Sida, immigration et inégalités : nouvelles réalités ... - ANRS

Avant-propos
France LERT, Véronique DORÉ
Il existe aujourd’hui un hiatus entre la part très importante des étrangers parmi
les personnes atteintes par le VIH en France, l’extrême gravité de la situation
épidémiologique en Afrique dont sont originaires la plupart d’entre eux, et le peu
de recherches qui s’intéressent à la problématique de l’immigration. Le Comité
scientifique CSS 5 « santé publique et sciences de l’homme et de la société »
de l’ANRS fait pourtant figurer, depuis des années, ce thème comme prioritaire
dans ses appels d’offres.
Pour tenter de sortir de cette situation, qui a aussi pour corollaire la timidité des
politiques de prévention, l’action coordonnée 18-1 « Comportements et prévention
» aréuni en octobre 2000 des chercheurs en sciences sociales travaillant
sur l’immigration autour des thèmes de l’emploi, de la famille, de la discrimination,
de la politique urbaine, d’autres maladies, ainsi que les acteurs travaillant sur la
question « immigration et sida ». Cet ouvrage présente un bilan de cette journée.
Les deux premiers chapitres sont consacrés à la question des inégalités, notamment
vis-à-vis de la santé et du VIH, ouvrant ainsi le débat sur le processus de
catégorisation et sur les phénomènes de discrimination. Le troisième chapitre
est consacré aux aspects juridiques qui conditionnent la vie familiale, mais aussi
affective et sexuelle, de ces populations. Les résultats de travaux de recherche
récents qui concluent cet ouvrage donnent un éclairage sur les attitudes de prévention
vis-à-vis du risque de contamination par voie sexuelle dans certains groupes
de population.
Dans le contexte des débats politiques sur l’immigration, la production de données
sur la prévalence de la maladie VIH dans cette population, la description
des mouvements migratoires, les modes de vie sexuels, conjugaux ou familiaux
qui sous-tendent la diffusion de l’épidémie, ou encore la question des
personnes sans papier parmi les malades, paraissent, pour beaucoup, constituer
un risque d’aggraver la situation de personnes déjà doublement stigmatisées
et de renforcer le discours d’exclusion voire de conduire à une législation
restrictive. Au-delà de la question d’une utilisation perverse des résultats des
études et des recherches, cette attitude renvoie à un débat entre ceux qui
mettent au premier plan les processus historiques et sociaux qui conduisent à
la situation sociale actuelle des immigrés au sein de la société française, et
ceux qui mettent en avant la nécessité de constituer des informations quantifiées
qui permettent de mesurer la situation des différents groupes de population
immigrée vivant en France et d’appréhender sur des bases bien informées
les inégalités et les discriminations. Ce débat n’est pas propre au sida, il traverse
toutes les sciences sociales opposant dans des conflits intellectuels,
voire des polémiques sans concession, les tenants des deux positions. On les
trouvera exposées dans cet ouvrage. Pour les uns, une connaissance précise
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