à la decouverte du musée en jouant - Parc naturel régional des ...

UNIVERSITÉ D’AVIGNON ET DES PAYS DE VAUCLUSE
Master Médiations de la Culture et du Patrimoine
Mention Stratégie du Développement Culturel
Mémoire de master 2 e année
À LA DECOUVERTE DU MUSÉE EN JOUANT :
ANALYSE THÉORIQUE ET ÉTUDE APPLIQUÉE À DEUX JEUX AMUSE-
MUSÉES DU RÉSEAU DE LA CONSERVATION DU PARC NATUREL
RÉGIONAL DES VOSGES DU NORD
Claire Barbieux
Sous la direction de Daniel Jacobi
Année universitaire 2009-2010

Avant-propos
Particulièrement intéressée par les questions de médiation auprès du public enfant dans les
musées, mon projet de mémoire s’est tourné vers une forme de médiation très répandue mais dont
la pratique a encore été peu étudiée : les jeux pédagogiques proposés aux enfants en visite
familiale. Les connaissances sur les enfants et les musées ont en effet été essentiellement abordées
sous l’angle de la relation école-musée, de l’interactivité ou de l’apprentissage en famille dans les
musées de sciences.
J’ai eu le plaisir d’effectuer un stage de cinq mois au sein du Service des publics du réseau
de la Conservation des musées du Parc naturel régional des Vosges du Nord. Au cours de ce stage,
j’étais chargée de mener un bilan général de l’ensemble des dispositifs de médiation Amuse-
Musées dans les quatorze musées de la Chaîne de la Découverte. Ce stage m’offrait donc un
terrain de recherche privilégié dans des musées techniques, d’histoire et d’arts et traditions
populaires de petite ou moyenne taille. Deux jeux présentant deux types de mise en forme ludique
ont fait l’objet d’une étude approfondie de ma part. Les résultats de cette étude permettent
d’éclairer le rapport du jeu et de l’apprentissage en famille au musée. Ce rapport entre le jeu et
l’apprentissage est de mon point de vue à considérer ni comme antinomique, ni comme une
évidence, mais plutôt comme une rencontre entre deux pôles : ludique d’une part et pédagogique
d’autre part, dont l’équilibre n’est que rarement garanti à l’avance. Il s’agit donc de questionner ici
les effets de deux jeux particuliers sur les apprentissages des enfants en visite familiale.
2

Remerciements
Je tiens à remercier pour son soutien Daniel Jacobi qui a supervisé et orienté mes recherches
par ses précieux conseils.
Je remercie également la responsable du service des publics de la Chaîne de la Découverte,
Elen Gouzien, qui a favorisé la réalisation de mon étude par sa disponibilité et l’intérêt qu’elle a
apporté à l’évolution de mon travail. J’adresse également mes remerciements à l’équipe de la
Conservation du Parc naturel régional des Vosges du Nord : Isabelle Vergnaud-Goepp, Caroline
Roelens-Duchamp et Carine Schutz, mais aussi à l’ensemble de l’équipe du Parc naturel régional
des Vosges du Nord pour leur accueil chaleureux pendant ce stage.
Je voudrais témoigner de ma vive gratitude aux personnels du musée de la Bataille de 1870 à
Woerth et du Musée de l’image populaire à Pfaffenhoffen sans le concours desquels il n’aurait pas
été possible de réaliser ce travail. J’ai été très touchée par leur investissement et le temps qu’ils
m’ont accordé.
Je remercie les parents et les enfants qui ont accepté de se déplacer spécialement dans les
deux musées et de consacrer de leur temps libre à cette étude.
Je voudrais tout particulièrement remercier mon père pour ses conseils dans l’utilisation
d’Excel et ma grand-mère pour avoir mis ses compétences d’ancienne institutrice au service de la
relecture de ce mémoire. Je remercie enfin toute ma famille et mes amis pour leur soutien et leur
affection.
3

Sommaire
Avant-propos ..................................................................................................................................... 2
Remerciements ................................................................................................................................. 3
Résumé .............................................................................................................................................. 6
Introduction ...................................................................................................................................... 7
I. Jeu et apprentissage .................................................................................................................. 9
A. Définition du jeu .................................................................................................................... 9
1. Polysémie du mot jeu ......................................................................................................... 9
2. Eléments pour une définition du jeu : qu’est-ce que le jeu ? .......................................... 10
B. Apprendre en jouant ............................................................................................................ 16
1. Quelques conséquences de la définition du jeu .............................................................. 16
2. Développement de l’enfant et socialisation .................................................................... 17
3. L’expérience ludique ........................................................................................................ 23
C. Jouer pour apprendre .......................................................................................................... 26
1. La mise en forme éducative du jeu .................................................................................. 26
2. La situation pédagogique pour les enfants en visite familiale ......................................... 33
3. La visite familiale au musée : motivations et bénéfices recherchés ................................ 35
II. Le contexte de la recherche .................................................................................................... 39
A. Les jeux Amuse-Musées du réseau de la Chaîne de la Découverte du Parc naturel régional
des Vosges du Nord ..................................................................................................................... 39
1. Le Parc naturel régional des Vosges du Nord .................................................................. 39
2. Le réseau de la Chaîne de la Découverte et ses missions ................................................ 41
3. Les Amuse-Musées : des jeux et des animations ............................................................. 42
B. Deux jeux : deux approches distinctes ................................................................................. 45
1. Les raisons qui ont motivé le choix de ces deux jeux ....................................................... 45
2. Analyse préalable du livret-jeu : La vie mystérieuse de l’Oncle Hans au Musée de l’image
populaire (Pfaffenhoffen) ........................................................................................................ 46
3. Analyse préalable d’un jeu de piste tactile : À qui est cet uniforme ? au musée de la
Bataille du 6 août 1870 (Woerth) ............................................................................................ 66
III. Description de la méthode de collecte des données ........................................................... 76
A. Conception et mise en œuvre des outils d’analyse ............................................................. 76
1. Les interventions verbales et non verbales des enfants et de leurs parents .................. 76
2. Des questionnaires adaptés aux enfants ......................................................................... 80
B. Le déroulement du travail de terrain ................................................................................... 83
1. Constitution des échantillons de l’étude ......................................................................... 83
2. Le déroulement des enregistrements .............................................................................. 84
4

3. Le déroulement des questionnaires ................................................................................. 85
IV. Présentation et analyse des résultats des observations et des interventions spontanées 86
A. Les groupes familiaux observés et les éléments marquants de la pratique des jeux ......... 86
1. Profils des groupes familiaux ........................................................................................... 86
2. Les consultations des éléments du jeu et des unités d’exposition .................................. 89
B. Les interventions spontanées .............................................................................................. 98
1. Des échanges principalement centrés autour de la monstration lors du jeu À qui est cet
uniforme au musée de la Bataille du 6 août 1870 à Woerth................................................... 98
2. Des échanges concernant en priorité la lecture et l’écriture lors du jeu La vie
mystérieuse de l’Oncle Hans au Musée de l’image populaire à Pfaffenhoffen ..................... 107
V. Présentation et analyse des résultats des questionnaires : socialisation des enfants au musée
et appropriation des collections ................................................................................................... 118
A. Perception du musée de Woerth et du musée de Pfaffenhoffen ..................................... 118
1. Profils des répondants .................................................................................................... 118
2. Perception du musée ..................................................................................................... 119
3. La compréhension de la thématique dans chacun des deux musées ............................ 127
B. Mémorisation des œuvres ou des objets vus au cours des jeux ....................................... 131
1. Reconnaissance des uniformes militaires (musée de la Bataille de 1870, Woerth) ...... 131
2. Reconnaissance et compréhension des images populaires du musée (Musée de l’image
populaire, Pfaffenhoffen) ...................................................................................................... 140
Conclusion ..................................................................................................................................... 149
Bibliographie ................................................................................................................................. 153
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Résumé
À la découverte du musée en jouant :
Analyse théorique et étude appliquée à deux jeux Amuse-musées du réseau de la Conservation du
Parc naturel régional des Vosges du nord
Ce mémoire aborde la relation entre le jeu et l’apprentissage au musée en tant que rencontre
entre un cadrage ludique et un contenu pédagogique dont l’équilibre n’est que rarement assuré. Il
s’agit d’étudier les motivations qui président à l’investissement éducatif du jeu au musée et les
effets de celui-ci sur la visite et les apprentissages des enfants. Les apprentissages des enfants au
cours du jeu sont appréhendés à la fois du point de vue de l’appropriation du musée en tant
qu’espace et lieu de sociabilité, et du point de vue de la mémorisation et de la compréhension des
collections du musée. Cette analyse s’appuie sur l’étude de deux jeux spécifiques dans deux
musées appartenant au réseau de la Chaîne de la Découverte du Parc naturel régional des Vosges
du Nord.
Mots clés : Jeu ; Apprentissage ; Enfants ; Familles ; Musées
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Introduction
La pédagogie basée sur le jeu est utilisée depuis une vingtaine d’années par les services des
publics des musées pour favoriser l’apprentissage des enfants au musée et développer leur
curiosité et leur sensibilité envers le patrimoine. Si les professionnels des musées ont aujourd’hui
l’habitude d’associer les deux notions de jeux et d’éducation et de considérer le jeu comme un
moyen pédagogique, il faut tout d’abord remarquer que les pratiques développées et les outils mis
en place n’ont été encore que peu étudiés. Plutôt que d’opposer de façon binaire le jeu et
l’apprentissage, nous essayerons de comprendre le pourquoi de cette association et les effets de
cette dernière sur la visite des enfants en famille au musée.
Du fait de l’attractivité et des mérites attribués au jeu, le mot jeu et l’adjectif dérivé ludique
sont très souvent employés dans les musées pour désigner tout type d’activité pédagogique
proposant une démarche active aux enfants. Si le jeu est une réalité complexe qui peut prendre des
formes variées et dont les limites semblent à priori floues, cet usage extensif du mot jeu entraîne
une certaine confusion qui empêche de penser correctement le jeu dans le cadre muséal. Il
convient donc, au préalable, de redonner au jeu sa spécificité pour pouvoir déterminer ce qui
relève réellement du jeu parmi les nombreux supports pédagogiques adressés aux enfants dans les
musées. Il ne s’agit pas de proposer une définition universelle et incontestable du jeu, mais plutôt
de fournir des critères permettant de mieux cerner ce qui est jeu et ce qui ne l’est pas. Pour cela,
nous ferons un détour par la théorie du jeu telle qu’elle est pensée dans diverses disciplines
(philosophie, sciences de la communication, sociologie). Nous essayerons de confronter la
diversité des points de vue et d’en tirer une définition opérationnelle dans le cadre d’une analyse
du jeu au musée. Nous reviendrons aussi sur le sens de l’association entre jeu et apprentissage à
travers l’approche développée en psychologie, en psychanalyse, mais aussi en sciences sociales, et
qui étudie le jeu au regard du développement de l’enfant.
Le jeu au musée n'est jamais gratuit, puisque ce sont toujours des objectifs d’apprentissage et
de sensibilisation au patrimoine et à l’art qui font sa raison d’être. En effet, la tendance éducative
basée sur le jeu au musée a pour objectif de rendre la visite plus attractive pour les jeunes enfants
en recourant au jeu, de leur transmettre des connaissances et de favoriser leur compréhension du
contenu du musée. La transposition des contenus scientifiques du musée et leur investissement
dans une mise en forme ludique ont pour but de favoriser l’appropriation des collections du musée
7

ou d’un lieu de patrimoine en sollicitant la participation du jeune visiteur. Nous nous demanderons
donc en quoi consiste cet investissement pédagogique du jeu en nous penchant sur le point de vue
des concepteurs des jeux pédagogiques au musée mais aussi des familles à qui ces jeux sont
destinés. Quels sont les intentions des responsables des musées à travers cette association entre jeu
et apprentissage ? Quels sont les motivations des familles en venant et leurs attentes trouvent-elles
dans le jeu une source potentielle de satisfaction ?
Enfin, nous étudierons les effets du jeu sur la visite des enfants et leur appropriation des
collections à travers l’évaluation de deux jeux Amuse-Musées du réseau de la Conservation du
Parc naturel régional des Vosges du Nord : le livret-jeu La vie mystérieuse de l‟Oncle Hans du
musée de l’image populaire de Pfaffenhoffen et le jeu de piste tactile À qui est cet uniforme ? du
musée de la Bataille de 1870 de Woerth. Ces deux jeux présentent chacun une mise en forme
ludique différente privilégiant pour l’un plutôt la recherche d’informations et pour l’autre
l’observation.
Pour procéder à l’évaluation de ces deux jeux, nous nous interrogerons plus particulièrement
sur trois points. Une analyse préalable de ces dispositifs pédagogiques nous permettront tout
d’abord de mettre à jour les attentes des concepteurs et les pré-requis nécessaires pour jouer. Puis,
nous étudierons les effets de ces deux jeux d’une part sur la visite des enfants et d’autre part sur le
plaisir et les apprentissages liés à ces deux parcours ludiques.
Lors de la visite familiale au musée, les membres de la famille partagent ensemble une
expérience avec un message commun. La situation d’apprentissage ne se limite pas à une relation
bilatérale entre la thématique du musée et l’enfant. Ainsi que le soulignent les recherches portant
sur les apprentissages en famille dans les musées, la famille filtre les influences d’éducation, c'està-dire
les « scanne, interprète, critique, renforce, complète, contredit, reformule et transforme »
(Leichter, 1979, in Butler & Sussman, 1989, p. 34). Nous avons donc choisi d’analyser
l’apprentissage au cours de la visite puis à l’issue de cette dernière à travers l’étude des
interactions verbales au sein de familles pratiquant les deux jeux, puis par le biais de
questionnaires destinés à évaluer la socialisation des enfants grâce au musée, et la mémorisation et
la compréhension des œuvres ou objets vus au cours du jeu.
8

I. Jeu et apprentissage
A. Définition du jeu
1. Polysémie du mot jeu
La notion de jeu est une notion polysémique et parfois ambiguë. Le mot jeu est un mot
« stratifié en plusieurs niveaux de signification» (Bougère, 1995 : 13). Le vocable jeu, ainsi que le
souligne Jacques Henriot dans la Métaphore ludique est d’abord « un fait de langage », c'est-àdire
qu’il s’insère dans des logiques de communication à l’intérieur desquelles il fait sens
(Henriot, 1989 : 12). Ainsi, Henriot consacre un chapitre entier au « jeu tel qu‟on le parle », tel
qu’il est pensé par notre société. Il relève notamment trente et une acceptions différentes du
substantif jeu en français d’après le dictionnaire Littré. Sans même s’intéresser aux nombreux
usages métaphoriques du mot jeu, il est donc nécessaire d’établir quelques distinctions préalables
afin d’éviter les confusions dues à la polysémie fondamentale du terme et avant d’aborder la
pensée du jeu. Le jeu correspond en français à plusieurs niveaux de réalité. Stéphane Chauvier
dans Qu‟est-ce qu‟un jeu distingue tout d’abord sous le nom de jeu un « comportement ludique
subjectif » qu’est l’activité de jouer, c'est-à-dire une certaine situation caractérisée par le fait que
des êtres jouent, et des « dispositifs objectifs » que sont les jeux. (Chauvier, 2007 : 14). Ces
« dispositifs ludiques objectifs » renvoient eux-mêmes à deux niveaux de réalité. Le jeu est une
structure, un ensemble de règles qui existe de façon abstraite indépendamment des joueurs. Le jeu
désigne aussi le matériel de jeu, l’ensemble des objets nécessaires pour jouer. Gilles Bougère
remarque que le jeu comme objet ne doit cependant pas être confondu avec le jouet. Tandis que le
jeu est directement lié à un usage ludique qui prend la forme de règles ou de principes et qui
constituent une structure préexistante au matériel, le jouet suppose à la fois une relation à
l’enfance et une indétermination quant à l’usage. (Bougère, 2005 : 7-8).
La recherche d’une définition est nécessaire pour comprendre ce qu’il en est du jeu comme
activité subjective et du jeu comme dispositif essentiellement détachable de la personne singulière
qui y joue et du moment où elle y joue. Le premier niveau, renvoyant à une situation requiert
interprétation et pose le problème de la délimitation du domaine ludique.
9

2. Eléments pour une définition du jeu : qu’est-ce que le jeu ?
Pour distinguer les activités qui peuvent être appelées ludiques, Johann Huizinga énonce un
ensemble de critères spécifiques qui à eux seuls ne pourraient être considérés comme distinctifs
mais qui par l’addition tendent à l’être. L’approche de Huizinga dans Homo ludens a renouvelé la
pensée du jeu et c’est sur sa définition que s’appuient une grande majorité des ouvrages sur le jeu
de la 2 ème moitié du 20 ème siècle. Huizinga envisage la notion de jeu dans la culture et interroge le
jeu au regard de la signification celui-ci possède pour le joueur lui-même et aussi de la question du
plaisir ludique. Sa définition est marquée d’une exigence première : comprendre « le jeu comme
forme d‟activité, comme forme pourvue de sens, et comme fonction sociale » (Huizinga, 1951 :
20). Selon Huizinga, ce qui caractérise le jeu, c’est qu’il est « une action libre, sentie comme
« fictive » et située en dehors de la vie courante, capable néanmoins d‟absorber totalement le
joueur ; une action dénuée de tout intérêt matériel et de toute utilité ; qui s‟accomplit en un temps
et dans un espace expressément circonscrits, se déroule avec ordre selon des règles données, et
suscite dans la vie des relations de groupe s‟entourant volontiers de mystère ou accentuant par le
déguisement leur étrangeté vis-à-vis du monde habituel » (Huizinga, 1951 : 35). En définitive, le
jeu est quant à ses fonctions, « une lutte pour quelque chose ou une représentation de quelque
chose ».
Un peu plus loin dans son ouvrage, Huizinga nuance cette première définition en ne retenant
que quatre principaux critères, outre la nette différenciation du jeu avec la « vie courante », avec
l’ensemble des activités sociales. Le premier critère sur lequel il insiste est le fait que le jeu en tant
que forme indépendante se caractérise d’abord comme une action libre. La 2 ème caractéristique est
celle de la limitation spatio-temporelle du jeu. Le 3 ème critère du jeu est le caractère impératif de la
règle du jeu : « Tout jeu a ses règles » (Huizinga, 1951 : 31). Le 4 ème caractère distinctif du jeu est
le sentiment de « tension et de joie » si l’on se positionne du côté de la psychologie du joueur ou
l’incertitude des issues si l’on regarde la structure du jeu. Huizinga souligne ainsi que les deux
sont liés : « tension signifie incertitude » (Huizinga, 1951 : 31). Huizinga résume par la phrase
suivante l’ensemble de ces critères :
« Le jeu est une action ou une activité volontaire, accomplie dans certaines limites fixées
de temps et de lieu, suivant une règle librement consentie mais complètement impérieuse,
pourvue d‟une fin en soi accompagnée d‟un sentiment de tension et de joie, et d‟une
conscience d‟être autrement que dans la vie courante. Ainsi définie, la notion semble apte
à englober tout ce que nous appelons jeu, à propos d‟animaux, d‟enfants et d„hommes
adultes : performance d‟adresse, de force, d‟esprit, de hasard» (Huizinga, 1951 : 58).
10

Roger Caillois reprend et critique la définition de Huizinga dans Les Jeux et les hommes.
Caillois a retenu la plupart des critères de Huizinga, mais lui reproche de ne pas inclure les jeux de
hasard. Cependant, il faut remarquer que cette critique s’adresse à la première définition donnée
par Huizinga en début de son ouvrage, puisque nous avons vu qu’il omet de caractériser dans la
suite de son analyse l’action ludique comme une « action dénuée de tout intérêt matériel et de
toute utilité ». Caillois parle quant à lui d’improductivité du jeu. Caillois circonscrit la notion de
jeu par les six caractères suivants (Caillois, 1998 : 42-43). Le jeu est défini comme étant une
activité : « libre », « réglée », « fictive » c'est-à-dire « accompagnée d‟une conscience spécifique
de réalité seconde ou de franche irréalité par rapport à la vie courante », « incertaine » dans son
déroulement même si elle est soumise à des règles, « improductive » même quand elle implique un
déplacement de propriété à l’intérieur d’un cercle de joueurs.
Jacques Henriot reprend les critères définitionnels de Huizinga et Caillois et souligne que
chacun d’entre eux pris séparément sont propres à un grand nombre d’activités humaines (Henriot,
1989 : 171-175). Il faudrait pouvoir déterminer quelle est la spécificité de la liberté ludique, la
spécificité de l’espace du jeu et du temps du jeu, rendre compte de la spécificité de la règle
ludique. Henriot fait remarquer que l’incertitude ou l’émotion peuvent se trouver dans la plupart
des activités humaines qui méritent d’être tentées. Le caractère fictif de l’activité ludique et le
sentiment de sortie de la vie courante ne lui appartiennent pas en propre. Henriot tente ainsi de
s’éloigner dans son analyse de la définition donnée par Huizinga. En effet, si nous prenons, par
exemple, la visite de musée, cette dernière pourrait à première vue correspondre par certains
aspects à la définition donnée par Huizinga et Caillois. En dehors des visites scolaires, la plupart
des visiteurs se rendent au musée librement, de leur plein gré sur leur temps de loisirs. La visite de
musée est réglée par un certain nombre de comportements à suivre pour ne pas gêner les autres
visiteurs, mais aussi profiter pleinement de la visite. La visite de musée est définie dans le temps et
l’espace et est improductive matériellement. L’expérience muséale est également caractérisée par
sa nature autotélique qui provoque l’absorption du récepteur dans l’activité de perception. Cette
expérience particulière nommée par Csikszentmihalyi comme l’expérience optimale ou the « flow
experience » (Csikszentmihalyi, 2002) procure un sentiment d’évasion, définie comme la faculté,
grâce à l’expérience, de se détacher du monde quotidien, de s’abandonner, de s’élever, de s’en
remettre à ses forces supérieures. De plus, l’expérience de musée vécue par les individus peut être
également source de surprise puisque ces derniers ne connaissent que très rarement l’intégralité
des œuvres ou objets qu’ils vont rencontrer au cours de leur parcours dans le musée. Nous
comprenons donc que pour pouvoir envisager l’étude du jeu en contexte muséal, il convient
encore d’approfondir la définition du jeu.
11

Le jeu est « une chose dont chacun parle, que tous considèrent comme évidente» et de pourtant
difficile à caractériser (Henriot, 1989 : 9). Si le jeu est difficile à définir, c’est que le domaine
ludique couvre une réalité multiforme et comporte des frontières floues. Ainsi, selon la formule de
Reynolds traduite par Bruner, « le caractère ludique d‟un acte ne provient pas de la nature de ce
qui est fait mais de la manière dont c‟est fait…Le jeu ne comporte aucune activité instrumentale
qui lui soit propre. Il tire ses configurations de comportements d‟autres systèmes affectifs
comportementaux » (Reynolds, 1972 cité par Bruner, 1983 : 223-224). À défaut de savoir si la
chose dénommée jeu existe, il est certain pour Henriot qu’existe du moins une idée de
jeu (Henriot, 1989 : 9, 10, 85). « L‟idée de jeu […] est l‟idée que l‟on se fait, dans un groupe
social donné, pris dans un moment donné de son histoire, de ce que c‟est jouer. » (Henriot, 1989 :
25). L’idée que l’on se fait du jeu consiste à se représenter un mode de conduite, en relation avec
une forme de situation : « La clé de la question du jeu tient donc à la mise en place de
l‟articulation des deux concepts de conduite et de situation » (Henriot, 1989 : 216). L’analyse
d’Henriot s’attache à définir les éléments qui, sur le plan structural, font d’une situation un jeu
potentiel et qu’il théorise sous le nom de « jouabilité ». Voici la définition du jeu donnée par
Henriot en conclusion de son ouvrage :
« On appelle jeu tout procès métaphorique résultant de la décision prise et maintenue de
mettre en œuvre un ensemble plus ou moins coordonné de schèmes consciemment perçus
comme aléatoires pour la réalisation d‟un thème délibérément posé comme arbitraire »
(Henriot, 1989, p. 300).
Tout d’abord les mots « thème » et « schème » correspondent respectivement à ce que l’on
pourrait nommer communément le but du jeu et les moyens pour l’atteindre. Le thème ludique se
présente donc comme un thème à réaliser. Ce qui distingue le thème ludique des autres fins
poursuivies par les activités humaines, c’est que la conduite du thème ludique est « toujours plus
ou moins arbitraire » dans le sens où il résulte d’une décision du joueur. Le mot « arbitraire »
désigne ici une décision individuelle, laquelle met le décideur face à ses responsabilités. Le
caractère plus ou moins arbitraire du thème ne se manifeste pas seulement dans la décision relative
à la fin poursuivie, mais on le trouve aussi au niveau des règles que le joueur s’impose de
respecter pour y parvenir. Colas Duflos dans Jouer et philosopher conteste la légitimité de la
séparation entre le thème ludique et les règles du jeu. Il récuse la conception du thème chez
Henriot comme « structure architectonique » qui comprendrait à titre de fin, la fin elle-même et
les conditions obligatoires du succès. Selon Duflos, « le thème n‟est rien d‟autre qu‟une règle qui
ne se distingue absolument pas et qui ne doit pas en droit être distinguées des autres, parce
qu‟elle n‟a pas de sens à part » (Duflos, 1997 : 49).
12

Henriot insiste sur le fait qu’on ne saurait concevoir de jeu qui soit totalement dépourvu de
règles. Ceux qui sont désignés comme des jeux sans règle le sont abusivement à l’instar du
Squiggle souvent cité par Winnicott comme jeu sans règle. (Winnicott, 1971 : 165). Ce dernier
était proposé par Winnicott comme support de relations avec les enfants lors de l’analyse. Le
Squiggle consiste à dessiner un tracé libre et à le faire transformer par le partenaire de jeu. Mais, il
y a bien ici à la fois décision par l’analyste et l’enfant d’agir conformément à une règle (faire un
gribouilli puis le faire transformer par l’autre joueur) et acceptation de cette règle comme support
de leur action. Vygotski affirme également qu’il n’existe pas « une telle chose qu‟un jeu sans
règle » et que même « la situation imaginaire contient des règles de comportement, bien qu‟il ne
s‟agisse pas de règles explicites et formulées à l‟avance » (Vygotski, 1933 : 9). Henriot met en
évidence le caractère spécifique de la règle du jeu qui est « le fait qu‟elle ne soit obligatoire que
pour celui qui décide de jouer et seulement pendant le temps qu‟il joue […] les règles du jeu n‟ont
de valeur que pour autant que l‟on accepte de s‟y soumettre » (Henriot, 1989 : 229). De plus,
quand on parle de règles d’un jeu, on associe deux réalités : à la fois le système des règles
objectivement formulées qui structurent le jeu (« règles de structuration d‟un système »), et
l’ensemble des règles que le joueur s’impose quand il entreprend de jouer (« règles d‟organisation
d‟une conduite »).
Colas Duflos explore plus avant le lien spécifique qui s’établit dans le jeu entre la règle (« la
légalité ») et la liberté, et qu’il définit sous le concept de « légaliberté » : « Le jeu est l‟invention
d‟une liberté dans et par une légalité » (Duflos, 1997 : 57). La liberté ludique est liberté dans une
légalité « parce qu‟elle est d‟abord strictement encadrée par elle » et ensuite au sens où « cet
encadrement par la règle maintient au joueur une latitude, une marge de manœuvre ». (Duflos,
1997 : 58-59). Ainsi dire que la liberté ludique est dans légalité, c’est dire que cette légalité
l’encadre et lui laisse de l’intérieur une place, mais c’est surtout dire qu’il s’agit d’une liberté
réglée. « Les règles du jeu créent des possibles et donc des options entre lesquelles il faut choisir.
Ce choix réglé entre des décisions rendues possibles par la légalité ludique, c‟est cela que nous
appelons liberté ludique » (Duflos, 1997 : 72).
Selon Henriot, le joueur agence un certain nombre de schèmes pour parvenir au but du jeu,
mais ces moyens sont « consciemment perçus comme aléatoires ». L’information dont dispose le
joueur n’est jamais complète, et la décision qu’il prend à tel ou tel moment de son jeu n’est donc
jamais totalement assurée de son efficacité. Colas Duflos préfère l’expression « activité
incertaine » employée par Caillois. Ce terme décrit mieux selon lui le fait que l’une des
« composantes essentielles du jeu est l‟incertitude des résultats de l‟action du joueur ». Mais,
cette critique n’a pas vraiment lieu d’être, car Henriot parle lui-même d’incertitude pour qualifier
le climat dans lequel se trouve le joueur quand il joue et propose de généraliser la formule de
13

Parlebas concernant les situations motrices : « Chaque joueur est un centre de décision et d‟action
original dont les comportements sont porteurs d‟imprévu » (Parlebas, 1981 : 84). Etant donné que
le joueur ne peut jamais embrasser la situation dans sa totalité, « jouer c‟est toujours décider dans
l‟incertain » (Henriot, 1989 : 239).
L’originalité de l’analyse d’Henriot réside surtout dans l’éclairage de ce que Caillois
définit comme l’aspect fictif du jeu ou Huizinga comme la conscience d’être « autrement que dans
la vie courante » par la notion de «procès métaphorique ». Le jeu est qualifié de « métaphorique »
par Henriot car il opère à la fois une mise à distance et un déplacement, une transposition
intérieure du joueur par rapport à lui-même sur fond d’absence. Le propre du jeu consiste à
« prendre l‟absence pour étoffe, à dépasser le présent dans le sens de l‟avenir, à transformer le
réel par le moyen du possible en lui donnant la dimension de l‟imaginaire ». La première
expression du dessein de jouer réside selon Henriot dans l’établissement d’une « imperceptible
mais active distance intérieure, instaurée par le joueur entre ce qu‟il fait par jeu et ce qu‟il ferait
si, le faisant il ne jouait pas ». Il s’agit avant tout d’un « déplacement du joueur par rapport à luimême,
d‟un éloignement qui se produit en quelque sorte verticalement dans le sens de la hauteur »
(Henriot, 1989 : 256). Cette maîtrise de l’absence par la transposition ludique correspond à une
redistribution du réel par la pensée, un travail de mise en scène. On comprend donc que le jeu crée
dans la réalité et en partie avec les moyens que la réalité lui fournit, une réalité autre régie par
d’autres rapports. La transposition ne s’effectue pas seulement sous la forme d’un déplacement,
d’une distanciation par rapport au monde tel qu’il est. L’abstraction dont use le joueur s’exerce
encore à l’égard de son jeu : « Jouer c‟est toujours plus ou moins jouer à jouer » (Henriot, 1989,
260). Par là, Henriot signifie que la conscience individuelle du joueur est à la fois des deux
mondes : le monde réel et le monde ludique qui s’instaure dans le monde réel. La conscience
individuelle du joueur est simultanément dans le jeu et hors du jeu.
« On ne joue jamais qu‟au second degré » (Henriot, 1989 : 260), c’est aussi ce qu’explique
Gregory Bateson quand il souligne que la métacommunication accompagne le jeu dans son
déroulement : « Ce phénomène (le jeu) n‟est possible que si les organismes qui s‟y livrent soient
capables d‟un certain degré de métacommunication, c'est-à-dire s‟ils sont capables d‟échanger
des signaux véhiculant le message : « ceci est un jeu » » (Bateson, 1977 : 209). Dans la
métacommunication, l’objet du discours est la relation entre les locuteurs. La métacommunication
transforme des signes en signaux, leur donne une signification qui n’est pas leur dénotation
habituelle. La métacommunication est un message de cadrage qui conduit à dépasser le cadre
primaire pour introduire un cadre secondaire qui transforme les énoncés de celui-là et leur confère
de nouvelles valeurs. Le passage du cadre primaire au cadre secondaire ne veut pas dire pour
14

autant que le premier niveau de sens est totalement abandonné. L’intérêt du jeu pour Bateson
réside justement dans la co-présence des deux cadres et à leur distinction. Erving Goffman dans
Les cadres de l‟expérience explique que cadrer l’expérience, c’est la modifier, lui donner un autre
sens qui implique une interprétation différente selon les acteurs. Le jeu apparaît ainsi comme la
modalisation d’une activité ordinaire, ce qui implique des modifications (Goffman, 1991 : 50-51) :
« La fonction normale de l‟action n‟est pas réalisée » ; « certains actes sont exagérés » ; « le
caractère répétitif est très marqué » ; la séquence qui sert de modèle n’est pas suivie fidèlement,
mais est l’objet de répétitions, de coupures, d’insertions d’autres séquences ; le jeu collectif
l’emporte sur le jeu solitaire ; « des signaux existent vraisemblablement pour indiquer le début et
la fin du jeu ». Le jeu traduit la présence d’un « mode » à l’œuvre dans le processus de
transformation : « Par mode, j‟entends un ensemble de conventions par lequel une activité donnée,
déjà pourvue d‟un sens par l‟application d‟un cadre primaire, se transforme en une autre activité
qui prend la première comme modèle mais que les autres participants considèrent comme
sensiblement différente » (Goffman, 1991 : 52). Si le cadrage secondaire n’est pas perçu, il y a
risque de confusion, de mésinterprétation faute de voir le cadrage spécifique de l’activité. La
modalisation à l’œuvre dans le jeu transforme un matériau qui a déjà sens et sur lequel elle
s’appuie. Des indices permettent d’établir le début et la fin de la transposition ; il s’agit de
« parenthèses temporelles » qui établissent strictement ses limites. « De la même manière, des
parenthèses spatiales indiqueront l‟espace réservé à la modalisation pour la circonstance, son
extension et ses limites » (Goffman, 1991 : 54).
De l’ensemble de ces analyses, nous retiendrons particulièrement l’importance du cadre
ludique : cadrage légalitaire et cadrage de la modalisation. D’une part, le jeu est une activité
caractérisée par des règles qui ne valent que pour celui qui décide de jouer et seulement dans un
temps et un espace défini, et qui permettent de produire des possibilités de décisions dont l’issue
est incertaine. Ces règles sont donc créatrices d’une liberté réglée. D’autre part, le jeu s’inscrit
dans un cadrage spécifique issu de la transformation d’un cadrage antérieur et qui s’exprime dans
la métacommunication.
15

