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journées d'étude - Palais des Beaux Arts de Lille

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journées d’étu<strong>de</strong><br />

Histoire <strong>de</strong> l’Art | Histoire <strong><strong>de</strong>s</strong> <strong>Arts</strong><br />

La place <strong>de</strong> l’éducation dans les musées<br />

4Alain Tapié<br />

Conservateur en chef du Patrimoine, Directeur du <strong>Palais</strong> <strong><strong>de</strong>s</strong> <strong>Beaux</strong>-<strong>Arts</strong> et du musée <strong>de</strong> l’Hospice Comtesse<br />

Je vais vous parler <strong>de</strong> quelque chose <strong>de</strong> tout<br />

à fait concret, qui est la situation <strong>de</strong> l’activité<br />

artistique, celle du passé comme celle du<br />

présent. Qui dit situation, dit lieu ; il y a <strong><strong>de</strong>s</strong><br />

lieux où sont présentés et représentés les<br />

activités artistiques, le musée est un <strong>de</strong> ces<br />

lieux. C’est très important <strong>de</strong> partir <strong>de</strong> la<br />

notion <strong>de</strong> lieu et <strong>de</strong> ne pas partir <strong>de</strong> notions<br />

plus abstraites. Nous allons donc parler<br />

d’un musée, <strong>de</strong> ce musée en particulier afin que<br />

cela soit plus concret. Ce musée est un musée<br />

<strong><strong>de</strong>s</strong> <strong>Beaux</strong>-<strong>Arts</strong>, cela indique qu’il conserve,<br />

qu’il présente et qu’il étudie un patrimoine lié<br />

à <strong><strong>de</strong>s</strong> pratiques artistiques considérées à partir<br />

du XVII e siècle comme <strong><strong>de</strong>s</strong> pratiques dites<br />

« libérales » – les <strong>Beaux</strong>-<strong>Arts</strong> – pratiques intellectuelles<br />

: peinture, sculpture, <strong><strong>de</strong>s</strong>sin, gravure,<br />

voilà l’essentiel <strong><strong>de</strong>s</strong> <strong>Beaux</strong>-<strong>Arts</strong>.<br />

C’est ce musée, né dans une circonstance très<br />

particulière, celle qui est la même pour une<br />

quinzaine <strong>de</strong> grands musées en France, celle<br />

d’un décret du directoire <strong>de</strong> 1801, le décret <strong>de</strong><br />

Chaptal. Ce décret institue que <strong><strong>de</strong>s</strong> villes vont<br />

<strong>de</strong>voir créer dans leur sein, un musée sur le<br />

modèle du Museum Central du Louvre qui a<br />

commencé à s’instituer dès 1793, chargé <strong>de</strong><br />

recueillir <strong><strong>de</strong>s</strong> biens <strong><strong>de</strong>s</strong> églises qui auront été<br />

séquestrés, <strong><strong>de</strong>s</strong> biens d’émigrés, <strong><strong>de</strong>s</strong> biens<br />

royaux, <strong><strong>de</strong>s</strong> biens princiers et <strong>de</strong> pouvoir les<br />

accueillir, les conserver, les présenter. Et même<br />

si on n’en est pas tout à fait à l’étu<strong>de</strong>, l’initiative<br />

en est souvent confiée à <strong><strong>de</strong>s</strong> artistes, voire à ce<br />

qu’on appelle au XVIII e siècle, <strong><strong>de</strong>s</strong> antiquaires,<br />

c’est à dire <strong><strong>de</strong>s</strong> gens savants, humanistes et<br />

spécialisés dans la connaissance <strong>de</strong> ces<br />

patrimoines. Il y a donc là <strong><strong>de</strong>s</strong> lieux qui se<br />

construisent, la plupart du temps ce sont <strong><strong>de</strong>s</strong><br />

constructions adaptées pour la présentation <strong>de</strong><br />

ces collections et les fins <strong>de</strong> ces musées sont<br />

clairement dites dans la déclaration : préserver<br />

ce patrimoine. C’est vrai qu’il y a eu au début<br />

<strong>de</strong> la pério<strong>de</strong> révolutionnaire <strong><strong>de</strong>s</strong> pério<strong><strong>de</strong>s</strong><br />

