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journées d'étude - Palais des Beaux Arts de Lille

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journées d’étu<strong>de</strong><br />

Histoire <strong>de</strong> l’Art | Histoire <strong><strong>de</strong>s</strong> <strong>Arts</strong><br />

journées d’étu<strong>de</strong><br />

Histoire <strong>de</strong> l’Art | Histoire <strong><strong>de</strong>s</strong> <strong>Arts</strong><br />

en particulier dans <strong><strong>de</strong>s</strong> pério<strong><strong>de</strong>s</strong> charnières<br />

1700-1755 – au moment <strong>de</strong> la mise en place <strong>de</strong><br />

la critique d’art autour <strong>de</strong> la personnalité <strong>de</strong><br />

Di<strong>de</strong>rot – <strong><strong>de</strong>s</strong> voix se font entendre pour<br />

signaler que ces ensembles d’art que possè<strong>de</strong>nt<br />

nos rois et nos princes, dont beaucoup<br />

commencent à saisir la valeur et à l’ouvrir au<br />

public, méritent non seulement d’être montrés<br />

mais aussi d’être présentés <strong>de</strong> façon cohérente<br />

et compré-hensive : ne mélangeons pas les<br />

Italiens avec les Flamands, il y a <strong><strong>de</strong>s</strong> écoles ;<br />

respectons les écoles. Au Louvre en particulier,<br />

on souhaite mettre un cartel en indiquant le<br />

nom <strong>de</strong> l’artiste : s’il s’agit <strong>de</strong> Raphaël, du<br />

Parmesan ou <strong>de</strong> Guido Reni. De la même<br />

manière, on <strong>de</strong>man<strong>de</strong> une sorte <strong>de</strong> mise en<br />

espace un peu agréable, <strong>de</strong> façon à favoriser<br />

la délectation, et ceci est un mot capital, le<br />

plaisir du regard associé à la connaissance :<br />

la démarche éducative est déjà à l’œuvre au<br />

cours du XVIII e siècle.<br />

Je vais citer un exemple important pour le XVII e<br />

siècle. Autour <strong><strong>de</strong>s</strong> cours royales et princières<br />

voire <strong><strong>de</strong>s</strong> palais cardinalices se constituent<br />

<strong><strong>de</strong>s</strong> collections, <strong><strong>de</strong>s</strong> galeries, <strong><strong>de</strong>s</strong> cabinets. En<br />

1687, à l’Université d’Oxford, se crée un premier<br />

musée, mais vous verrez que ce n’est pas<br />

le premier, sous une forme mo<strong>de</strong>rne, à côté<br />

<strong>de</strong> l’université. On y trouve <strong><strong>de</strong>s</strong> manuscrits,<br />

une bibliothèque, <strong><strong>de</strong>s</strong> livres utiles à la<br />

connaissance ainsi que <strong><strong>de</strong>s</strong> instruments<br />

scientifiques <strong>de</strong> mesure, <strong><strong>de</strong>s</strong> éléments <strong>de</strong><br />

séries <strong>de</strong> science naturelle, <strong><strong>de</strong>s</strong> séries <strong>de</strong><br />

peintures, sculptures, <strong><strong>de</strong>s</strong>sins et gravures<br />

qui permettront <strong>de</strong> connaître non seulement<br />

les pratiques artistiques du temps, du siècle<br />

passé mais aussi <strong>de</strong> connaître la société et<br />

la civilisation qu’elle recouvre. Et ce musée,<br />

accolé à l’Université, est l’instrument interactif,<br />

pratique <strong>de</strong> la connaissance. C’est une forme<br />

presque d’Internet déjà. Il est ouvert tous les<br />

jours mais avec <strong>de</strong>ux jours pour le ménage et<br />

le rangement, <strong>de</strong>ux jours pour la connaissance<br />

<strong><strong>de</strong>s</strong> savants, <strong>de</strong>ux ou trois jours pour le public,<br />

le reste du temps c’est un instrument pour les<br />

étudiants <strong>de</strong> l’Université.<br />

Je remontrai encore un peu plus loin et j’irai<br />

vers le XV e -XVI e siècle pour rappeler qu’à ce<br />

moment là, en Italie en particulier, les premières<br />

collections se constituent ; toujours par les<br />

mêmes : princes, cardinaux, seigneurs. Ces<br />

collections apparaissent – c’est le cas à Venise –<br />

dès la fin du XV e siècle, non seulement comme<br />

<strong><strong>de</strong>s</strong> lieux <strong>de</strong> captation <strong>de</strong> richesses acquises,<br />

