong>en</strong>t<br />

la situation de discrimination. Or ces aspects sont souv<strong>en</strong>t ceux de la vie privée de la personne.<br />

Cette expression du ress<strong>en</strong>ti doit être évacuée avant de pouvoir construire les conditions d’un<br />

dialogue. Les débordem<strong>en</strong>ts pot<strong>en</strong>tiels ne doiv<strong>en</strong>t pas se déployer <strong>en</strong>tre non intimes et doiv<strong>en</strong>t être<br />

cont<strong>en</strong>us pour protéger le réclamant et épargner le mis <strong>en</strong> cause.<br />

La mise <strong>en</strong> place <strong>des</strong> <strong>en</strong>treti<strong>en</strong>s individuels séparés avec chacune <strong>des</strong> personnes <strong>en</strong> prés<strong>en</strong>ce a pour<br />

objet de permettre une expression libre <strong>des</strong> émotions, <strong>des</strong> ress<strong>en</strong>tis, <strong>des</strong> besoins, att<strong>en</strong>tes <strong>des</strong> valeurs<br />

et <strong>des</strong> droits.<br />

Le médiateur a pour mission d’avoir une écoute att<strong>en</strong>tive et active pour arriver à restaurer une<br />

confiance dans les possibilités du dialogue et à structurer les conditions d’un échange interactif<br />

<strong>en</strong>tre les personnes. En construisant avec chacune <strong>des</strong> parties <strong>«</strong>les problématiques spécifiques liées<br />

à la discrimination», de façon à ce que les personnes puiss<strong>en</strong>t arriver à les aborder <strong>en</strong> séance<br />

plénière.<br />

Le respect de la dignité humaine sous-t<strong>en</strong>d le principe de non discrimination. Or, quand les<br />

personnes se retrouv<strong>en</strong>t victimes de discrimination, elles se s<strong>en</strong>t<strong>en</strong>t bafouées dans leur dignité, et<br />

pour plusieurs, seule une sanction même symbolique pourrait restaurer l’atteinte qui leur a été faite.<br />

Par ailleurs, ceux qui sont accusés sont indignés et ont le réflexe de la négation et du déni.<br />

Bi<strong>en</strong> souv<strong>en</strong>t la discrimination porte <strong>des</strong> <strong>en</strong>jeux exist<strong>en</strong>tiels et organisationnels lourds.<br />

Pour que la médiation se construise comme une approche recevable de la résolution du conflit <strong>en</strong><br />

matière de violation <strong>des</strong> droits fondam<strong>en</strong>taux, la restauration de la dignité doit être l’un <strong>des</strong> objectifs<br />

de la médiation. Elle doit se réaliser tout autant dans les modalités du processus de médiation que<br />

dans l’id<strong>en</strong>tification d’un résultat qui satisfasse l’exig<strong>en</strong>ce de respect <strong>des</strong> droits <strong>des</strong> deux parties.<br />

L’espace de médiation constitue un espace de restauration du respect de la dignité <strong>des</strong> personnes.<br />

Grâce à l’écoute active, la reformulation, l’empathie bi<strong>en</strong>veillante, le médiateur va contribuer à la<br />

restauration progressive de la dignité de la victime libérée grâce à une parole libre porteuse de s<strong>en</strong>s<br />

et de valeurs humaines universelles<br />

La séance individuelle de médiation avec le représ<strong>en</strong>tant légal et habilité de<br />

l'Entreprise ou le représ<strong>en</strong>tant habilité de l'organisme<br />

. Je pose le cadre de la médiation <strong>en</strong> leur donnant le s<strong>en</strong>s et la portée de ma mission. J’explique que<br />

le processus de médiation est un processus de déculpabilisation et qu’il a une dynamique à visée<br />

pédagogique.<br />

Je constate que la situation n’est pas liée à une incompréh<strong>en</strong>sion de l’institution mais à <strong>des</strong><br />

mal<strong>en</strong>t<strong>en</strong>dus respectifs non clarifiés . Grâce à ce dialogue singulier avec le mis <strong>en</strong> cause, celui ci<br />

id<strong>en</strong>tifie que les mo<strong>des</strong> de communication ont produit <strong>des</strong> exclusions qui requièr<strong>en</strong>t aujourd’hui <strong>des</strong><br />

réponses et <strong>des</strong> rectifications. Le mis <strong>en</strong> cause manifeste un s<strong>en</strong>tim<strong>en</strong>t de désolation et marque sa<br />

volonté d’y remédier.<br />

Je finis cet <strong>en</strong>treti<strong>en</strong> de fin de matinée, <strong>en</strong> laissant la question ouverte :<br />

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Est-il possible d’<strong>en</strong>t<strong>en</strong>dre le ress<strong>en</strong>ti de discrimination ?<br />