<strong>de</strong> <strong><strong>de</strong>s</strong>tructions, incontestablement ; mais à<br />

partir <strong>de</strong> 1793, un mouvement nouveau se fait<br />

jour pour considérer cet ensemble patrimonial<br />

comme une sorte <strong>de</strong> réserve <strong>de</strong> valeur<br />

spirituelle, qui est <strong>de</strong> toute autre nature que<br />

celle issue <strong><strong>de</strong>s</strong> traditions religieuses. C’est<br />

donc l’esthétique qui est mise en avant, pas<br />

le style : l’idée du beau et tout ce qui tourne<br />

autour <strong>de</strong> la beauté, se trouve ainsi comme<br />

porté par ces institutions patrimoniales<br />

avec vocation à préserver, conserver, présenter<br />

mais aussi à éduquer ; ceci étant une vocation<br />

absolument fondamentale du musée.<br />

L’éducation, ce n’est pas un vain mot. Ce n’est<br />

pas un mot qui vient du volontarisme<br />

contemporain ; non, c’est dans les fon<strong>de</strong>ments<br />

même <strong>de</strong> la raison d’être <strong><strong>de</strong>s</strong> musées.<br />

Ce moment majeur <strong>de</strong> la construction <strong><strong>de</strong>s</strong><br />

musées se fait essentiellement autour <strong>de</strong> la<br />

dynamique révolutionnaire française dont le<br />

principe va essaimer dans toute l’Europe,<br />

dans le cadre <strong>de</strong> l’expansion napoléonienne : ce<br />

sera un <strong><strong>de</strong>s</strong> avantages, il y aura certainement<br />

aussi <strong><strong>de</strong>s</strong> inconvénients. Il continue en effet à y<br />

avoir captation dans le cas <strong><strong>de</strong>s</strong> guerres, en<br />

particulier celle avec l’Italie (1797/1798), avec<br />

les Flandres, la Hollan<strong>de</strong>, jusqu’en Allemagne et<br />

en Russie autour <strong>de</strong> 1808/1810, <strong>de</strong>ux pério<strong><strong>de</strong>s</strong><br />

dans lesquelles il y aura <strong><strong>de</strong>s</strong> captations <strong>de</strong><br />

patrimoine en Europe. Dans un premier temps<br />

et dans le cas <strong><strong>de</strong>s</strong> guerres d’Italie, les captations<br />

seront liées à <strong><strong>de</strong>s</strong> traités, où les gouvernements<br />

vaincus doivent cé<strong>de</strong>r <strong><strong>de</strong>s</strong> biens et dans le<br />

<strong>de</strong>uxième cas ce sont bien plus souvent <strong><strong>de</strong>s</strong><br />

pillages, <strong><strong>de</strong>s</strong> prises <strong>de</strong> guerre. Je ne vais pas<br />

entrer dans les détails et m’en tiens à ce cadre<br />

général. C’est dire l’importance accordée par le<br />

politique à ces patrimoines qu’on appellerait<br />

aujourd’hui culturels. 1<br />

Je vais revenir rapi<strong>de</strong>ment un peu en arrière en<br />

remontant les siècles : dans tout le XVIII e siècle,<br />

1<br />

Gaspard <strong>de</strong> CRAYER<br />

La Pêche miraculeuse, vers 1630-1635.<br />

Provient <strong>de</strong> l’église Saint-Pierre d’Osten<strong>de</strong>.<br />

Saisie révolutionnaire en 1793 ; envoi <strong>de</strong> l’état, 1804.<br />

<strong>Lille</strong>, <strong>Palais</strong> <strong><strong>de</strong>s</strong> <strong>Beaux</strong>-<strong>Arts</strong>,<br />

Photo © Philipp Bernard<br />

lille, palais <strong><strong>de</strong>s</strong> beaux-arts • 29-30 janvier 2009 |

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