repères - Le Matin
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Opinions & débat<br />
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La résistance autrement<br />
Grève de la faim : la lutte palestinienne<br />
LE MATIN<br />
Lundi 11 juin 2012<br />
non violente prend une nouvelle dimension<br />
Par Dawoud<br />
Abu <strong>Le</strong>bdeh<br />
Palestinien vivant à Jérusalem,<br />
est gestionnaire de projets au<br />
Centre pour la démocratie et la<br />
non-violence. Il est également un<br />
des fondateurs du mouvement<br />
étudiant Watan et écrit sur le blog<br />
de Middle East Post.<br />
En entamant une grève de la<br />
faim en décembre dernier, le<br />
prisonnier palestinien Khader<br />
Adnan ouvrait un nouveau chapitre de<br />
l’histoire du mouvement non violent<br />
palestinien, un chapitre qui s’est soldé<br />
par un succès il y a une quinzaine de<br />
jours, Israël ayant accepté de satisfaire<br />
plusieurs des revendications principales<br />
des prisonniers palestiniens.<br />
Khader Adnan a mis fin à sa grève de<br />
la faim, au bout<br />
de 66 jours, en<br />
février dernier,<br />
une fois que les<br />
autorités israéliennes<br />
lui ont<br />
accordé sa libération<br />
pour le mois<br />
d’avril. Suite à<br />
cela, des centaines<br />
d’autres<br />
prisonniers, détenus<br />
dans différentes<br />
prisons<br />
israéliennes, lui<br />
ont emboîté le pas, et ont eux aussi<br />
entamé une grève de la faim. Cet élan<br />
a montré que les actes de non-violence,<br />
sur une grande échelle, peuvent être<br />
plus efficaces que les actes de violence.<br />
Hana Shalabi était la deuxième détenue<br />
palestinienne à entamer une grève<br />
de la faim ; elle a réussi à convaincre<br />
les autorités de la relâcher et de la renvoyer<br />
à Gaza. Puis ce fut le tour de<br />
Bilal Diab et de Taher Halahleh qui<br />
jeûnèrent pendant 76 jours, battant<br />
le record du militant irlandais Bobby<br />
Sands qui mourut dans une prison britannique<br />
après une grève de la faim de<br />
66 jours. En avril dernier, 1 600 prisonniers<br />
palestiniens, à travers Israël, se<br />
sont ralliés à Bilal Diab et Taher Halahleh.<br />
Ils ont jeûné pendant 28 jours<br />
jusqu’au 14 mai, date à laquelle les<br />
autorités israéliennes ont accepté un<br />
compromis face aux revendications de<br />
ces détenus. Ces derniers demandaient<br />
aux autorités de limiter la durée des<br />
confinements solitaires, de leur permettre<br />
d’étudier en prison, d’accorder<br />
des droits de visite aux prisonniers<br />
originaires de Gaza, notamment le<br />
droit d’avoir un<br />
contact physique<br />
avec les<br />
membres de<br />
leur famille. La<br />
grève de la faim<br />
est un moyen<br />
pacifique de<br />
protestation<br />
souvent utilisé<br />
par les prisonniers<br />
politiques<br />
qui veulent revendiquer<br />
les<br />
droits qui leur<br />
sont octroyés par les conventions internationales.<br />
Lorsque la grève de la faim s’est propagée<br />
dans les prisons israéliennes, cela<br />
Lorsque la grève de la<br />
faim s’est propagée dans<br />
les prisons israéliennes,<br />
cela a attiré l’attention des<br />
cercles internationaux, et<br />
surtout des organisations<br />
de défense des droits<br />
de l’Homme, sur la cause<br />
des grévistes.<br />
<strong>Le</strong> mouvement de grève de la faim avait suscité bien des réactions de soutien et de solidarité.<br />
a attiré l’attention des cercles internationaux<br />
– et surtout des organisations<br />
de défense des droits de l’homme –<br />
sur la cause des grévistes. Des sit-in<br />
ont été organisés dans des campus<br />
universitaires partout en Europe en<br />
signe de soutien.<br />
Sur le plan local, les Palestiniens de<br />
Cisjordanie, de la Bande de Gaza et<br />
d’Israël, ont soutenu les grévistes de<br />
la faim, en dressant des tentes dans le<br />
centre des villes et des villages et en<br />
organisant des marches de soutien.<br />
La plupart de ces marches étaient en<br />
direction d’Ofer, une des prisons principales<br />
de Cisjordanie. <strong>Le</strong>s manifestants,<br />
bien que totalement pacifiques,<br />
ont été néanmoins confrontés à des<br />
mesures de dispersion, notamment du<br />
gaz lacrymogène et des tirs de balles en<br />
caoutchouc. La voie de la non-violence<br />
revêt une importance particulière pour<br />
les dirigeants palestiniens et la cause<br />
d’un État palestinien. Pour ces dirigeants,<br />
un retour à la violence compromettrait<br />
tout le travail accompli dans le<br />
cadre de l’Autorité palestinienne pour<br />
renforcer l’économie et mettre en place<br />
une infrastructure politique en vue de<br />
la construction d’un futur État. Un<br />
retour à la violence mettrait aussi en<br />
péril les efforts palestiniens de relations<br />
publiques sur le plan international,<br />
déployés depuis quelques années.<br />
D’autres campagnes non violentes en<br />
Cisjordanie ont également marqué<br />
et apporté leurs fruits. On peut notamment<br />
citer l’action pacifique des<br />
habitants du village de Budrus qui<br />
se sont opposés pendant des années<br />
au projet de construction du mur de<br />
séparation sur les terres de leur village<br />
et qui ont réussi à convaincre les autorités<br />
israéliennes d’en changer le tracée.<br />
Des initiatives semblables se déroulent<br />
ailleurs en Cisjordanie, comme à<br />
Ni’ilin, à Bil’in et à Nabi Saleh.<br />
La grève de la faim qui a réuni des<br />
prisonniers issus de factions politiques<br />
différentes a fait comprendre à la fois<br />
aux Palestiniens et à la communauté<br />
internationale que l’on peut accomplir<br />
beaucoup de choses autour d’une<br />
cause commune, en recourant à la<br />
non-violence. La leçon tirée de ces<br />
grèves est surtout que la lutte pacifique<br />
et non violente, menée à une grande<br />
échelle, est sans doute la forme la plus<br />
efficace des résistances. L’exemple de<br />
ces prisonniers a clairement montré<br />
aux Palestiniens qu’ils devaient se<br />
doter d’un projet collectif et global,<br />
acceptable pour tous, et faire en sorte<br />
que les diverses factions de leur société<br />
travaillent ensemble pour mettre sur<br />
pied un tel projet. Cela a appris aux<br />
Palestiniens qu’ils doivent redescendre<br />
dans la rue pour revendiquer leur droit<br />
à un État, mais qu’ils doivent le faire<br />
à travers une lutte populaire, non<br />
violente. <strong>Le</strong>s Israéliens qui observent<br />
cette évolution doivent comprendre<br />
que celle-ci représente un changement<br />
profond dans la société palestinienne,<br />
un changement vers la non-violence.<br />
Ils devraient voir cela comme une<br />
conjoncture favorable. Mener une<br />
lutte non violente pour l’obtention<br />
d’un État est un pas essentiel vers la<br />
solution à deux États, bénéfique aux<br />
deux peuples. n<br />
Source : Service de Presse de<br />
Common Ground (CGNews).