B. Apprendre en jouant
1. Quelques conséquences de la définition du jeu
L’apprentissage est à envisager dans un sens large qui ne concerne pas seulement le plan
cognitif, mais aussi sensori-moteur, émotionnel et social. Nous avons caractérisé le jeu par son
double cadrage : cadrage légalitaire et cadrage de la modalisation. Le premier cadrage implique
non seulement la relation à la règle, mais aussi l’exercice de la décision et l’action dans
l’incertitude. Le cadrage de la modalisation induit lui la maîtrise du second degré (c'est-à-dire une
distanciation par rapport au monde réel, mais aussi une distanciation à l’égard de son jeu). Nous
pouvons déjà essayer de tirer quelques conséquences de la proposition de définition du jeu
abordée précédemment en ce qui concerne la relation entre le jeu et l’apprentissage.
Considérant la décision de l’enfant d’entrer dans le jeu, et la suite de décisions à prendre dans
le développement du jeu, Duflos fait valoir que le jeu possède d’un point de vue pédagogique « le
mérite de favoriser un apprentissage d‟une liberté, protégée, favorisée par lui, dans un monde
enfantin qui n‟est que trop semé d‟interdits, d‟ordres et de commandements » (Duflos, 1997 : 58).
Cette liberté ludique est une liberté inventive qui dans la marge de manœuvre qu’elle possède,
invente des solutions à des problèmes, des nouvelles pratiques, des nouveaux styles de jeu. Nous
avons vu précédemment que le jeu a pour vocation de fabriquer de l’incertitude. Ainsi la décision
dans l’incertitude est déjà affirmation de soi et apprentissage en ce qui concerne la maîtrise de
l’aléatoire. Quand il joue, le joueur décide d’accepter d’encourir un certain risque qu’il a choisi et
ainsi ce choix le rend responsable de ce qu’il advient : « Ce qui définit le jeu n‟est pas le simple
fait que la situation présente est en elle-même une structure aléatoire : c‟est le fait que le sujet qui
s‟y engage assume sa responsabilité en allant au-devant d‟un avenir dont il n‟est pas parvenu à
supprimer le plus grand nombre possible d‟aléas » (Henriot, 1989 : 244). Ainsi que le souligne
Bougère, décider c’est « développer des compétences en matière de décisions », d’initiative
(Bougère, 1997 : 50). Mais si l’enfant est libre de ses décisions et l’activité incertaine, il paraît
difficile d’atteindre des objectifs pédagogiques strictement définis au préalable.
Nous avons également vu avec Bateson que « ce phénomène (le jeu) n‟est possible que si les
organismes qui s‟y livrent soient capables d‟un certain degré de métacommunication, c'est-à-dire
s‟ils sont capables d‟échanger des signaux véhiculant le message : « ceci est un jeu » (Bateson,
16

1977 : 209). Étant donné que le jeu est une transposition d’un cadrage primaire, une modalisation,
le jeu développe des compétences en matière de maîtrise de la communication chez l’enfant,
puisque pour passer du cadrage primaire au cadrage secondaire, les enfants doivent gérer les
indicateurs de la métacommunication, négocier les règles avec les partenaires, construire le cadre
du jeu commun, dont Bruner a montré son importance dans le développement du langage chez les
jeunes enfants (Bruner, 1987).
Bruner considère le jeu comme une activité sans conséquence, sans risque. En vertu même de
sa frivolité, il peut être pour l’enfant un espace privilégié d’expérience : ce dernier peut y réaliser
des expériences qu'il n'oserait faire sous la contrainte de la vie ordinaire : « Dans le jeu, la gravité
des conséquences que comportent les erreurs ou les échecs se trouve atténuée […]. Il s‟agit d‟une
activité entreprise pour elle-même et non pas pour autrui. Le jeu est donc un superbe moyen
d‟exploration qui suscite une sorte de courage spécifique » (Bruner, 1986 : 83). Selon Reynolds,
ce sont les conséquences du jeu sur le réel qui permettent de distinguer le jeu du réel : « Le
caractère ludique d'un acte ne provient pas de la nature de ce qui est fait mais de la manière dont
c'est fait… Le jeu ne comporte aucune activité instrumentale qui lui soit propre. [..] Dans le jeu,
en fonctionnement normal, le comportement se trouve dissocié de ses séquelles normales. C'est là
que résident à la fois la flexibilité et la frivolité du jeu » (Reynolds, 1972, cité par Bruner, 1983 :
224).
2. Développement de l’enfant et socialisation
Les théories développées en psychologie et en psychanalyse ont cherché à expliquer le jeu de
l’enfant et à étudier ce qui est mis en œuvre par les enfants dans les comportements ludiques. Dans
le cadre des théories psychologiques, le jeu est considéré comme un comportement essentiel qui
ne peut exister que parce qu’il est nécessaire au développement. « Les psychologues de l‟enfant
ont utilisé le jeu pour illustrer des caractéristiques de divers processus fondamentaux du
développement et leur mise en œuvre par l‟enfant dans des comportements naturels » (Hurtig,
1969 : 334).
Dans La formation du symbole chez l‟enfant, Jean Piaget souligne tout d’abord qu’il n’y pas
pour lui d’opposition tranchée entre le jeu et les autres comportements : « Le jeu ne constitue pas
une conduite à part ou un type particulier d‟activités parmi d‟autres : il se définit seulement par
17

une certaine orientation de la conduite, ou par un « pôle » général de tout activité, chaque action
particulière se caractérisant ainsi par sa situation plus ou moins voisine de ce pôle et par le mode
d‟équilibre entre les tendances polarisées » (Piaget, 1945, réed. 1976 : 154). Les critères proposés
par Piaget pour définir cette orientation ludique sont les suivants : le caractère désintéressé ou
autotélique, la spontanéité, le plaisir, le manque relatif d’organisation dans le jeu, la libération des
conflits, la surmotivation. Piaget propose une classification des jeux en parallèle des stades de
développement de l’intelligence chez l’enfant. Le jeu d’exercice renvoie au développement
sensori-moteur de l’enfant (0-2 ans), donc aux premières formes de l’intelligence qui commence
par être pratique ou sensori-motrice. À travers les jeux d’exercice, l’enfant opère la construction
du réel. Le jeu symbolique apparaît à la fin de la deuxième année. C’est le « comme-si », la
possibilité d’utiliser un objet devenu symbole d’autre chose. Il trouve son origine dans les deux
derniers stades du développement sensori-moteur, lorsque l’enfant commence à appliquer un
schème sensori-moteur à vide. Le jeu de règles a son origine dans le jeu symbolique et plus
particulièrement les jeux de rôle où la coopération doit nécessairement intervenir, mais aussi dans
de la socialisation de jeux d’exercice simple. Les règles sont soit transmises d’une génération à
l’autre soit spontanées ; ce qui correspond à d’une part des jeux de règles devenus institutionnels
et d’autre part des jeux de règles de nature contractuelle et momentanée. Les jeux de règles aident
et sanctionnent le passage de la centration sur le moi à l’ouverture sur le monde et la socialisation.
Bougère dans Jeu et éducation remarque que l’objet de la démarche de Piaget n’est pas
d’expliquer le jeu mais essentiellement le développement d’un outil essentiel à l’intelligence, le
symbole. « Seule l‟importance du jeu symbolique justifie ce développement sur le jeu en général,
mais fortement centré sur l‟explication de celui-là » (Bougère, 1995 : 105). Cette fonction
symbolique se développe en trois moments. L’imitation est le point de départ des fonctions
symboliques. Elle est tournée vers l’accommodation qui est une action transformant les schèmes
de conduite avec le principe de réalité. Par l’accommodation, l’enfant modifie sa conduite pour
s’adapter au milieu. Le jeu se distingue ensuite de l’imitation par le rôle essentiel de l’assimilation,
c'est-à-dire « l‟incorporation des objets dans les schèmes de conduite ». Le jeu est ainsi perçu
comme consolidation des acquisitions antérieures et donc comme un levier de l’apprentissage chez
l’enfant (Piaget, 1945, réed. 1976 : 128-148).
Dans un article de 1967 pour la revue Soviet Psychology, Vygostki traite du jeu et de son rôle
dans le développement de l’enfant. Vygotski appréhende le développement de l’enfant de façon
globale et refuse la séparation du cognitif des dimensions émotionnelles et sociales. Vygotski
considère la question de la motivation à l’activité comme essentielle et le jeu apparaît comme un
support de motivation. Pour Vygotsky, le jeu en situation imaginaire introduit une nouvelle forme
de comportement dans laquelle l’enfant est libéré des contraintes situationnelles de la première
18

enfance à travers son activité dans une situation imaginaire. Dans le jeu, l’enfant agit en lien avec
une situation mentale et non une situation visible et les choses perdent leur caractère déterminant.
L’action dans une situation qui est conçue sur un mode imaginatif apprend à l’enfant à guider son
comportement non pas seulement en fonction de la perception immédiate des objets ou de la
situation qui les affectent immédiatement, mais aussi en fonction de la signification de la
situation. « Dans le jeu, l‟enfant crée la structure signification/objet, où l‟aspect sémantique
domine et détermine son comportement » (Vygotski, 1967 : 13). L’enfant se concentre sur la
signification coupée des objets, mais la séparation des mots et des choses requiert un pivot sous la
forme d’une autre chose. Vygotski prend l’exemple du bâton qui devient objet substitut pour le
cheval qu’il représente, c'est-à-dire que le bâton sert à couper la signification de cheval du cheval
réel et de la conférer au bâton.
Selon Bruner, « le jeu fournit l‟occasion d‟essayer des combinaisons de conduites qui, sous
des pressions fonctionnelles, ne seraient pas tentées » (Bruner, 1983 : 53). C’est en conséquence
un espace d’innovation, de création pour l’enfant : « Dans le jeu la gravité des conséquences que
comportent les erreurs ou les échecs se trouve atténuée. Au fond, le jeu est une activité très
sérieuse, mais qui n‟a pas de conséquences frustrantes pour l‟enfant. Il s‟agit en un mot d‟une
activité entreprise pour elle-même et non pas pour autrui. Le jeu est donc un superbe moyen
d‟exploration qui suscite un courage spécifique » (Bruner, 1986 : 83). La règle produit un monde
spécifique marqué par le second degré dans lequel l’enfant peut sans risque inventer, essayer dans
cet univers. Le jeu est un moyen de « minimiser les conséquences de ses propres actes et, par
conséquent, d‟apprendre dans une situation comportant moins de risques » (Bruner, 1983 : 52).
Jérôme Bruner poursuit la voie ouverte par Piaget dans la question du jeu. Le jeu est le lieu d’une
assimilation, mais surtout le lieu d’un dialogue avec les autres, interaction d’où surgit notamment
la nomination et le langage sous forme de routines qui seront ensuite réintroduites et réorganisées
dans d’autres contextes : « le jeu a donc pour effet de permettre la maturation de certaines
routines modulaires en prévision de leur intégration ultérieure à des programmes d‟action plus
larges » (Bruner, 1983 :101).
Quant au psychanalyste Winnicott, il établit que le jeu existe comme espace « potentiel »,
c'est-à-dire comme une aire d’expérience opposée, d'une part, à la réalité psychique intérieure ou
personnelle et, d'autre part, au monde existant dans lequel vit l'individu, monde qui peut être
objectivement perçu. Cette aire d’expérience intermédiaire ou « transitionnelle » entre l’objectif et
le subjectif est fondamentale pour le développement de la maturité de l’enfant et l’acquisition de
l’expérience culturelle. Le jeu qui se met en place dans une aire intermédiaire de la réalité permet
d’accéder à la créativité : « C‟est en jouant, et seulement en jouant, que l‟individu, enfant ou
adulte, est capable d‟être créatif et d‟utiliser sa personnalité toute entière. C‟est seulement en
19

étant créatif que l‟individu découvre le soi » (Winnicott, 1975 : 76). Winnicott analyse le jeu du
côté de l’émotion et sa gestion : c’est pour nier symboliquement les absences de la mère que
l’enfant fantasme en la projetant sur un « objet transitionnel » auquel l’enfant attache alors des
activités de plaisir ayant valeur substitutive de la mère. L’objet transitionnel apparaît comme un
moyen de passage dès lors que les activités de l’enfant ne se centrent plus sur lui-même, mais
perçoit l’environnement en tant que tel : « Il existe un développement direct qui va des
phénomènes transitionnels au jeu, du jeu au jeu partagé et de là aux expériences culturelles »
(Winnicott, 1975 :72-74).
À travers cette brève présentation des théories psychologiques du jeu, on constate que si le jeu
semble contribuer au développement de la pensée chez l’enfant et prélude au langage, les
théoriciens le limitent principalement au moment de l’enfance, et plus particulièrement dans la
petite enfance au travers des jeux d’exercice sensori-moteurs et symboliques. Mais, si les jeux
peuvent être considérés comme des activités dans lesquelles les enfants se construisent
personnellement, il ne faudrait pas sous-estimer le fait que le jeu est aussi un fait social. Nous
étudierons donc en quoi le jeu entre également dans le processus de socialisation de l’enfant.
Ludovic Gaussot dans Le jeu de l‟enfant et la construction sociale de la réalité (Gaussot,
2001 : 22-29) distingue quatre approches sociologiques pour aborder le questionnement croisant
l’enfance, le jeu et le monde social. La perspective sociohistorique a tout particulièrement
développé l’idée que le sens du jeu et le rapport aux jeux (et à l’enfance) n’ont pas été toujours ce
qu’ils sont. En tant qu’activité sociale et produit culturel, le jeu s’inscrit dans des formes
collectives soumises à la variabilité socio-historique. La perspective socio-économique étudie le
fait que les valeurs et les idéaux des sociétés de consommation contemporaines se reflètent dans
les jeux à travers notamment les jeux de finance qui encouragent un nouveau style de vie.
Selon Gaussot, La perspective socioculturelle « consiste à rappeler notamment que la société
est divisée sexuellement, et que cette division (ou domination) se lit tout particulièrement dans les
jeux et surtout les jouets offerts aux enfants, soulignant l‟investissement des activités ludiques
opéré dans le cadre plus large de la structuration sexuelle des pratiques éducatives » (Gaussot,
2001 : 25-26). Au-delà de la différenciation sexuée des jeux, il faudrait considérer plus largement
l’existence d’une culture ludique, définie par Bougère comme « un ensemble de règles et
significations que le joueur acquiert et maîtrise dans le cadre de son jeu » (Bougère, 2005 : 106).
L’effet premier du jeu est d’apprendre cette culture particulière qui est celle du jeu. « En jouant,
on apprend avant tout à jouer », c'est-à-dire à intégrer les procédures préexistantes qui produisent
le jeu. La culture ludique, à l’instar de la culture vue par Howard Becker, est ce qui est partagé
20

pour agir et désigne « les ressources sur lesquelles les individus s‟appuient pour coordonner leurs
activités » (Becker, 1999 : 22).
Enfin la sociologie cognitive et plus particulièrement l’interactionnisme symbolique apportent
« des outils théoriques pour appréhender l‟articulation entre le jeu, la construction de soi et la
construction sociale de la réalité». Georges Herbert Mead accorde une place éminente au jeu dans
la formation de la personnalité sociale (Mead, 1934). Mead distingue le jeu libre (play) et le jeu
réglementé (game) qui sont définis comme des facteurs dans la formation du soi, c'est-à-dire de la
personnalité dans ce qu’elle a de conscient et de réfléchi. Le jeu libre et le jeu réglementé
participeraient à un processus social d’interaction et d’intériorisation des rôles d’autrui. Dans le
jeu libre (consistant à jouer, par exemple, à la maman avec sa poupée ou au policier et au voleur),
l’enfant assume à son gré différents rôles, les comprend et les intègre. Dans le jeu réglementé,
l’enfant doit être capable de prendre l’attitude de tout individu qui participe à la partie,
d’intérioriser tous les rôles différents sous la forme d’un tout cohérent. Tandis que dans le jeu
libre, l’enfant assume le rôle des autres (« l’autrui significatif ») et que les différents rôles ne sont
pas liés entre eux, au contraire dans le jeu réglementé l’enfant assume un rôle organisé dans un
tout unifié (« l’autrui généralisé »), ce qui permet précisément à la conscience de soi de s’élaborer,
mais aussi à la norme collective. Dans cette même perspective, L. Gaussot se référence à l’analyse
de Reis (1994) qui met en lumière la logique à l’œuvre dans les jeux traditionnels que pratiquent
les enfants et donne à voir les démarches intellectuelles et sociales de ces derniers. Il a observé
que c’est par le jeu que « le monde enfantin s‟essaie à la vie adulte ». Le jeu représenterait alors
plus qu’une « pédagogie parallèle » : « c‟est loin de l‟école que les enfants apprennent. » Par delà
sa fonction de loisir, le jeu serait le lieu privilégié dans lequel les enfants déconstruisent
mentalement, décomposent en unités plus simples, les concepts, principes, règles qui organisent la
vie sociale qui sont ensuite réagencés, reconstruits. La conduite complexe et hétérogène des
adultes décomposée en une série de concepts leur deviennent compréhensibles au moyen de
l’action. Reis essaie de montrer que l’une des caractéristiques du jeu enfantin est la création de
situations fictives où les enfants adoptent le rôle, exécutent les actions et établissent les relations
typiques des adultes : « Ils regardent le monde conceptuel des adultes, le démontent, l‟assimilent,
le pratiquent ».
Nous conclurons cet aperçu du rôle du jeu dans le développement psychologique et la
socialisation de l’enfant en évoquant le fait que certaines recherches les plus récentes tendent à
remettre en cause les relations établies entre jeu et apprentissage. Brian-Sutton Smith dans The
Ambiguity of Play (1997) met à jour sept rhétoriques qui ont sous-tendu et orienté la pensée du
jeu. Smith entend le mot rhétorique au sens de « discours persuasif ou narration implicite, plus ou
21

moins volontairement adapté par les membres d‟un groupe pour persuader les autres de la
véracité et de l‟intérêt de leurs croyances » (Brian-Sutton Smith, 1997 : 8). Il s’agirait ainsi moins
de démonstrations scientifiques que de développements théoriques pour justifier certaines idées
relatives au jeu. Parmi celles-ci, la « rhétorique du progrès » a dominé les études sur le jeu de
l’enfant et pose le jeu comme le domaine du développement où les animaux et les enfants (mais
non pas les adultes) s’adaptent et se développent à travers le jeu. B-S. Smith met en avant le fait
que cette vision du jeu a été plutôt supposée que démontrée. « De nombreux éducateurs durant les
deux derniers siècles semblent avoir eu besoin de se représenter les imitations ludiques comme
une forme de socialisation et de la croissance morale, sociale et cognitive à tel point qu‟ils ont
perçu le jeu comme étant d‟abord lié au développement plutôt qu‟au plaisir » (Brian-Sutton
Smith, 1997 : 9-10). Peter K. Smith (in Pellegrini, 1995 : 3-21) revient sur son itinéraire de
chercheur partant de la pensée dominante concernant l’évidence de l’apport du jeu au
développement de l’enfant, et évoluant vers une perspective critique au fur et à mesure de
l’évolution de son travail scientifique. P. K Smith a reproduit certaines observations effectuées
dans des études prouvant l’apport du jeu, en obtenant des conclusions non positives. Il impute
notamment la différence à la neutralité de l’observateur ou à la volonté de prouver l’effet positif
du jeu. L’observateur a pu dans certains cas donner inconsciemment des indices aux enfants, noté
avantageusement les enfants ou surinterprété les résultats. Ainsi la « rhétorique du progrès » dont
parle B-S Smith l’emportait alors sur la valeur scientifique. De plus, certaines études tendent
aujourd’hui à montrer que dans bien des cas rien ne prouve qu’un apprentissage relève de la
spécificité du jeu, ou que l’insertion de cet apprentissage dans le jeu améliore les conditions
d’apprentissage. Thomas G. Power fait le constat suivant dans son ouvrage Play and exploration
in children and animals (Thomas G. Power, 2000 : 394) :
« Malgré la fréquence avec laquelle les théoriciens ont affirmé que le jeu contribuait au
développement des enfants et des animaux, la recherche permet de tracer quelques
conclusions générales. Bien que les enfants qui montrent les niveaux d‟implication et de
complexité les plus élevés dans le jeu réalisent des scores élevés à des tests de
développement cognitif et social, la recherche expérimentale ne permet pas de tirer des
déductions assurées sur la causalité de cette corrélation. La même chose est vrai des
études sur le jeu parent-enfant et le développement de l‟enfant ».
Power conclut en disant qu’il ne s’agit pas de rejeter toute contribution du jeu au développement,
mais de dire que « nous n‟en savons rien ». « Les enfants et les petits de beaucoup d‟autres
espèces passent un temps considérable à jouer, et c‟est probable que des apprentissages
importants ont lieu dans ce contexte. Toutefois, il n‟apparaît toujours pas clairement ce qui est
appris et comment ces apprentissages se produisent.»
22

3. L’expérience ludique
Au regard de ces analyses, la question du rapport du jeu et de l’apprentissage peut être posée.
Les théories psychologiques et socio-cognitives réfléchissent sur la contribution du jouer au
développement de l’enfant, mais aussi dans la construction de soi et de la réalité sociale.
L’approche socio-culturelle souligne que le jeu est une construction sociale et que le jeu n’est pas
donné. Il doit lui-même faire l’objet d’un apprentissage. L’enfant doit apprendre à jouer, c'est-àdire
apprendre la culture du jeu. Le jeu renvoie à la fois à une expérience individuelle singulière et
à une forme de participation collective à une culture. Les apprentissages dont semble porteur le jeu
ne sont ni dans les contenus du jeu ni dans sa finalité, mais s’élaborent dans des situations qui ne
sont pas intentionnellement construite pour l’apprentissage. Le jeu semble caractérisé à la fois par
une richesse potentielle des contenus culturels, et des processus de construction, de transformation
de ces mêmes contenus. En tant qu’il est une construction sociale et culturelle, en tant qu’il
transforme des éléments extérieurs en leur donnant de nouvelles significations, le jeu possède en
lui-même un potentiel éducatif. Bougère rapproche le jeu de la notion d’éducation informelle : « Si
le jeu est éducatif, ce serait donc d‟un point de vue informel, c'est-à-dire comme un effet qui
accompagnerait cette expérience sans qu‟elle soit visée » (Bougère, 2005 : 153). Le jeu n’est pas
une activité ou une situation éducative, mais il peut générer une expérience qui a des effets
éducatifs et ceci en dehors de toute mise en forme éducative.
Toutefois, il ne faut pas oublier que l’enfant ne joue pas pour apprendre, mais pour le plaisir
qu’il va en retirer. L’effet recherché par le joueur renvoie au plaisir. Parmi les auteurs qui se sont
interrogés sur le jeu, nombreux sont ceux qui ont dit quelque chose du plaisir qu’il procure. Peu
d’entre eux en revanche ont consacré leur recherche à comprendre en quoi consistait ce plaisir.
Les psychologues partant des observations de Groos sur le jeu chez les animaux ont tout d’abord
décrit le plaisir du jeu comme un plaisir fonctionnel lié à l’harmonieux fonctionnement du corps
ou de l’intelligence. Piaget et Château ont montré également que ce plaisir fonctionnel se redouble
du plaisir que le sujet trouve à prendre conscience des pouvoirs que lui révèle l’exercice
harmonieux de ses fonctions. Le jeu est une « activité gratuite dont le principe est la jouissance
née de la réussite trouvée dans l‟accomplissement des fonctions propres » (Château, 1973 : 377).
D’autres ont lu dans le plaisir du jeu celui que procure sa fonction cathartique de défoulement des
forces, des instincts et des sentiments. Jean Château note également le plaisir qu’ont les enfants
d’obéir scrupuleusement à des règles arbitraires et constate qu’il y a dans le jeu des enfants ce
plaisir d’être au principe d’une action, ce plaisir d’être cause. Huizinga remarque que le jeu est
« capable d‟absorber totalement le joueur » (Huizinga, 1951 : 35) et qu’il est accompagné d’une
23

« sentiment de tension et de joie » (Huizinga, 1951 : 58). Roger Caillois souligne que les jeux
s’organisent selon deux pôles antagonistes (Caillois, 1998 : 75-87) : la Paida (la turbulence), soit
« un principe commun de divertissement, de turbulence, d‟improvisation libre et
d‟épanouissement insouciant », et le Ludus (la règle), c'est-à-dire « une tendance complémentaire
inverse à quelques égards de sa nature anarchique et capricieuse : un besoin croissant de la plier
à des conventions arbitraires, impératives et à dessein gênantes, de la contrarier toujours
davantage en dressant devant elle des chicanes sans cesse plus embarrassantes, afin de lui rendre
plus malaisé de parvenir au résultat désiré ». Le plaisir recherché dans le jeu semble à première
vue multiple et extrêmement variable dans sa nature selon les types de jeux.
Les travaux de Csikszentmihalyi et Robinson (1975) partent de l’étude des bénéfices
psychologiques auprès d’adultes engagés dans des activités qui demandent beaucoup de temps,
d’efforts et de compétences, mais qui ne procurent qu’une faible rétribution financière. En
interrogeant un groupe d’adultes (composés de joueurs d’échecs, de chirurgiens, de grimpeurs, de
danseurs, de compositeurs, et de joueurs de basketball), ils ont mis à jour l’état du « flow » : La
personne se concentre sur un champ limité de stimulus ; la personne oublie ses problèmes
personnels ; elle perd la notion du temps et d’elle-même ; elle se sent compétente dans ce qu’elle
fait et exerce le contrôle sur ses actions ; la personne a un sentiment d’union et d’harmonie avec
son environnement.
« L‟engagement dans une tâche précise (un défi) qui fournit une rétroaction immédiate qui,
exige des aptitudes appropriées, un contrôle sur ses actions et une concentration intense ne
laissant aucune place aux distractions ni aux préoccupations à propos de soi et qui
s‟accompagne d‟une perception altérée du temps constitue une expérience optimale (une
expérience du flot). Cette dernière entraîne des conséquences très importantes : meilleure
performance, créativité, développement des capacités, estime de soi et réduction du stress.
Bref, elle contribue à la croissance personnelle, apporte un grand enchantement et améliore
la qualité de vie. » (Csikszentmihalyi, 2002 : 77).
Csikszentmihalyi à travers un diagramme montre comment cette expérience optimale se situe à
égale distance entre ennui et anxiété. Dans ce modèle théorique du plaisir, la personne possède des
capacités (skills) et l’activité offre des opportunités (challenges). Si les défis demandés par
l’activité sont trop importants pour les capacités de la personne, l’activité produit de l’anxiété. Si
les capacités dépassent les défis posés, alors l’activité ne stimule pas et génère de l’ennui. Si les
défis correspondent aux capacités de la personne, alors résulte un état de bien être, l’état du
« flow ». Dans ses premiers travaux (1975), Csikszentmihalyi met surtout en avant le fait que la
différence essentielle n’est pas selon lui entre le travail et le jeu. Il faut plutôt opposer une
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expérience de plaisir qui arrive typiquement dans des activités de jeu mais aussi dans le travail, et
une expérience d’ennui ou d’inquiétude qui arrive le plus souvent dans des activités qui procurent
trop peu ou pas assez d’opportunités d’actions. Dans Vivre, La psychologie du bonheur (2002), il
souligne, toutefois, que les activités de loisirs dont les effets sont beaucoup moins drastiques que
les autres activités, permettent à la personne de se centrer sur l’activité elle-même et non les
conséquences de celle-ci.
« Les activités autotéliques ont ceci en commun : elles provoquent un sentiment de
découverte, une impression de passer à une réalité nouvelle ; elles favorisent un haut
niveau de performance et permettent d‟accéder à des états de conscience inattendus ; elles
rendent le soi plus complexe et le font grandir, ce qui est l‟essence même de l‟expérience
optimale. » (Csikszentmihalyi, 2002 : 88).
25

C. Jouer pour apprendre
1. La mise en forme éducative du jeu
Ainsi que le constate Jean Christophe Vilatte, le jeu dans le musée est « un jeu dirigé, avec
un contrôle exercé sur le matériel et sur le temps. Il est marqué par un projet éducatif et il a bien
souvent peu de rapports avec les expériences ludiques que l‟enfant peut faire ailleurs. » (Vilatte,
2005). En donnant une dimension éducative à des activités ludiques, les musées élaborent les jeux
selon des thèmes, des buts et des objectifs pédagogiques (plus ou moins explicites) et investissent
ainsi l’activité ludique de finalités d’apprentissage. Nous pouvons tout d’abord nous demander en
quoi consiste cet investissement pédagogique du jeu. Daniel Jacobi dégage, en effet, deux
préalables nécessaires avant de pouvoir décrire et analyser les formes de l’intervention éducative
dans un musée (Jacobi, 2001 : 126-129) :
- « Le premier est de parvenir à identifier sans équivoque ce que l‟on considère comme
éducatif dans un musée par rapport à ce qui ne l‟est pas»
- « Le second est de parvenir à nommer, désigner, et formaliser la nature du projet éducatif
car il n‟y a pas à proprement d‟éducation possible sans projet destiné à provoquer ou à
induire des changements sur le public […] pour lequel précisément on a conçu une
intervention éducative».
En considérant ce qui est éducatif dans un musée, Daniel Jacobi met en avant le fait qu’on
ne saurait réduire l’intervention éducative à l’accueil d’élèves ou de groupes scolaires. La
production de supports de jeux destinés à être utilisés par un public d’enfants en visite familiale
(visiteurs non captifs ou spontanés) dans les expositions ou les collections des musées s’inscrit
également au sein de l’intervention éducative des musées. Dans le cas d’institutions muséales
grandes ou moyennes, ce matériel ludique est conçu au sein des services éducatifs ou
pédagogiques des musées. En ce qui concerne les petits musées où le personnel est bien souvent
réduit au conservateur ou attaché de conservation assisté parfois d’un adjoint et d’une personne
chargée de l’accueil et de la billetterie, c’est donc le conservateur, son adjoint, mais aussi parfois
un stagiaire qui se charge éventuellement de réaliser un jeu pour le jeune public. Dans le cas des
deux exemples de jeu qui seront l’objet d’une étude dans la seconde partie de ce mémoire, il faut
signaler une situation originale du fait de l’appartenance des deux musées concernés (le musée de
la Bataille de 1870 de Woerth et le Musée de l’image populaire de Pfaffenhoffen) à un réseau de
musées comportant un service commun de conservation et un service des publics. Cette gestion en
26

