Les sirènes de la glace - Je me livre ... Eric Vincent
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<strong>Les</strong> <strong>sirènes</strong> <strong>de</strong> <strong>la</strong> g<strong>la</strong>ce<br />
Ramollo convenait parfaite<strong>me</strong>nt pour une telle situation. <strong>Les</strong> yeux <strong>la</strong>rmoyants du brave basset<br />
hound n'auraient aucun mal à libérer ses propres yeux. Il suffisait <strong>de</strong> le regar<strong>de</strong>r. Il en était<br />
ainsi à chaque fois. Dès qu'une nouvelle, un fait le blessait, le chagrinait, il se tournait vers<br />
Ramollo et lâchait les sanglots qui ne pouvaient rester prisonniers plus longtemps. A l'inverse,<br />
quand il avait le coeur joyeux, il débordait d'énergie et c'était Zeus qui le stimu<strong>la</strong>it encore<br />
davantage, l'incitant à jouer. Quand il se morfondait, il aurait aimé coucher ses senti<strong>me</strong>nts<br />
dans un journal inti<strong>me</strong>, com<strong>me</strong> le faisait Valérie. Mais, pour les mots, les poè<strong>me</strong>s, son amie<br />
d'enfance était autre<strong>me</strong>nt plus talentueuse. A chaque fois qu'elle était tombée amoureuse, elle<br />
avait su manier les vers à sa guise et faire succomber l'élu <strong>de</strong> son coeur. Seul le prénommé<br />
Pascal ne s'était pas <strong>la</strong>issé séduire aussi rapi<strong>de</strong><strong>me</strong>nt. Il saurait bientôt si <strong>la</strong> robe offerte à<br />
Valérie avait réussi là où <strong>la</strong> poésie avait échoué.<br />
"A quoi bon se morfondre ? Magali est une traînée, rien <strong>de</strong> plus !" se dit-il en se remémorant<br />
avec un frisson <strong>de</strong> dégoût, <strong>la</strong> scène à <strong>la</strong>quelle il avait assisté ce matin. Pourtant, il avait édifié<br />
tout un mon<strong>de</strong> autour d'elle, une vie mê<strong>me</strong>, imaginant, à tort sans doute qu'ils pourraient<br />
s'unir un jour et fon<strong>de</strong>r un foyer. Cruelle déception ! Magali possédait <strong>de</strong>s notions <strong>de</strong> base <strong>de</strong><br />
<strong>la</strong> famille établies sur le quatuor plutôt que sur le duo.<br />
Toute <strong>la</strong> journée, il était allé courir dans les bois, sillonnant les différents parcours <strong>de</strong> santé<br />
jusqu'à son complet épuise<strong>me</strong>nt et jusqu'à ce que Zeus lui-mê<strong>me</strong> finisse par s'allonger dans<br />
l'herbe fraîche, <strong>la</strong>ssé <strong>de</strong>s galops incessants <strong>de</strong> son jeune maître. Paniers <strong>de</strong> basket, saut en<br />
hauteur à répétition dans le garage familial, avaient pour l'instant consommé ses <strong>de</strong>rnières<br />
particules d'énergie. Ce<strong>la</strong> l'avait aidé, surtout, à ne plus songer à <strong>la</strong> scène du matin et à ses<br />
espoirs bafoués.<br />
A présent, seul dans sa chambre, les idées noires revenaient à <strong>la</strong> charge, les <strong>la</strong>r<strong>me</strong>s aussi.<br />
Intense déception et révolte grandissaient à <strong>la</strong> vue <strong>de</strong> <strong>la</strong> robe confectionnée avec soin et<br />
amour, utilisée pour appâter <strong>de</strong>s mâles en rut. Oui ! Ce<strong>la</strong> le révolta ! Il enrageait <strong>de</strong> lui avoir<br />
offert et il irait bien <strong>la</strong> reprendre si ce<strong>la</strong> ne représentait pas un risque pour sa vie. A <strong>la</strong> folle<br />
pensée s'opposait, hé<strong>la</strong>s, <strong>la</strong> vision effrayante du gar<strong>de</strong> et <strong>de</strong>s molosses <strong>de</strong>stinés à traquer les<br />
intrus. Un bien triste métier que celui-là. Le type <strong>de</strong>vait être en train <strong>de</strong> profiter du spectacle,<br />
en douce, par une autre fenêtre. Salopard !<br />
Que faire ? Que faire pour chasser ces dangereuses déviations <strong>de</strong> l'esprit ? Regardant vers les<br />
étagères fixées au-<strong>de</strong>ssus <strong>de</strong> son bureau, il entrevit <strong>la</strong> solution miracle aux crises d'angoisse et<br />
<strong>de</strong> solitu<strong>de</strong>. <strong>Les</strong> <strong>la</strong><strong>me</strong>s <strong>de</strong>s patins affûtées bril<strong>la</strong>ient <strong>de</strong> mille reflets com<strong>me</strong> autant <strong>de</strong> clins<br />
d'oeil l'invitant à glisser sur <strong>la</strong> g<strong>la</strong>ce et par <strong>la</strong> mê<strong>me</strong> occasion, sur le temps. Il se décida,<br />
motivé, et prit les indispensables instru<strong>me</strong>nts.<br />
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* *<br />
<strong>Les</strong> patineurs s'éclipsèrent un à un au fur et à <strong>me</strong>sure que Tonio, le disc-jockey animant <strong>la</strong><br />
patinoire durant l'après-midi et en soirée, leur rappe<strong>la</strong> qu'il était l'heure <strong>de</strong> ranger patins et