HistoMag'44 special Front de l'est - 39-45.org
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HISTOMAG’44<br />
mais il reconnaît les pas moins saccadés <strong>de</strong>s hommes<br />
en imperméables et chapeaux, mous, néfastes et<br />
efficaces <strong>de</strong> la Gestapo tant redoutée.<br />
Les hommes font irruption dans la salle à manger et<br />
entourent immédiatement Bruno Larat et ses amis.<br />
Eux aussi sont fouillés, mais heureusement assez<br />
superficiellement.<br />
Les hommes du premier, ainsi que ceux du rez-<strong>de</strong>chaussée<br />
sont menottés par couple. Les femmes sont<br />
momentanément groupées et tenues en respect par<br />
la mitraillette d'un agent <strong>de</strong> la Gestapo.<br />
- « Silence ! » hurlent les Allemands, bien que<br />
personne ne souffle mot. Leurs vois furieuses<br />
résonnent cruellement.<br />
Jean Moulin risque un regard vers l'homme qui<br />
Dugoujon, très pâle et décontenancé.<br />
« Pauvre type » : il n'y a rien à voir dans cette affaire,<br />
et pourtant le voilà dans le bain jusqu'au cou, Dieu<br />
soit loué, il ne peut pas dire grand chose, et il ne<br />
connaît qu’André Lassagne qui est un dur. S'ils ne<br />
per<strong>de</strong>nt pas la tête, ils vont sûrement s'en tirer.<br />
Le visage congestionné, l'agent <strong>de</strong> la Gestapo,<br />
examine les pièces d'i<strong>de</strong>ntité entassées <strong>de</strong>vant lui,<br />
scrutant le visage <strong>de</strong> chaque homme au moment <strong>de</strong><br />
l'interpeller.<br />
Quand vient son tour, Jacques Martel rend regard pour<br />
regard calmement, sans flancher, puis se retourne<br />
face au mur ; d'un léger sourire, il rassure le docteur<br />
Dugoujon qui s'émerveille du sang-froid <strong>de</strong> cet<br />
homme. Il ne perçoit aucun tremblement du poignet<br />
attaché au sien, alors que ses propres mains sont<br />
moites. Il ne parvient pas à se dominer.<br />
Un <strong>de</strong>s membres <strong>de</strong> la Gestapo<br />
<strong>de</strong>scend du premier étage et<br />
vient chuchoter quelques mots<br />
à ses collègues. Les Allemands<br />
hurlent <strong>de</strong>s ordres : les<br />
prisonniers sont emmenés<br />
<strong>de</strong>ux par <strong>de</strong>ux jusqu'à la place<br />
et brutalement poussés dans<br />
<strong>de</strong>s Citroën Traction qui<br />
atten<strong>de</strong>nt. Les vrais patients,<br />
qui habitent tous Caluire, sont<br />
relâchés et renvoyés chez eux<br />
sous la menace d'une<br />
Bruno Larat arrestation s'ils parlent <strong>de</strong> ce<br />
qui vient <strong>de</strong> se passer.<br />
Les Allemands s'occupent ensuite <strong>de</strong>s hommes du<br />
premier étage. Bruno Larat <strong>de</strong>scend d'abord,<br />
partageant les mêmes menottes que le colonel<br />
Lacaze ; Henri Aubry se trouve attaché à André<br />
Lassagne, qui a déjà eu un avant-goût <strong>de</strong>s métho<strong>de</strong>s<br />
<strong>de</strong> la Gestapo et a la figure tuméfiée.<br />
René Hardy <strong>de</strong>scend le <strong>de</strong>rnier. Quand il arrive sur la<br />
place, tous les autres se trouvent assis dans les<br />
tractions dont les moteurs tournent. Il est le seul<br />
homme sans menottes, et, par une chance incroyable,<br />
il a réussi à gar<strong>de</strong>r son revolver. Son poignet droit est<br />
entouré d'un long « cabriolet » que tient dans sa<br />
grosse main un <strong>de</strong>s membres <strong>de</strong> la Gestapo. Le bras<br />
gauche <strong>de</strong> René Hardy pend librement à son côté. Les<br />