éseau permet à quatorze musées municipaux ou associatifs du territoire des Vosges du Nord de se
partager une équipe mutualisée de trois conservateurs, mais aussi de bénéficier de l’initiative et de
la réalisation de projets de médiation par une chargée de mission auprès du Service des publics.
Nous pouvons dire que les jeux destinés à de jeunes visiteurs spontanés sont éducatifs dans le sens
où ils s’inscrivent dans une perspective d’apprentissage qui est à relier avec les missions
éducatives du musée comme lieu non formel d’éducation.
En ce qui concerne le second point, « ce qui permet de considérer comme éducative une
activité conduite au sein d‟un espace muséal », trois conditions sont souvent mises en avant pour
caractériser une situation d’apprentissage : « déterminer le ou les objectifs d‟apprentissage,
choisir, réunir et organiser les conditions favorables à l‟apprentissage et, enfin évaluer pour
vérifier si l‟objectif est atteint (ou partiellement atteint ou non atteint) » (Jacobi, 2001 : 128).
Même si le troisième volet évaluatif n’est pas toujours intégré à la démarche de mise en place de
jeux, de livrets-jeux ou de parcours ludiques pour les enfants en visite familiale, ces activités
ludiques sont bien comme nous le verrons aménagées plus ou moins à la marge afin d’être
porteuses de contenus pédagogiques, même si ces derniers ne sont pas toujours explicitement
formulés. Ces activités qualifiées de « jeux » répondent aussi à un autre objectif sous-entendu dans
le choix même de leur dénomination : celui de susciter le plaisir et l’intéressement des enfants,
voir leur divertissement. Il ne faudrait pas non plus oublier que si la mise en œuvre de ces activités
ludiques dans les musées part des besoins et demandes supposés des enfants, la mise en place de
jeux répond également à des exigences d’attractivité et au désir de générer l’intérêt d’un public
non captif : le public familial.
Quels sont donc ces objectifs que les musées investissent dans les jeux ou livrets de jeux
pour les enfants et peut-on réellement les qualifier d’éducatifs ? Si nous prenons l’exemple le plus
répandu de jeu dans les musées, l’enquête ou le jeu de piste, celui-ci vise principalement
l’orientation, la focalisation de l’intérêt, la régulation du parcours qui tiennent plus du guidage que
de l’éducation. Mais, d’autres objectifs plus spécifiquement éducatifs sont également mis en
avant : exercer ou développer les capacités perceptivo-cognitives (observation et mémorisation
visuelle), le questionnement et la quête d’information, la compréhension des objets, l’acquisition
d’informations cognitives (faits et concepts), mais aussi bien souvent les interactions sociales.
Voici pour exemple ce que disent Claire Merleau Ponty et Sylvie Girardet, deux fondatrices du
Musée en Herbe à propos des jeux d’enquête au musée :
« Ces livrets-jeux, parcours-jeux, jeux de piste [….] amènent les petits visiteurs par le
biais de questions, d‟intrus à retrouver, de dessins à compléter, etc. à découvrir ce que
l‟on veut qu‟ils regardent, à comprendre ce qui est important et à retenir l‟essentiel. Tout
27

cela en s‟amusant. Munis de leur papier, seuls ou par groupe de deux ou trois, ils
acquièrent une autonomie au sein de l‟exposition. Ces jeux peuvent aussi servir de petits
catalogues si l‟on introduit des informations dans la rédaction des questions. Pour les
familles, ils sont un excellent outil de convivialité, car parents et enfants œuvrent
ensemble pour trouver les réponses. […] En aucun cas, les questions ne porteront sur des
connaissances générales. Toutes doivent avoir leur réponse dans l‟exposition soit en
regardant les objets, soit en lisant les textes. Il est indispensable que la réussite du petit
visiteur soit presque garantie pour lui apporter la satisfaction en le valorisant. […] Les
réponses seront affichées à la fin de l‟exposition, car les enfants et les parents sont
soucieux de savoir s‟ils ont trouvé la bonne réponse. Pas de récompense pour éviter le
stress de la concurrence.» (Merleau-Ponty, 2000 : 17).
« Le jeu est un excellent moyen de guider un jeune enfant dans un espace muséal, de lui
faire observer et comprendre certains objets exposés. Le jeu de piste sur papier donné à
l‟enfant et à l‟adulte qui l‟accompagne à l‟entrée de l‟exposition, joue le rôle de guide ;
en dirigeant l‟enfant d‟un objet à l‟autre, il rythme la visite. Le choix des œuvres à
observer est défini à l‟avance par les concepteurs de l‟exposition. Cela canalise le
circuit et évite les pertes de temps et l‟affolement devant un trop grand nombre d‟objets
exposés (le reproche peut-être néanmoins fait que le circuit est trop directif). Les
questions posées sur le jeu de piste […] font appel à l‟observation et non à la
connaissance […]» (Girardet, 1996 : 15-16).
À la lecture de ces deux passages, on peut se demander ce qu’il reste du jeu dans la description
que fait Claire-Merleau Ponty ou Sylvie Girardet du jeu de piste au musée. Non seulement,
l’enfant est privé de toute initiative de décisions au cours du jeu, mais le critère d’incertitude est
également supprimé. Il ne s’agit plus de gagner ou de perdre un jeu, mais de réussir ou d’échouer
à des tâches assignées. Ce qui est désigné ici comme jeu n’est en fait qu’une succession de
consignes (« listes de questions ou tests de closure » selon les termes de Daniel Jacobi) et il serait
peut-être plus approprié de le désigner en tant qu’exercice ludique. Le jeu de piste induit un
parcours et donne ce qu’il faut voir, ce qu’il faut comprendre et ce qu’il faut retenir. Un certain
nombre des finalités assignées au jeu semblent ainsi plus de l’ordre de la régulation du parcours et
des comportements des enfants, du guidage et de la focalisation de l’intérêt des enfants que de
l’ordre de l’apprentissage. « Ils attirent de manière privilégiée l‟attention du public sur certaines
parties de l‟exposition, ils focalisent utilement l‟intérêt ; on estime qu‟ils régulent le parcours ou
encore qu‟ils permettent de maîtriser les impulsions à courir ; on peut supposer qu‟ils favorisent
la mémorisation et préparent une exploitation ultérieure de la visite » (Jacobi, 2001 : 129).
Cependant, il s’agit aussi de favoriser l’observation et la mémorisation, d’apprendre à regarder
28

diront certains, et de stimuler la convivialité. Daniel Jacobi repère également d’autres contenus qui
s’ils ne sont pas toujours explicitement formulés demeurent néanmoins bien présents :
« Les exigences concernant la conduite à tenir dans un musée, l‟intériorisation de
certaines règles sociales comme la possibilité de toucher ou de ne pas toucher des types
d‟objets, la découverte physique et matérielle d‟items qui n‟appartiennent pas à l‟univers
familier et quotidien (un très grand tableau, un squelette de dinosaure) représentent des
contenus éducatifs de première importance, alors qu‟ils ne sont habituellement pas mis
en avant, ou qu‟ils demeurent implicites » (Jacobi, 2001 : 129).
Mais le jeu de piste ou d’enquête n’est pas le seul type de jeu proposé au musée. C. Merleau-
Ponty et S. Girardet parlent également de « jeux interactifs » ou de jeux comportant des
« manipulations » : « Se dépenser, apprendre à regarder et faire travailler ses sens avec plaisir,
voici ce que les jeux interactifs à manipuler, ponctuant le parcours de l‟exposition, peuvent
apporter aux jeunes visiteurs » (Merleau-Ponty, 2000 : 17). Les effets souhaités décrits par C.
Merleau-Ponty sont encore une fois variés et peuvent se classer en quatre catégories : développer
les capacités cognitives (perception, lecture, connaissances), les capacités sensori-motrices, les
opérations concrètes, l’affectivité et l’émotion, chacune de ces fins éducatives étant associées à
des jeux particuliers. Mais, il faut remarquer que certains des « jeux interactifs » proposés sont
autre chose que des jeux. C’est le cas des « boîtes à odeur » ou « boîtes tactiles » qui relèvent de
la simple expérience sensorielle, puisqu’il s’agit bien de sentir et de toucher au premier degré et
rien de plus.
Une autre distinction doit être faite, car l’emploi de l’adjectif interactif ou du terme de
manipulations pourraient porter à confusion et la tentation serait alors grande d’assimiler les
interactifs au jeu. Joëlle Le Marec, dans un article de 2001, rappelle l’histoire de la notion
d’interactivité et en liste les différentes définitions relevant de la sphère technique ou de la sphère
pédagogique. L’interactivité a d’abord fait son apparition en 1964 dans le domaine de
l’informatique pour qualifier « les possibilités d‟interaction entre la machine et son utilisateur par
le biais de procédures proche de forme conversationnelle » (Le Marec, 2001 : p. 97-110). Puis, le
milieu de l’éducation informelle s’est emparé du terme pour désigner des situations
d’apprentissage par rapport à des objets que l’on peut manipuler, toucher, transformer. Frank
Oppenheimer, fondateur de l’Explorarium de San Francisco écrit en 1983 : « Voilà ce que
j‟appelle « interactif » : cette possibilité de se servir de ses cinq sens pour acquérir un ensemble
cohérent de connaissances dont l‟agencement représente le premier stade d‟une réelle
compréhension » (Frank Oppenheimer, cité par Le Marec, 2001 : 104). Si on considère ces
« manipulations d‟ordre mécanique » (Cécile Gasc, 2008), l’interactivité a pour but de faire
29

participer le visiteur à des situations potentielles d’apprentissage. Si l’interactivité n’est pas
forcément synonyme de jeu, elle emprunte souvent certaines de ses caractéristiques. Jack
Guichard liste les conditions pour mettre l’enfant en situation active de découverte dans les
musées de sciences (Guichard, 1998 : 216-218) :
- Le plaisir sensori-moteur donné par la manipulation des objets et l’émotion des
scénographies.
- La liberté de découvrir l’exposition à son rythme et dans n’importe quel sens. L’enfant doit
pouvoir avoir le choix de sa circulation dans l’exposition, mais aussi de sa stratégie par
rapport à la manipulation interactive.
- La frivolité due au fait que les conséquences de ses actions n’ont pas de conséquence sur la
vie du visiteur.
- L’incertitude du résultat de la manipulation lorsqu’on la met en jeu : « Le jeu est aussi un
moyen de maintenir l‟intérêt : mais le jeu n‟est pas synonyme de manipulation pressebouton,
où l‟enfant ne regarde pas le résultat de son geste. Le jeu correspond à une série
d‟activités nécessitant une suite logique d‟actions. »
On retrouve dans cette liste de recommandations plusieurs des caractéristiques propres au jeu :
plaisir, liberté, frivolité et incertitude du résultat. La différence essentielle entre un jeu et un
interactif se situe surtout dans son rapport à la réalité : « L‟interactivité est alors, par son côté
expérimental et manipulatoire, l‟équivalente (toute proportion gardée) d‟un “mini système
laboratoire ou professionnel” qui permet d‟explorer des phénomènes, de mettre en évidence des
effets, de reconstituer des situations techniques, de tenter par expérimentation de simuler une
phase de démarche scientifique » (Jantzen, 1995 : 32). L’interactivité met le visiteur dans une
démarche expérimentale ou d’exploration. Corinne Hutt distingue ainsi nettement l’exploration du
jeu (J. Hutt, S. Tyler, C. Hutt, 1990 : 11). L’exploration comporte la requête implicite suivante :
« Qu‟est-ce que cet objet peut faire », alors que le jeu consiste à se demander : « Qu‟est-ce que je
peux faire avec cet objet ? ». Si cette distinction concernait dans son propos deux types de
comportements observés chez les enfants en dessous de cinq ans (pre-school) face aux objets, elle
permet d’éclairer ce qui fait la différence entre le jeu et l’interactivité. L’interactivité instaure un
rapport de premier degré par rapport à la réalité, même si les interactifs peuvent faire l’objet d’un
détournement dans une logique de jeu.
Faire du jeu un outil d’apprentissage au musée ne revient pas seulement à l’investir d’un projet
éducatif, mais suppose également l’aménagement plus ou moins important du jeu dans sa forme.
Le jeu pour les enfants en visite familiale au musée échappe au principal reproche adressé au jeu
dans le cadre scolaire : celui d’imposer le jeu aux élèves. Au musée, le choix de jouer ou de ne pas
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jouer est laissé aux enfants en visite familiale. Il y a bien décision des enfants d’entrer dans le jeu,
même si cette décision peut résulter d’une élaboration collective au sein de la famille ce qui
suppose négociation et parfois acceptation de la décision de l’autre. Cependant des tensions restent
entre jouer et apprendre. Le recours au ludique comme moyen d’apprentissage au musée revient à
faire des choix entre un certain nombre de divergences qui opposent jeu et éducation, notamment
autour de la finalité des actions et de l’indétermination du processus ludique. On peut notamment
s’interroger si le cadrage légalitaire des jeux proposés au musée conserve sa spécificité ludique
dans le sens où ce dernier doit comme nous l’avons vu permettre de produire des possibilités de
décisions dont l’issue est incertaine. Le caractère aléatoire du processus ludique peut sembler en
effet, entrer en tension avec un projet éducatif qui poursuit des objectifs d’apprentissage. Mais en
supprimant ce critère d’incertitude, on risque de priver le jeu de ce qui fait sa spécificité.
Des convergences entre jeu et éducation peuvent aussi être signalées. En effet, les situations
pédagogiques sont souvent « des situations de second degré à travers les figures de l‟exercice et
de la simulation plus ou moins réaliste, et comportent des règles » (Bougère, 2003 : 149). Les
méthodes actives d’apprentissage, initiées au début du XXe siècle par le courant de l’Éducation
Nouvelle, considèrent que les enfants mémorisent mieux des connaissances ou des apprentissages
lorsqu’ils y contribuent. Certains des initiateurs de ces méthodes actives (Maria Montessori,
Ovide Decroly et Édouard Claparède) trouvent dans le jeu un appui pour une participation active
des enfants. Célestin Freinet centre au contraire sa méthode sur une « pédagogie du travail » et
met en place des activités où l’acquisition se fait par tâtonnement expérimental.
Des chercheurs à l’instar de Thomas W Malone (1980) ont également étudié les motivations
intrinsèques à l’apprentissage. Il a conduit une étude expérimentale pour trouver quels facteurs
permettent d’apprendre en s’amusant. Il a fait développer huit versions dérivées d’un des 25 jeux
vidéo les plus populaires pratiqués par 65 élèves de l’école primaire pour une période de deux à
vingt-quatre mois. 58 élèves ont joué à l’une de ces huit versions. D’après les résultats, il a trouvé
trois facteurs qui semblent affecter l’apprentissage et le rendre amusant : le défi, le rêve et la
curiosité. Malone et Lepper (Malone et Lepper, 1987) présentent une taxonomie des motivations
intrinsèques pour l’apprentissage et distinguent les motivations individuelles et les motivations
interpersonnelles :
- Les motivations individuelles sont le défi, le rêve, la curiosité et le contrôle.
- Les motivations interpersonnelles comprennent la coopération, la compétition, et la
reconnaissance.
Le jeu au musée résulte d’une construction qui associe les contraintes de la mise en forme
ludique à celles de la mise en forme éducative de manière plus ou moins équilibrée. Du fait des
31

divergences et des convergences mises en évidence entre jeu et éducation, la confrontation de la
forme ludique à la forme éducative est une rencontre complexe. Il peut y avoir domination d’une
forme sur l’autre. Le risque est qu’à travers ce processus de formalisation, le jeu ne soit plus qu’un
simple subterfuge, une ruse, un habillage ludique. À l’occasion d’un colloque sur Les enfants et
les musées (1999), Daniel Jacobi cite ainsi les déclarations de certains enfants interrogés par
Sylvie Romano à la sortie d’une exposition au Préau des Accoules dans le cadre de son DEA de
muséologie : « Finalement, on a beaucoup joué, mais on n‟a pas eu le temps de s‟amuser ».
Bougère définit le « processus de formalisation » comme « la présence d‟éléments qui donnent
une dimension partiellement éducative à la situation soit du point de vue de celui qui construit ou
gère la situation, soit de celui qui vit l‟expérience, soit des deux, éventuellement sous forme de
collaboration » (Bougère, 2002 : 15). Cette notion de formalisation comme processus reflète le
fait que l’intention éducative peut devenir plus consciente ou plus explicite dans certaines
situations jusqu’à constituer l’essentiel d’une interaction. Ce processus passe par la création d’un
matériel ludique qui inclut des finalités pédagogiques. Cette formalisation peut-être repérée à trois
niveaux :
- au niveau du matériel ludique mis à disposition des enfants et qui reflète l’investissement
pédagogique et didactique de l’institution muséale.
- au niveau de l’intervention des parents accompagnant les enfants dans le jeu et le
conduisant vers des objectifs conçus comme éducatifs.
- au niveau de l’enfant, apprenant informel qui peut développer une intention de
comprendre, de s’informer, de donner une dimension éducative plus forte en posant des
questions, en organisant exploration et observation.
Mais, ainsi que le souligne Bougère, une grande partie du jeu échappe toutefois à cette
formalisation éducative : « L‟initiative du joueur l‟associe à la recherche du plaisir au
divertissement et le matériel va dans ce sens » (Bougère, 2005 : 156). C’est d’ailleurs la
conclusion d’Hana Gottesdiener et de Jean Christophe Vilatte à l’étude d’un livret-jeu en visite
familiale (Gottesdiener et Vilatte, 2001). Gottesdiener et Vilatte ont pour cette étude observé et
interrogé deux groupes d’enfants, l’un ayant visité l’exposition sans livret-jeu et l’autre avec
livret-jeu : « L‟utilisation du livret-jeu a modifié le parcours suivi dans l‟exposition et le temps
passé dans celle-ci, cependant ces facteurs n‟ont pas eu pour effet un apprentissage
supplémentaire pendant la visite ». Si le livret-jeu provoquait un « parcours livret », par contre les
enfants avaient tendance à répondre et à réussir les jeux plutôt qu’à regarder les tableaux
concernés par les jeux et le livret ne semblait pas vraiment lu, seules les informations nécessaires
pour jouer l’étaient. L’activité d’observation des tableaux ou la lecture du livret paraissait donc
32

essentiellement mise au service du jeu, comme moyens pour accomplir le but du jeu (ici répondre
aux différentes questions du livret-jeu). De plus, Vilatte et Gottesdiener rappellent les observations
de Vurpillot (1972) sur les capacités perceptivo-cognitives des enfants. Ce dernier montre que les
enfants à partir de sept ans formulent correctement leur jugement concernant la perception visuelle
et l’observation d’équivalence ou de différences. D’autres études ont montré également que la
mémoire visuelle est persistante sur le long terme (jusqu’à des jours voir des semaines après) et
que les images porteuses de sens ont des effets encore plus prononcés pour la mémorisation
visuelle sur le long terme (Rock et Engelstein, 1959). Vilatte s’interroge en outre sur
l’appartenance des activités d’observation que les musées ont élaborées pour les enfants au
registre ludique : « découvrir un objet, un détail, des différences, des erreurs, des bizarreries, de
comparer, de recueillir des indices, tel un détective ou un explorateur » dans le but de développer
les compétences en matière d’attention, de perception et de mémoire visuelle. Comme nous
l’avons vu à travers notre tentative de définition du jeu, ce n’est pas le comportement qui
caractérise le jeu mais l’attitude face au comportement. Le jeu n’est pas un comportement
spécifique mais une situation dans laquelle ce comportement prend un sens spécifique. Le jeu est
avant tout affaire de sens donné à une situation. Pour qu’il y ait jeu, il faut que les activités
d’observation soient insérées dans un jeu. La référence au détective ou l’archéologue marque la
transposition du comportement d’observation dans un cadrage secondaire.
2. La situation pédagogique pour les enfants en visite familiale
Les membres du Groupe de recherche sur l’éducation et les musées de l’UQUAM se sont
intéressés à la situation pédagogique au musée. Pour cela, ils se fondent sur un modèle systémique
de la situation pédagogique en milieu scolaire conçu par le professeur Rénald Legendre. Ce
modèle décrit la situation pédagogique comme « un ensemble de relations (didactique,
d’enseignement et d’apprentissage) tissées bidirectionnellement dans un milieu entre trois
éléments (l’objet, l’agent et le sujet)» (Allard : 2003). Si on applique ce modèle à la situation
pédagogique engendrée par la pratique d’un jeu éducatif par les enfants en visite familiale, Le
Sujet correspondrait au jeune visiteur pour lequel une situation pédagogique a été mise en œuvre.
L’Objet comprend le jeu pédagogique (la culture du jeu et son projet pédagogique). L’Agent
correspond au niveau de la visite familiale aux adultes accompagnants l’enfant. Le Milieu désigne
ici le musée dans sa dimension de lieu physique et sa dimension organisationnelle.
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Toutefois, si le modèle de Rénald Legendre s’applique à toutes les situations pédagogiques
qui se déroulent dans un lieu d’éducation formel, il faut l’adapter au musée, considéré comme un
lieu d’éducation à la fois formelle et non formelle. C’est ainsi que les quatre chercheurs du GREM
renomment les interrelations entre le Sujet (l’élève-visiteur), l’Agent (l’intervenant) et l’Objet (la
thématique, c'est-à-dire le thème unificateur de tous les objets réunis dans le musée à des fins de
collections) en tant que relations de support, de transposition et d’appropriation.
Tout d’abord, le groupe de recherche du GREM remarque que dans le modèle de Legendre, la
relation d'apprentissage désigne la relation bi-directionnelle entre un objet et un sujet qui conduit à
une « acquisition de connaissances ou développement d'habiletés ou d'attitudes » (Legendre,
1988, p. 36). Au musée, le visiteur peut faire sien affectivement, intellectuellement ou
imaginairement les objets de musée. C'est pourquoi, Allard et les autres membres du GREM
substituent l'expression « relation d'appropriation » à celle de « relation d'apprentissage ». En ce
qui concerne le jeu éducatif, son projet pédagogique ne se limite pas dans bien des cas à
l’appropriation d’un contenu, mais concerne également l’exercice de compétences et d’habiletés
intellectuelles. Dans le cas d’un jeu éducatif en visite familiale, la relation entre l’enfant et le
projet éducatif porte à la fois sur l’appropriation d’un contenu et l’apprentissage (ou du moins
l’exercice) de compétences psychomotrices, cognitives et affectives, mais aussi l’intériorisation de
règles sociales.
La relation de support désigne « l‟aide apportée directement ou indirectement au visiteur de
musée dans sa démarche d‟appropriation » (Allard et al., 1998). Nous constatons encore une fois
que la relation qui lie l’enfant (le Sujet) et ses parents (l‟Agent) ne se limite pas à l’apprentissage
cognitif, à l’affectivité ou à l’imagination mais concerne également des attitudes et des valeurs
(respect des règles) et la sociabilité entre les membres de la famille. Cette relation entre l’enfant et
ses parents peut-être nommée relation de support et de convivialité.
Dans le cadre d’une exposition ou d’un programme éducatif muséal, la relation entre l’objet et
l’agent n’est plus une relation didactique mais une relation de transposition : « adaptation de la
thématique d‟un musée à la capacité d‟appropriation du visiteur » (Allard et al., 1998). La
conception d’un jeu éducatif au musée procède d’un travail de transposition d’un contenu, mais
surtout de formalisation, de transformation de ces dimensions ludiques et éducatives afin de les
faire rencontrer au sein du jeu.
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Nous voyons donc que la situation pédagogique engendrée par un jeu éducatif pour les
enfants en visite familiale au musée procède de relations stratifiées combinant plusieurs niveaux
de relations entre chacun des trois pôles du triangle pédagogique qui échappe donc à une simple
schématisation.
3. La visite familiale au musée : motivations et bénéfices recherchés
Selon les critères de l’INSEE, la famille désigne un ensemble d’individus apparentés vivant
sous le même toit et comprenant soit un couple lié par l’alliance ou non, avec son ou ses enfants,
soit un adulte avec son ou ses enfants. En fait, la famille existe dès qu’il y a un ou des adultes
ayant à charge un ou des enfants. Dans le cadre de ce mémoire, c’est la famille élargie que nous
considérons. Il est désigné comme famille, un groupe de personnes composé d’au moins un adulte
(grand-parent, parent, oncle ou tante) et d’un enfant de 12 ans ou moins. Les résultats de l’enquête
menée par Bourdieu et Darbel entre 1964-1965 dans plusieurs musées français et européens
(Bourdieu, Darbel, 1966) révélaient alors l’extrême inégalité sociale d’accès aux œuvres par les
musées ou lieux d’exposition, mais aussi le caractère socialement construit de la visite de musées
en mettant en avant le rôle essentiel de la transmission familiale de cet habitus culturel. La famille
contemporaine a évolué depuis les années 60 aussi bien au niveau du mode de reproduction
sociale que dans son fonctionnement (De Singly, 1993). Les fonctions de la famille s’articulent
aujourd’hui autour de deux points principaux : la famille se mobilise pour la réussite des siens,
notamment des enfants par l'école, et accorde ensuite de l’attention au développement personnel
de chacun, homme et femme, adulte et enfant. De nos jours, la possession d’un diplôme, d’une
qualification s’avère plus importante pour la réussite sociale que la transmission d’un patrimoine
économique, ce qui entraîne une forte mobilisation des familles en vue de la réussite scolaire des
enfants. Les parents cherchent également à bâtir un environnement au sein duquel la nature de leur
fille ou de leur fils puisse se développer. Dans Pour être des parents responsables, Bruno
Bettelheim a défini en 1988 le nouvel objectif pédagogique : « Les parents ne doivent pas
s'acharner à créer l'enfant qu'ils voudraient avoir, mais au contraire l'aider à devenir ce qu'il est
en puissance, à épanouir ses potentialités. ».
À travers deux enquêtes (une quantitative et l’autre qualitative) menées sur trois musées
parisiens, Anne Jonchéry analyse les motivations de la venue au musée des groupes familiaux qui
reflètent les évolutions de la famille contemporaine et visent à la fois les bénéfices personnels et
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éducatifs de l’enfant. Elle identifie quatre types de motivations qui procèdent à la visite (Jonchéry,
2008 : 9).
D’une part, la motivation éducative est essentielle dans la visite familiale et cet acte éducatif
revêt des significations multiples:
« Le musée est considéré comme lieu de connaissance, d‟éveil et d‟ouverture au monde ; il
est appréhendé dans ses spécificités, pour le rapport physique à l‟objet et à la culture
matérielle qu‟il permet. Les relations entre l‟école et la visite peuvent être de l‟ordre de la
prescription inconsciente ou viser la réussite scolaire : les implications de l‟institution
scolaire à de multiples degrés de la visite reflètent à la fois le poids de l‟école dans la
famille et ses connexions avec l‟institution muséale» (Jonchéry, 2008 : 9).
Si l’on peut considérer avec assurance que la visite du musée par les adultes est une « activité
volontaire prise sur son temps de loisir, de type intermittent, sans programme préétabli et sans
système de sanction et de récompense susceptible de lui conférer une énergie motivationnelle »
(Jacobi & Coppey, 1995 : 12), il apparaît donc que le caractère non formel de la visite du musée
par les enfants accompagnés de leurs parents soit teinté d’une finalité éducative qui participe à
l’infléchissement formel de cette dernière.
Mais, comme la visite de musée, ce sont les loisirs des enfants dans l’ensemble qui sont touchés
par les logiques éducatives. Ainsi selon Joël Zaffran : « le temps scolaire est aujourd‟hui le temps
dominant d‟un point de vue qualitatif […] Mises au service du temps scolaire, certaines activités
du temps libre sont également calquées sur l‟école, à la fois sur le plan de leur organisation et sur
le plan de leur finalité. » (Zaffran, 2000 : 13). Cette soumission d’une partie du temps libre des
enfants aux attentes des parents est à replacer en lien avec la situation d’enfance : « Quant au
caractère libératoire, il ne nous semble pas correspondre non plus au cas des 6-14 ans. Toutes
leurs activités de loisirs ne sont pas, loin s‟en faut, dégagées des contraintes familiales. […] Les
6-14 ans négocient sans cesse avec ces contraintes pour définir le périmètre de leur loisir,
d‟autant que l‟emprise qu‟exerce la “pédagogisation” sur la socialisation des plus jeunes (c'està-dire
l‟application de critères scolaires et/ou un investissement fort, pour favoriser les carrières
scolaires) est croissante au sein de la famille » (Octobre, 2004 : 17). Guy Vincent, Bernard
Lahire, Daniel Thin observent à leur tour « la propension des adultes à faire de chaque instant un
instant d‟éducation, de chaque activité une activité éducative, dont la finalité est de former, de
former les corps, de former les connaissances, de former leur morale, le tout étant indissociable »
(Vincent, Lahire, Thin, 1993 : 44).
La visite familiale vise aussi à faire plaisir à l’enfant et satisfaire ses intérêts et par là à favoriser le
développement personnel et la construction identitaire de l’enfant. Néanmoins, cette motivation de
favoriser le développement de l’enfant s’accompagne également d’un objectif de développement
36

intellectuel et culturel. Anne Jonchéry met en relation cette ambiguïté des parents avec l’analyse
plus globale de Singly (2003) soulignant la position instable des parents, lesquels oscillent entre
exigence pédagogique, attention et respect des envies de l’enfant.
D’autre part, la sociabilité familiale apparaît également comme une motivation essentielle de
la visite familiale. La convivialité est associée au partage et au dialogue au sein de la famille
contribuant à faire de l’exposition un lieu de l’expérience collective. Il s’agit de « faire du
commentaire » pour vivre l’expérience collectivement (de Singly, 2003). Celle-ci offre également
un terrain d’exploration et de connaissance de l’autre. Le temps de la visite familiale est ainsi
l’occasion pour les parents de « découvrir son enfant, ses centres d‟intérêt, des facettes de son
identité ».
Enfin, l’intérêt et le plaisir de l’adulte participent de manière secondaire ou accessoire à la
visite et semblent parfois même entrer en tension avec les modalités de la visite familiale, ce qui
peut générer chez certains un sentiment de frustration. Cette relégation au second rang de l’intérêt
de l’adulte est révélatrice du « positionnement identitaire de l‟adulte : qui se présente avant tout
comme parent ».
Ainsi, les familles « investissent l‟équipement muséal de fortes motivations éducatives,
visant l‟apprentissage cognitif, le développement de la curiosité, de l‟esprit critique ou de la
pratique. Les objectifs recherchés (réussite scolaire, intégration sociale, épanouissement
personnel) révèlent combien ces usages s‟inscrivent dans les fonctions de la famille.» (Jonchéry,
2008 : 13). Au regard de ces logiques de visite, nous décelons combien la pratique du jeu au
musée en famille cristallise l’ensemble des motivations qui œuvrent à la visite du musée en
famille. Si le jeu ou le ludique constitue un des supports médiatiques les plus développés pour
accueillir le public enfant, c’est peut-être aussi parce que les familles trouvent dans le jeu le miroir
à leurs propres aspirations divergentes. Cette ambiguïté des parents qui souhaitent le plaisir et
l’épanouissement de leur enfant tout autant que son développement intellectuel place les parents
dans une position instable comme l’avait déjà analysé de Singly plus globalement pour les
pratiques culturelles :
« L‟idéal pour les parents soucieux de tenir les deux bouts de l‟éducation moderne est
d‟avoir un enfant qui apprécie sur ses temps de loisirs, c'est-à-dire à titre personnel, une
activité qui a une résonnance culturelle » (de Singly, 2003 : 48).
Or, en analysant le jeu au regard de la psychologie de l’enfant et de la sociologie cognitive, nous
avons vu que le jeu porte en lui-même des effets liés au développement de l’enfant et à la
construction identitaire et sociale de ce dernier (ou du moins est perçu comme tel à travers ces
théories). Le développement de l’enfant serait dans ce cadre un effet induit qui accompagnerait
37

cette activité sans qu’il soit visé. À travers l’analyse des motivations intrinsèques par
Csikszentmihalyi et Robinson (1975), nous avons étudié que l’effet recherché du jeu par le joueur
renvoie au plaisir et qu’il est susceptible de procurer un état de bien-être (state of flow) quand il
offre des opportunités d’action qui correspondent aux capacités du joueur. Les recherches de
Thomas W. Malone (1980) nous ont également éclairés sur les facteurs qui permettent
d’apprendre en s’amusant. Enfin, nous avons vu que les musées inscrivaient le jeu dans une
logique éducative et que celui-ci était une construction qui conduit à la rencontre de la mise en
forme ludique et de la mise en forme éducative. Le jeu au musée conçu pour associer les
dimensions ludiques et éducatives est le résultat d’un travail de formalisation, de transformation
qui s’ajoute à l’effet diffus d’éducation du jeu qui accompagne potentiellement le jeu. Que cet
effet second du jeu, non cherché et non voulu soit une réalité démontrable ou une projection, reste
qu’il doit-être pris en compte au moins comme rhétorique associé à ce dernier pour comprendre la
relation de continuité entre le jeu comme activité que l’enfant rencontre d’abord dans le cadre
familial et constituant une part de l’éducation familiale spontanée, porteuse de socialisation, mais
aussi d’apprentissage linguistiques, cognitifs, affectifs, etc., et une pratique du jeu au musée avec
un objectif d’éducation. En tentant de concilier développement de l’enfant, plaisir et éducation à
travers le support médiatique du jeu, c’est bien une réponse (aussi imparfaite sa concrétisation
soit-elle) aux motivations divergentes de la famille lors de sa venue au musée que les musées
proposent, même si rien n’assure la résolution de ces tensions.
Si l’on regarde les aspirations individuelles et non plus celles de la cellule familiale dans son
ensemble, chaque membre de la famille répond à des besoins et motivations familiales
différentes : « l‟enfant a besoin de vivre des expériences personnelles, hors du regard parental,
pour se construire lui-même et expérimenter son identité, processus inhérent à la société
individualiste ; de même que l‟adulte aspire aussi à réaliser des visites à titre personnel et non
parental » (Jonchéry, 2008 : 14). Le groupe familial dans son ensemble exprime quant à lui une
attente très forte de convivialité et d’éducation. Anne Jonchéry précise que ces besoins
différenciés « se manifestent et surgissent à différents moments suivant le développement et
l‟évolution du groupe familial, de ses individus » (Jonchéry, 2008 : 14). Là encore, les concepteurs
des jeux au musée semblent vouloir concilier ces besoins différenciés mais pas forcément
concomitants, puisque l’on trouve par exemple dans la citation de Claire Merleau-Ponty à propos
de jeux d’enquête (exposée précédemment) le jeu successivement évoqué comme favorisant
« l‟autonomie de l‟enfant » et comme « outil de convivialité ». La tendance éducative du jeu
omniprésente au musée serait donc peut-être aussi le reflet des difficultés pour les musées de
choisir entre des besoins et des motivations familiales différentes.
38

II. Le contexte de la recherche
A. Les jeux Amuse-Musées du réseau de la Chaîne de la Découverte du
Parc naturel régional des Vosges du Nord
1. Le Parc naturel régional des Vosges du Nord
Le territoire des Vosges du Nord fut classé Parc naturel régional le 30 décembre 1975, puis
reconnu comme réserve de biosphère en 1989 par l’UNESCO. Un parc naturel régional a pour
vocation de « concourir à la politique de protection de l‟environnement, d‟aménagement du
territoire, de développement économique et social, d‟éducation et de formation du public […] et
constituent un cadre privilégié des actions menées par les collectivités publiques en faveur de la
préservation des paysages et du patrimoine naturel et culturel » (Loi Paysages, art. 2, 1993). La
Charte Constitutive du Parc naturel régional des Vosges du Nord a connu une première révision en
1994 pour introduire la notion de développement durable, c'est-à-dire la recherche d’un mode
équilibré de développement des activités humaines tournées vers l’avenir, tout en restant soucieux
des richesses à transmettre aux générations futures. Le développement durable est, selon la
Commission mondiale sur l’Environnement et le Développement, « un développement qui répond
aux besoins du présent, sans compromettre la capacité des générations futures à répondre aux
leurs » (Rapport de la Commission G.H.Brundtland, « Notre avenir pour tous », 1987). La Charte
a été révisée à nouveau en 2000 et après son approbation par l’ensemble des collectivités
concernées, elle a permis le renouvellement du classement des Vosges du Nord en Parc naturel
régional (par le décret du 9 juillet 2001 pour une durée de 10 ans). Le Parc naturel des Vosges du
Nord se donne actuellement pour missions principales :
- la maîtrise de l’évolution du territoire et des espaces,
- la protection durable des patrimoines,
- la gestion des grands ensembles patrimoniaux,
- le développement durable de son territoire,
- la qualité de la vie et la mobilisation des acteurs du Parc.
Le Parc naturel régional des Vosges du Nord est géré par un syndicat mixte, le Syndicat de
Coopération du Parc (SYCOPARC), regroupant toutes les collectivités qui ont approuvé la Charte
39

