L 'arme nucléaire : Totem et tabou - Alternatives non-violentes
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<strong>Alternatives</strong> <strong>non</strong> <strong>violentes</strong> n° 130 • L’arme <strong>nucléaire</strong> : totem <strong>et</strong> <strong>tabou</strong><br />
Dominique Lalanne<br />
l’arme pendant l’explosion. Point n’est besoin d’explosion<br />
réellement <strong>nucléaire</strong> pour tester de nouveaux matériaux,<br />
de nouveaux composants électroniques ou de nouvelles<br />
configurations mécaniques, l’accélérateur Airix perm<strong>et</strong>tra<br />
de tout voir dans les instants très brefs de l’explosion qui<br />
allume les réactions <strong>nucléaire</strong>s, la charge fissile étant<br />
remplacée par un autre matériau, <strong>et</strong> de valider ainsi les<br />
nouvelles armes plus performantes.<br />
Les armes du futur champ de bataille<br />
Au début des années 1990, les Américains ont déjà<br />
réfléchi aux armes du futur. Et aux nouvelles<br />
recherches qu’il faut mener. Ils décident de construire un<br />
laser géant, le NIF (National Ignition<br />
Facility) en Californie pour créer de<br />
p<strong>et</strong>ites explosions à partir de deux isotopes<br />
de l’hydrogène. Ce qui se passe<br />
dans un bombe H mais qui est amorcé<br />
par une bombe A au plutonium. Les<br />
Français reprennent alors l’idée <strong>et</strong> décident<br />
le Mégajoule, copie presque conforme<br />
du NIF <strong>et</strong> qui s’implante près de<br />
Bordeaux.<br />
L’enjeu est d’importance. Dans<br />
une bombe <strong>nucléaire</strong> actuelle, il faut trois<br />
étages : le premier étage est une bombe chimique classique<br />
qui comprime le plutonium pour déclencher la<br />
réaction <strong>nucléaire</strong> de fission. C’est ce deuxième étage, la<br />
bombe <strong>nucléaire</strong> de plutonium (ou d’uranium 235), la<br />
bombe A, qui va être elle-même l’allum<strong>et</strong>te pour créer 10<br />
millions de degrés pendant un millionième de seconde<br />
au troisième étage composé d’isotopes de l’hydrogène<br />
(deutérium <strong>et</strong> tritium) qui vont constituer la bombe H.<br />
Mais le grand défaut de ces armes <strong>nucléaire</strong>s est précisément<br />
ce deuxième étage. Le plutonium (ou l’uranium) a<br />
besoin d’une « masse critique » pour fissionner (5 kg pour<br />
le Pu <strong>et</strong> 11 kg pour l’U235). Et donc on ne peut pas concevoir<br />
de p<strong>et</strong>ites bombes <strong>nucléaire</strong>s. Beaucoup plus p<strong>et</strong>it<br />
qu’Hiroshima (10 000 tonnes d’équivalent TNT) n’est pas<br />
possible. Mais si on savait allumer l’hydrogène avec un<br />
laser, on n’aurait plus ce problème d’allum<strong>et</strong>te-bombe A.<br />
La fusion de l’hydrogène ne connaît pas ce problème de<br />
masse critique. On pourrait donc faire une toute p<strong>et</strong>ite<br />
bombe <strong>nucléaire</strong>. Et en particulier on pourrait faire des<br />
bombes qui n’existent pas actuellement, de puissance<br />
comprise entre une tonne de TNT (les plus grosses<br />
bombes conventionnelles) <strong>et</strong> 1 000 tonnes de TNT (les<br />
plus p<strong>et</strong>ites bombes A). Donc des bombes utilisables sur<br />
un champ de bataille <strong>et</strong> <strong>non</strong> plus des bombes de menace<br />
d’apocalypse.<br />
Ainsi sans rien dire, on passe de l’idée de dissuasion<br />
<strong>nucléaire</strong> à l’idée de guerre <strong>nucléaire</strong>. Pour les<br />
Américains, le pas est fait depuis longtemps car en parallèle<br />
ils ont mis au point les plus p<strong>et</strong>ites bombes A possibles,<br />
dites mininukes, dans l’idée<br />
« Le plus étonnant de<br />
l’histoire est l’absence<br />
totale de débat<br />
démocratique sur<br />
ces orientations de<br />
recherches. »<br />
D. L.<br />
de perforer des bunkers enterrés.<br />
Lors des guerres d’Afghanistan <strong>et</strong><br />
d’Irak certains militaires américains<br />
ont souhaité essayer ces nouvelles<br />
armes. Pour les Français, la transition<br />
officielle de stratégie n’est toujours<br />
pas d’actualité. Les armes « à fusion<br />
pure » ne sont pas pour un avenir<br />
proche <strong>et</strong> les têtes <strong>nucléaire</strong>s<br />
actuelles font 100 000 tonnes de TNT<br />
<strong>et</strong> sont donc trop puissantes pour<br />
être utilisées sur un champ de bataille. Mais l’infléchissement<br />
stratégique est tout de même perceptible,<br />
comme on l’a vu dans le discours de Jacques Chirac.<br />
Le Mégajoule<br />
Au Barp, près de Bordeaux, ce sont des laboratoires de<br />
plusieurs centaines de mètres de long qu’il faut<br />
construire pour abriter les 240 lasers de puissance qui<br />
devront tirer en un millionième de seconde sur une p<strong>et</strong>ite<br />
sphère d’un millième de gramme d’hydrogène congelé…<br />
Une performance jamais encore réalisée. Ainsi l’hydrogène<br />
se m<strong>et</strong> à fusionner pour donner de l’hélium <strong>et</strong>