Allemands ont sous-estimé le nombre <strong>de</strong> leurs<br />
victimes et manquent <strong>de</strong> menottes.<br />
Au moment d'atteindre la <strong>de</strong>rnière voiture, René<br />
Hardy, d'un coup brusque, se libère <strong>de</strong> l'emprise <strong>de</strong><br />
son geôlier et se met à courir. Des balles sifflent<br />
autour <strong>de</strong> lui, mais il se rue sur<br />
la place, malgré les troupes, et<br />
riposte avec son revolver. Il<br />
s'enfuit vers les platanes et la<br />
route ondoyante. Il réussit sa<br />
tentative d'évasion et<br />
disparaît.<br />
Les prisonniers assis dans les<br />
voitures, restent stupéfaits.<br />
Comment est-il possible<br />
qu'aucune balle n'ait atteint le<br />
fugitif ? Quelle chance<br />
Henri Aubry merveilleuse !<br />
Dans la première voiture, Jean<br />
Moulin croît reconnaître vaguement la silhouette du<br />
jeune homme blond qui brise héroïquement le cordon<br />
allemand. Ne l'a-t-il pas vu lors <strong>de</strong> la réunion à Lyon,<br />
peu <strong>de</strong> temps avant <strong>de</strong> partir pour l'Angleterre avec le<br />
général Delestraint ? Mais que fait-il à Caluire ?<br />
La voiture prend la direction <strong>de</strong> Lyon. Jean Moulin<br />
cherche à se rappeler le nom <strong>de</strong> l'homme qui vient <strong>de</strong><br />
s'éva<strong>de</strong>r. N'est-ce pas Didot ? La voiture roule vers le<br />
Fort <strong>de</strong> Montluc où le calvaire <strong>de</strong> Jean Moulin va<br />
commencer.<br />
André Lassagne<br />
n'était pas « Max »<br />
comme le crut un moment<br />
la Gestapo<br />
Le Sicherheitsdienst Hauptsturmführer<br />
Barbie n'en croit<br />
pas ses yeux : L'impossible<br />
s’est réalisé et il a enfin entre<br />
les mains les vrais chefs <strong>de</strong> la<br />
Résistance française et l'un<br />
d'eux est « Max ». Mais<br />
lequel ? Il examine<br />
attentivement les photographies<br />
<strong>de</strong>s prisonniers qui<br />
sont développées <strong>de</strong> toute<br />
urgence et se dit que,<br />
vraisemblablement, le Professeur<br />
Lassagne est le<br />
« Max » recherché.<br />
Ainsi, pendant <strong>de</strong>ux jours,<br />
Lassagne est-il l'objet <strong>de</strong><br />
toutes les attentions <strong>de</strong> Barbie : il en souffre<br />
corporellement et moralement sans broncher. À vrai<br />
dire il ne sait pas qui est Max.<br />
Cependant, les autres restent emprisonnés à Montluc,<br />
sans être torturés, et ne subissent que <strong>de</strong>s<br />
interrogatoires <strong>de</strong> forme.<br />
Jean Moulin commence à reprendre espoir. Il croise le<br />
docteur Dugoujon dans la cour <strong>de</strong> la prison, pendant<br />
la <strong>de</strong>mi-heure <strong>de</strong> promena<strong>de</strong> à laquelle ont droit tous<br />
les prisonniers et lui chuchote :<br />
- « Bon courage, mon ami. »<br />
C’est typique <strong>de</strong> l'homme.<br />
À Paris, <strong>de</strong>s photographies <strong>de</strong>s hommes arrêtés sont<br />
montrées aux prisonniers ramenés <strong>de</strong> Fresnes au 84,<br />
avenue Foch. Personne ne connaît Max.<br />
Barbie commence à s'énerver <strong>de</strong> plus en plus et à<br />
<strong>de</strong>venir brutal. Il est maintenant sûr que Lassagne<br />
n’est pas celui qu'il recherche mais les autres ne<br />
semblent pas non plus correspondre au signalement<br />
<strong>de</strong> Max.<br />
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MAG<br />
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