Constitutive du Parc. Le Sycoparc regroupe ainsi les communes du Parc, les établissements de
coopération intercommunale, les deux départements du Bas-Rhin et de la Moselle, les deux
régions Alsace et Lorraine. Les conseils économiques et sociaux régionaux, les chambres
consulaires, certains établissements publics tels l’office régional des Forêts et le centre régional de
la Propriété forestière sont également membres associés à voix consultative. Les missions du
Sycoparc sont :
- d’analyser et d’expertiser, de dresser des inventaires, de créer des bases de données,
- d’impulser des politiques et d’en expérimenter de nouvelles,
- d’apporter la référence, guider les choix, notamment par la réflexion et l’animation en
amont,
- de garantir les options qualitatives inscrites dans la Charte Constitutive.
Le Parc naturel régional des Vosges du Nord recouvre une vaste étendue de 133 000 hectares
dans le triangle Wissembourg-Saverne-Sarreguemines. Ce territoire rural est composé de trois
grands secteurs paysagers : le piémont alsacien, le massif forestier et le plateau lorrain. En plus
d’un patrimoine naturel diversifié, le Parc compte un très riche patrimoine culturel à préserver et à
mettre en valeur. En effet, le patrimoine historique, architectural et culturel du parc comprend 35
châteaux et 113 monuments historiques et sites protégés. Le Parc possède également un
patrimoine industriel remarquable concernant la production de grès, de verre, de fer et de pétrole.
A sa création en 1975, le Parc naturel régional des Vosges du Nord comprenait une dizaine de
musées municipaux ou associatifs. De nouveaux musées ou expositions permanentes se sont
progressivement mis en place pour permettre la valorisation de ce patrimoine culturel riche et
varié. Ainsi, le Parc comporte aujourd’hui 35 équipements muséographiques, musées ou
expositions permanentes de sites.
40

2. Le réseau de la Chaîne de la Découverte et ses missions
Pour assurer l’animation de ce réseau d’équipements muséographiques, améliorer la
conservation des collections et la mise en valeur des sites, le Sycoparc a souhaité dès 1990 la mise
en place d’une structure permettant aux différents établissements de travailler en commun. Cette
action de mise en réseau s’est concrétisée en 1994 avec la création de la Conservation des musées
et exposition de sites aussi nommée « La Chaîne de la Découverte » regroupant 12 musées et 4
sites d’interprétation qui se partagent des moyens techniques et humains (Deval, 1998 : 18-22). La
Conservation expérimente un mode original de mutualisation des coûts qui permet à ces musées
de se partager une équipe de 3 conservatrices assurant le suivi scientifique des musées, et de 2
chargées de mission responsables des inventaires. Cette équipe de la Conservation s’est agrandie
en 2003 d’une personne chargée du service des publics des musées. Les communes ayant en
charge une institution culturelle mandatent le Sycoparc pour gérer la conservation. Le financement
de son fonctionnement est assuré environ à 70% par les communes selon un mécanisme de
mutualisation financière qui suit une logique de solidarité en fonction de deux critères : le nombre
de visiteurs et d’habitants. Ce budget est complété par des subventions annuelles des départements
du Bas-Rhin et de la Moselle (Hoffsess, 1997 : 102-105).
Les musées de la Chaîne de la Découverte recouvrent trois grandes thématiques : les arts et
traditions populaires, les techniques et l’histoire. Sept d’entre eux sont labellisés musées de France
et la majorité doivent leur existence aux associations qui les soutiennent et les animent. Les
communes ou communautés de communes où sont implantés les musées sont souvent
propriétaires et gestionnaires du cadre bâti et parfois des collections.
La Conservation des musées a pour objectif de contribuer à garantir la qualité des projets
muséographiques et la gestion des collections, en liaison avec les responsables locaux, et de situer
chaque équipement dans un réseau cohérent. Ce dispositif permet aussi de mener des projets de
rénovation ou de création d’équipements culturels et d’expérimenter des actions collectives en
termes de formation des personnels, de réalisation des inventaires, de promotion, et d’animation.
La Loi du 4 janvier 2002 prévoit dans son article 7 que « chaque musée de France dispose
d'un service ayant en charge les actions d'accueil des publics, de diffusion, d'animation et de
médiation culturelles ». Dans le cadre de mutualisation des moyens des musées de la « Chaîne de
la Découverte », la Conservation a donc crée l’année suivante en son sein un service des publics
dont les actions sont d’abord dirigées à l’intention du public familial et des scolaires. Depuis la loi
41

du 11 février 2005 « pour l‟égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des
personnes handicapées » rendant obligatoire l’accessibilité pour tous, quel que soit le handicap
des établissements recevant du public, le Service des publics a également pour mission
d’accompagner les musées dans la conception d’outils de médiation adaptés aux personnes en
situation de handicap.
3. Les Amuse-Musées : des jeux et des animations
L’une des missions du Service des publics est de développer une démarche active vers les
publics et notamment les publics de proximité, les enfants et les jeunes et d’animer le réseau. La
première action d’importance du Service des publics a été l’élaboration d’activités ludiques à
destination du jeune public en visite familiale : les Amuse-Musées. Il s’agissait initialement de
jeux mis à disposition des familles lors de journées événementielles afin de permettre aux enfants
d’« apprendre en s’amusant ». Les objectifs qui ont présidé à la création des Amuse-Musées étaient
d’inciter à découvrir ou redécouvrir les musées et expositions de site, mais surtout de parvenir à
toucher un public plus jeune :
- Promouvoir et valoriser le réseau de la Chaîne de la Découverte,
- Relancer l’intérêt du public de proximité et les habitants du Parc pour les musées et
expositions du réseau de la Conservation,
- Faire venir de nouveaux publics sur un secteur plus large,
- Toucher le public familial en proposant une activité spécifique pour les enfants basée sur
approche ludique des collections.
Ces jeux, d’abord conçus dans une optique événementielle, ont été progressivement adaptés et
pérennisés tout au long de l’année dans 14 musées et sites de la « Chaîne de la Découverte ». De
nouveaux jeux ont été crées pour venir enrichir ces propositions de découverte ludique des
expositions des musées. La pérennisation des jeux tout au long de l’année a suivi quatre grands
principes :
- favoriser la découverte du patrimoine culturel par le jeu,
- permettre l’autonomie des familles,
- jouer en famille,
- diversifier les approches pour inciter les familles à participer à plusieurs Amuse-Musées.
Le programme des journées événementielles a fait place à des animations comprenant soit des
contes, des spectacles ou des ateliers.
42

D’un musée à l’autre, chaque jeu propose une approche différente élaborée spécifiquement
en fonction du contenu scientifique du musée. L’ensemble des actions proposées par le Parc se fait
avec l’accord des communes et associations responsables des musées de la « Chaîne de la
découverte ». Le comité de pilotage de la Conservation réunit une fois par an les communes, les
instances institutionnelles, les personnels concernés par le Parc pour déterminer les grandes
orientations pour le réseau de la « Chaîne de la Découverte » et déterminer le programme pluriannuel
des projets dans les musées. Les associations sont présentes au comité de pilotage à titre
consultatif. Les comités techniques sont un outil de concertation entre les personnels concernés du
Parc et les acteurs des musées (communes et associations) pour réfléchir à la mise en œuvre des
actions dans les musées. Si la création des jeux Amuse-Musées a été initiée par le Service des
publics, la conception de ces jeux est issue d’une réflexion commune entre la chargée de
médiation et les employés ou bénévoles des musées à l’occasion de comités techniques ou de
réunions. Les membres des associations des musées sont pour une part importante d’anciens
enseignants. Les partenaires des musées ont été interrogés à l’occasion d’une évaluation
sommative des Amuse-Musées réalisée en 2004 par Jamila Krimi. L’analyse de ces entretiens
laissent à penser que la conciliation du ludique et de la pédagogie a dû être parfois le résultat de
négociations afin de trouver un terrain d’accord avec certains partenaires qui envisageaient alors la
visite familiale de la même manière qu’une visite scolaire et préféraient « évacuer le ludique au
nom de la pédagogie » (Krimi, 2004 : 180-181).
Les documents de travail qui témoignent de la conception des jeux révèlent que ces jeux ont
été conçus en essayant d’apporter une réponse originale à trois questions principales : « Quel est
le message du jeu ? », « Quel est le fil conducteur du jeu ? » et « Quelle forme de jeu choisiton
? ». Le processus d’élaboration des jeux a d’abord consisté à définir la thématique du jeu, les
objectifs pédagogiques et à retenir un « principe de jeu » qui correspond en fait à un type de jeu.
Le but et les règles du jeu ont ensuite été élaborés de façon plus détaillée. La définition des règles
du jeu comprenait notamment une réflexion sur le support et le matériel du jeu ainsi que le
déroulement du jeu au sein du musée. L’élaboration des jeux s’est souvent faite par tâtonnements
et des rectifications ont parfois été apportées après une première mise en œuvre lors des journées
événementielles de 2004, puis 2005. La première saison d’animations de 2004 avait d’ailleurs un
« caractère expérimental », ainsi que le souligne J. Krimi dans son rapport d’évaluation des
Amuse-Musées (Krimi, 2004 : 187). Cette première saison d’animations de 2004 a été selon les
conclusions de J. Krimi « un succès compte tenu des difficultés de diffusion et des moyens de
communications mis à disposition ». Lors de son étude, J. Krima a identifié que l’équilibre
recherché entre le jeu et la pédagogie était une des sources de satisfaction des parents et que le
43

public familial de ces journées événementielles était « demandeur d‟animations à la fois ludique
et pédagogique » (Krimi, 2004 : 187).
L’adaptation progressive des jeux à l’année à partir de 2006 s’est traduite la plupart du temps
dans chaque musée par la mise en place d’un panneau de présentation du jeu, de fiches de
corrections à destination du personnel de l’accueil ou des familles, et parfois de cartels spécifiques
pour les enfants.
C’est ce rapport entre jeu et pédagogie que nous interrogerons à travers l’étude de deux jeux
d’enquête comportant chacun un matériel spécifique : d’une part, un jeu de piste sous forme d’un
livret-jeu au musée de l’Image populaire à Pfaffenhoffen et d’autre part un jeu de piste tactile au
musée de la Bataille de 1870 à Woerth. Peut-on parler d’équilibre entre jeu et pédagogie ? Les
enfants jouent-ils vraiment ? Les objectifs pédagogiques sont-ils atteints ?
44

B. Deux jeux : deux approches distinctes
1. Les raisons qui ont motivé le choix de ces deux jeux
Afin de me familiariser avec le réseau des musées et le fonctionnement des différents jeux,
je me suis d’abord rendue dans l’ensemble des 14 musées de la « Chaîne de la Découverte »
comportant un ou plusieurs jeux. J’ai ainsi dressé sur place un premier état des lieux des jeux pour
identifier les disfonctionnements éventuels et les maintenances à effectuer. J’ai observé les points
suivants lors de ce tour d’horizon des jeux :
- Disponibilité effective du jeu à l’année : Les supports de jeu sont-ils mis à
disposition par les personnes chargées de l’accueil ?
- Dégradations observées : Le jeu est-il complet ou en bon état ?
- Accord du jeu avec l’actuelle muséographie : Le jeu a-t-il été mis à jour en cas de
changement survenu dans la présentation des collections ?
- Autonomie des familles lors de la pratique du jeu : L’adaptation du jeu pour une
pratique autonome s’est-elle concrétisée ? Les enfants accompagnés de leurs parents
peuvent-ils jouer en autonomie ?
- Interaction du jeu avec les collections ou le site : Le jeu vise-il une appropriation des
collections ou du site, ou le jeu est-il plutôt envisagé comme une introduction à la
visite ?
Ces premières observations m’ont permis d’éliminer les jeux qui ne me semblaient pas répondre
positivement à l’ensemble de ces critères. D’autres raisons plus pratiques ont aussi déterminé mon
choix : l’amplitude d’ouverture des musées et l’éloignement de ces derniers par rapport au siège
du Parc. Mon stage auprès du service des publics de la « Chaîne de la Découverte » s’est déroulé
essentiellement en période scolaire et les musées choisis devaient donc être ouverts le weekend
et/ou le mercredi pour que je puisse mener l’évaluation auprès d’enfants en visite familiale.
45

2. Analyse préalable du livret-jeu : La vie mystérieuse de l’Oncle Hans au
Musée de l’image populaire (Pfaffenhoffen)
a. Description du jeu de piste : objectifs et pré-requis
Figure 1 : Intérieur du Musée de l’image populaire à Pfaffenhoffen, rez-de-chaussée
Le Musée de l’image populaire à Pfaffenhoffen est un musée d’art et traditions populaires
qui expose des collections d’images populaires alsaciennes provenant en grande partie des
donations de Maître Lotz et du Docteur Léon Kieffer. Le guide de visite du musée définit ainsi les
objectifs du Musée de l’image populaire : « faire connaître les images populaires en tant que
trace précieuse d‟une pratique fort ancienne et de permettre aujourd‟hui, à travers leur étude et
analyse d‟en savoir plus sur les usages, coutumes et pratiques de nos ancêtres ». Une image
populaire se caractérise par l’appartenance à la classe populaire de son auteur et de son
destinataire. En Alsace, l’usage était d’offrir une image destinée à marquer un événement
important de la vie quotidienne. Le musée a pour vocation de « montrer tout ce qui appartient à la
représentation imagée du cadre de vie ordinaire des Alsaciens avant l‟avènement des techniques
modernes de reproduction photomécanique». Au niveau de l’aire géographique concernée, les
collections du musée représentent principalement le Val de Moder, mais s’étend aussi au Grand
Est et à l’espace Rhénan. Les images du musée peuvent se classer en fonction des techniques
mises en œuvre pour leur réalisation : estampes, canivets, églomisés ou peinture sous verre. Les
images populaires se distinguent aussi en fonction de leur usage : images accompagnant une vie,
images à usage religieux et images à usage de protection domestique. Les images accompagnant le
cours de la vie comprennent les souhaits de baptême, souvenirs de confirmation, souvenirs de
46

communion, souvenirs de conscription ou de régiment, images d’amour et d’amitié, textes de
mariage, et textes funéraires.
Figure 2 : Plan des espaces des collections permanentes du Musée de l’image populaire à Pfaffenhoffen
Le musée est organisé selon cette double approche thématique, puisque le rez-de-chaussée
est consacré essentiellement aux techniques de fabrication, aux motifs et symboles et aux ateliers
des imagiers-peintres et le premier étage aux usages des images populaires. Deux sections
abordent enfin l’histoire du musée et des collections au rez-de-chaussée et les enjeux de la
conservation préventive au premier étage. Le dernier étage du musée est consacré à des
expositions temporaires sur les techniques traditionnelles de l’image populaire et à l’art populaire
contemporain.
47

Figure 3 : Malle de l’Oncle Hans située au 1 er étage
Figure 4 : Couverture du livret-jeu : La vie mystérieuse
de l’Oncle Hans
Le jeu de piste La vie mystérieuse de l‟Oncle Hans se déroule successivement au rez-dechaussée
puis au premier étage du musée. Le jeu de piste recourt à un livret-jeu (fig. 4) et deux
malles aux indices (fig. 3). Le but du jeu consiste à retrouver des images à partir de détails tirés de
ces dernières, et de compléter au fur et à mesure les informations manquantes dans le livret jeu.
Les supports nécessaires au jeu sont les suivants :
- un panneau de présentation du jeu.
- un livret-jeu comportant deux parties : « Enquête sur la vie de l‟oncle Hans » et « Extraits
du journal intime écrit par l‟oncle Hans ».
- neuf fac-similés reproduisant les images souvenirs à retrouver : ceux-ci sont soit accrochés
sur les cimaises (si possible à proximité des œuvres originales), soit posés sur des
pupitres.
- neuf étiquettes portant le nom des images reproduites sur les fac-similés : ces cartels
spécifiques sont signalés par leur couleur jaune et la présence d’une mascotte sous forme
d’un hibou Grand Duc stylisé.
- deux malles de l’oncle Hans (au rez-de-chaussée et au premier étage) renfermant chacune
des cartes qui reproduisent en les agrandissant les détails visuels présents dans le livret-jeu.
Le livret-jeu remis aux enfants à l’accueil comporte deux parties : « Enquête sur la vie de
l‟oncle Hans » et « Extraits du journal intime écrit par l‟oncle Hans ». Le jeu présente une trame
narrative fictive qui retrace les étapes de la vie d’un personnage imaginaire inventé pour le jeu.
48

Figure 5 : Première partie du livret-jeu : « Les grandes étapes de sa vie »
Figure 6 : Deuxième partie du livret-jeu : « Extraits du journal intime de l’Oncle Hans »
La première partie du livret-jeu (fig. 5) s’apparente à un livret de famille ou à des actes
administratifs à compléter et la seconde partie (fig. 6) suggère des notes personnelles écrites par
l’oncle Hans sur sa vie avec des trous à compléter. Pour les deux parties du livret, seul le type de
49

narration diffère (récit impersonnel pour la première partie et récit à la première personne pour la
seconde partie), mais la consigne reste toujours la même. Il s’agit dans les deux cas de retrouver
les images correspondantes aux détails proposés, puis de compléter des textes à trous. La première
partie du jeu s’achève toutefois par une invitation pour les enfants à dessiner un motif de leur
choix en s’inspirant des images d’amour et d’amitié du musée ou en faisant appel à leur
imagination. Le livret-jeu comprend sur sa première page les indications suivantes : « L‟oncle
Hans est un personnage imaginaire qui aurait pu vivre en Alsace au XIXe siècle. À cette période,
l‟usage de conserver une image en souvenir d‟un moment important de la vie était
particulièrement développé. Partez sur les traces de cet oncle mystérieux et grâce aux images et
aux indices de la malle retrouvée dans le grenier du musée, complétez les informations qui le
concerne ».
Figure 7 : Recto et verso de la carte indice Service militaire
Les enfants se servent des indices visuels reproduits sur le livret-jeu pour repérer les images
souvenirs de la vie du personnage fictif. Les enfants peuvent s’aider en cas de besoin des cartes
indices disponibles dans une malle à chacun des étages (fig. 3 et fig. 7). Ces cartes reproduisent en
les agrandissant les détails des images populaires à retrouver. Les images à localiser dans le musée
par les enfants sont reproduites sur des fac-similés (fig. 8). Les concepteurs du jeu ont dû opter
pour des reproductions en fac-similé pour deux raisons principales. Tout d’abord, les images
souvenirs présentes dans le musée ne permettaient pas de suivre les étapes de la vie d’une seule et
même personne réelle. D’autre part, pour des raisons de conservation préventive, les œuvres sur
support papier ne peuvent être exposées que pour un temps limité et sont ensuite remplacées par
d’autres, ce qui ne permettait pas de garder la continuité du jeu. Ces fac-similés sont soit
accrochés sur les cimaises à hauteur des enfants (si possible à côté des œuvres originales), soit
posés sur des pupitres. Ces images en fac-similé sont accompagnées de cartels spécifiques,
reconnaissables par leur couleur jaune et la mascotte « Hibuc ».
50

Figure 8 : Fac-similé du souvenir de conscription et de régiment placé à hauteur des enfants et accompagné d’une
étiquette spécifique de couleur jaune.
Une fois que les enfants ont retrouvé l’image à laquelle appartient le détail, ils doivent lire
les inscriptions portées sur cette dernière pour obtenir les informations manquantes sur la vie du
personnage. Il faut remarquer que quatre des neuf images comportent des inscriptions en allemand
ce qui pourrait-être susceptible de poser des difficultés aux enfants (fig. 9, fig.10, fig.11 et fig.12).
La lecture des étiquettes associées aux fac-similés permettent aux enfants de connaître le nom des
images. Pour les deux dernières images (un ex-voto en remerciement de la survie de la famille
après un incendie et un ex-voto pour la naissance d’un septième enfant), les enfants ne doivent
plus faire appel à la lecture mais à leur sens de l’observation et de la déduction (fig.16 et 17).
Cependant, la compréhension de ce type d’image fait référence à l’iconographie chrétienne ce qui
nécessite d’avoir déjà au préalable une culture religieuse. Les enfants reportent les informations
sur la vie du personnage et le nom des images populaires au fur et à mesure dans le livret-jeu. La
correction est effectuée oralement par la personne chargée de l’accueil une fois le jeu de piste
terminé. Une carte postale est remise aux enfants en récompense de leur participation.
51

On constate tout d’abord une forte adéquation entre le thème valorisé dans le jeu - les images
témoins des grandes étapes de la vie - et le discours développé dans l’exposition permanente,
puisque les fonctions des images populaires constituent un des angles majeurs valorisés dans le
musée avec les techniques de fabrication. Le choix de ce thème est donc tout à fait pertinent avec
les missions du musée déjà énoncées ci-dessus, puisque ce sont bien les « usages, coutumes et
pratiques de nos ancêtres » qui sont abordés à travers cette thématique.
On peut classer les neuf fac-similés du jeu en quatre catégories selon que la représentation
visuelle participe ou non au sens de l’image populaire : texte avec motifs géométriques ou
ornementaux (le souvenir de confirmation et le souvenir de baptême), texte avec motifs décoratifs
à caractère symbolique (le souvenir de mariage et le souvenir funéraire), image figurative associée
à un texte (le souvenir de régiment et de conscription, le jeu de l’oie, le carnet de voyage), image
uniquement figurative (l’ex-voto pour remercier d’avoir été sauvé d’un incendie et l’ex-voto en
remerciement d’une septième naissance).
Tableau 1 : Les neuf images à rechercher au cours du jeu
Relation entre
le texte et
l’image
Texte avec
motifs
géométriques
ou
ornementaux
Visuels des images populaires en fac-similé
Figure 9 : Souvenir de confirmation
Figure 10 : Souvenir de baptême
Texte avec
motifs
décoratifs à
caractère
symbolique
Figure 11 : Souvenir de mariage
52

Figure 12 : Souvenir funéraire
Image
figurative
associée à un
texte
Figure 14 : Souvenir de conscription
Figure 14 : Carnet de voyage
Figure 15 : Jeu de l’oie
53

Image
essentiellement
figurative
Figure 16 : Ex-voto incendie
Figure 17 : Ex-voto naissance
Dans le cas du texte à décor ornemental, seul le texte est porteur de sens dans l’image
populaire. En ce qui concerne le texte avec des motifs à caractère symbolique (roses pour le
mariage, croix et couleur noire pour les funérailles), les motifs accompagnent le sens du texte,
mais ajoutent aussi une strate de signification : la croix marque l’appartenance du défunt à la
religion chrétienne et les roses font allusion à l’amour entre les deux conjoints. En ce qui concerne
le souvenir militaire et le carnet de voyage, texte et figuration se partagent la construction du sens.
Dans le dernier cas, l’image figurative est seule porteuse de sens. La démarche qui est proposée
aux enfants face aux images populaires associant texte et représentation visuelle est de deux
ordres : la reconnaissance de l’image, puis le déchiffrement du texte dont les images sont
porteuses. Les images populaires sont surtout considérées comme des supports d’informations
textuelles à travers le jeu. C’est à l’enfant seul de faire les liens entre ce qu’il lit et ce qu’il voit.
- Objectifs du jeu
Delphine Nicola, alors en charge de médiation du service des publics de la « Chaîne de la
Découverte » avait déterminé deux objectifs pédagogiques lors de l’élaboration du jeu en 2004 :
- Observer les différentes formes et usages que prennent les images populaires peintes.
- Retracer les grandes étapes qui marquaient la vie de chacun ou presque dans le passé :
baptême, confirmation, service militaire, mariage, etc.
54

Les objectifs de ce jeu n’ont pas été rédigés de façon précise. Comme le conseillent Daniel Jacobi
et Odile Coppey (Jacobi, Coppey, 2007 : 15), j’ai donc demandé à Rosemay Zurcher, chargée de
communication et de développement au Musée de l’image populaire quels sont les effets que la
pratique du jeu cherche à provoquer chez les enfants. De plus, étant donné le mode d’élaboration
des jeux issus d’une concertation entre la chargée de médiation du Parc et les musées du réseau, il
me semblait fondamental de prendre aussi en compte le point de vue du musée. À la suite de cet
entretien, j’ai pu dégager les objectifs éducatifs suivants :
- S’approprier physiquement l’espace du musée :
« Le premier niveau, c‟était déjà de permettre aux enfants et aux parents de s‟approprier
l‟espace d‟un musée et de faire la différence entre ce qu‟est un musée avec l‟école ou un
endroit de loisirs ».
- Intérioriser la conduite à tenir dans un musée et les comportements à adopter :
« Comprendre que l‟on a le droit de circuler dans un musée, que l‟on a le droit d‟utiliser
le musée ».
- S’approprier en famille les collections, le contenu du musée :
« Comment utiliser la collection et qu‟est-ce qu‟on peut faire d‟intéressant ? […] L‟idée
c‟est vraiment que parents et enfants s‟approprient le musée, s‟approprient les
collections».
- Rechercher et retrouver par correspondance des images à partir de détails donnés : « Après,
le but du jeu ce n‟est pas d‟avoir telle ou telle réponse dans le carnet (d‟autant que le
personnage est fictif), donc l‟apprentissage ne se fait pas dans les réponses, mais vraiment
dans la recherche ».
- Développer l’observation
« Observer différentes images »
- Repérer les motifs qui apparaissent sur ces images
« Repérer les différentes fleurs, les différents cœurs, les oiseaux, les animaux».
- Dépasser le blocage lié aux inscriptions en langue allemande sur les images populaires :
« Comprendre ce qu‟il faut chercher dans les images elles-mêmes. Comme il y a beaucoup
de textes souvent en allemand, donc, il y a toute cette étape où il faut se dire que ce n‟est
pas grave si on ne comprend pas l‟allemand, que ce n‟est pas grave si on ne peut pas le
lire. […] Ce qui est souvent relevé, ce qui est difficile, c‟est que les images comportent
souvent des inscriptions en langue allemande. Cela décourage vite l‟observation. C‟est
vraiment lié aux objets eux-mêmes et à la collection elle-même. Cela fruste un peu les
gens. »
- Comprendre la fonction et l’utilité des cartels et s’en servir :
55

« Comprendre ce qu‟est un cartel, qu‟il faut s‟en servir, que cela permet de comprendre
des choses ».
- Faire des liens entre ce que l’on lit et ce que l’on voit
« comprendre les liens qu‟il y a à faire […] faire des liens avec ce qu‟on voit ou pas ».
- Pré-requis
Si l’on s’intéresse aux pré-requis nécessaires pour faire l’activité, nous constatons que ce jeu
nécessite tout d’abord de maîtriser la lecture et l’écriture. Selon Rosemay Zurcher, les enfants
doivent être capables pour pratiquer le jeu non « seulement de déchiffrer mais vraiment de
comprendre ce qu‟ils lisent ». Si le succès du jeu semble assez large au niveau de l’âge des
enfants, les capacités en termes de lecture et d’écriture paraissent influencer une expérience plus
ou moins bénéfique lors de la pratique du jeu : « C‟est hyper varié ce que l‟on peut exploiter avec
le jeu. Entre ceux qui vont faire le jeu pour s‟occuper et ceux qui vont comprendre tous les liens
qu‟il y a à faire et qui vont observer différentes images et différents niveaux de lecture, c‟est assez
large le champ de succès du jeu. Mais globalement, là où le jeu est vraiment réussi, c‟est déjà
pour des enfants qui savent lire et écrire. Je dirais plutôt 8-10 ans, c‟est encore mieux, car ils sont
dans un niveau de lecture qui permet pas seulement de déchiffrer mais vraiment de comprendre ce
qu‟ils lisent. Alors que pour les plus petits, c‟est vraiment difficile. S‟ils le font tout seuls, ils
passent plus de temps à inscrire les réponses qu‟à faire des liens avec ce qu‟ils voient ou pas. »
On comprend donc qu’au-delà des compétences en écriture et en lecture, c’est la compétence
linguistique qui doit être maîtrisée au préalable pour pouvoir faire l’activité qui consiste à
compléter un texte à trous. Le principe de l’exercice lacunaire est que l’on doit reconstituer un
texte dont des parties ont été cachées et pour chaque mot caché, il n’existe qu’une seule réponse.
Selon les lacunes, la réponse se trouve soit dans le texte inscrit sur l’image populaire concernée ou
sur le cartel spécifique. Pour les deux derniers trous à compléter, l’enfant trouve la réponse à
travers l’iconographie des deux ex-votos. Les phrases à trou demandent des compétences
linguistiques préalables. La compétence linguistique correspond à la maîtrise du système formel
de la langue : reconnaissance du sens, du vocabulaire et de la syntaxe. L’intérêt de la
reconstitution de texte est ici de permettre aux enfants d’auto-évaluer la compréhension de ce
qu’ils lisent sur les images populaires sans leur offrir un guidage implicite présent dans des
questions fermées de type questions à choix multiples. L’exercice lacunaire des phrases à trous
implique une question non formulée. L’enfant doit être capable de reformuler cette question à
partir de la lacune pour pouvoir diriger sa recherche d’informations lors de sa lecture du texte
inscrit sur l’image populaire ou sur le cartel spécifique, ainsi que lors de son interprétation du sens
56

des images figuratives proposées. L’enfant doit être capable de maîtriser le lexique pour compléter
les phrases, puisqu’il faut qu’il soit capable d’identifier s’il cherche un nom commun, un nom
propre, une date, un chiffre, un participe passé ou un adjectif (Tableau 2 : Les étapes de la vie de
l’Oncle Hans, p. 60). L’enfant doit être en outre capable d’inférer à partir d’un message incomplet
en faisant des hypothèses. Ce type d’activité évalue donc avant tout la compétence langagière de
l’enfant. Cet exercice même si il se veut d’apparence ludique ne peut être à lui seul assimilé à un
jeu.
Les images peintes du Musée de l’image populaire se rapprochent finalement des œuvres d’art
par le caractère unique de chacune d’entre-elles. Les images faites à la main en un seul exemplaire
sont d’ailleurs désignées par le terme d’unica. Ces images-là sont faites à la commande, et parfois
réalisées par l’utilisateur lui-même. Du fait de la présence concomitante d’images originales et de
reproductions en fac-similé, les enfants doivent déjà être familiarisés avec les notions d’œuvre
originale et de reproduction pour pouvoir faire la différence entre les images originales et les facsimilés.
Le livret-jeu comporte un avertissement sur le caractère fictif du personnage de l’Oncle
Hans, mais aucune indication n’est apportée dans le livret ou sur les étiquettes des reproductions
sur le caractère factice des images à retrouver. Cette indication se trouve bien par contre sur le
panneau de présentation du jeu. Cependant, on peut supposer que du fait de la taille réduite des
caractères employés et de son emplacement en toute fin du texte, cette explication ne soit
finalement que peu lue par les parents ou les enfants et qu’elle passe inaperçue.
Un autre pré-requis important porte lui sur l’acquisition d’une culture religieuse chrétienne.
En effet, le thème du jeu porte sur des images témoins de la vie d’autrefois. Les étapes de la vie
qui marquaient la vie de chacun dans le passé correspondaient pour plusieurs d’entre elles à des
rites religieux (baptême, confirmation, communion). Le sens de ces rites ne peut être compris que
si les enfants ou les parents possèdent eux-mêmes cette culture religieuse. Il en est de même pour
les deux ex-voto qui mêlent représentation profane (incendie ou naissance) et iconographie
religieuse avec la représentation de la Vierge à l’enfant.
57

. Mise en forme ludique
Cette activité possède-t-elle les caractéristiques du jeu que nous avons énoncé dans la
définition du jeu ? En quoi consiste la mise en forme ludique de ce contenu pédagogique ?
Si nous avons vu en étudiant les pré-requis que le texte à trous du livret était plus proche d’un
exercice lacunaire que d’un jeu, on peut toutefois se demander si d’autres aspects de l’activité
relèvent eux bien du jeu. Tout d’abord, l’activité possède des règles (retrouver des images dans le
musée à partir de détails). La question est de savoir si ces règles produisent des possibilités de
décisions dont l’issue est incertaine. Nous pouvons considérer ici que les deux caractéristiques de
décisions et d’incertitude sont réunies dans le sens où l’emplacement des images dans le musée
échappe en partie au joueur. Les décisions que les joueurs doivent prendre sont relatives à leur
orientation dans le musée. Les deux plans suivants donnent l’emplacement des images en facsimilé
dans les collections du musée au rez-de-chaussée et au premier étage.
58

Légende : Plan de l’espace d’exposition au rez-de-chaussée
c1 à c 25 : numéro de cimaise
vitrine 1 à 6 : vitrines horizontales sur les
techniques de fabrication
Noms des espaces :
- HISTOIRE ET COLLECTIONS DU
MUSÉE
- LES TECHNIQUES DE FABRICATIONS
- SAVOIR-FAIRE, SIGNIFICATIONS ET
SYMBOLES
Noms des sections : en bleu (ex : Les
églomisés)
Emplacement des éléments du jeu : en rouge
- SB : souhait de baptême
- SM : Souhait de mariage
- SC : souvenir de confirmation
- SF : souvenir funéraire
- Malle de l’Oncle Hans : malle aux
indices
Légende : Plan de l’espace d’exposition au 1 er étage
c 33 à c 58 : numéro de cimaise
vitrine 7 à 20 : vitrines verticales de mise en
contexte
Noms des espaces :
- IMAGES RELIGIEUSES ET PROFANES
DANS L’ESPACE DOMESTIQUE
- DU BERCEAU À LA TOMBE
- TRACES ET ENJEUX DE MÉMOIRE
Noms des sections : en bleu (ex : La vie
domestique)
Emplacement des éléments du jeu : en rouge
- Jeu de l’oie
- Souvenir de conscription
- Carnet de voyage
- Ex-voto incendie
- Ex-voto naissance
- Malle : malle aux indices
59