achetées, mais aussi <strong><strong>de</strong>s</strong> lieux dans lesquels<br />

s’ouvrent <strong><strong>de</strong>s</strong> académies pour que le modèle<br />

antique soit appris et transmis. Là aussi, une<br />

éducation spécialisée : à la forme, au volume,<br />

au <strong><strong>de</strong>s</strong>sin voire même à la connaissance <strong>de</strong><br />

l’anatomie. Il s’agit d’un geste éducatif.<br />

Le Moyen-Âge, qui crée <strong><strong>de</strong>s</strong> trésors, donc<br />

recueille et protège <strong><strong>de</strong>s</strong> ensembles précieux<br />

ayant une valeur souvent liée à la relique ou<br />

à la question du sacré constitue néanmoins<br />

aussi <strong><strong>de</strong>s</strong> ensembles qui montrent la diversité<br />

<strong><strong>de</strong>s</strong> techniques, <strong><strong>de</strong>s</strong> matériaux, <strong><strong>de</strong>s</strong> productions<br />

en particulier dans <strong><strong>de</strong>s</strong> échanges entre Orient<br />

et Occi<strong>de</strong>nt.<br />

Et j’en arrive à l’Antiquité. Le mot « musée »<br />

vient <strong>de</strong> museon, l’Université. C’est une<br />

assemblée <strong>de</strong> sages et <strong>de</strong> savants qui travaillent,<br />

produisent un savoir et sont en quelque sorte<br />

protégés, financés sur les biens publics. Dans<br />

ces museon , il y a souvent le temple, temple<br />

religieux dans lequel on trouvera les ex-voto et<br />

les pynakes, c’est à dire <strong><strong>de</strong>s</strong> portraits peints sur<br />

bois, représentant <strong><strong>de</strong>s</strong> figures célèbres ou<br />

connues ou <strong><strong>de</strong>s</strong> citoyens qui veulent conserver<br />

leur image. Parmi ces offran<strong><strong>de</strong>s</strong>, qui regroupent<br />

aussi <strong><strong>de</strong>s</strong> statues liées au culte <strong><strong>de</strong>s</strong> dieux, se<br />

trouvent, pour conserver ce patrimoine, <strong><strong>de</strong>s</strong><br />

gardiens, <strong><strong>de</strong>s</strong> hierops Et ces gardiens sont là<br />

pour entretenir ce patrimoine, le conserver,<br />

vérifier que la lumière ou les grands vents, la<br />

sécheresse n’altèrent pas et parfois même, sont<br />

accumulés tellement d’ex-voto, qu’ils seront<br />

amenés à en enterrer, ce qui créera les premières<br />

réserves. C’est dire que la notion <strong>de</strong> musée est<br />

une notion antique et qu’elle est <strong>de</strong>puis<br />

toujours liée au fait <strong>de</strong> la connaissance, à la<br />

production <strong>de</strong> connaissance, et pas seulement<br />

à la délectation et à l’éducation.<br />

2<br />

Je reviens au temps contemporain, en<br />

particulier à celui du <strong>Palais</strong> <strong><strong>de</strong>s</strong> <strong>Beaux</strong>-<strong>Arts</strong>.<br />

Pendant tout le XIX e siècle à <strong>Lille</strong>, il existe non<br />

pas un musée mais <strong><strong>de</strong>s</strong> musées : ce musée<br />

accueille en effet six musées : un musée <strong>de</strong><br />

peinture, un <strong>de</strong> sculpture, un <strong>de</strong> gravure, un <strong>de</strong><br />

monnaies, etc, etc. Pourquoi <strong>Palais</strong> ? Parce qu’en<br />

1892 lorsqu’il a été construit, il l’a été sous les<br />

principes d’un palais. Sous ses principes les plus<br />

positifs, le mot palais voulait dire représentation<br />

prestigieuse d’un élément patrimonial <strong>de</strong> la<br />

2<br />

Vue <strong>de</strong> la faça<strong>de</strong> du palais <strong><strong>de</strong>s</strong> <strong>Beaux</strong>-<strong>Arts</strong> <strong>de</strong> <strong>Lille</strong><br />

en 1898.<br />

Photo © <strong>Lille</strong>, <strong>Palais</strong> <strong><strong>de</strong>s</strong> <strong>Beaux</strong>-<strong>Arts</strong>.<br />

