Les sirènes de la glace - Je me livre ... Eric Vincent
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<strong>Les</strong> <strong>sirènes</strong> <strong>de</strong> <strong>la</strong> g<strong>la</strong>ce<br />
- Non, pas <strong>de</strong> punition. Mes parents sont tolérants sur ce sujet. Une chance ! Ce<strong>la</strong> <strong>me</strong> fout<br />
assez les boules <strong>de</strong> traîner un trois <strong>de</strong> moyenne en maths.<br />
- Que tu compenses facile<strong>me</strong>nt par tes autres notes !<br />
- Oui, c'est pour ce<strong>la</strong> qu'ils ne s'inquiètent pas trop sur ce p<strong>la</strong>n-là.<br />
- Ils s'inquiètent sur d'autres p<strong>la</strong>ns ? Demanda Valérie avec un air innocent, cherchant à se<br />
faufiler en douceur dans <strong>la</strong> carapace <strong>de</strong> Sébastien.<br />
- Attends ! Il faudrait que tu restes en p<strong>la</strong>ce pour que je note les retouches à faire.<br />
- Ce n'est pas utile. <strong>Je</strong> n'ai peut-être pas achevé ma croissance.<br />
- Ah...<br />
- J'espère prendre encore quelques centimètres en hauteur et si possible, Dieu m'enten<strong>de</strong>, une<br />
taille <strong>de</strong> soutien-gorge en plus. Autant espérer un miracle ! Ou prier Saint Silicone !<br />
- Quoi ? Tu veux du silicone dans les... les...<br />
- Mais non ! <strong>Je</strong> p<strong>la</strong>isante !<br />
- Ah bon... Oh ! J'entends les parents qui rappliquent. Bon ! Rhabille-toi. <strong>Je</strong> vais te <strong>me</strong>ttre <strong>la</strong><br />
robe dans un carton.<br />
- Tu <strong>me</strong> l'offres...<br />
- Mais oui ! Puisque je te le dis !<br />
Valérie se renferma à nouveau dans <strong>la</strong> salle <strong>de</strong> bains. Elle ne détachait plus son regard du<br />
miroir où elle voyait une princesse. Un rêve bleuté et argenté. Sébastien n'avait pas seule<strong>me</strong>nt<br />
l'étoffe d'un dé d'or : c'était aussi son <strong>me</strong>illeur ami parce qu'il avait un coeur d'or. Un coeur<br />
fragile, qu'un coup <strong>de</strong> perfidie et <strong>de</strong> méchanceté saignerait à b<strong>la</strong>nc. Ce coup proviendrait<br />
sûre<strong>me</strong>nt <strong>de</strong> Magali, cette tête <strong>de</strong> linotte capable <strong>de</strong> recouvrir ses ongles d'une fleur <strong>de</strong> lys s'il<br />
le fal<strong>la</strong>it, pour montrer, pour étaler ses riches origines nobles qui lui offraient une vie facile et<br />
dorée. Sébastien n'était jamais tombé amoureux. En tous cas, pas à sa connaissance. Hormis<br />
d'elle, bien sûr, mais là, c'était différent : il s'agissait d'amour fraternel ou maternel. Enfin,<br />
c'était <strong>de</strong> l'amitié avec un senti<strong>me</strong>nt d'accord et <strong>de</strong> convergence, <strong>la</strong> confiance mutuelle. En y<br />
songeant, elle reconnut qu'elle ne partageait pas ses secrets avec sa propre soeur ou avec ses<br />
copines com<strong>me</strong> elle le faisait avec Sébastien. Com<strong>me</strong> c'était curieux... Entre eux, il n'y avait<br />
jamais eu <strong>de</strong> gestes équivoques. Juste <strong>de</strong> franches et amicales embrassa<strong>de</strong>s ; parfois, elle s'était<br />
réfugiée contre son épaule, pleurant <strong>de</strong> tout son saoul lorsque le chagrin l'accab<strong>la</strong>it. Et il <strong>la</strong><br />
conso<strong>la</strong>it du mieux qu'il pouvait, se jugeant pourtant inapte à accomplir une telle tâche, mais<br />
<strong>la</strong> <strong>me</strong>nant à bien avec générosité sans jamais l'abandonner. Il lui prouvait, une fois <strong>de</strong> plus,<br />
son attache<strong>me</strong>nt en lui faisant un présent d'un prix inouï mais qui contenait bien plus <strong>de</strong><br />
symboles pour l'adolescent, que <strong>de</strong> dizaines d’euros et d'heures investis dans le ca<strong>de</strong>au. En<br />
regardant l'étoffe bleue, elle pria le ciel pour ne jamais perdre son ami, pour le préserver <strong>de</strong><br />
tous les malheurs.<br />
*<br />
* *<br />
En pénétrant dans le repaire <strong>de</strong> <strong>la</strong> haute couture amateur, Sylvie Prévaud découvrit enfin<br />
l'une <strong>de</strong>s oeuvres créées par son fils. Celle que Valérie s'apprêtait à emballer dans un soli<strong>de</strong><br />
carton. Sébastien s'était empressé <strong>de</strong> fer<strong>me</strong>r <strong>la</strong> gran<strong>de</strong> armoire. Afin simple<strong>me</strong>nt <strong>de</strong> soustraire<br />
à <strong>la</strong> vue <strong>de</strong> sa mère, le produit <strong>de</strong> ce qu'il considérait com<strong>me</strong> <strong>de</strong>s balbutie<strong>me</strong>nts. Inutile <strong>de</strong><br />
réc<strong>la</strong><strong>me</strong>r l'ouverture, elle ne l'obtiendrait pas. En revanche, elle se permit, en se précipitant<br />
ma<strong>la</strong>droite<strong>me</strong>nt, <strong>de</strong> s'offrir le spectacle <strong>de</strong> <strong>la</strong> robe désormais propriété <strong>de</strong> Valérie.