La chargée de communication et de développement du musée de Pfaffenhoffen déplore le
faible guidage exercé par le livret-jeu sur le parcours des enfants : « L‟emplacement des différentes
images, a été fait par rapport à une certaine logique avec les œuvres qui les entourent, mais j‟ai
l‟impression que cela n‟aide pas du tout les enfants. Ils ne maîtrisent pas le parcours
muséographique. Ils repassent plusieurs fois aux mêmes endroits, sans savoir où aller. Ils ne
procèdent pas avec méthode, mais ils regardent partout en même temps ». Si le livret-jeu est
susceptible de focaliser l’attention sur les images à retrouver, il ne semble pas à première vue
favoriser la régulation du parcours des enfants.
D’autre part, le jeu de piste recourt à la mise en scène des images à rechercher à travers une
narration fictive qui exerce une transposition sur ces images qui deviennent dans le cadre de
l’activité les témoins de la vie d’un personnage imaginé. Les images souvenirs présentes dans le
musée ne permettaient pas de suivre les étapes de la vie d’une seule et même personne réelle. Les
concepteurs du jeu ont donc inventé une biographie pour un personnage fictif. Des images
souvenirs originales ont été ensuite modifiées par un graphiste pour correspondre à cette
biographie fictive. Le tableau ci-dessous reconstitue les étapes de la vie du personnage fictif et
permet de voir les modifications opérées sur les fac-similés par rapport aux images originales.
Tableau 2 : Les étapes de la vie de l’oncle Hans
Étape de la
vie
date
Image souvenir
originale du musée
(emplacement dans le
musée)
Naissance 1815 Souhait de Baptême,
canivet, anonyme, non
daté (réserve)
Intervention
du graphiste
(fac-similé)
Une lacune a
été comblée
avec la date de
la naissance et
le nom
Johannes Jacob
Enfance Jeu de l‟oie – 1 er étage Pas de
modification
Livret-jeu :
mots manquants
à rechercher
(phrases à trou)
Retrouver sa date
de naissance
(1815)
Retrouver le nom
de l’image
offerte par son
parrain et sa
marraine (souhait
de baptême)
Retrouver le
cadeau
d’anniversaire
offert par sa mère
pour ses 10 ans
(jeu de l’oie)
Indice visuel
(sur le
livret-jeu et
sur les
cartes
indice)
Détail d’un
cœur du
souhait de
baptême
Détail de
l’oie sur le
jeu de l’oie
60

Confirmation 1829 Souvenir calligraphié –
1 er étage
Service
militaire
1833-
1840
Voyage 1841-
1843
Souvenir de conscription
et de régiment - rez-dechaussée
Carnets d‟amitié - rezde-chaussée
Rajout du nom
Johann Jacob
dans le coin
inférieur gauche
Le nom
d’origine est
remplacé par
celui de
Johannes Jacob
Création d’un
carnet de
voyage pour le
jeu inspiré des
carnets d’amitié
Retrouver la date
de sa
confirmation
(1829)
Retrouver le nom
de l’image
offerte par le
pasteur (souvenir
de confirmation)
Retrouver son
numéro de
conscrit (le n°
16) et dans quel
régiment a-t-il
servi (la
cavalerie) ?
Retrouver le lieu
où il a cueilli une
branche d’olivier
(le Midi de la
France)
Détail de la
frise
décorant le
souvenir de
confirmation
Détail du
cavalier sur
le souvenir
de
conscription
et de
régiment
branche
d’olivier
Mariage 1845 Souvenir de mariage de
Johannes Schweyer et
Maria Stoltz – rez-dechaussée
Le nom
Schweyer est
remplacé par
Jacob
Retrouver le nom
de son épouse
(Maria)
Retrouver le nom
de l’image
offerte par ses
parents (souvenir
de mariage)
Détail d’une
fleur sur le
souvenir de
mariage
Incendie de
la maison
Paternité
Ex voto représentant un
incendie (réserve
gauche)
Ex voto d’une femme en
couche et de ses enfants
priant - 1er étage
Décès 1905 Texte funéraire églomisé
– rez-de-chaussée
Pas de
modification
Pas de
modification
Pas de
modification
Trouver quel
était ce terrible
accident (la
maison a brûlé)
Chercher de quel
enfant la mère
vient d’accoucher
(septième)
Chercher quand
est mort Hans?
(28 novembre
1871)
Détail d’une
femme priant
sur l’ex voto
Détail de la
femme
venant
d’accoucher
et de son
nouveau né
sur l’ex voto
Détail de la
croix sur le
souvenir
funéraire
Et quel âge avaitt-il
? (en nombre
d’années, de
mois et de jours,
soit 61 ans, 10
mois et 21 jours)
Retrouver le nom
61

de l’image que
ses enfants ont
fait faire
(souvenir
funéraire)
Nous voyons donc que la mise en forme ludique va ici bien au-delà de la « métaphore », et que
cette transformation, cette transposition n’est pas simplement « redistribution du réel par la
pensée» (Henriot, 1989 : 259), mais modification concrète de la réalité. Il y a finalement création
d’une réalité autre. Il faut aussi considérer le fait que le musée est lui même un lieu qui opère une
première transposition sur la réalité. Les images populaires étaient destinées à être accrochées sur
les murs de la maison des paysans alsaciens. Les images populaires sont ici encadrées, accrochées
sur des cimaises ou mises sous vitrines à la manière d’une présentation de type musée des beauxarts.
La décontextualisation visuelle qu’exerce la scénographie du musée sur ces images transpose
ces images du quotidien en œuvres d’art. La muséographie attire l’attention des visiteurs sur
l’aspect esthétique ou technique de ces images. La mise en contexte passe essentiellement par la
lecture des nombreux panneaux ou fiches de salles. Le jeu apparaît donc ici comme un processus
de modalisation, mais cette modalisation porte sur une activité déjà modalisée (la déambulation
dans le musée). Le jeu par le recours à la fiction transforme une première activité (qui consiste à
regarder des images ayant appartenu à des alsaciens anonymes) en une autre (regarder des images
ayant appartenu à une personne identifiée : l’Oncle Hans). Le problème est que si le cadrage
secondaire n’est pas perçu par les enfants, il y a risque de confusion, de mésinterprétation faute de
voir le cadrage spécifique de l’activité. La modalisation à l’œuvre dans le jeu transforme un
matériau qui a déjà sens (les images populaires) et sur lequel elle s’appuie. Si des indices existent
pour communiquer sur cette modalisation (le signalement du personnage comme fictif sur la
première page du livret-jeu, les cartels jaunes spécifiques pour le jeu, l’emplacement des facsimilés
à hauteur des enfants), on peut se demander toutefois s’ils sont bien perçus et compris par
les enfants.
L’entretien avec Rosemay Zurcher a mis à jour certains problèmes de logistique. Il faudrait
tout d’abord s’interroger sur l’utilité des deux malles aux indices. Celles-ci contiennent des cartes
qui n’apportent rien de nouveau au livret-jeu sauf une meilleure visibilité des indices visuels : « La
malle, c‟est vraiment une étape intermédiaire qui peut-être sympa quand on joue dans le cadre
familial pour avoir des détails meilleurs que ceux reproduits dans le carnet ». Quant aux neuf
objets présents dans le fond des deux malles sous une plaque en plexiglas, ils symbolisent les neuf
62

étapes de la vie de l’Oncle Hans. Les enfants peuvent les voir, mais ne peuvent pas les emporter.
Ces objets n’interviennent pas directement dans le jeu : « Les petits objets que l‟on a mis au fond
de la malle ne bougent pas ; donc ils ne remplissent pas un rôle très important. Ils servent à
contextualiser les événements que l‟on veut évoquer. Cela a le mérite d‟exister, mais ce n‟est pas
vraiment remarqué. Cela n‟intrigue pas les enfants. Ils ne le remarquent pas vraiment. Est-ce que
ce n‟est pas assez visible ? Est-ce que ce n‟est pas assez clair ? Ils n‟ont pas vraiment une grande
importance finalement ». Au final, cette malle semble avant tout une manière d’attirer l’attention
des enfants sur la présence d’un jeu, de le signaler visuellement dans l’espace : « On peut très bien
se passer de la malle. Le gros avantage de la malle, c‟est qu‟elle intrigue. On la voit beaucoup
mieux que n‟importe quel kakémono ou panneau : qu‟est-ce que c‟est ? Est-ce qu‟on peut
l‟ouvrir ? C‟est un objet qui attire et que l‟on sent qu‟on peut manipuler ». Les malles sont donc
avant tout un moyen de communiquer sur le jeu, une ruse pour attirer les enfants par un matériel
d’apparence ludique, mais elles ne font partie du jeu qu’accessoirement.
L’autre point sur lequel nous pouvons nous interroger est celui de la commodité du support
papier : « les enfants ont un mal fou à écrire dans leur carnet ». L’écriture demande à la fois
d’avoir mémorisé les lettres et les sons correspondant et aussi de maîtriser la motricité fine
(notamment la coordination et la précision du geste) pour pouvoir tenir le crayon correctement et
contrôler la pression sur le papier. Le positionnement est important pour pouvoir maîtriser
correctement la coordination précise des gestes. Les enfants ont l’habitude d’écrire assis à une
table ou en s’appuyant sur un support rigide et fixe. La chargée de communication et de
développement du musée de Pfaffenhoffen a ainsi constaté que de nombreux enfants ont dû mal à
compléter le livret-jeu et qu’ils ne savent pas où s’appuyer dans le musée : « Pour écrire, ils se
tortillent dans tous les sens finissent une fois sur dix par s‟appuyer contre une œuvre. C‟est
compliqué déjà d‟utiliser le carnet, d‟écrire dedans. […] On a des sous-mains que l‟on peut
prêter effectivement. Mais cela ne résout pas tout. Les enfants à cet âge là, on l‟habitude d‟écrire
assis à une table d‟écolier. C‟est la meilleure condition pour qu‟ils puissent écrire. Alors, ils y
arrivent quand même en se couchant par terre ou en s‟appuyant contre les murs. Mais, on voit
bien qu‟ils sont un peu embêtés par cela ». Pour des raisons de conservation des œuvres,
l’intensité lumineuse ne doit notamment pas dépasser les 50 lux par heure pour les images peintes
et les gravures et doit être limitée dans le temps. On considère à titre indicatif que 1500 lux sont
nécessaires à un individu pour avoir une attention visuelle soutenue. Cette faible lumière entraîne
une gêne pour les visiteurs et ne facilite pas la lecture du livret-jeu ou l’écriture des réponses par
les enfants.
63

c. Buts de l’évaluation du jeu La vie mystérieuse de l’oncle Hans
Nous avons vu, tout d’abord, que la mise en place des jeux Amuse-Musées tout au long de
l’année dans les musées de la « Chaîne de la Découverte » avait pour but de favoriser la
découverte du patrimoine culturel en jouant en famille et de permettre l’autonomie des familles.
Nous retiendrons donc l’étude des interactions familiales comme premier but de l’évaluation. Les
Jeux Amuse-Musées, dont celui du musée de Pfaffenhoffen ont été conçus pour être pratiqués en
famille. Ainsi que le soulignent Odile Coppey et Daniel Jacobi, « rendre compte de l‟éducation
non formelle, c‟est prendre en compte l‟interactivité, le compagnonnage et les conflits sociocognitifs
que la visite instruit manifestement » (Jacobi, Coppey, 1995 : 18).
Le type de découvertes et les effets souhaités ont ensuite été approfondis lors de l’étude des
objectifs pédagogiques du jeu définis par le Service des publics lors de la conception du jeu, et de
ceux énoncés par la chargée de communication et de développement du musée de l’image
populaire.
La synthèse des objectifs définis par le Service des publics du Parc et de ceux déterminés lors
de l’entretien avec la chargée de communication et de développement du musée de l’image
populaire nous permettent de dégager sept objectifs principaux :
- La pratique du jeu en famille favorise la découverte du patrimoine culturel par les
interactions qu’ils suscitent au sein de la famille
- Le jeu doit permettre l’appropriation du musée par les enfants en tant que lieu avec des
comportements spécifiques à adopter
- Le jeu doit favoriser l’apprentissage du sens des images populaire en lien avec les
principales étapes de la vie au XIXe siècle.
- Le jeu doit développer l’observation et la mémorisation des détails et des caractéristiques
des images populaires.
- Le jeu doit inciter à la consultation des cartels spécifiques et à s’intéresser aux textes
inscrits sur les images populaires : Le jeu doit permettre aux enfants de surmonter le frein
posé par l’usage de l’allemand sur les images populaires et faire découvrir aux enfants le
contenu de ces images.
64

- La pratique du jeu doit aussi être un moment de plaisir pour inciter à participer à d’autres
jeux Amuse-Musées dans les musées de la Chaîne de la découverte.
L’analyse préalable du jeu, nous a permis de soulever deux questions quant à l’usage du livretjeu
et à la perception du second degré dans le jeu :
- Le livret-jeu pose-t-il des difficultés au niveau de l’usage et de la compréhension du
carnet ?
- Le second degré du jeu est-il perçu par les enfants (personnage fictif et images en facsimilés)
?
65

3. Analyse préalable d’un jeu de piste tactile : À qui est cet uniforme ? au
musée de la Bataille du 6 août 1870 (Woerth)
a. Description du jeu : objectifs et pré-requis
Figure 18 : Intérieur du musée de la Bataille de 1870 à Woerth : salle 5
Le musée de la Bataille du 6 août 1870 à Woerth est consacré à la bataille de Woerth-
Frœschwiller, plus connue sous le nom de « bataille de Reichshoffen » qui vit la défaite de la
France et ouvrit à l’armée prussienne la route des Vosges. Le musée, installé au 2 ème niveau du
château de Woerth, témoigne de ce passé à la fois héroïque et tragique à travers une collection de
1300 objets. La collection du musée comprend essentiellement des uniformes, armes, munitions,
casques, coiffes, et objets nécessaires à la vie du soldat trouvés sur le champ de bataille. Des
documents tableaux, cartes postales, et gravures constituent des témoignages intéressants d’un
tourisme du souvenir. Un diorama de 4000 figurines retrace un moment de cette bataille.
66

Figure 19 : Jeu de piste tactile : supports du jeu
Le jeu « À qui est cet uniforme ? » est désigné dans les documents de communication des
Amuse-Musées ou dans le Carnet du Parc comme « rébus illustré » ou comme « charades
tactiles ». Cependant, ce jeu n’est à proprement parler ni un rébus ni une charade, mais un jeu
d’observation. Le jeu se présente sous la forme de dix plateaux en bois comprenant chacun trois à
quatre indices qui imitent des éléments de l’uniforme d’un soldat. Pour chaque plateau, les enfants
doivent retrouver quel soldat portait ces éléments sur son uniforme. Les uniformes à retrouver
appartenaient aux dix soldats suivants : l’artilleur, le zouave, le cuirassier et le prussien, le gardemobile,
le hussard, le lancier-français, le fantassin bavarois, le chasseur à cheval, le turco
(tirailleur). Les enfants peuvent emporter avec eux les plateaux de jeu durant leur recherche et
toucher les éléments en relief du plateau. Les plateaux de jeu sont soit choisis au hasard par
l’enfant, soit distribués un par un à l’accueil. Une fois le mannequin retrouvé, les enfants doivent
lire le nom du soldat sur l’étiquette dans la vitrine, puis aller dire la réponse à la personne chargée
de l’accueil. Celle-ci lui remet un nouveau plateau de jeu en cas de succès ou l’incite à chercher de
nouveau en cas d’erreur. Des fiches de corrections permettent d’en savoir plus sur chaque soldat et
son uniforme au recto, et sur le régiment auquel ce soldat appartenait au verso. Selon les agents
d’accueil, une courte explication est parfois donnée sur les caractéristiques de l’uniforme que
l’enfant vient de trouver.
67

Tableau 3 : Les supports de jeu et les mannequins à rechercher
Nom du soldat Éléments du support de jeu Uniforme
Artilleur français
Fantassin
prussien
- un morceau d’étoffe bleu marine avec des bandes
rouges
- une boucle de ceinturon en relief ornée de deux
canons croisés et d’une grenade (obus en
flammes)
- une forme de l’obus en relief
- un galon doré
- un morceau d’étoffe bleu
- la boucle de ceinturon en relief ornée de la
couronne impériale
- une pointe de casque
- l’aigle de l’Empire germanique décorant le
casque
68

Cuirassier
français
- un morceau d’étoffe rouge
- une cuirasse miniature réalisée en métal
- la boucle de ceinturon en relief décorée d’une
grenade (obus en flammes)
- des crins de chevaux (appartenant au protègenuque
du casque)
Zouave
- un morceau d’étoffe représentant le pantalon
bouffant rouge
- étoffe jaune du « tombô » de la veste (la couleur
désigne la province où est stationné le régiment
du soldat)
- pompon de la chéchia (coiffe)
- broderie du pantalon
69

Chasseur à cheval
Hussard
- la boucle de ceinturon en S (boucle de ceinturon
du chasseur à cheval français)
- reproduction en miniature d’une selle (selle de
cavalerie française)
- cordelettes bleues (brandebourgs) et boutons de la
veste
- boucle de ceinturon en S
- cordelettes blanches (brandebourgs) et boutons de
la veste
- cordon en laine blanche (cordon de shako)
Lancier français
- pommeau du sabre
- plastron rouge avec bande blanche et boutons
- moulage en bas-relief de la partie en métal d’un
chapska (casque) de lancier
70

Turco
algérien)
(tirailleur
Fantassin
bavarois
- galons dorés des manches
- guêtre à lacets
- mini pantalon bouffant bleu
- une bande rouge
- le pompon de sa coiffe
- galons et broderie ornant le bas de la veste
(« tombô »)
- porte baïonnette à double fourreau
- moulage en bas-relief de l’initiale du roi Louis II
de Bavière surmontée d’une couronne (casque
d’infanterie bavaroise)
- moulage en bas-relief d’une boucle de ceinturon
simple
- chenille (sur le dessus du casque)
Garde-mobile
- képi miniature
- guêtre blanche en toile
- morceau d’étoffe bleue pour le pantalon et bande
rouge
71

- Les objectifs
Les objectifs définis lors de la conception par Delphine Nicola, anciennement responsable
du Service des publics de la « Chaîne de la Découverte » étaient essentiellement centrés sur
l’observation et sur la mémorisation visuelle mais aussi sur l’éveil de la curiosité, de l’intérêt de
l’enfant :
- Observer les détails et accessoires insolites des uniformes dans le musée.
- Identifier des soldats dans le musée par comparaison grâce aux éléments en relief que
l’enfant peut observer et toucher.
- Observer, dans un second temps, les objets dans les vitrines environnantes qui
correspondent au personnage.
- Apprendre à différencier les français et les allemands sur le champ de bataille.
J’ai mené un entretien auprès d’une des chargées d’accueil du musée, particulièrement
impliquée dans la promotion et la mise à disposition du jeu sur place. À la suite de cet entretien,
j’ai pu dégager les effets souhaités suivants :
- Changer la façon de percevoir le musée : donner une image positive du musée qui ne soit
pas une « vision figée d‟un musée qui parle de personnes mortes depuis longtemps » ;
donner l’image d’un musée plus vivant
- Voir le musée et les objets autrement ; visiter le musée autrement
- Initier à la visite de musée
- Impliquer activement le jeune visiteur
- Donner envie de revenir dans un musée
- Prendre plaisir à faire l’activité
- Favoriser l’observation : voir des détails que les enfants n’auraient pas vus autrement
- Retenir le nom de certains soldats ou de certains détails
L’aspect ludique du jeu et le plaisir qu’il est censé procurer est valorisé par la chargée d’accueil. Il
s’agit essentiellement de faire passer un bon moment aux enfants dans un petit musée d’histoire
locale. Des changements sont surtout espérés au niveau des attitudes et des valeurs associées au
musée. Des effets sont aussi mentionnés au niveau de l’attention et de l’observation.
72

- Les pré-requis
En ce qui concerne les pré-requis nécessaires à l’activité, le jeu surtout basé sur
l’observation est accessible pour les enfants dès 5 ou 6 ans, s’ils sont accompagnés de leur parents.
Toutefois, les indices des supports ne sont pas des reproductions à l’identique des éléments des
costumes militaires. Il s’agit d’éléments distinctifs qui ressemblent aux éléments originaux des
uniformes, mais ce ne sont pas de parfaites copies. Il y a souvent une différence de proportion
entre les éléments des supports de jeu et les éléments originaux. L’échelle de taille n’est pas
respectée entre les différents éléments d’un même support de jeu. Les matériaux utilisés pour les
éléments du jeu différent parfois aussi des matériaux originaux utilisés. Les couleurs des tissus
sont souvent approximatives. Les enfants doivent donc non pas chercher des correspondances
exactes, mais faire des rapprochements et chercher des similitudes. Ils doivent trouver un certain
nombre de points communs entre les éléments du support de jeu et l’uniforme porté par un
mannequin.
b. Mise en forme ludique
Nous pouvons nous demander à nouveau si l’activité proposée est effectivement un jeu.
Celle-ci possède des règles : retrouver un soldat et son uniforme dans le musée à partir d’indices
en relief assemblés sur un support en bois. Les indices correspondent à des éléments
caractéristiques de l’uniforme d’un soldat de la guerre de 1870. Ces règles engendrent bien une
liberté réglée, au sens où l’enfant choisit de procéder comme il le souhaite pour retrouver ces
éléments. L’enfant ignore à quel soldat appartiennent les éléments du jeu et où se trouve le soldat
dans le musée. Il peut décider par exemple de se focaliser sur un seul élément à chercher, ou de
chercher tous les éléments en même temps. Il peut décider de procéder de manière systématique
en regardant tous les mannequins un par un ou en se laissant guider par le hasard. L’enfant doit
donc prendre une succession de décisions au cours du jeu et l’issue de ces décisions comporte une
part d’incertitude. Le jeu n’impose pas de parcours dans le musée et ne le guide pas à travers les
salles du musée. Par contre, il attire son attention sur un type d’expôt à chercher : les mannequins.
73

Plan du Musée de la Bataille du 6 août 1870, Woerth
Légende :
En rouge : emplacement des mannequins à chercher (ex : artilleur)
En vert : emplacement des mannequins qui ne font pas partie du jeu (ex : médecin)
De plus, nous pouvons considérer qu’il y a bien second degré dans le sens où dans le cadre du
jeu le joueur opère un déplacement par rapport à la réalité. Le joueur a conscience à la fois de
déambuler en tenant dans ses mains une planche en bois avec un assemblage hétéroclite de
matériaux, mais aussi de chercher un soldat en s’aidant d’un plateau avec des éléments de
costume. Le jeu opère une modalisation sur un cadre primaire de signification : une planche en
bois sur laquelle sont assemblés des matériaux hétéroclites, puisque celle-ci est perçue à travers le
cadre secondaire instauré par le jeu comme un plateau de jeu avec des éléments de costume.
Nous pouvons aussi remarquer que le matériel utilisé en faisant appel au toucher participe à la
mise en scène du jeu et à son caractère ludique. Ce matériel ludique permet une appropriation
sensorielle des uniformes que les enfants voient sous vitrine. Les supports de jeu par leur format
de la taille d’une feuille A4 impliquent une certaine manipulation et donne la possibilité d’entrer
en contact avec les matériaux et les objets en relief.
74

c. Buts de l’évaluation du jeu À qui est cet uniforme ?
Les Jeux Amuse-Musées, dont celui du musée de Woerth ont été conçus pour être pratiqué en
famille. Nous avons vu que la mise en place des jeux Amuse-Musées tout au long de l’année dans
les musées de la « Chaîne de la Découverte » avait pour but de favoriser la découverte du
patrimoine culturel en jouant en famille et de permettre l’autonomie des familles. Nous
retiendrons donc l’étude des interactions familiales comme premier but de l’évaluation. Le type de
découvertes et les effets souhaités ont été cernés de façon plus approfondie à travers les objectifs
pédagogiques définis par le Service des publics de la Conservation lors de la conception du jeu, et
grâce à l’entretien mené auprès de la chargée d’accueil auprès du musée de la Bataille de 1870.
La synthèse des objectifs définis par le Service des publics du Parc et de ceux déterminés lors
de l’entretien avec une des chargées d’accueil du musée nous permettent de dégager six objectifs
principaux :
- La pratique du jeu en famille favorise la découverte du patrimoine culturel par les
interactions qu’ils suscitent au sein de la famille.
- Le jeu doit permettre l’appropriation du musée par les enfants en tant que lieu avec des
comportements spécifiques à adopter.
- Le jeu doit favoriser l’observation attentive des détails et accessoires des uniformes du
musée, mais aussi dans un second temps les objets dans les vitrines aux alentours.
- L’enfant doit apprendre à différencier les soldats allemands ou français de la guerre de
1870, retenir les noms de certains soldats ou certains accessoires et éventuellement
pourvoir identifier certains soldats du musée.
- Les supports tactiles du jeu impliquent une démarche active des enfants et contribuent à
une meilleure mémorisation des détails insolites des uniformes, mais aussi à donner une
image positive du musée aux enfants.
- Les enfants doivent prendre plaisir à faire l’activité afin de leur donner envie de visiter
d’autres musées.
75

III. Description de la méthode de collecte des données
A. Conception et mise en œuvre des outils d’analyse
Face à ces différents buts de recherche et au fait que mon étude se devait de privilégier un
aspect qualitatif, il me fallait donc concevoir des outils qui permettraient de prendre en compte
d’une part les échanges au sein de la famille, la réalité de la pratique du jeu et les difficultés
éventuelles rencontrées, et d’autre part les effets définis au préalable en terme de découverte et
d’apprentissage.
J’ai donc décidé de concevoir un outil de récolte de données composé de l’enregistrement des
réactions des groupes familiaux au cours du jeu et de questionnaires adaptés pour les enfants.
Du fait des tranches d’âge auxquelles les deux s’adressent, entre 6 et 10 ans pour le Musée de
la bataille du 6 août 1870 de Woerth et entre 7 et 10 ans pour le Musée de l’image populaire à
Pfaffenhoffen, les questionnaires ont été conçus spécialement en privilégiant une méthode non
verbale centrée sur les épreuves de rappel ou de reconnaissance des objets des collections de
chacun des musées.
1. Les interventions verbales et non verbales des enfants et de leurs parents
a. Le mode de collecte des réactions des familles
À la suite d’une phase d’observation flottante, j’ai remarqué que la pratique du jeu en visite
familiale suscitent de nombreux commentaires à voix haute aussi bien par les enfants que par les
adultes qui les accompagnent. Ce discours produit spontanément par les visiteurs au cours du jeu
m’a semblé une source très riche de renseignements. Les membres de la famille échangent entre
eux leurs impressions, les difficultés rencontrées, le plaisir éprouvé au cours du jeu. Les parents
suscitent l’attention des enfants à travers des commentaires ou des questions. Les enfants
sollicitent l’aide des parents ou attirent leur attention sur des choses qui les intriguent.
La collecte des réactions des enfants et de leurs parents s’est faite sous la forme d’observation
suivie filmée. Il s’agissait de recueillir leurs remarques spontanées, leurs impressions, les
questions qu’ils se posent et les problèmes qu’ils rencontrent durant le jeu. Le recours à la caméra
plutôt qu’à l’enregistrement a été choisi dans le but de mettre en relation les interventions verbales
76

des groupes familiaux avec les éléments du jeu ou des collections. Il me permettait aussi de tenir
compte des interventions non verbales à caractère démonstratif, mais aussi du nombre de
consultations des éléments du jeu et des collections.
b. Le traitement des interventions des familles
Les conversations des familles ont été retranscrites. Les interventions verbales des membres
des groupes familiaux ont été ensuite analysées en fonction de leur valeur sémiocognitive et
socioaffective. Pour construire la grille d’analyse, j’ai consulté différentes études recourant à
l’analyse sémiocognitive des conversations des visiteurs. Lors d’une étude sur l’apprentissage des
familles dans les musées de sciences, Minda Borun, Margaret Chambers et Ann Cleghorn ont
distingué trois niveaux d’apprentissage qui donnent une mesure de l’apprentissage du groupe
plutôt qu’individuel basé sur la compréhension d’informations en lien avec l’exposition, et les
connections établies avec des connaissances antérieures (Borun ; Chambers ; Cleghorn, 1996). Le
premier niveau est l’identification caractérisée par des affirmations ou des réponses courtes et très
peu d’associations au contenu de l’exposition. Les connections établies sont souvent éloignées ou
à côté du sens de l’exposition. Le deuxième niveau est la description qui se caractérise par des
réponses complexes, des mises en relation correctes avec des caractéristiques visibles de
l’exposition et des évocations d’expériences personnelles basées sur des caractéristiques visibles
de l’exposition et non des concepts. Le troisième niveau comprend des réponses complexes, des
affirmations exactes concernant les concepts sous-tendant l’exposition et des mises en relation
entre les concepts de l’exposition et des expériences personnelles. Nous retrouvons ces catégories
d’identification, description et d’interprétation dans la typologie des actes interprétatifs de
Silverman (1990). Les « actes interprétatifs » sont « des actes illocutoires par lesquels les
visiteurs donnent collectivement un sens aux exhibits » (Niquette, 1994 : 87). Silverman a dégagé
cinq « actes interprétatifs » à partir de l’écoute de conversations tenues entre des visiteurs : 1.
l’établissement d’identité ; 2. L’évaluation ; 3. La description objective ; 4. L’émission d’un savoir
puisé à même son répertoire personnel ; 5. Les références à l’expérience personnelle. Colette
Dufresne Tassé s’est intéressée au fonctionnement psychologique du visiteur et a élaboré « un
instrument destiné à étudier les propos que les visiteurs de musées tiennent pendant qu‟il se
trouve dans une salle d‟exposition et plus particulièrement devant un exhibit ». (Dufresne-Tassé,
1995 : 28). Cette grille permet d’étudier quatre dimensions du fonctionnement d’une personne : 1.
Les opérations mentales que fait le visiteur pour traiter son expérience ; le foyer d’attention du
visiteur ; la manière dont le visiteur aborde la réalité et le degré de certitude qui accompagne ce
77

que fait le visiteur. Colette Dufresne Tassé distingue 12 opérations mentales : « manifester,
constater, identifier-situer, évoquer, comparer-distinguer, saisir, expliquer-clarifier-justifier,
transformer-modifier-suggérer, résoudre, prévoir, vérifier, juger ». Le foyer de l’attention du
visiteur correspond à ce dont il parle et il s’occupe. La manière dont le visiteur aborde la réalité
peut être imaginaire, cognitive ou affective. Le degré de certitude s’exprime par « du doute, de
l‟hésitation, une question, du scepticisme, une affirmation ou une négation directe. »
Ces analyses rendent compte du fonctionnement psychologique individuel du visiteur ou de la
compréhension de la famille prise dans sa globalité, mais ne permettent pas de comprendre le rôle
joué par la sociabilité quant à l’appropriation de l’exposition. Jacqueline Peignoux, Frédérique
Lafon et Emmanuelle Vareille ont mené des entretiens itinérants dans trois des étages de la Grande
Galerie de l’Évolution à Paris. Elles ont catégorisé les commentaires des visiteurs en huit
catégories : les commentaires comportementaux, les commentaires muséographiques, les
commentaires descriptifs, les commentaires établissant des relations, les commentaires coéducatifs
simples, les commentaires d’investigation, les commentaires coéducatifs complexes, les
commentaires synthétiques (Peignoux, Lafon, Vareille, 2000). C’est bien sous les aspects
d’apprentissage mutuel ou de coéducation qu’il nous faut également considérer la relation entre le
contenu du jeu, l’enfant et son groupe familial et les sens suscités par ces interactions. Jean-Pierre
Cordier et Sylvie Serre ont essayé de comprendre comment les interactions familiales influencent
l’acquisition des savoirs lors de la visite de musée. La grille d’observation utilisée distingue quatre
catégories d’interactions familiales favorisant l’activité de l’enfant : motiver l’enfant ; fixer son
attention ; susciter sa réflexion ; trouver un sens. Ces quatre catégories correspondent à des
niveaux croissants d’autonomie dans l’apprentissage.
Le codage des enregistrements des interventions des groupes familiaux comprend donc deux
dimensions principales : l’apprentissage mutuel et le fonctionnement psychologique des enfants.
Les observations concernent toujours le comportement d’un seul des enfants du groupe familial et
l’ensemble des interventions de coéducation qui lui sont destinées.
Les interventions de coéducation sont catégorisées selon onze types d’interactions : 1. Susciter
et entraîner l’adhésion envers les exigences de la situation (encourager, féliciter, s’assurer que tout
va bien) ; 2. Focaliser l’attention par la parole ou le geste (dire quoi regarder, aider à l’observation
par des interventions verbales ou non-verbales) ; 3. Aider à l’investigation (montrer comment
visiter et comment diriger les recherches d’informations, rappeler les règles du jeu) ; 4. Aider à la
lecture et à l’écriture (lire ou épeler à voix haute) ; 5. Exprimer son approbation ; 6. Exprimer son
désaccord, mettre en doute ; 5. Faire prendre du recul par une interprétation ponctuelle (susciter la
réflexion); 7. Stimuler l’élaboration d’un sens (expliquer ou aider à trouver le sens ou la fonction
78

d’un objet) ; 8. Faire respecter les règles de conduite ; 9. Orienter et prendre des décisions d’ordre
matériel (interventions organisationnelles); 10. Communiquer sur le cadrage secondaire du jeu
(touchant au caractère fictif de la narration, ou au caractère factice des éléments du jeu) ; 11.
Exprimer une appréciation ou ses sentiments. Ces interventions de coéducation peuvent être
initiées par les parents envers les enfants, mais peuvent aussi être observées à l’intérieur des
dyades d’enfants.
Les réactions des enfants sont classés en douze catégories : 1. Commenter son comportement,
émettre des décisions ou suggestions liées à l’organisation et à l’orientation dans le musée
(interventions verbales ou non verbales comportementales et organisationnelles); 2. Lire à voixhaute
ou reformuler les textes ; 3. Montrer ou attirer l’attention ; 3. Comparer les indices du jeu et
les objets des collections; 4. Décrire, constater ; 5. Établir des relations (en lien avec l’expérience
personnelle ou entre plusieurs objets des collections et portant sur des caractéristiques visibles des
objets); 6. Expliciter le sens ou la fonction des objets (commentaires en lien avec l’expérience
personnelle ou des connaissances préalables et portant sur la fonction ou le sens des objets) ; 7.
Communiquer sur le cadre secondaire du jeu ; 8. Exprimer son accord ; 9. Exprimer son doute ou
son désaccord ; 10. Manifester un plaisir lié au jeu ; 11. Commentaires témoignant des difficultés
rencontrées (demander de l’aide ou exprimer des difficultés) ; 12. Commentaires témoignant de
l’ennui, de la lassitude ou de la dissipation de l’enfant ; 13. Exprimer une appréciation ou ses
sentiments.
Dans l’analyse sont pris en compte le type de commentaires, le nombre de commentaires et
l’étape du jeu pendant laquelle ils ont été émis. Les deux parcours-jeu peuvent être découpés en
différentes étapes qui correspondent aux dix soldats à rechercher pour le jeu du musée de Woerth
et aux deux grandes parties du livret-jeu du musée de Pfaffenhoffen.
Ces étapes mettent en relation le groupe familial avec des éléments du jeu et des unités
d’exposition. Pour le jeu À qui est cet uniforme du musée de Woerth, nous pouvons distinguer les
plateaux de jeu, les mannequins portant les uniformes, les autres vitrines du musée. Pour le jeu La
mystérieuse vie de l‟Oncle Hans du musée de Pfaffenhoffen, nous pouvons faire la distinction
entre les cartes indices de la malle de l’Oncle Hans, le livret-jeu, les fac-similés, les étiquettes
« enfants », les œuvres sur les cimaises, les œuvres dans les vitrines, les cartels. Nous avons pris
également en compte la durée de chacune des étapes du jeu et le nombre de consultations des
éléments du jeu et des unités d’exposition.
79