Est-il possible de trouver une issue satisfaisante équitable et juste afin de restaurer la personne<br />

discriminée.<br />

L’<strong>en</strong>treti<strong>en</strong> avec le mis <strong>en</strong> cause se termine avec une volonté d’œuvrer pour <strong>des</strong> solutions<br />

appropriées.<br />

3.- La réunion de la séance plénière de la médiation<br />

Pour comm<strong>en</strong>cer la séance plénière, j’installe les personnes l’une <strong>en</strong> face de l’autre. Je pose, à<br />

nouveau, le cadre de la médiation.<br />

J’indique que je n’ai pas de pouvoir décisionnel ; Les parties vont échanger leurs points de vue sur<br />

la situation de discrimination pour mettre <strong>en</strong> place, <strong>en</strong> temps réel, <strong>des</strong> réponses mutuellem<strong>en</strong>t<br />

acceptées et de nouvelles normes de non-discrimination.<br />

J’ajoute que mon interv<strong>en</strong>tion a un caractère impartial.<br />

J’indique que je veillerai à une égale empathie vis-à-vis <strong>des</strong> deux parties, tout au long de la<br />

médiation, quelque soit son issue.<br />

J’indique que je pr<strong>en</strong>drai le temps de l’écoute, que je prêterai à chacun la même att<strong>en</strong>tion, que je<br />

veillerai à l’équilibre <strong>des</strong> échanges.<br />

Je précise que je favoriserai l’émerg<strong>en</strong>ce <strong>des</strong> difficultés r<strong>en</strong>contrées, <strong>des</strong> prises de consci<strong>en</strong>ce, utiles<br />

à un dialogue réel.<br />

Au cours de cette séance le réclamant aborde tout de suite ses att<strong>en</strong>tes: excuses, aménagem<strong>en</strong>ts du<br />

poste de travail, formation, reconstitution de carrière...<br />

Un dialogue interactif s’est instauré <strong>en</strong>tre les deux parties sur les différ<strong>en</strong>tes possibilités. Si la<br />

question se pose sur les aménagem<strong>en</strong>ts raisonnables, je peux être am<strong>en</strong>ée à solliciter l'interv<strong>en</strong>tion<br />

d'un tiers qualifié pour la question <strong>des</strong> financem<strong>en</strong>ts par les organismes, l'autorisation de la de la<br />

Médecine du travail peut être nécessaire.<br />

La séance plénière de médiation a permis d’<strong>en</strong>t<strong>en</strong>dre les ress<strong>en</strong>tis, de lever l’<strong>en</strong>semble <strong>des</strong><br />

mal<strong>en</strong>t<strong>en</strong>dus, de clarifier les deman<strong>des</strong>, leur faisabilité concrètes <strong>en</strong> fonction <strong>des</strong> contraintes<br />

légitimes et objectives de l’<strong>en</strong>treprise.<br />

La séance plénière de médiation est un espace de co construction de résolutions librem<strong>en</strong>t<br />

négociées, vecteurs d’efficacité juridique économique et sociale.<br />

- Un espace de progression évolutive du ress<strong>en</strong>ti de discrimination déposé à l’intégration de<br />

la norme de non discrimination,<br />

- La séance plénière symbolise l’espace de libération d’un fardeau de discrimination, qui<br />

permet de trouver l’expression de la reconnaissance mutuelle apaisem<strong>en</strong>t et une certaine joie<br />

face à la transformation positive de la relation de travail.<br />

- La médiation constitue un espace significatif <strong>en</strong> termes d’efficacité économique, elle ouvre<br />

de nouvelles perspectives de travail avec les aménagem<strong>en</strong>ts de poste pour les personnes <strong>en</strong><br />

situation de handicap, l’interv<strong>en</strong>tion <strong>des</strong> bureaux d’étu<strong>des</strong>, les plans de formation, ou la<br />

mise <strong>en</strong> place de bilan de compét<strong>en</strong>ce, ou de nouveaux ajustem<strong>en</strong>ts de coeffici<strong>en</strong>ts et de<br />

points.<br />

- La médiation est espace significatif d’activation de régulation et du dialogue social,<br />

notamm<strong>en</strong>t <strong>en</strong> prés<strong>en</strong>ce de discrimination syndicale dans le secteur privé ou le secteur<br />

public.<br />

- La médiation est espace interactif de mise <strong>en</strong> place de la norme de non discrimination<br />

intégrée <strong>en</strong> temps réel.<br />

4. Phase de finalisation<br />

Il arrive que le réclamant et le mis <strong>en</strong> cause soi<strong>en</strong>t accompagnés de leurs avocats qui vont pr<strong>en</strong>dre<br />

l’initiative de rédiger le protocole d’accord de la médiation.<br />

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Conclusion<br />

La médiation de la Halde est un espace pédagogique <strong>«</strong> du vivre & construire <strong>en</strong>semble » que<br />

favorise la posture impartiale, loyale et confid<strong>en</strong>tielle du médiateur et l’application transpar<strong>en</strong>te et<br />

vigilante de ses règles éthiques et déontologiques<br />

La médiation a ainsi ouvert un espace de parole et d’écoute qui s’est révélé juste pour les deux<br />

parties.<br />

Dans ce cas spécifique, la médiation a joué son rôle, voulu par le législateur.<br />

La médiation a <strong>des</strong> limites qui sont celles de la liberté, c’est-à-dire qu’à tout mom<strong>en</strong>t, il peut y être<br />

mis fin à la demande d’une partie ou même du médiateur. Dans ce cas la HALDE repr<strong>en</strong>d son<br />

dossier, étant <strong>en</strong>t<strong>en</strong>du qu’<strong>en</strong> aucun cas, le médiateur ne peut donner les raisons de cet rupture..<br />

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