culture lilloise, du Nord, <strong>de</strong> la région face au<br />

bâtiment en face qui représente l’état : la<br />

préfecture. Ainsi, le caractère puissant <strong>de</strong> cette<br />

architecture est lié à la volonté <strong>de</strong> rivaliser<br />

avec l’autre forme <strong>de</strong> puissance qui se situe<br />

en face.<br />

<strong>Palais</strong>, par les choix <strong><strong>de</strong>s</strong> architectes voulus<br />

par les édiles <strong>de</strong> l’époque : il a tout pour plaire,<br />

il tout pour stupéfier, pour séduire avec<br />

ce caractère composite, pour ne pas dire<br />

hétéroclite, où pratiquement tout le vocabulaire<br />

architectural est représenté. Tout est là :<br />

les triglyphes, les métopes, les colonnes corinthiennes,<br />

les doriques, les pilastres. <strong>Palais</strong><br />

pour qu’on puisse y entrer. Il est largement<br />

ouvert au public par sa faça<strong>de</strong>. Il n’est pas ce<br />

temple fermé, ce lieu clôt, tenu par <strong><strong>de</strong>s</strong><br />

conservateurs sourcilleux quant à la bonne<br />

conservation et ne souhaitant pas que le grand<br />

mon<strong>de</strong> ou les grands vents pénètrent dans le<br />

bâtiment. C’est une conception qui a existé<br />

durant tous le XIX e et aussi dans la première<br />

moitié <strong>de</strong> XX e siècle, conception qui vient<br />

<strong>de</strong> l’archéologie : c’est que les seuls objets<br />

protégés sont ceux qui ne sont pas vus et pas<br />

découverts, étant dans le sol. Il est vrai que dans<br />

l’absolu, c’est la meilleure protection qui soit.<br />

Les mauvais aspects du <strong>Palais</strong> nous les voyons,<br />

nous les citons, et ce qui est valable pour le<br />

musée <strong><strong>de</strong>s</strong> <strong>Beaux</strong>-<strong>Arts</strong> <strong>de</strong> <strong>Lille</strong> serait valable<br />

pour d’autres institutions nées au XIX e siècle et<br />

surtout pour celles construites aujourd’hui ;<br />

c’est celle <strong>de</strong> fabriquer un très beau bâtiment<br />

sans tenir compte <strong><strong>de</strong>s</strong> collections qui sont<br />

censées être la raison d’être <strong>de</strong> ce bâtiment.<br />

Et lorsque les conservateurs, en 1892, sont<br />

entrés dans ce <strong>Palais</strong> <strong><strong>de</strong>s</strong> <strong>Beaux</strong>-<strong>Arts</strong>, ils se<br />

sont <strong>de</strong>mandés où ils allaient mettre les<br />

tableaux, tellement il y avait <strong>de</strong> portes, <strong>de</strong><br />

fenêtres, <strong>de</strong> tout cet appareil architectural<br />

spectaculaire ; qui plus est, les conditions à <strong>Lille</strong><br />

n’étaient pas réunies techniquement car vous<br />

savez que <strong>Lille</strong> est une île et que l’eau circule<br />

partout en particulier sous le musée.<br />

Néanmoins, il y a eu le recueil <strong>de</strong> tout une série<br />

<strong>de</strong> collections : la première est celle <strong><strong>de</strong>s</strong> envois<br />

<strong>de</strong> l’état liée au décret <strong>de</strong> Chaptal. Des œuvres<br />

envoyées ou choisies par <strong><strong>de</strong>s</strong> érudits locaux, un<br />

peintre en particulier, Watteau <strong>de</strong> <strong>Lille</strong>. Prendre<br />

dans les dépôts parisiens ce qu’il y a <strong>de</strong> plus<br />

cohérent avec l’esprit et la culture du lieu, avec<br />

la culture d’une ville, qui certes est française<br />

<strong>de</strong>puis 1667 mais qui est une ville flaman<strong>de</strong><br />

aussi d’i<strong>de</strong>ntité profon<strong>de</strong>. Et c’est ainsi que dans<br />

les envois <strong>de</strong> l’état, tout ce qui appartient à<br />

la peinture flaman<strong>de</strong> est particulièrement<br />

apprécié, choisi, saisi : que ce soit dans le<br />

domaine <strong>de</strong> la sculpture médiévale, <strong><strong>de</strong>s</strong><br />

retables <strong>de</strong> la première Renaissance ou dans<br />

le domaine <strong>de</strong> la gran<strong>de</strong> peinture d’autel pour<br />

le XVII e siècle. 3<br />

Il faudra attendre le XIX e pour que, d’une part,<br />

<strong>de</strong> gran<strong><strong>de</strong>s</strong> familles lilloises ou <strong>de</strong> la région se<br />

constituent grâce à leurs activités économiques,<br />

entrepreneuriat, <strong><strong>de</strong>s</strong> collections et plutôt que<br />