2. Des questionnaires adaptés aux enfants
a. Conception des questionnaires
La consultation d’enquêtes évaluant les effets pédagogiques d’activités à caractère ludique
dans les musées a tout d’abord guidé mon travail de conception des questionnaires. Je me suis
inspirée de la méthode utilisée par Sylvie Romano au Préau des Accoules à Marseille pour évaluer
l’impact pédagogique de l’exposition Camoin sur les enfants de 4 à 6 ans (Romano, 1998 : 3-10)
ainsi que celle développée par Hana Gottesdiener et Jean Vilatte pour évaluer l’impact d’un livretjeu
sur des enfants de 6 à 14 ans en visite familiale dans une exposition sur l’Impressionnisme au
musée des Beaux-arts de Quimper (Gottesdiener, Vilatte, 2001 : 167-176). Dans le but d’évaluer
les apprentissages perceptivo-cognitifs, ces deux études recouraient à des photographies comme
supports des entretiens avec les enfants. Les photographies présentaient des reproductions de toiles
de l’exposition, et des distracteurs du même auteur (Camoin) ou du même courant de peintures
(l’Impressionnisme) et des intrus d’un style très différent. Il était demandé aux enfants de
reconnaître les peintures qu’ils avaient vues durant la visite. Sylvie Romano abordait deux grands
thèmes au cours de son questionnaire : « la socialisation de l‟enfant grâce au musée, par la
reconnaissance du lieu et des comportements à adopter » ; « la délectation de l‟enfant grâce au
musée, par la reconnaissance et l‟identification de certains détails, ainsi que par les émotions
ressenties durant la visite » (Romano, 1998 : 7). Durant les entretiens post-visite, Hana
Gottesdiener et Jean Vilatte interrogeaient d’abord les connaissances des enfants à propos de
l’Impressionnisme, des noms des artistes et des caractéristiques des différents styles des œuvres de
l’exposition. Puis, les enfants devaient classer 28 reproductions d’œuvres en trois catégories : les
œuvres qu’ils étaient sûrs d’avoir vues, celles qu’ils étaient sûrs de n’avoir pas vues et celles à
propos desquelles ils avaient un doute.
Le jeu du musée de Woerth et celui du musée de Pfaffenhoffen ont tous les deux pour
objectif de développer l’esprit d’observation des enfants. J’ai donc décidé de construire à mon tour
deux questionnaires en recourant à des épreuves de reconnaissance à partir de reproductions des
éléments des jeux et de photographies des œuvres ou objets exposés dans le musée.
Sur les conseils de mon directeur de mémoire, j’ai veillé à ce que la formulation des questions
utilise un vocabulaire simple proche du langage parlé des enfants. Pour la conception de la
question à choix multiples sur la fonction d’un musée, je me suis rendue dans la classe de CM1 de
l’école de La Petite Pierre. J’ai ainsi posé la question aux élèves : « À quoi ça sert un musée ? » et
80

ecueilli les interventions des différents élèves. J’ai ensuite utilisé les termes employés par les
enfants pour construire les modalités de réponse.
Enfin, un test du questionnaire du musée de Pfaffenhoffen auprès d’un enfant de 9 ans m’a
permis de vérifier si les questions ne posaient pas de difficultés de compréhension. Après quelques
modifications au niveau des énoncés et du choix des photographies, j’ai pu mettre en œuvre les
questionnaires.
b. Contenu des questionnaires
J’ai ainsi conçu un questionnaire illustré par 46 photographies de lieux, de matériaux,
d’œuvres ou d’éléments du jeu et comportant 11 séries de questions pour le musée de
Pfaffenhoffen. Le questionnaire du musée de Woerth est illustré de 45 supports visuels
(photographies, échantillons de matière ou carrés de couleurs) et comportant 15 groupes de
questions.
Le questionnaire conçu pour le musée de l’image populaire à Pfaffenhoffen aborde les sujets
suivants :
- l’appropriation du musée par les enfants en tant qu’espace :
1. comportements à adopter au sein du musée
2. reconnaissance du lieu
3. fonctions du musée
- la compréhension des enfants face à la thématique des images populaires :
1. situer les images dans une période historique
2. faire le lien entre les images et les différentes étapes de la vie (le sens des images
rencontrées au cours du jeu en lien avec les événements principaux qui rythment une
vie)
- le degré d’observation développé par les enfants à travers ce jeu :
1. reconnaissance des matériaux utilisés pour les images
2. Identification des caractéristiques d’une image populaire
3. Identification des images du jeu
- la perception de la trame narrative en tant que fiction (second degré du jeu)
Le questionnaire élaboré pour le musée de la bataille de 1870 à Woerth contient les sujets
suivants :
- la manière dont les enfants perçoivent le musée (attitudes et valeurs, image du musée)
81

1. comportements à adopter au sein du musée
2. reconnaissance du lieu
3. fonctions du musée
- les apprentissages en termes de connaissances sur la thématique développée par le musée :
1. les forces en présence sur le champ de bataille (soldats français et soldats
allemands)
2. la période concernée : la guerre de 1870
3. les noms des soldats
- les compétences perceptivo-cognitives (mémorisation visuelle)
1. reconnaissance des matières utilisées pour les uniformes
2. reconnaissance des couleurs apparaissant sur les uniformes
3. reconnaissance des uniformes
4. reconnaissance des accessoires des soldats (casques, coiffes, armes)
5. Identification des soldats de la guerre de 1870 sur d’autres supports (tableaux,
gravures)
c. Compilation et traitement des données collectées par questionnaire
Le logiciel de traitement d’enquête SPHINX a été utilisé comme outil de compilation des
réponses aux questionnaires. Le questionnaire avec ses diverses modalités de réponses a donc été
saisi dans le logiciel afin de pouvoir rapidement compiler les données collectées. Les données ont
ensuite été exportées sous EXCEL afin d’établir un système de notation pour les questions de
connaissance et de reconnaissance d’images afin de pouvoir déceler des tendances. Du fait de
l’échantillon restreint, aucun croisement significatif n’a pu être effectué entre les données et ceuxci
ne sont donc pas présentés dans les résultats de l’enquête.
82

B. Le déroulement du travail de terrain
1. Constitution des échantillons de l’étude
Pour les fins de notre recherche, il est considéré comme famille, un groupe de personnes
composé d’au moins un adulte (grand-parent, parent, oncle ou tante) et d’un enfant. L’âge des
enfants a été défini en fonction des tranches d’âge auxquelles ces deux jeux sont habituellement
proposés au sein du musée : 6-10 ans pour le musée de la Bataille du 6 août 1870 à Woerth et 7-10
ans pour le Musée de l’image populaire à Pfaffenhoffen.
En ce qui concerne la constitution des échantillons, j’ai dû prendre en compte la réalité du
terrain d’enquête et m’y adapter. Il faut se rappeler que les deux musées concernés par l’étude sont
d’une part un musée d’histoire locale et d’autre part un musée d’arts et traditions populaires situés
tous deux dans un territoire rural. Selon les chiffres communiqués à l’Observatoire régional du
tourisme et de la région, la fréquentation pour l’année 2009 était de 2424 visiteurs pour le musée
de Pfaffenhoffen et de 3332 visiteurs pour le musée de Woerth. Une étude statistique a été menée
en 2004-2005 par le Parc naturel régional des Vosges du Nord sur la fréquentation des musées de
la « Chaîne de la Découverte ». La majorité des visiteurs des musées de la « Chaîne de la
Découverte » sont des adultes individuels ou en groupes qui représentent environ 75 % de la
fréquentation. Les groupes scolaires (jusqu’à 16 ans) viennent eux en seconde position. En dehors
des journées d’animation Amuse-Musées, les enfants individuels en visite familiale représentent
une faible part de la fréquentation de ces musées. Les animations Amuse-Musées se succèdent tout
au long de l’année à raison d’une après-midi par musée. Les contes, spectacles ou ateliers ainsi
que le goûter constituent l’essentiel de ces journées événementielles, même si les jeux sont mis à
disposition des familles pour l’occasion. Ces journées d’animation ne m’ont donc pas paru un
moment favorable pour une étude ciblée sur le jeu du musée de la Bataille du 6 août 1870 et celui
du Musée de l’image populaire. Les dates des journées d’animation pour ces deux musées (le 11
avril 2010 à Woerth et le 10 octobre 2010 à Pfaffenhoffen) ne convenaient de toute manière pas
pour l’enquête, arrivant soit trop tôt, soit trop tard dans la saison.
Étant donné qu’il était difficile de réussir à constituer des échantillons de visiteurs spontanés
pour l’étude de chacun des jeux, il a fallu prendre contact au préalable avec des familles pour
constituer deux groupes de familles volontaires pour participer à l’évaluation. Le recrutement de
ces familles s’est fait essentiellement par trois biais. Les journées d’animation Amuse-Musées ont
été l’occasion de prendre contact avec quelques familles intéressées pour participer ultérieurement
à l’un des deux jeux. J’ai diffusé une annonce auprès de l’équipe du Parc, ainsi qu’auprès des
83

écoles de Woerth, de Pfaffenhoffen et de La Petite Pierre. D’autre part, une des chargées d’accueil
du musée de Woerth, également en poste à la bibliothèque de la ville, s’est proposée pour
présenter l’étude auprès des enfants, fréquentant la bibliothèque et à leurs parents. Ce mode de
recrutement peut paraître un peu hétéroclite, mais résulte d’une adaptation nécessaire au problème
de la faible affluence des familles dans ces deux musées.
Les deux échantillons sont donc composés de groupes familiaux volontaires pour être
enregistrés lors du jeu et pour participer dans le cas des enfants au questionnaire une fois le jeu
terminé. Les familles étaient libres de choisir l’un ou l’autre des deux musées. Une date était
convenue à l’avance concernant le jour de leur venue au musée. Le travail de terrain s’est déroulé
sur 11 après-midi du 5 juin au 11 juillet (uniquement le mercredi, samedi et dimanche).
Les observations concernent un échantillon de 5 groupes familiaux pour le musée de
Pfaffenhoffen et de 7 groupes familiaux pour le musée de Woerth. Les données collectées pour les
questionnaires portent sur un échantillon de 10 enfants entre 7 et 10 ans pour le musée de
Pfaffenhoffen et de 11 enfants entre 6 et 10 ans pour le musée de Woerth. Du fait de l’aspect très
réduit des échantillons ainsi que de leur constitution sur la base du volontariat, il sera impossible
de considérer les résultats de cette recherche comme représentatifs d’une réalité généralisable. Ces
deux études de cas sont donc plutôt à envisager comme des enquêtes exploratoires et leurs
résultats devront être considérés avec prudence.
2. Le déroulement des enregistrements
Le protocole de l’évaluation avait été expliqué à l’avance à l’occasion de la prise de rendezvous
avec les familles. Lors de l’arrivée au musée, l’agent d’accueil présent ce jour-là procédait à
une présentation orale des consignes du jeu. L’agent d’accueil se chargeait également de la
correction du jeu selon les modalités prévues pour chacun des jeux. La correction se fait à mesure
que les enfants ramènent un support de jeu à l’accueil pour le musée de Woerth et en fin de
parcours pour le musée de Pfaffenhoffen. S’ils le jugeaient bon, les chargés d’accueil pouvaient
apporter une aide ponctuelle au cours des jeux.
Durant la pratique du jeu, je me suis efforcée de rester toujours un peu en retrait pour ne pas gêner
les déplacements des enfants ou les interactions entre les membres de la famille. Du fait de la
pratique du jeu en groupes familiaux et de la participation active impliquée par le jeu, la caméra ne
m’a pas paru intimider les enfants ou les parents. Certains m’ont parfois pris à témoin de leurs
difficultés ou m’ont fait part de leurs impressions, mais les contacts n’ont jamais été établis à mon
initiative. Dans le cas où les membres des groupes familiaux se séparaient, j’ai toujours observé le
84

même enfant tout au long de son parcours. De ce fait, les enregistrements vidéo concernent un
plus petit nombre d’enfants participants que les questionnaires.
3. Le déroulement des questionnaires
À la fin du jeu, je demandais aux enfants de me suivre soit à l’entresol du musée de
Pfaffenhoffen, soit à l’accueil ou dans les réserves pour le musée de Woerth.
Avant de commencer le questionnaire, je rappelais aux enfants que ce n’était pas une interrogation
orale et qu’ils pouvaient se tromper. Selon les enfants, les questionnaires ont duré entre 20 et 35
minutes.
85

IV.
Présentation et analyse des résultats des observations et
des interventions spontanées
A. Les groupes familiaux observés et les éléments marquants de la
pratique des jeux
1. Profils des groupes familiaux
a. Les enfants observés et leur mode d’accompagnement lors du jeu À qui est
cet uniforme ? au musée de la Bataille du 6 août 1870 à Woerth
Tableau 4 : Profils des groupes familiaux observés au musée de la Bataille de 1870 à Woerth
Groupe
familial
Nbr.
de
membres
Origine
n°1 3 Ingwiller
(67)
n°2 4 Bas-Rhin
(67)
n°3 4 La Petite
Pierre (67)
n°4 2 Woerth
(67)
Enfants
< 6 ans
Enfants
entre 6
et 10
ans
Jeunes
> 10
ans
Adultes
accompagnants
Ȃge de
l'enfant
observé
Sexe de
l'enfant
observé
Intervenants
dans
la
coéducation
Durée du
jeu
0 1 0 parents 9 garçon parents 00:32:57
0 2 0 parents 6 garçon mère 00:35:00
1 2 0 mère 8 fille mère 00:30:06
0 1 0 mère 9 fille mère 00:31:37
n°5 5 Brumath
(67)
0 4 0 mère
d'une
camarade
de classe
9 garçon amie de
9 ans
00:14:06
n°6 3 Bretagne 0 1 1 oncle 10 fille frère de 00:17:15
12 ans
n°7 3 Haguenau
(67)
0 1 0 parents 9 garçon parents 00:36:52
Sept groupes familiaux ont accepté de participer à l’évaluation du jeu À qui est cet uniforme.
Ces groupes sont originaires du département du Bas-Rhin, à l’exception d’une famille bretonne de
passage dans les Vosges du Nord.
Les groupes familiaux comprenaient entre deux à cinq membres et étaient composés de deux
mères venues seules avec leur ou leurs enfants, de deux couples et leurs enfants, d’un oncle venu
avec sa nièce et son neveu, mais aussi d’une mère accompagnant sa fille et trois de ses camarades
de classe. Les observations concernent le comportement d’un seul enfant (entre 6 et 10 ans) de
86

chacun de ces groupes familiaux et l’ensemble des interventions de coéducation qui lui sont
adressées.
Dans cinq familles sur sept, la mère ou les deux parents sont intervenus dans la coéducation.
Pour les deux autres familles, l’adulte accompagnant n’a pas suivi les enfants au cours du jeu.
Cependant, l’apprentissage mutuel a pu être observé dans un cas entre frère et sœur (famille n°6)
et dans l’autre entre deux amis (famille n°5).
Les parcours-jeux observés ont duré entre 14 et 37 minutes (sans compter la présentation du
jeu et la correction à l’accueil), soit environ vingt-huit minutes en moyenne.
b. Les enfants observés et leur mode d’accompagnement lors du jeu La vie
mystérieuse de l’Oncle Hans au Musée de l’image populaire à
Pfaffenhoffen
Tableau 5 : Profils des groupes familiaux observés au musée de l’image populaire à Pfaffenhoffen
Groupe
fami
-lial
Nbr. de
membres
Origine
En
-fants
< 7 ans
En
-fants
entre 7
et 10
ans
Jeunes
>10 ans
Adultes
accompagants
Ȃge
de l’
enfant
obser
-vé
Sexe de
l'
enfant
obser
-vé
Interve
-nants
dans la
coéducation
Durée du
jeu
n°1 3 Saverne
(67)
n°2 4 Mertzwiller
(67)
n°3 3 Bischoltz (67) 0 2 0 grandmère
n°4 4 Haguenau
(67)
n°5 3 Niederbronnles-Bains
(67)
1 1 0 mère 9 Fille mère 00:26:18
0 1 2 mère 10 Fille sa mère et
sa sœur
ainée de
16 ans
7 Fille sa sœur de
8 ans et
l’agent
d’accueil
00:24:24
00:37:30
1 1 0 parents 10 Fille parents 00:34:16
0 2 0 mère 8 Fille sa mère et
sa cousine
de 7 ans
00:48:44
n°6 2 Sarre-
Union
(67)
n°7 5 Rohrbach-
Lès-Bitche
(57)
0 1 0 père NC NC NC 00:30:00
1 2 0 parents NC NC NC 00:34:00
Sept familles ont accepté de participer à l’évaluation du jeu La vie mystérieuse de l‟Oncle
Hans. Ces sept familles sont toutes originaires du département du Bas-Rhin, à l’exception d’une
famille provenant de la Moselle. Sur ces sept groupes familiaux, deux n’ont pas été pris en compte
87

pour l’analyse des interventions familiales. En effet, la venue d’un groupe d’adultes très bruyants
en même temps que celle du groupe familial n°6 et la dissipation du plus jeune des enfants (moins
de 3 ans) de la famille n°7 ont rendu inaudibles les enregistrements. Cependant, les réponses des
enfants de ces deux groupes familiaux ont été exploitées lors de l’analyse des questionnaires.
Sur les sept familles, 10 enfants de 7 à 10 ans ont participé au jeu, dont 9 filles et 1 garçon.
Cette surreprésentation des filles pour l’étude du jeu du Musée de l’image populaire s’explique par
le fait que les familles étaient libres de choisir entre le musée de l’image populaire de
Pfaffenhoffen ou le musée de la Bataille du 6 août 1870 de Woerth. Les familles comportant des
garçons ont préféré dans leur grande majorité se rendre dans un musée portant sur l’histoire et la
guerre plutôt que dans un musée d’art et tradition populaire.
En ce qui concerne les cinq familles prises en compte pour l’étude des interactions familiales,
7 filles de 7 à 10 ans ont participé au jeu. Dans trois familles sur cinq, un seul enfant de 7 à 10 ans
a participé au jeu. Dans les deux autres familles (n°3 et n°5), deux filles ont participé ensemble au
jeu. Dans le cas de deux participants au jeu, je n’ai suivi qu’un seul des deux enfants tout au long
de son parcours.
Les groupes familiaux comprenaient trois ou quatre membres et la composition des familles
était assez variée : une mère avec une fille (9 ans) et un très jeune enfant (3 ans), une mère avec
deux adolescents (16 et 17 ans) et une fille (10 ans), une grand-mère avec deux filles (7 et 8 ans),
deux parents avec une fille (10 ans) et un très jeune enfant (4 ans), une mère avec sa fille (8 ans) et
sa nièce (7 ans).
Dans quatre familles sur cinq, un adulte ou un adolescent sont intervenus au cours du jeu pour
aider les enfants. Pour la famille n°3, l’adulte accompagnant (grand-mère) a laissé jouer seules les
deux filles pendant qu’elle visitait le musée. Il n’y a donc pas eu d’interventions de coéducation de
sa part. Par contre, l’apprentissage mutuel a pu être observé entre les deux sœurs. L’agent
d’accueil est intervenu à deux reprises au cours du jeu pour les aider suite à leurs sollicitations.
La durée moyenne de la pratique du jeu pour les cinq familles était d’environ 35 min (valeur
minimale : 24 min et valeur maximale : 48 min).
88

2. Les consultations des éléments du jeu et des unités d’exposition
a. Des parcours « uniformes » pour le jeu À qui est cet uniforme ? du musée
de la Bataille du 6 août 1870 à Woerth
Figure 20
J’ai distingué deux types d’unités d’exposition pour le musée de Woerth : les mannequins
portant les uniformes (au nombre de quinze au total) et les autres objets exposés dans le musée.
Les sept enfants observés se sont arrêtés en moyenne 31 fois devant les mannequins et moins de
quatre fois devant les autres objets exposés dans le musée. Le jeu À qui est cet uniforme consiste à
retrouver à partir d’indices rassemblés sur des plateaux les mannequins portant les uniformes
militaires correspondants. Les enfants doivent rechercher par similitude l’uniforme du soldat qui
correspond aux éléments en relief fixés sur chacun des supports en bois. Le type d’expôts à
observer dans le musée est indiqué par les agents d’accueil lors de la présentation du jeu et les
mannequins à taille humaine sont facilement repérables par les enfants. Il semble donc que le jeu
favorise des parcours principalement centrés sur l’observation des mannequins. Un des effets
attendus du jeu lors de sa conception était de favoriser l’observation attentive des détails et
accessoires des uniformes du musée, mais aussi dans un second temps l’observation des objets
dans les vitrines environnantes. Si le premier objectif semble atteint, en revanche l’observation des
objets dans les vitrines qui ne comportent pas de mannequins paraît beaucoup moins assurée. Les
89

supports de jeux focalisent l’attention des enfants sur les uniformes des soldats et les enfants
paraissent négliger les objets exposés à proximité.
Les enfants emportent avec eux le plateau de jeu lors de leur recherche dans le musée. Le
plateau peut-être soit tenu par l’enfant lui-même, soit par un co-joueur, ou par la personne
accompagnante. Du fait de la taille relativement importante des plateaux et des indices fixés sur
ces derniers, les enfants ont toujours plus ou moins les détails à observer sous les yeux. Il est donc
difficile de recenser le nombre de fois où les enfants regardent les supports au cours du jeu. En
revanche, j’ai compté le nombre de fois où les enfants s’arrêtaient pour regarder les indices plus
attentivement, ou désigner des éléments du plateau aux autres membres du groupe. Le nombre de
consultations des plateaux de jeux correspond donc au nombre de fois où les enfants ont manifesté
une attention soutenue aux détails des indices des supports de jeu. Les enfants ont porté plus de 27
fois en moyenne une attention soutenue aux éléments des supports de jeu. Les enfants semblent
donc recourir régulièrement aux plateaux de jeu pour retrouver par comparaison les détails des
costumes.
Tableau 6 : Durée de la recherche et arrêts devant les éléments d'exposition (en moyenne par support de jeu)
Plateaux de jeu
Durée de la
recherche
Nbr. arrêts mannequins
Nbr. arrêts autres
objets
garde-mobile 00:01:56 2,0 0,0
bavarois 00:02:02 2,2 0,5
prussien 00:02:52 2,6 0,6
chasseur à cheval 00:03:03 2,7 1,0
artilleur 00:02:15 2,8 0,0
cuirassier 00:02:54 3,3 0,3
zouave 00:03:57 3,4 0,3
hussard 00:02:07 3,6 0,1
turco 00:05:22 5,4 0,3
lancier 00:04:05 5,4 1,0
Total 00:28:16 31,1 3,7
Si nous regardons le temps consacré aux différents supports de jeu, nous constatons que les
enfants ont passé plus de temps en moyenne à rechercher l’uniforme correspondant au plateau du
lancier (Maréchal des logis) et à celui du turco (tirailleur algérien). Ces deux plateaux ont
également nécessité un nombre d’arrêts plus important devant les mannequins revêtus des
uniformes pour réussir à identifier les deux soldats correspondants. La correspondance entre les
indices de ces deux plateaux et les uniformes du lancier et du turco parait moins facile à effectuer
90

pour les enfants. Les deux supports de jeu demandent en effet une capacité d’abstraction plus
importante, du fait de la différence d’échelle entre les différents indices et de certains détails
ressemblants mais non identiques (cf. Tableau 3, p. 68-71). Ainsi, la plaque du casque du lancier
comporte le numéro 2 de régiment sur le support de jeu, alors que le chapska porté par le
mannequin dans le musée comporte le numéro 6. La veste, le plastron et le porte-ceinture de
l’uniforme du lancier sont figurés de façon schématique par un élément tricoté. Le plateau du
turco demande également une observation soutenue, car certains détails ne sont pas
immédiatement visibles ou ne sont pas exactement identiques. Ainsi les guêtres en cuir se lacent à
l’arrière de la jambe et les lacets visibles sur le plateau ne peuvent donc pas être directement
observés sur le mannequin. Les manches de la veste ne comportent seulement qu’un chevron doré
et non deux comme ceux figurés sur le détail du plateau de jeu. Enfin, la jambière à lacets et la
fausse poche de la veste (tombô) sont représentés à une échelle beaucoup plus réduite que les
galons ornant les manches.
Figure 21
Les dix supports de jeu sont choisis au hasard par les enfants à l’accueil ou distribués de
façon aléatoire par la chargée d’accueil. L’ordre de consultation des plateaux semblent influencer
le nombre d’arrêts devant les mannequins. Lors des recherches relatives aux trois premiers
supports de jeu choisis, les enfants s’arrêtent de façon plus fréquente devant les mannequins. Lors
du parcours dans le musée avec le premier support de jeu, les enfants se sont arrêtés deux à trois
fois plus souvent qu’à partir du quatrième support de jeu choisi.
91

Les plateaux de jeu semblent donc favoriser une observation attentive des mannequins et un
repérage de ces derniers dans le musée, puisqu’à partir du quatrième plateau les enfants trouvent*
en moyenne l’uniforme correspondant au plateau de jeu au bout de deux ou trois arrêts devant les
mannequins. (*Le nombre de réponses fausses données à l’accueil lors du retour de chacun des
plateaux est en effet minime. Sur l’ensemble des 65 parcours effectués par les sept enfants
observés, les enfants n’ont donné que trois fois une mauvaise réponse à la chargée d’accueil). Les
écarts observés au niveau du temps consacré à la recherche selon l’ordre de consultation du
plateau de jeu ne sont en revanche pas vraiment significatifs. Les recherches des enfants ont duré
en moyenne entre 30 secondes à 1 minute 15 en moins par rapport aux deux premiers plateaux.
b. Des parcours partagés entre lectures et observations pour le jeu La vie
mystérieuse de l’Oncle Hans au Musée de l’image populaire à
Pfaffenhoffen
Figure 22
Lors du jeu La vie mystérieuse de l‟Oncle Hans, les enfants étaient en présence à la fois du
matériel du jeu et des unités d’exposition du musée. Les éléments mis à disposition des enfants
pour les fins du jeu comprennent : les cartes indices rangées dans la malle de l’Oncle Hans, le
livret-jeu comportant à la fois des indices visuels et des phrases à trous à compléter, les neuf
images souvenirs en fac-similé et les étiquettes « enfants » de couleur jaune. Les unités
d’exposition incluent les cimaises, vitrines et cartels. Au cours du jeu de piste, les cinq enfants ont
en moyenne consulté à 13 reprises les unités d’exposition et ont eu recours plus de 36 fois aux
92

différents éléments du jeu. Nous désignons sous le terme de consultation un arrêt pour lire ou
observer.
Figure 23
Les enfants ont consulté majoritairement les images souvenirs en fac-similé durant leur parcoursjeu
(près de 18 fois en moyenne). Viennent ensuite les œuvres sur les cimaises ou dans les vitrines,
puis le livret-jeu. Le jeu de piste semble donc focaliser l’attention des enfants sur les images
souvenirs à rechercher. Cependant, les enfants ne s’arrêtent pas uniquement devant les images
figurant sur le livret-jeu ou les cartes indices, mais aussi devant les œuvres des collections. Il faut
toutefois remarquer que ces arrêts devant les images des collections ne traduisent pas forcément
un intérêt particulier pour ces dernières, mais seraient plutôt le résultat des recherches des imagessouvenirs
du jeu à travers le musée. De plus, une partie des consultations des œuvres des
collections concernent les œuvres originales des fac-similés. Sur les neuf fac-similés du jeu, trois
sont accrochés à proximité des œuvres originales. Ainsi que nous le verrons ultérieurement, les
enfants et les parents ne saisissent d’ailleurs pas toujours clairement si c’est l’œuvre originale ou
le fac-similé qui doit faire l’objet de leur attention pour le jeu.
93

Figure 24
Les enfants doivent tout d’abord retrouver par similitude les images correspondant aux
détails figurés sur les cartes indices ou le livret-jeu. Une fois l’image souvenir identifiée, les
enfants doivent compléter les phrases à trous du livret-jeu en lisant les textes inscrits sur les
images populaires en fac-similé ou les étiquettes enfants. Les éléments du jeu et les unités
d’exposition peuvent donc soit être observés, soit être lus, soit les deux dans le cas du livret-jeu,
des images reproduites en fac-similé ou des images peintes du musée. Si nous regroupons d’une
part les comportements d’observations envers les différents éléments du jeu et les unités
d’exposition et d’autre part les lectures effectuées, nous pouvons constater que ces deux
comportements (observations et lectures) apparaissent presque aussi fréquemment l’un et l’autre
au cours du jeu.
94

Figure 24
Les cinq enfants ont ainsi observé 25 fois en moyenne un élément du jeu (carte indice, indice
visuel du livret-jeu ou image souvenir en fac-similé) ou une unité d’exposition (cimaise ou
vitrine). Les enfants ont lu environ 22 fois un texte qui pouvait être inscrit sur le livret-jeu, les
images populaires peintes ou en fac-similé, les cartels ou les étiquettes « enfants ». Le jeu de piste
semble donc favoriser chez les enfants un mode de visite qui se distingue par la quantité
importante de lectures qui avoisinent celle des observations. Les cinq enfants ont tous rempli le
livret-jeu au fur et à mesure de la visite et ils se sont arrêtés 13 fois en moyenne pour écrire dans le
livret-jeu.
Figure 25
95

Pour écrire les réponses dans le livret-jeu, les enfants se sont servis de l’ensemble de l’espace du
musée à leur disposition. Ils se sont appuyés aussi bien sur le sol, sur les murs, sur les cimaises à
côté des œuvres, que sur les vitrines. L’écriture dans le livret-jeu paraît donc relativement
malaisée pour les enfants qui ressentent le besoin de s’appuyer sur un support stable.
Tableau 7 : Durée moyenne du jeu par enfant selon la partie du livret-jeu et l’étage du musée concerné
Partie du livret-jeu
Durée moyenne
« Les grandes étapes de la vie de l'Oncle Hans »
00:19:11
(rez-de-chaussée)
« Extrait du journal intime de l'Oncle Hans » (1er
00:15:03
étage)
livret-jeu dans sa totalité 00:34:14
Les enfants ont passé plus de temps en moyenne sur la première partie du livret-jeu que sur
la deuxième partie. La première partie intitulée Les grandes étapes de la vie de l‟Oncle Hans
inclut quatre images à rechercher et des informations s’y rapportant à compléter dans le livret-jeu,
ainsi qu’un dessin libre à effectuer. La deuxième partie nommée Extraits du journal intime de
l‟Oncle Hans comporte cinq images à rechercher et des images et des informations à ajouter pour
compléter le texte du livre-jeu.
96

Figure 25
De plus, nous remarquons que les consultations (lectures et observations) des unités d’exposition
sont trois fois plus fréquentes au rez-de-chaussée lors de la première partie du livret-jeu qu’au 1 er
étage. Les enfants ont consulté dix fois en moyenne les unités d’exposition au rez-de-chaussée
pour seulement 3,4 fois en moyenne au 1 er étage. De plus, on observe également un léger écart
entre les consultations des éléments du jeu au rez-de-chaussée et au 1 er étage. Du fait de
l’échantillon réduit sur lequel porte les observations suivies, nous nous garderons de faire des
conclusions hâtives. Nous pouvons toutefois proposer quelques hypothèses pour expliquer ces
différences de durée et d’attention entre la première et la deuxième partie du livret-jeu. Nous
pourrions y voir soit les effets d’une possible fatigue muséale, ou de lassitude envers le jeu, soit un
niveau de difficultés plus élevé pour les lacunes à compléter de la première partie du livret-jeu qui
nécessiteraient d’y consacrer plus de temps et d’attention, soit au contraire le résultat d’une
assimilation des principes du jeu et donc d’une meilleure efficacité dans les recherches.
97