<strong>de</strong> les vendre aux enchères après le décès, elles<br />

lèguent ces ensembles dans leur entièreté<br />

aux musées <strong>de</strong> leur ville. C’est ainsi que vous<br />

verrez lorsque vous ferez le travail avec nos<br />

conférencières à quel point la richesse <strong>de</strong> ce<br />

patrimoine doit à la société civile qui a rendu<br />

une partie <strong>de</strong> ce gain à travers <strong><strong>de</strong>s</strong> dons, <strong><strong>de</strong>s</strong><br />

legs importants. C’est ainsi que l’on voit un très<br />

bel ensemble <strong>de</strong> sculptures flaman<strong><strong>de</strong>s</strong> liées<br />

à <strong><strong>de</strong>s</strong> collections d’orfèvrerie du XIV e au XVII e<br />

siècle, un ensemble <strong>de</strong> retables, <strong><strong>de</strong>s</strong> collections<br />

<strong>de</strong> peintures hollandaises (cent quatorze<br />

d’un coup) données au XIX e , <strong><strong>de</strong>s</strong> ensembles<br />

petits mais essentiels, <strong>de</strong> peinture espagnole.<br />

Je vous donne les grands principes, vous verrez<br />

les détails au cours <strong>de</strong> ce stage. 4 5<br />

Important aussi à <strong>Lille</strong> au XIX e siècle : le Salon,<br />

qui est lié à l’Académie et qui se tient en miroir<br />

<strong><strong>de</strong>s</strong> Salons parisiens. Il va générer un rapport<br />

et en particulier la captation, la possibilité <strong>de</strong><br />

voir déposer par l’état <strong><strong>de</strong>s</strong> chefs-d’œuvre très<br />

importants qui ont été présentés dans les<br />

salons parisiens – j’en cite <strong>de</strong>ux : la Médée <strong>de</strong><br />

Delacroix et L’ après-dîner à Ornans <strong>de</strong> Courbet,<br />

1838-1848 – et une activité artistique spécifiquement<br />

lilloise, celle <strong><strong>de</strong>s</strong> sculptures qui suivra.<br />

Le musée <strong>de</strong>viendra l’un <strong><strong>de</strong>s</strong> grands musées<br />

<strong>de</strong> sculpture.<br />

Un <strong>de</strong>rnier mot concernant un patrimoine<br />

phénoménal arrivé par un <strong>de</strong> ces grands<br />

donateurs, c’est un peintre, il s’appelle<br />

Jean Baptiste Wicar, il est à Rome, très tôt il<br />

accompagne le peintre David, il développe une<br />

activité d’antiquaire, <strong>de</strong> connaisseur mais en<br />

même temps d’acquéreur, et puis, travaillant<br />

pour les forces révolutionnaires, pour les<br />

forces napoléoniennes dans un second temps,<br />

pour les forces royalistes dans un troisième<br />

temps – on connaît ça chez Talleyrand. Ce Wicar<br />

va léguer en 1834 une phénoménale collection<br />

3<br />

Adolphe Vasseur<br />

Vue <strong><strong>de</strong>s</strong> salles <strong>de</strong> peinture du musée <strong>de</strong> <strong>Lille</strong> en 1882,<br />

<strong>Lille</strong>, <strong>Palais</strong> <strong><strong>de</strong>s</strong> <strong>Beaux</strong>-<strong>Arts</strong>, Photo © Thierry Le Mage.<br />

4<br />

Allemagne, XVI e s. Hanap, <strong>Lille</strong>, <strong>Palais</strong> <strong><strong>de</strong>s</strong> <strong>Beaux</strong>-<strong>Arts</strong>.<br />

Photo © H. Lewandowski<br />

5<br />

Jacob van Ruisdael<br />

Champ <strong>de</strong> blé. Photo © <strong>Lille</strong>, <strong>Palais</strong> <strong><strong>de</strong>s</strong> <strong>Beaux</strong>-<strong>Arts</strong><br />

| 29-30 janvier 2009 • lille, palais <strong><strong>de</strong>s</strong> beaux-arts<br />

lille, palais <strong><strong>de</strong>s</strong> beaux-arts • 29-30 janvier 2009 |

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