B. Les interventions spontanées
1. Des échanges principalement centrés autour de la monstration lors
du jeu À qui est cet uniforme au musée de la Bataille du 6 août 1870
à Woerth
a. Fréquence des échanges
Figure 26
À la suite des retranscriptions des commentaires des sept groupes familiaux, j’ai codé 803
interventions énoncées soit par les enfants observés, soit par les membres des groupes familiaux et
à destination des enfants observés. Les conversations familiales destinées à un autre membre du
groupe n’ont pas été codées. Parmi ces 803 échanges, j’ai recensé 417 interventions de la part des
enfants observés, et 387 interventions émises par les membres des groupes familiaux à destination
de ces derniers. La participation aux échanges est donc à peu près égale entre les enfants observés
et les personnes accompagnantes au cours du jeu.
98

Tableau 8 : Durée de la recherche et interventions familiales en moyenne par support de jeu
Plateaux de jeu
Durée de
la
recherche
Nbr. arrêts
mannequins
Échanges (en
moyenne
par support
de jeu)
Interventions
de coéducation
(en moyenne
par support de
jeu)
Interventions
de l'enfant
(en moyenne
par support
de jeu)
garde-mobile 00:01:56 2,0 12,0 4,7 7,3
bavarois 00:02:02 2,2 11,6 4,8 6,8
hussard 00:02:07 3,6 10,3 4,1 6,1
artilleur 00:02:15 2,8 8,5 3,8 4,7
prussien 00:02:52 2,6 9,3 3,7 5,6
cuirassier 00:02:54 3,3 9,7 4,5 5,2
chasseur à cheval 00:03:03 2,7 16,3 7,8 8,5
zouave 00:03:57 3,4 13,0 6,4 6,6
lancier 00:04:05 5,4 13,9 8,9 5,0
turco 00:05:22 5,4 20,1 10,9 9,3
Total 00:28:16 31,1 114,7 55,3 59,4
Le nombre moyen d’échanges varie de 8 à 20 selon les supports de jeu. Les deux plateaux
du lancier et du turco pour lesquels les enfants ont mis le plus de temps et se sont arrêtés le plus
souvent ont suscité un nombre important d’échanges. Cependant, le temps croissant passé par
plateau de jeu et le nombre croissant d’arrêts devant les mannequins ne sont pas forcément en
corrélation avec une moyenne plus élévée d’interventions. Ainsi, le plateau du chasseur à cheval
qui correspond à un temps moyen de recherche et à un nombre moyen d’arrêts inférieur à la
moyenne est le 2 ème plateau à avoir suscité le plus de commentaires après celui du turco. Nous
pouvons peut-être supposer que le sujet du plateau du chasseur à cheval fait l’objet de
conversations privilégiées par les familles parce qu’il fait référence en partie à des choses connues
par les enfants avec la selle de cheval.
Tableau 9 : Nombre d’échanges moyens en fonction de l’ordre de consultation des supports de jeu
N° consultation du
plateau de jeu
Durée de la
recherche
Échanges
verbaux (en
moyenne)
Interventions
de coéducation
(en moyenne)
Interventions
de l'enfant (en
moyenne)
n°1 00:03:49 13,3 7,6 5,7
n°2 00:03:45 16,6 9,6 7,0
n°3 00:02:35 10,9 5,1 5,7
n°4 00:03:04 12,4 5,1 7,3
n°5 00:02:54 15,4 7,6 7,9
n°6 00:02:29 10,0 4,4 5,6
n°7 00:03:19 11,1 5,3 5,9
n°8 00:03:21 16,3 7,3 9,0
99

n°9 00:02:29 10,0 4,0 6,0
n°10 00:02:51 3,7 1,0 2,7
À l’exception du dixième plateau de jeu choisi, les échanges entre les enfants observés et les
membres des groupes familiaux semblent se maintenir tout au long du jeu. Les échanges fluctuent
de manière irrégulière entre 10 et 16 en moyenne selon le numéro de consultation du plateau.
b. Types d’interactions
Nous avons catégorisé les interventions de coéducation et les interventions des enfants
respectivement en onze et treize types d’interaction. Puis, nous avons calculé le pourcentage
d’occurrences pour chaque type d’interventions de coéducation et pour chaque type
d’interventions des enfants.
- Interventions de coéducation
Tableau 10 : Catégorisation des interventions de coéducation
Catégories d’interventions de
coéducation
1. Susciter et entraîner
l’adhésion envers les exigences
de la situation (motiver l’enfant)
Exemples (E : enfant observé ; M : mère ; P : père ; F : autre enfant
accompagnant)
Famille 4
M4 : « Donc, tu as compris ce que tu dois faire ? »
E4 : « Oui. »
M4 : « Super ! Vas-y ! Travaille ! » (famille 4, mère à sa fille de 9 ans)
2. Focaliser l’attention par la
parole ou le geste (dire quoi
regarder, aider à l’observation
par des interventions verbales
ou non-verbales)
3. Décrire ou comparer les
éléments du plateau et les
mannequins
4. Aider à l’investigation
(montrer comment visiter et
comment diriger les recherches
d’informations, rappeler les
règles du jeu)
M4 : « Y‟a pas photo ! Allez vas-y. » (famille 4, mère à sa fille de 9 ans)
Famille 1
M1 : « Et celui là là-bas, tu ne l‟as pas regardé. » (mère de la famille 1
désignant le chasseur à cheval)
Famille 4
M4 : « C‟est le sabre, mais ce n‟est pas exactement la même forme non
plus. Là, c‟est bien droit et là-bas incurvé. Ce n‟est pas évident celui-là. »
(famille 3, mère à sa fille de 9 ans à propos du sabre du lancier)
Famille 1
M1 : « Chouchou, tu regarderas après tout ça. Le but c‟est d‟abord que
tu cherches les trucs qui sont forcément sur les bonhommes c‟est ça ? Ils
sont forcément sur les mannequins. » (famille 1, mère à son fils de 9 ans)
Famille 2
M2 : « Il faut que tu regardes et que tu cherches. Il faut aller voir sur les
100

côtés, il faut bien regarder partout : en haut, en bas, à gauche, à droite. »
(famille 2, mère à son fils de 6 ans)
5. Aider à la lecture (lire ou
aider à la prononciation)
6. Exprimer son approbation ou
son désaccord, mettre en doute
Famille 2
M2 : « Comment il s‟appelle ? Il s‟appelle lancier, maréchal des logis.
Tu répètes ? Comment il s‟appelle ? »
E2 : « lancier, maréhal…»
M2 : « Maréchal »
E2 : « Maréchal »
M2 : « des logis » (mère de la famille 2 et son fils de 6 ans)
Famille 4
M4 : « Il s‟appelle comment celui-là ? »
E4 : « Prusien »
M4 : « Prussien avec deux s. » (mère de la famille 4 et sa fille de 9 ans à
propos du prussien)
Famille 2
M2 : « Est-ce que c‟est vraiment une chaussure ? Ça, on ne sait pas
trop. » (mère de la famille 2 à son fils de 6 ans à propos de l‟indice
figurant la jambière sur le plateau du turco)
7. Faire prendre du recul par
une interprétation ponctuelle
(susciter la réflexion)
8. Stimuler l’élaboration d’un
sens (expliquer ou aider à
trouver le sens ou la fonction
d’un objet)
Famille 4
M4 : « Enfin, moi, je ne vois pas ça. Je ne suis pas convaincu. » (famille
4, mère et sa fille de 9 ans devant le lancier)
Famille 1
M1 : « Donc ça s‟appelle une cuirasse, hein ? Ce n‟est pas une armure
mais une cuirasse, tu peux dire, je crois. » (mère de la famille 1 à propos
du cuirassier)
Famille 1
M1 : « Alors, je pense que ça ne doit pas être une épée ou un sabre, mais
plutôt une lance parce que tu as regardé comment il s‟appelle ? »
E1 : « Un lancier. »
M1 : « Un lancier ça a certainement une lance.» (mère de la famille 1 à
propos du lancier)
9. Faire respecter les règles de
conduite
10. Orienter et prendre des
décisions d’ordre matériel
(interventions
organisationnelles)
11. Métacommunication sur le
jeu : communiquer sur le
cadrage secondaire du jeu
M1 : « En fait, ils venaient d‟Afrique, mais ils étaient français. C‟était
l‟époque des colonies. On n‟a jamais parlé de ça hein chéri ? Voilà un
truc qu‟il faudra qu‟on éclaire un jour ? » (mère de la famille 1 à propos
du zouave).
Famille 2
M2 : « Ne fais pas le pitre ! Allez fais le sérieusement ! » (mère de la
famille 2 rappelle au calme son fils de 6 ans)
Famille 2
M2 : « Maintenant, c‟est chacun qui cherche son truc. Ça va être plus
dur ça. » (mère de la famille 2 à son fils et à sa fille)
Famille 2
M2 : « Ce sont des indices. Ce n‟est pas forcément pareil. Ça ressemble,
c‟est pour t‟aider. »
101

(touchant au caractère factice
des éléments du jeu)
[…]
M2 : « Oui, mais on t‟a dit que ce sont des indices. Ce n‟est pas
exactement pareil. Tu te souviens tout à l‟heure avec le deux et le six ? »
(mère de la famille 2 à son fils de 6 ans à propos des supports de jeu)
12. Exprimer une appréciation
ou ses sentiments
E2 : « Peut-être que c‟est derrière ? »
M2 : « Ils ne sont pas bêtes quand même. Ils ont pris des choses pour
qu‟on puisse quand même les voir. Ils ne vont pas les cacher exprès
derrière. » (mère de la famille 2 à son fils de 6 ans)
Famille 7
P7 : « Le hussard…Il fallait le faire quand même. » (famille 7, père à son
fils de 10 ans à propos de l‟uniforme)
Figure 27
Sur l’ensemble des interventions de coéducation, nous voyons que les interactions du type
fixer l’attention sont de loin les plus nombreuses (40,3 % des interventions de coéducation). Si
nous ajoutons les commentaires descriptifs (3.6 %), c’est un peu moins de la moitié des
interventions de coéducation qui sont destinées à montrer et dire aux enfants ce qu’il faut regarder.
Cette part importante des interactions démonstratives traduit chez les parents le souci de la réussite
du jeu. Il faut que les enfants trouvent rapidement, soit par crainte de désaffection du jeu, soit dans
le but de les valoriser. Mais ces conversations privilégiant la monstration peuvent aussi être
considérées comme des moments d’éducation : il s’agit s’apprendre à regarder en dirigeant
102

l’attention et le regard. Le deuxième type d’occurrences le plus fréquent (12 % des interactions de
coéducation) est celui qui consiste à donner son avis sur le repérage des éléments de l’uniforme et
l’identification du soldat concerné (approuver, mettre en doute, exprimer son désaccord). Le degré
d’autonomie des enfants dans la conduite du jeu reste donc assez limité. L’observation des enfants
au cours du jeu est orientée, guidée par les interventions des autres membres du groupe familial.
Il faut remarquer aussi que les interactions visant à engager l’adhésion de l’enfant sont
relativement peu nombreuses (7,8% des interventions de coéducation). La motivation intrinséque
liée à la participation au jeu À qui est cet uniforme paraît donc forte, puisque les parents n’ont pas
vraiment besoin d’encourager les enfants à jouer par leur présence affective.
Les commentaires visant à susciter la réflexion ou à insister sur le sens de ce que les enfants
regardent paraissent assez marginaux (9,6 % pour les interventions des deux types). Bien que les
commentaires interprétatifs semblent mineurs face à la masse des commentaires visant la
monstration, ils ne doivent pourtant pas être négligés. Si nous nous intéressons à la moyenne des
commentaires interprétatifs par groupe familial, celle-ci est de 6 commentaires interprétatifs en
moyenne au cours du jeu.
- Interventions des enfants
Tableau 11 : Catégorisation des interventions des enfants
Catégories d’interventions des
enfants
Exemples (E : enfant observé ; M : mère ; P : père ; F : autre
enfant accompagnant)
1. Commenter son comportement,
émettre des décisions ou
suggestions liées à l’organisation et
à l’orientation dans le musée
(interventions verbales ou non
verbales comportementales et
organisationnelles)
Famille 4
E4 : « Tu peux me le tenir ? »
M4 : « Oui. » (famille 4, une fille de 9 ans demande à sa mère de
tenir à sa place son plateau de jeu).
Famille 6
E6 donne des indications directionnelles à son frère : « Il est dans la
deuxième salle après. Je suis sûre qu‟il est là. » (famille 6, une fille
de 10 ans et son frère)
2. Lire à voix-haute Famille 5
E5 lit à voix haute. : « C‟est sûr. C‟est l‟infanterie bavaroise. »
(groupe 5, un garçon et une amie)
3. Montrer ou attirer l’attention Famille 4
E4 désigne la poignée du sabre sur le support de jeu du lancier : « Et
ça, c‟est quoi ? » (famille 4, une fille de 9 ans à sa mère)
4. Décrire, constater Famille 3
E3 décrit le support de jeu du turco : « Il nous faut du rouge, du
noir, du bleu. » (famille 3, une fille de 8 ans)
103

5. Comparer les indices du jeu et les
uniformes des soldats, identifier les
éléments du plateau de jeu sur les
uniformes
Famille 4
E4 à propos du prussien : « Ce n‟est pas celui-là. » (famille 4, fille
de 9 ans)
Famille 6
E6 montre successivement les éléments de costume sur le plateau de
jeu puis sur le garde-mobile : « Non, mais ils ont le même chapeau !
Regarde les bandes rouges là. Le bleu ici et le bleu là. Les
chaussures et les chaussures. » (famille 6, une fille de 10 ans à son
frère)
6. Établir des relations (en lien avec
l’expérience personnelle ou entre
plusieurs objets des collections et
portant sur des caractéristiques
visibles des objets)
7. Expliciter ou le sens ou la
fonction des objets (commentaires
en lien avec l’expérience
personnelle ou des connaissances
préalables et portant sur la fonction
ou le sens des objets)
8. Communiquer sur le cadre
secondaire du jeu
(Métacommunication sur le jeu)
Famille 1
E1 : « C‟est l‟infanterie bavaroise. Il y a quand même quelque
chose. Le dessin gravé sur un casque qui ressemble à un petit truc
de jeu vidéo, à une arme de jeu vidéo. C‟est un aigle qui tenait une
boule comme ça avec une croix, mais dans World c‟est une
grenade. » (famille 1, un garçon de 9 ans à sa mère à propos de
l’insigne du casque du prussien vue précédemment)
Les sept enfants observés n’ont fait part que très rarement de
réflexions sur le sens ou la fonction des objets. Les enfants se sont
surtout contentés de faire des interprétations ponctuelles ou des
mises en relation. L’investigation sur le sens des objets a été
principalement initiée par les personnes accompagnants les enfants
observés.
Les sept enfants observés ont très peu communiqué sur le cadre
secondaire du jeu. Le rappel du cadre secondaire a surtout été le fait
des personnes accompagnantes.
9. Exprimer son accord, son doute
ou son désaccord
Famille 4
E4 à propos de l’indice de la selle sur le plateau du chasseur à
cheval : « Ça ne ressemble pas à une selle de cheval ». (famille 4,
une fille de 9 ans à sa mère)
Famille 6
F6 montre le turco : « Ah, c‟est peut-être lui »
E6 répond : « Non, c‟est un autre. Je l‟avais vu mais je ne sais plus
où. » (groupe 6, un garçon de 9 ans et une amie)
10. Commentaires témoignant des
difficultés rencontrées (demander de
l’aide ou exprimer des difficultés)
F6 montre le tissu rayé rouge sur le plateau de l’artilleur puis la
jambe gauche du pantalon de l’artilleur : « Et, il a aussi le truc rouge
là. »
E6 approuve : « Oui, lui, il a des traits rouges. » (groupe 6, un
garçon de 9 ans et une amie)
Famille 2
E2 : « Ah ouais ! On l‟a trouvé. Il s‟appelle comment ? »
M2 : « Il s‟appelle infanterie bavaroise. »
E2 essaye de répéter après sa mère.
M2 : « C‟est un peu dur, mais prends ton temps. »
E2 s’agenouille au sol pour manifester la difficulté qu’il éprouve à
répéter ce nom inconnu.
104

E2 répète infanterie puis bavaroise l’un après l’autre après sa mère.
E2 : « C‟est difficile. »
M2 : « Je n‟ai pas dit que c‟était facile. » (famille 2, un garçon de 6
ans et sa mère)
11. Manifester un plaisir lié au jeu Famille 6
E6 s’apprête à s’éloigner du chasseur à cheval, puis remarque la
selle à côté et appelle son frère : « Pierrick, j‟ai raison ! Pierrick ! »
E6 fait de grands gestes de la main en direction de la selle miniature
sur le plateau de jeu, puis de la selle véritable : « Pierrick !
Pierrick ! regarde ! C‟est la selle de cheval à côté ! »
F6 : « Ok. Bravo. »
E6 se précipite à l’accueil pour aller dire la réponse. (famille 6, une
fille de 10 ans et son frère)
Famille 4
E4 : « C‟est le dernier ? Ah ! Ça passe vite ! » (famille 4, fille de 9
ans à sa mère)
12. Évaluation, appréciation Famille 2
E2 : « Lui quand même, il est marrant. » (à propos de la cuirasse du
cuirassier)
13. Commentaires témoignant de
l’ennui, de la lassitude ou de la
dissipation de l’enfant.
Les sept enfants ont tous fait entre 8 et 10 plateaux de jeu et n’ont
jamais manifesté l’envie d’abandonner le jeu. Les sept enfants
étaient tous en majorité très concentrés sur les recherches des
éléments de costume. Seul le plus jeune joueur de 6 ans était parfois
un peu dissipé.
Famille 2
E2 agite son plateau et court en disant : « Tchou ! Tchou ! »
105

Figure 28
À la lecture de ce graphique, nous voyons que les interventions des enfants traduisent une
mobilisation de ces derniers en vue de « gagner » le jeu. Les interventions d’ordre perceptif
(comparer, décrire, attirer l’attention) constituent 61 % des interventions des enfants. Ces trois
types d’interventions majeures des enfants au cours du jeu suggèrent un souci d’efficacité qui
privilégie la saisie des uniformes et des objets par le regard et l’évaluation de leur dissemblance ou
ressemblance avec les éléments des plateaux de jeu. Leur conduite semble réglée selon une
certaine productivité visant la réussite du jeu.
Les expressions d’un plaisir ou d’une émotion liés au jeu reviennent également assez
fréquemment, puisqu’elles constituent 11,8 % des interventions des enfants. Le jeu À qui est cet
uniforme semble donc une expérience satisfaisante du point de vue du plaisir éprouvé au cours du
jeu.
106

2. Des échanges concernant en priorité la lecture et l’écriture lors du
jeu La vie mystérieuse de l’Oncle Hans au Musée de l’image
populaire à Pfaffenhoffen
a. Fréquence des échanges
Figure 29
Les enregistrements vidéos se sont focalisés sur un seul enfant de chacune des cinq familles
et l’ensemble des interactions qui lui étaient adressées. J’ai ainsi codé 796 interventions énoncées
soit par les enfants observés, soit par les membres des groupes familiaux et à destination des sujets
des observations. Ces 796 échanges comptent 420 interventions de la part des enfants observés et
376 interventions de coéducation. La participation aux échanges est donc presque égale entre les
enfants observés et les personnes accompagnantes au cours du jeu.
107

Figure 30
Les échanges sont un peu moins nombreux lors de la deuxième partie du livret-jeu au 1 er étage
du musée. Cependant, il faut mettre en relation cette légère diminution de la quantité d’échanges
avec la moindre durée en moyenne de cette partie du jeu. La fréquence des échanges reste donc à
peu près constante lors des deux parties du jeu.
b. Types d’interactions
Nous avons catégorisé les interventions de coéducation et les interventions des enfants
respectivement en onze et treize types d’interaction. Puis, nous avons calculé le pourcentage
d’occurrences pour chaque type d’interventions de coéducation et pour chaque type
d’interventions des enfants.
108

- Interventions de coéducation
Tableau 12 : Catégorisation des interventions de coéducation
Catégories d’interventions de
coéducation
Exemples (E : enfant observé ; M : mère ; P : père ; S : sœur ; C :
cousine)
1. Motiver l’enfant : susciter et
entraîner l’adhésion envers les
exigences de la situation
(encourager, féliciter, vérifier que
tout va bien)
2. Focaliser l’attention par la parole
ou le geste (dire quoi regarder, aider
à l’observation par des interventions
verbales ou non-verbales)
Famille 4
M4 à E4 : « T‟as trouvé ma chérie ? »
E4 : « C‟était là bas. »
M4 : « Ah ! Super. »
Famille 1
M1 à E1 : « Tu as vu il y a un S. Tu as compris Galatée ? » (à propos
de l’étiquette « enfant » du souhait de baptême)
M1 à E1 : « Et regarde la date chérie. C‟est ça, hein ? » (M désigne
la date sur le fac-similé du souhait de baptême)
3. Aider à l’investigation (montrer
comment visiter et comment diriger
les recherches d’informations,
rappeler les règles du jeu)
Famille 2
S2 à E2 : « Il faut que tu cherches une autre image avec un truc
jaune. »
[..]. M2 à E2 : « T‟as pas trouvé d‟autres images avec la fiche
jaune ? » (à propos des étiquettes « enfants » de couleur jaune)
4. Aider à la lecture ou à l’écriture
(lire ou épeler à voix haute,
reformuler le texte)
Famille 5
M5 rejoint les deux filles : « C‟est le souhait de baptême. »
M5 montre l’emplacement à compléter à E5 : « Margaud, tu vois les
traits. Il faut écrire souhait. SOU.»
E5 : « Attends. » E5 s’agenouille au sol pour écrire. C5 est aussi
agenouillée pour écrire la réponse. E5 et C5 s’allonge ensuite au sol
pour écrire.
E5 : « Le S, il est déjà écrit. »
M5 épelle le mot « souhait ».
M5 : « On ne voit pas trop bien. »
M5 épelle « de Baptême » et indique l’emplacement où il faut
l’inscrire.
M5 : « Le T il y est déjà. »
E5 : « Mais là on met quoi ? »
M5 épelle une deuxième fois « souhait de baptême. »
M5 : « On ne prononce pas le P de baptême. »
[…]
M5 dicte la réponse : « Il est né le 6 janvier 1810. »
M5 montre l’emplacement où il faut écrire sur le carnet : « En haut. »
M5 répète ce qu’il faut écrire : « 6 janvier 1810. »
[…]
E5 à M5 : « C‟est trop dur. Ça s‟écrit comment 1000 ? »
M5 : « 1810. »
M s’accroupit et note la réponse pour E5 dans son livret-jeu : « Le
crayon, il n‟est pas trop bien. 1810. »
109

5. Exprimer son approbation ou son
désaccord, mettre en doute
6. Faire prendre du recul par une
interprétation ponctuelle (susciter la
réflexion)
7. Stimuler l’élaboration d’un sens
(expliquer ou aider à trouver le sens
ou la fonction d’un objet)
8. Faire respecter les règles de
conduite
9. Orienter et prendre des décisions
d’ordre matériel (interventions
organisationnelles)
10. Métacommunication sur le jeu :
communiquer sur le cadrage
secondaire du jeu (touchant au
caractère factice des éléments du
jeu)
11. Exprimer une appréciation ou
ses sentiments
Famille 3
E3 aperçoit le carnet de voyage et l’ouvre : « J‟ai trouvé Juliette ! »
S3 rejoint sa sœur en courant : « Où c‟est ? Où c‟est ? »
S3 : « Je savais que je passais devant tout le temps ! Les feuilles.
Montre ! T‟as la fiche encore ? »
E3 tend la carte indice à S3. S3 compare le carnet de voyage avec la
carte indice : « Oui. C‟est bien ça. »
Famille 1
M1 montre à E1 le fac-similé du SC : « Regarde c‟est ça un souvenir.
On faisait des petits tableaux. »
Famille 1
M1 à E1 : « Johannes Jacob a été confirmé. Confirmé c‟est comme
pour la communion. C‟est religieux. C‟est un acte religieux. »
Famille 5
E5 touche le nombre de mois avec son stylo sur le fac-similé du
souvenir funéraire : « Dix. »
M5 : « Ne mets pas le stylo ! »
Famille 2
M2 à E2 : « Moi, je ne vais pas pouvoir t‟aider. Fais le avec ta
sœur. »
Famille 3
S3 : « Où est-ce qu‟on peut se mettre pour écrire…par terre.» et
s’agenouille par terre. E3 imite sa sœur et s’accroupit au sol pour
noter la réponse.
[…]
S3 : « Ah ouais ! Tu me passes la gomme. »
E3 : « Je ne l‟ai pas. »
S3 : « Tu ne l‟as pas prise. »
E3 : « Ah mince ! Je l‟ai laissée en bas. »
S3 : « Vas vite la chercher. »
E3 va chercher la gomme au rez-de-chaussée et remonte à l’étage.
Famille 5
E5 met son carnet en hauteur devant le souvenir de mariage original.
[…]
E5 montre le souvenir de mariage original au-dessus du fac-similé:
« Et ça, c‟est quoi ? »
M montre du doigt le cartel de l’image : « C‟est ça. Texte de
mariage. »
M montre ensuite le fac-similé en dessous : « Ça c‟est une copie pour
faire le jeu avec les enfants. »
E5 : « Hum ! D‟accord. »
Famille 1
M1 à E1 : « C‟est joli en tout cas. Un souhait de baptême, ça c‟est
joli.»
M1 : « Et bien, elle a du courage sa femme.» (à propos de l’ex-voto
sur la naissance du 7 ème enfant)
110

Figure 31
Les interventions de coéducation se répartissent différemment que pour le jeu précédent.
C’est l’aide apportée à la lecture et à l’écriture qui représente les interactions les plus nombreuses
(26,3 % des interventions de coéducation), avant la focalisation de l’attention (18.9%). Nous
voyons donc que le choix du support écrit a des répercussions qui sont loin d’être anodines sur la
visite familiale. L’aide à la lecture et à l’écriture se décompose de la manière suivante :
111

Figure 32
Une partie notoire de l’attention des parents est donc consacrée à décharger les enfants de la
lecture du livret-jeu, à s’assurer qu’ils comprennent correctement ce qu’ils lisent et qu’ils
orthographient correctement les réponses dans le livret-jeu.
La part des interventions visant à encourager les enfants est légèrement plus élevée (9,6 %) que
pour le jeu du musée de Woerth, ce qui pourrait peut-être suggérer une adhésion des enfants un
peu moins spontanée au jeu La vie mystérieuse de l‟Oncle Hans.
Les commentaires interprétatifs (susciter une réflexion et aider à trouver un sens)
constituent à nouveau un peu moins de 10% des interventions de coéducation, avec une moyenne
de 7.2 commentaires interprétatifs par groupe familial. La métacommunication sur le jeu
représente 3.5 % des interventions de coéducation et 3.3 % des interventions des enfants (Cf. fig.
33, p. 116). Si les commentaires sur le cadrage secondaire du jeu restent peu nombreux, leur
présence est toutefois un indicateur du fait que le cadrage secondaire interpelle ou pose parfois
question aux parents et à leurs enfants.
112

- Interventions des enfants
Tableau 13 : Catégorisation des interventions des enfants
Catégories d’interventions des
enfants
Exemples (E : enfant observé ; M : mère ; P : père ; S : sœur ; C :
cousine)
1. Commenter son comportement,
émettre des décisions ou
suggestions liées à l’organisation et
à l’orientation dans le musée
(interventions verbales ou non
verbales comportementales et
organisationnelles)
2. Lire à voix-haute ou reformuler
le texte
Famille 4
E4 : « Je vais voir la prochaine. »
E4 : « C‟est elle. Ah non ! Attends ! J‟ai pris la mauvaise carte. C‟est
celle-là. » E4 repose la carte indice du souvenir de confirmation et
prend la carte indice du souvenir funéraire dans la malle de l’Oncle
Hans.
Famille 1
E1 lit le texte à trous du livret-jeu puis reformule sous forme de
question : « Ensuite. À l‟âge de …. Il avait quel âge quand il est
mort ? »
E1 regarde le fac-similé du souvenir-funéraire : «Après, à l‟âge de
combien d‟ans ? 61 ans.»
3. Montrer ou attirer l’attention Famille 1
E1 prend sa mère par le bras pour l’emmener devant la fresque, puis
fait signe à sa mère de la suivre.
E1 : « Là, il y a un mur brûlé. » (fresque)
M : « C‟est là, tu crois ? »
E1 : « Je ne sais pas. »
4. Décrire, constater, identifier Famille 4
E4 montre la carte indice enfance à P4.
E4 à P4 : « C‟est un cygne sur l‟eau. » (détail de l’oie du jeu de l’oie)
P : « Un cygne sur l‟eau ? »
5. Comparer les indices du jeu et
les objets des collections
6. Établir des relations (en lien
avec l’expérience personnelle ou
entre plusieurs objets des
collections et portant sur des
caractéristiques visibles des objets)
Famille 5
E5 regarde le détail visuel sur le livret jeu : « Une dame au-dessus
d‟un nuage. » (détail de la Vierge à l’enfant sur l’ex-voto de
l’incendie)
E5 : « Je sais ! Je l‟ai vu tout à l‟heure. »
Famille 2
E2 se penche vers le fac-similé : « Problème, ce n‟est pas ça. »
[…]
S2 à E2 : « T‟es sûre ? »
E2 : « Là il n‟y a qu‟une croix et des petites feuilles (sur l‟indice
visuel du livret-jeu) et là il y a des roses (sur le fac-similé du souvenir
funéraire). »
E2 montre la croix sur l’indice du livret-jeu : « Il n‟y a pas ça là
l‟espèce de petite croix.»
Famille 5
M5 : « Vous savez ce que c‟est le jeu de l‟oie ? »
E5 : « Moi, j‟en ai un. »
M5 : « Mais, ce n‟est pas le même.»
E5 : « Si, c‟est le même en plus grand. » et E5 observe le jeu de l’oie.
113

7. Expliciter ou le sens ou la
fonction des objets (commentaires
en lien avec l’expérience
personnelle ou des connaissances
préalables et portant sur la
fonction ou le sens des objets)
8. Communiquer sur le cadre
secondaire du jeu
(métacommunication sur le jeu)
9. Exprimer son accord, son doute
ou son désaccord
10. Commentaires témoignant des
difficultés rencontrées (demander
de l’aide ou exprimer des
difficultés)
Famille 3
E3 regarde la carte indice naissance : « Alors ! C‟est celle où il y a le
Jésus. C‟est facile ça. » E3 se rend devant l’ex-voto de la naissance
du 7 e enfant.
Famille 4
M4 : « Non, je me suis trompée, mais ils se ressemblent tous les
deux. Regarde la petite étiquette jaune. C‟est celui-là.»
[…]
M4 désigne le fac-similé puis l’original du souvenir de mariage
: « Attends il y en a deux qui se ressemblent là. »
E4 désigne le fac-similé : « Non. C‟est celui-là. »
M4 montre le cartel du souvenir de mariage original puis l’étiquette
jaune du fac-similé : « Là, c‟est écrit texte de mariage et là c‟est
souvenir de mariage. »
E4 montre l’original du souvenir de mariage : « Mais, c‟est le même
de toute façon. C‟est le même, mais là c‟est un peu effacé. »
M4 : « T‟as raison. »
[…]
M4 compare la carte indice avec le fac-similé du souvenir de
mariage : « Non Mathilde, ce n‟est pas ça. Regarde Mathilde. C‟est
marqué L I C et ici L I C mais ici qu‟est-ce qu‟il y a marqué là ? Mais
non, tu as raison. Il y a marqué la même chose.»
E4 à M4 : « C‟est ça maman.»
[…]
M4 compare une fleur du souvenir de mariage original avec celle de
figurée sur la carte indice : « Mais regarde la fleur là, c‟est la même
celle-là ? »
M4 pointe le souvenir de mariage original puis le fac-similé : « C‟est
les mêmes les deux. »
M4 : « Là, ce n’est pas la même fleur. »
E4 : « Sauf que celui-là (l‟exemplaire original), il est plus ancien que
celui-là. »
M4 : « Ah bah voilà. Tu as raison, c‟est ça. »
Famille 5
E5 regarde l’indice visuel de l’ex-voto sur le livret-jeu : « Il faut
trouver une grand-mère. »
C5 : «Non, une maman avec un bébé. »
E5 : « Mais non. Là, c‟est une grand-mère. » et E5 montre à sa
cousine le détail visuel de l’ex-voto sur l’incendie dans le livret jeu.
Famille 4
E4 : « C‟est dur à trouver, dis donc. »
[…]
E4 : « Ça fait trois heures que je cherche. »
[…]
M4 : « J‟ai trouvé ! »
E4 : « Ah ! Pitié ! Merci de me le dire. »
M4 : « Tu te baisses un peu au niveau de ton frère. Cherche ! »
E4 : « Oh mon Dieu ! Je suis passée trop vite dis donc ! »
Famille 1 (devant le carnet de voyage)
E1 lit le texte du fac-similé du carnet de voyage: « La première
branche d‟olivier que je vis ou que j‟abordais en entrant dans le midi
114

de la France, du côté d‟Apt. Le vulgaire prononce Atte, les gens
cultivés diroient Atte ».
E1 conclut : « Je n‟ai rien compris. »
11. Manifester un plaisir lié au jeu Famille 5
E5 regarde la carte indice funérailles de C5.
E5 et C5 font la course pour arriver la première au fac-similé du
Souvenir funéraire.
E5 et C5 montrent du doigt le fac-similé du SF et disent toutes les
deux : « Là ! J‟ai trouvé. »
E5 : « Même sans truc ! » (sans carte indice).
12. exprimer une appréciation ou
ses sentiments
Famille 5 (devant le fac-similé de l’ex-voto relatif à l’incendie)
E5 avec une petite voix : « Ouais brûlé. Ça fait peur, hein ?»
[…]
E5 : « Lors de l‟accident, ils ne sont pas morts. »
M5 : « Non, ils sont sains et saufs. »
E5 : « Mais, c‟est qui qui les a sauvé ? »
E5 : « Ils habitaient où quand la maison elle a brûlé alors ? »
M5 : « Chez des amis. »
13. Interactions négatives
(s’ennuyer, être dissiper, se
disputer, gronder)
Famille 4 (devant le fac-similé de l’ex-voto relatif à la naissance)
E4 compte les enfants sur l’ex-voto et exprime son étonnement :
« Un, deux, trois, quatre, cinq, six, sept ! Waou ! Ils sont champions
du monde.»
Famille 4
E4 à son frère (F4): « Tu arrêtes de me suivre comme ça. »
P4 à F4 : « Il cherche de son côté et tu cherches du tien. »
E4 à P4 : « Mais non ! Il me suit. Il m‟énerve ! »
F4 continue à suivre E4. E4 à F4 : « Tu arrêtes ! Je vais m‟énerver.»
115

Figure 33
La lecture à voix haute et la reformulation des textes (du livret-jeu, des images en facsimilés,
des étiquettes enfants, et des cartels) constituent 24.3 % des interventions des cinq enfants
qui étaient sujets de l’étude. La lecture à voix haute quasi systématique des textes par les enfants
peut être perçue à la fois comme une façon de partager le jeu avec les autres membres du groupe
familial, mais aussi comme le résulat d’une lecture silencieuse encore parfois malaisée pour les
enfants de 7-8 ans (deux des cinq enfants observés). La lecture à voix haute peut aussi être une
manière de rechercher l’approbation des parents lors du repérage des informations sur les textes
des fac-similés ou sur les étiquettes.
La description et la comparaison avec les indices visuels du jeu ne représentent que 8.8 %
des interventions des enfants (contre 41 % pour le jeu du musée de Woerth). Le rapport aux
collections semble donc bien distinct d’un jeu à l’autre. Alors que l’appréhension des collections
passe avant tout par le regard au cours du jeu du musée de Woerth, le déchiffrement de texte
semble central lors du jeu La vie mystérieuse de l‟Oncle Hans.
Le jeu suscite également un nombre important de commentaires relatifs à l'organisation et à
l’orientation (15.5 % des interventions des enfants). Ce type de commentaires organisationnels
sont d’ailleurs aussi assez nombreux chez les autres membres du groupe familial (13,3 % des
interventions de coéducation). Le jeu du Musée de l’image populaire demanderait donc un effort
de coordination assez important entre les membres du groupe familial.
116

Les demandes d’aide ou l’expression de difficultés relatives au jeu sont le troisième type
d’interventions en terme de fréquence.
Figure 34
Ces difficultés concernent principalement l’écriture (5.5 %), la lecture (4.3%) et la manière dont il
faut chercher dans le musée (4.3%).
Enfin, on constate que la part des manifestations de plaisir (5%) est deux fois moins élevée
qu’au cours du jeu À qui est cet uniforme du musée de Woerth (11%). Nous n’observons en outre
pas de corrélation entre le recours à un support écrit et l’incitation à la lecture avec une
augmentation de la part des commentaires interprétatifs de la part des enfants. Ceux-ci
correspondent à une part toujours aussi faible des interventions des enfants : 2.2 % pour le jeu du
musée de Woerth et 3.8 % pour le jeu du musée de Pfaffenhoffen.
117

V. Présentation et analyse des résultats des questionnaires :
socialisation des enfants au musée et appropriation des
collections
A. Perception du musée de Woerth et du musée de Pfaffenhoffen
1. Profils des répondants
Tableau 14 : Âge et sexe des répondants
Nombre
d'enfants
(musée de
Woerth)
Nombre
d'enfants
(musée de
Pfaffenhoffen)
Tranches d'âge
6-8 ans 4 5
9-10 ans 7 5
Nombre
d'enfants
(musée de
Woerth)
Nombre
d'enfants
(musée de
Pfaffenhoffen)
Sexe
fille 7 9
garçon 4 1
La passation des questionnaires a eu lieu auprès de l’ensemble des enfants des groupes
familiaux qui correspondaient aux tranches d’âge définies pour chaque jeu (pour la présentation
des groupes familiaux : cf. tableau 4 et tableau 5, p. 86-87). Onze enfants entre 6 et 10 ans ont été
interrogés au musée de Woerth, dont 7 filles et 4 garçons. Dix enfants ont été questionnés au
musée de Pfaffenhoffen, dont 9 filles et 1 garçon. En ce qui concerne les tranches d’âge des
enfants, celles-ci sont un peu mieux équilibrées pour les enfants interrogés dans les deux musées.
Du fait de notre petit échantillon, les résultats sont présentés en effectifs et non en
pourcentage. À l’exception des deux séries de questions sur la perception du musée (les
comportements à adopter dans le musée, et la fonction du musée), les réponses à chaque série de
questions ont été ramenées à des notes sur 1 afin de pouvoir estimer plus facilement la
mémorisation et la compréhension des enfants de façon globale. Cet emploi d’un score sur 1 pour
118

chaque série de questions facilite également la comparaison entre les deux musées. Pour établir
cette notation, les réponses aux questions ont été rentrées sous Sphinx non en fonction des
modalités de réponses du questionnaire, mais en tant que réponse juste ou réponse fausse. Nous ne
présentons pas de croisements avec les données socioculturelles, du fait d’effectifs trop faibles par
sous-catégorie. Les deux questionnaires sont consultables en annexe IV et en annexe V.
2. Perception du musée
Les deux questionnaires commencent chacun par trois séries de questions sur les
comportements à adopter dans le musée, la reconnaissance des lieux et la fonction du musée selon
les enfants. Les trois séries de questions sont formulées sous la forme de questions fermées
auxquelles les enfants ne pouvaient répondre que par oui ou par non. Les questions sur la
reconnaissance des lieux étaient illustrées par des photographies représentant des lieux intrus et le
musée concerné.
a. Les comportements à adopter au musée
La série de questions sur les comportements à adopter dans le musée interrogeaient les
enfants sur ce qu’ils peuvent faire ou ne pas faire dans le musée. Pour cinq de ces comportements
(observer, toucher, lire, apprendre, écrire), en cas de réponse positive de la part de l’enfant, la
question était ensuite ramenée à son expérience particulière de l’après-midi :
- « Et toi, est-ce que tu as observé des choses en particulier aujourd’hui ? »
- « Qu’est-ce que l’on peut toucher au musée ? Qu’est-ce que l’on ne peut pas toucher ? »
- « Où est-ce qu’on peut lire des choses au musée ? »
- « Et toi, est-ce que tu as appris des choses nouvelles aujourd’hui ? »
- « Sur quoi peut-on s’appuyer pour écrire ? »
119

Figure 35
Figure 35
120

L’analyse des comportements montre que les enfants qui ont été interrogés aussi bien à
Woerth qu’à Pfaffenhoffen ont globalement bien assimilé les règles de conduite à adopter dans
l’espace du musée. Les enfants distinguent parfaitement les conduites qui ne sont pas autorisées au
musée : courir, manger, parler fort. Les réponses à la question ouverte : « Qu‟est-ce que tu peux
toucher et qu‟est-ce que tu ne peux pas toucher ? », montrent également que les enfants font la
différence entre ce qu’ils peuvent toucher (les éléments du jeu) et ce qu’ils ne peuvent pas toucher
(les objets du musée). L’ensemble des 21 enfants interrogés dans les deux musées ont répondu soit
qu’ils n’avaient le droit de rien toucher, soit qu’ils ne pouvaient toucher seulement que les
« cadres » ou « objets du jeu », c'est-à-dire les supports de jeu du musée de Woerth, ou « le
livre », « le petit carnet » et les images « sur des sortes de truc où on peut poser les livres », c'està-dire
en l’occurrence les œuvres en fac-similé (carnet de voyage ou ex-votos) prévus pour le jeu
du musée de Pfaffenhoffen. Le fait que les deux jeux mettent à disposition des enfants des
éléments qu’ils peuvent manipuler (plateaux tactiles du musée de Woerth et carnet de voyage du
musée de Pfaffenhoffen) ne semble donc pas entraîner de confusion sur la conduite à adopter à
l’égard des œuvres originales ou des objets des collections du musée.
Seule l’interdiction de prendre des photographies semble moins bien perçue par les enfants
en ce qui concerne le Musée de l’image populaire à Pfaffenhoffen, puisque plus de la moitié ont
répondu qu’ils pouvaient prendre des photos dans le musée. Par contre, les enfants interrogés au
musée de Woerth semblent avoir remarqué dans leur grande majorité les panneaux comportant le
signe indiquant que les photographies sont interdites.
Les enfants paraissent également bien conscients des possibilités offertes par le musée. Se
promener, observer des choses, discuter, poser des questions, lire, apprendre des choses, imaginer
des choses ont été cités par presque tous les enfants comme ce que l’on peut effectivement faire au
musée. En ce qui concerne la lecture, les enfants semblent en majorité avoir assimilé la manière
dont il faut procéder pour chercher l’information à propos des objets, puisqu’ils identifient les
supports porteurs de texte dans chacun des musées : les étiquettes comportant les noms du
régiment des soldats à Woerth, les étiquettes enfants, le livret-jeu et les textes inscrits sur les
images populaires à Pfaffenhoffen . Sept enfants interrogés à Woerth font mention du fait qu’ils
ont lu les noms des soldats et trois d’entre-eux de 9 et 10 ans précisent qu’on peut aussi lire dans
les vitrines la dénomination des armes ou des objets : « lire des choses sur qui est cette personne
et qu‟est-ce que c‟est comme arme » ; « On peut lire des choses devant les objets et les
personnages. » Six des enfants interrogés à Pfaffenhoffen parlent des textes inscrits sur les images
populaires : « les textes sur les tableaux », « les images où il y a des choses écrites », « Quand il y
a des cadres par exemple il y avait des choses à lire dessus ». Trois d’enfants font référence aux
121

étiquettes spécifiques du jeu : « On peut lire des choses sur les plaquettes » (fille, 7 ans) ; « quand
c'est jaune et qu'il y a une petite étiquette » (fille, 9 ans).
Écrire et dessiner ne sont pas perçus commme des actions possibles pour la majorité des
enfants ayant été questionnés au musée de Woerth. À l’opposé, les enfants interrogés au musée de
Pfaffenhoffen, ayant eu recours à la fois à l’écriture et au dessin au cours du jeu, déduisent pour la
plupart que ces comportements sont admis au musée. Si ces enfants perçoivent le fait qu’ils ne
doivent pas s’appuyer sur les œuvres pour écrire, les vitrines, les murs, la rampe de l’escalier, le
sol, la table de l’espace de documentation leur semblent indifféremment un appui approprié pour
écrire : « S‟il y a des trucs comme on a fait maintenant, on peut s'appuyer sur la table et sur les
vitrines qui sont couchées alors ça fait comme des tables » (fille, 8 ans) ; « On peut écrire dans le
petit carnet en se mettant par terre, sur la rampe ou sur les petites vitrines, sur le mur » (fille, 7
ans).
À la question « Est-ce qu‟on peut s‟amuser au musée ?», 12 des 21 enfants interrogés dans
les deux musées ne perçoivent pas le musée comme un lieu où l’on peut s’amuser. Le enfants qui
ont répondu positvement à la question ont en général nuancé spontanément leur réponse soit en
circonscrivant cet amusement à leur expérience particulière de l’après-midi : « D'habitude on ne
peux pas trop s'amuser mais avec le jeu oui. » (fille, 10 ans, Woerth) ; soit en précisant qu’il ne
s’agit pas de n’importe quel divertissement : « Mais pas s'amuser comme jouer à cache-cache »
(garçon, 9 ans, Pfaffenhoffen). Deux filles de 8 et 10 ans interrogées au Musée de l’image
populaire ont finalement conclu que pour elles s’amuser au musée voulait avant tout dire apprécier
ce qu’elles voyaient : « On peut s'amuser un petit peu mais pas trop. ça dépend des musées aussi.
Aujourd'hui je me suis amusée mais ça dépend desquels. S'amuser ça veut pas dire jouer à
quelquechose d'autre que de regarder. S'amuser cela veut dire que cela nous a plu. » ; « Sinon on
n'aurait pas fait ce jeu mais on ne peut pas jouer aux billes ou au cheval à roulettes ou aux petites
voitures, ça non. Je me suis bien amusée à visiter et à regarder toutes les peintures ».
122

. La reconnaissance des lieux
Figure 36
Cinq photographies montrant l’intérieur de lieux publics ont été présentées aux enfants dont
une salle du musée de la Bataille du 6 août 1870. Nous n’avons pas choisi d’évaluer la
reconnaissance de l’extérieur du musée, car celui-ci ne possède pas une architecture propre mais
est situé dans une aile du château de Woerth qui inclut aussi la mairie. Les enfants semblent pour
la plupart avoir bien identifié l’intérieur du musée, puisqu’ils sont 9 sur 11 à avoir discerné
correctement s’il s’agissait ou non du musée pour les cinq photographies proposées. Les deux
autres enfants se sont trompé une ou deux fois et le confondent avec la photographie d’un autre
musée militaire exposant des mannequins vêtus des uniformes de la Grande Armée de Napoléon
Ier ou avec la salle d’armes d’un château.
123

Figure 37
Huit photographies ont été présentées aux enfants, dont quatre montrant l’extérieur de
bâtiments publics et quatre autres reproduisant l’intérieur de différents musées. Dans les deux cas,
les enfants devaient reconnaître si oui ou non ils reconnnaissaient le Musée de l’image populaire.
La présentation intérieure du musée semble avoir marqué les enfants plus que l’aspect extérieur du
bâtiment (une maison traditionnelle alsacienne peinte en rose). Sur les dix enfants interrogés, ils
sont quatre seulement à avoir reconnu la photographie représentant l’extérieur du Musée de
l’image populaire.
124

c. La fonction du musée
Figure 38
En réponse à la série de questions : « À ton avis à quoi sert le musée ? »
Les enfants semblent avoir bien identifié le musée de Woerth à la fois comme lieu où sont
exposés des objets, comme lieu où l’on peut apprendre des choses sur l’histoire ou la guerre, mais
aussi comme lieu où sont conservés des objets anciens ou rares. Les enfants paraissent donc avoir
conscience de la particularité des objets présentés et de la fonction de conservation du musée
envers ces derniers.
125

Figure 39
En réponse à la série de questions : « À ton avis à quoi sert le musée que tu viens de visiter ? »
Les enfants identifient bien deux des principales fonctions du Musée de l’image populaire :
lieu où sont exposées des images, lieu où l’on peut apprendre des choses sur le sens et la fonction
des images populaires et les traditions du passé. La fonction de conservation des images
populaires anciennes, rares ou fragiles est par contre légèrement moins bien perçu par les enfants
(8 enfants sur 10 ont affirmé le fait que le musée sert à garder de vieilles choses et 7 sur 10 ont
répondu que le musée sert à garder des choses rares ou fragiles). Ils ne sont également que 7 sur
10 à avoir affirmé que le musée permet de connaître comment les images peintes étaient
fabriquées.
126

3. La compréhension de la thématique dans chacun des deux musées
a. Appropriation des collections par les enfants
En ce qui concerne les réponses données à la question ouverte : « Et toi, est-ce que tu as
observé des choses en particulier aujourd‟hui ? », nous observons une différence de précision
dans le vocabulaire employé selon le jeu fait par les enfants. Les 11 enfants interrogés au musée
de Woerth mentionnent tous des objets particuliers qui ont attiré leur attention ou qui les ont
marqué, par exemple : « les personnes et les fusils avec les épées » ; « les choses qu'il y avait sur
les bonhommes comme les boutons ou les chapeaux » ; « les sabres, les maquettes et les
mannequins » ; « les uniformes des militaires et puis j‟ai vu aussi des choses anciennes, des
casques » ; « plutôt les objets et des armes, en particulier les obus ». Pour les 10 enfants
interrogés au musée de Pfaffenhoffen, ils ont dit soit qu’ils ne savaient pas (4 enfants sur 10), soit
qu’ils ont vu des « images », « des peintures », des « tableaux » ou des choses à lire (« des photos
où il y a marqué des choses dessus », « des écritures, des petits textes »).
Nous retrouvons aussi ce degré plus élevé d’appropriation des collections dans les réponses
données à ce que les enfants ont appris de nouveau à la suite du jeu du musée de Woerth. Les 11
enfants ayant pratiqué le jeu À qui est cet uniforme ? ont formulé des réponses complexes et ne se
contentent pas d’identifier ou décrire des objets qu’ils auraient vus dans le musée. Deux d’entreeux
établissent des liens entre les objets et la thématique du musée : « J'ai appris comment les
différentes troupes avec quoi ils se combattaient et les uniformes qu‟ils portaient» ; « J'ai appris
comment les soldats s'habillaient et de quelles armes ils se servaient et pleins d'autres choses ».
Un enfant fait le lien entre ce qu’il a vu et des expériences de visites antérieures : « J'ai découvert
les tableaux sur la guerre. Un musée comme ça c'est rare. ». Un enfant exprime le fait que la
visite du musée a changé la vision qu’il avait des uniformes militaires : « Je ne pensais pas qu'ils
étaient habillés aussi beaux. » Enfin, trois enfants exposent même des connaissances précises
apprises sur le sens ou la fonction des uniformes ou des objets : « J'ai appris que les français
étaient en rouge alors que normalement ils auraient dû être en bleu, parce que la couleur
normalement c'est bleu, je n'aurais pas dit rouge» ; « Les vêtements des gens qui ne sont pas tous
les mêmes. Ceux qui viennent du même village ont à peu près la même chose» (en référence aux
galons de la veste du zouave ou du turco) ; « Comment ça s'appelait les uniformes ou les chapeaux
qu'ils avaient les soldats. J'ai aussi appris des choses par rapport aux aigles : les aigles avec les
ailes baissées c'est pour les français et les bavarois ils portaient des aigles avec les ailes
127

déployées » Les réponses énoncées par les enfants à la suite de leur pratique du jeu À qui est cet
uniforme semblent donc particulièrement riches et révèlent une bonne appropriation d’une
thématique qui aurait pu paraître à priori rébarbative ou difficilement accessible pour des enfants
de 6-10 ans.
En ce qui concerne le jeu du Musée de l’image populaire, 2 enfants sur 10 m’ont confié
qu’ils n’avaient pas vraiment l’impression d’avoir appris quelque chose : « Un petit peu, des trucs
sur autrefois un petit peu, un tout petit peu ». 4 enfants sur 10 ne semblent pas avoir perçu le
cadrage fictif de la narration du jeu et désignent l’histoire fictive du jeu comme l’objet principal de
leur apprentissage : « J'ai appris des choses sur une personne...Il faut que ça me revienne le nom
qu'il avait. J'oublie les choses très vite » ; « J'ai appris que le Monsieur il avait sept enfants, la
date où il est né et la date où il est mort » ; « Quand on regarde attentivement en lisant un peu, j'ai
appris des choses sur une personne célèbre que je ne connaissais pas » ; « Je pense que c'est fait
pour ça le musée non ? J'ai appris pleins de choses sur la vie d'un certain personnage que je ne
sais pas trop qui sait, mais apparemment il est connu ».
Figure 40
Les réponses données par les enfants à la question « L‟Oncle Hans a-t-il réellement existé ? »
viennent confirmer cette confusion opérée par les enfants entre l’histoire fictive du jeu et la réalité,
puisqu’ils sont 8 sur 10 a croire que l’Oncle Hans est une personne réelle et non un personnage
imaginaire.
128

. Situation du contexte historique de la thématique respective des
musées
La situation du contexte historique des œuvres ou objets présentés dans chacun des musées
reste assez difficile pour les enfants. Un peu moins de la moitié d’entre eux ne situent pas bien la
période à laquelle les collections du musée concerné se rapportent.
Figure 41
(Question à choix multiples)
À Pfaffenhoffen, 4 enfants sur 10 associent les images populaires au Moyen-âge.
Figure 42 Figure 43
(Question à choix multiples)
(Question ouverte)
129

À Woerth, 5 enfants sur 11 n’ont pas compris à quelle guerre le musée était consacré : 3 enfants
situent le conflit lors de la 2 de guerre mondiale et 2 lors de la 1 ère guerre mondiale (fig. 42). Il faut
préciser cependant que la chronologie présente souvent des difficultés pour l’ensemble des
visiteurs de musées, y compris les adultes. Les enfants ont par contre bien compris quels pays
s’opposaient durant le conflit : la France et l’Allemagne (fig. 43).
Figure 44
En réponse à la question ouverte : « Est-ce que tu peux me donner les nom de trois d’entre eux ? »
La quasi-totalité des enfants se sont tous souvenus au minimum d’un nom de régiment de soldat
de la guerre de 1870. 5 enfants sur 10 ont pu même nommer trois soldats qui combattaient durant
cette guerre. Un seul des enfants n’a pu citer aucun nom de soldat.
Figure 45
Les deux questions sur l’époque et les forces en présence durant la guerre ont été regroupées et notées sur un. La
question sur les trois noms de soldats a été également notée sur un. La moyenne de ces deux groupes de notes donne
une estimation de la compréhension globale de la thématique.
130

B. Mémorisation des œuvres ou des objets vus au cours des jeux
1. Reconnaissance des uniformes militaires (musée de la Bataille du 6 août
1870, Woerth)
a. Matériaux et couleurs employés pour les uniformes
Figure 46
Figure 47
131

Le recours à des plateaux tactiles présentant des indices à toucher et à observer semble avoir
favorisé une assez bonne reconnaissance des matériaux employés pour les uniformes des soldats :
métal, drap de laine, cuir, crins de chevaux, étoffe en coton (fig. 46). Il faut d’ailleurs remarquer
que les plumes présentes sur les casques de certains soldats mais qui ne faisaient pas partie des
indices des supports de jeu ont été moins bien reconnues par les enfants (6 enfants sur 10
seulement ont identifié les plumes comme faisant partie des uniformes). En revanche, les enfants
distinguent un peu plus difficilement les matériaux intrus. Une forte majorité des enfants ont
identifié correctement au moins 6 matériaux sur 9 (fig. 47).
Figure 48
Figure 49
132

Les couleurs des uniformes s’avèrent particulièrement bien appréhendées par les enfants. Seule la
couleur blanche a été source d’erreurs chez les jeunes visiteurs qui paraissent avoir des difficultés
à considérer le blanc comme une couleur.
b. Reconnaissance et identification des uniformes militaires
Figure 50
Figure 51
Parmi les huit photographies montrant des tenues militaires, les enfants ont parfaitement identifié
les uniformes de la guerre de 1870 et ceux appartenant à d’autres époques (fig. 49). Sept enfants
ont correctement idenfié l’ensemble des huit représentations et quatre se sont trompés à une seule
133

eprise (fig. 50). Il semble donc que le jeu du musée de Woerth favorise une attention soutenue des
enfants aux uniformes des soldats et une excellente mémorisation de ces derniers. Une fois
l’uniforme reconnu, quelques enfants arrivent même à l’attribuer correctement au soldat qui le
portait (fig. 52) : 6 enfants sur 10 ont nommé le cuirassier et 4 sur 10 se sont rappelés le nom du
turco.
Figure 52
c. Les casques et les objets des soldats
Deux autres séries avaient pour but de tester la reconnaissance de détails spécifiques abordés à
travers le jeu : les casques des soldats et les objets servant aux soldats.
134

Figure 53
Figure 54
Une série de neuf casques ou coiffes a été montrée aux enfants dont trois casques appartenant
à des époques différentes. Ainsi que pour les uniformes, les enfants reconnaissent sans problème
les casques qui appartenaient aux soldats sur lesquels portaient le jeu et discriminent tout à fait les
casques datant d’autres périodes. En revanche, le casque de dragon dont plusieurs modèles sont
exposés dans le musée, mais qui n’était pas porté par un des mannequins du musée ne semble pas
avoir été vraiment remarqué par les enfants. Il en est de même pour la trompette servant à sonner
la charge des lanciers (fig. 55). Bien que présente à plusieurs endroits du musée, la trompette n’a
135

été que très peu reconnue comme appartenant aux collections du musée. Lors des observations
suivies de cinq des enfants, nous avions remarqué que le jeu À qui est cet uniforme ? focalise
l’attention des enfants sur les mannequins et leur uniforme au détriment des autres objets du
musée. La plus faible reconnaissance des objets qui ne sont pas concernés par les recherches du
jeu s’explique donc par le fait que les supports de jeu dirigent l’observation des enfants envers une
partie seulement des vitrines du musée et que les enfants tendent à négliger les autres objets du
musée.
Figure 55
Figure 56
Les autres objets qui étaient directement dans les vitrines des mannequins (l’obus aux pieds de
l’artilleur, le sabre tenu par le lancier et le fusil posé à côté du turco) sont eux tout à fait reconnus
par les jeunes visiteurs. Les enfants identifient en outre très bien ces objets à l’exception de l’obus.
136

Figure 57
d. Reconnaissance des uniformes sur d’autres supports
Une dernière série de questions comportait cinq représentations mettant en scène des soldats
sur différents supports : dessin, gravure, peintures, et photographie. Le but de cette série de
questions est d’évaluer si les enfants ont acquis grâce à l’observation des uniformes des
connaissances transposables à d’autres types de supports.
La majorité des enfants interrogés semblent effectivement capables de mobiliser les
connaissances acquises sur les caractéristiques des uniformes et de les appliquer sur des
représentations peintes ou gravées (fig. 58). 8 enfants sur 11 ont pu identifier correctement s’il
s’agissait ou non de soldats de la guerre de 1870 sur au moins quatre des cinq représentations (fig.
59).
Il semblerait donc qu’au cours du jeu, les enfants n’aient pas seulement mémorisé
visuellement les uniformes portés par chacun des mannequins, mais aient assimilé des
connaissances concernant les caractéristiques des uniformes qu’ils peuvent ensuite réutiliser.
137

Figure 58
Figure 59
Les résultats des six séries de questions sur la reconnaissance des matériaux et des couleurs
des uniformes, des costumes militaires, des accessoires des soldats (casques ou objets), et sur les
représentations de scène de bataille nous conduisent donc à penser que les enfants se sont
véritablement familiarisés avec l’iconographie des soldats de la guerre de 1870.
138

Figure 70
Figure 71
La catégorie « Connaissances sur la thématique du musée » regroupe à la fois la mémorisation des noms des soldats
et la situation du conflit. La catégorie « Mémorisation visuelle » regroupe les six séries de questions sur la
reconnaissance des uniformes et des accessoires des soldats
139

2. Reconnaissance et compréhension des images populaires du musée
(Musée de l’image populaire, Pfaffenhoffen)
a. Les supports des images peintes ou dessinées
Figure 60
En réponse à la série de questions : « Dans quelles matières sont réalisées les images que tu as vues dans le
musée ? »
Figure 61
140

Les enfants devaient identifier parmi huit photographies représentées sur des suppports variés
quels sont ceux sur lesquels les images populaires sont peintes. Si le papier et la toile ont été cités
comme des supports possibles des images populaires par les trois quarts des enfants, le verre n’a
par contre pas été perçu comme un des supports des images peintes. Les images populaires du
musée sont dans leur grande majorité encadrés sous verre pour des raisons de protection. Il est
donc difficile pour les enfants de remarquer la spécificité des images églomisées ou peintes sous
verre.
b. Familiarisation avec les images populaires
Figure 66
En réponse à la série de questions : Pour chaque image, est-ce que tu peux me dire si oui ou non, celle-ci était dans le
musée ?
141

Figure 67
Dix reproductions d’œuvres ont été montrées aux enfants, parmi lesquelles 6 images
populaires exposées au musée mais qui ne faisaient pas partie du jeu. L’objectif était d’évaluer si
les enfants se sont familiarisés ou non avec les caractéristiques des images populaires au cours du
jeu. En ce qui concerne les quatre œuvres intruses, celles-ci ont été bien distinguées par les enfants
à l’exception du tableau de Monet représentant La rue de Montorgueil à Paris (quatre enfants sur
dix ont dit qu’il pouvait se trouver dans le musée). Ce tableau du musée d’Orsay représente une
foule et de nombreux drapeaux déployés. Les souvenirs de régiment et de conscription du musée
comportent aussi des représentations de drapeaux français. Il est très possible que les enfants qui
ont associé le tableau de Monet à une image populaire se soient basés sur les détails des drapeaux
qu’ils avaient observés dans le musée.
Les images populaires des collections du musée ont été largement identifiées par les
enfants, soit que les enfants aient fait le rapprochement avec les images du jeu, soient qu’ils les
aient vues dans le musée au cours de leur parcours (fig. 66). L’Image d‟amour présentée lors du
questionnaire est la seule image populaire a ne pas avoir été reconnue par plus de la moitié des
enfants. Le jeu La mystérieuse vie de l‟Oncle Hans ne comprenait pas de reproductions (en facsimilé
ou sur le livret-jeu) d’images d’amour ou d’amitié. Les enfants étaient, par contre, invités à
s’inspirer de ce type d’images pour réaliser un dessin de leur création. Nous pouvons donc
supposer que l’observation des images sur le livret-jeu ou les fac-similés a peut-être facilité la
reconnaissance des images populaires se référant aux mêmes étapes de la vie.
142

c. Reconnaissance des images du jeu
Figure 62
Une série de 12 photographies comprenant les 8 images du jeu à reconnaître et 4 distracteurs
ont été montrées successivement aux enfants. Les enfants ont identifié pratiquement sans aucune
erreur les images vues au cours du jeu et celles qui n’en faisaient pas partie (fig. 63). Seul le
Souvenir funéraire a été un peu moins bien reconnu par les enfants (fig. 62). Les enfants semblent
donc bien reconnaître les images vues sur les différents supports du jeu (fac-similés, livret-jeu,
cartes indices).
143

Figure 63
Lorsqu’une des reproductions est reconnue comme l’une des images du jeu, l’enfant devait
répondre à deux questions supplémentaires sur le nom de l’image et sens de cette dernière. Le jeu
La vie mystérieuse de l‟Oncle Hans porte autant sur la recherche d’informations à propos de ces
images que sur leur repérage par comparaison. Il nous a donc semblé nécessaire d’évaluer aussi
les effets de la lecture des cartels et le déchiffrement des textes inscrits sur les images quant à la
compréhension des enfants.
Figure 64
144

La lecture du nom des images sur les étiquettes enfants et l’inscription du nom des images dans les
lacunes du texte à trous du livret-jeu ne paraît pas avoir permis une meilleure mémorisation des
noms des images par les enfants. Seul le jeu de l’oie qui était déjà familier aux enfants avant leur
venue au musée a été nommé systématiquement par les jeunes visiteurs (fig. 64).
Figure 65
La pratique du jeu ne s’est pas non plus traduite par une bonne compréhension de
l’ensemble des images du jeu par les enfants (fig. 65). On peut distinguer les images faisant appel
à la figuration (l’ex-voto sur l’incendie, l’ex-voto sur la naissance d’un enfant, le jeu de l’oie, et le
souvenir militaire) et les autres images du jeu associant textes et motifs à caractère décoratif ou
symbolique. Les images figuratives sont celles qui ont été mieux comprises par les enfants. De
plus, il faut aussi souligner le fait que le souvenir de baptême et le souvenir de confirmation dont
le sens n’a été compris par aucun des dix enfants font tous les deux références à des rites religieux
dont la pratique ne paraît pas vraiment familière aux enfants.
Par ailleurs le déroulement du parcours jeu qui amène les enfants à rechercher le jeu de l’oie
puis le souvenir militaire a suscité une confusion entre le sens des deux images. Ces deux images
comportaient chacune des numéros (numéros des cases du jeu de l’oie et numéro de conscription
sur le souvenir militaire). Le texte du livret-jeu mentionne le fait que le personnage a tiré un
145

numéro de conscription au sort et doit partir faire son service militaire. Deux des enfants ont
déduit que ce tirage au sort s’était effectué sur le jeu de l’oie : « Elle voulait dire que c'était le
numéro que la fille a tiré au sort parce qu'elle avait eu un labyrinthe et elle a joué et elle a tiré » ;
« Quand on devait chercher la case quand le petit garçon avait tiré le numéro 16 sur le jeu de
l'oie ». Deux autres enfants ont compris le souvenir militaire comme une annonce de mariage :
« parce qu'il y a un mariage et c'est pour l'annoncer à tout le monde » ; « ça montre le chevalier
et la Maria qui vont se marier ». Cette assimilation du souvenir de conscription au mariage vient
d’une mauvaise interprétation du texte du livret-jeu en référence à son futur mariage après sept ans
de service militaire : « À mon retour, j‟épouserai Maria. J‟espère qu‟elle m‟attendra…. »
d. Lien entre les images populaires du jeu et les événements marquants de la
vie d’autrefois
Figure 68
146

Figure 69
Il était enfin demandé aux enfants d’associer chacune des images du jeu avec un des
événements de la vie de l’Oncle Hans en fonction d’une frise chronologique représentant le
déroulement de la vie du personnage. Même avec l’aide de la frise des étapes de la vie de l’Oncle
Hans, les trois quarts des enfants n’ont pas pu faire le lien entre le souvenir de baptême et le
baptême à la naissance ou le souvenir de confirmation et la confirmation à l’adolescence. En
revanche, les enfants ont associé plus facilement les six autres images à l’étape de la vie
correspondante. La répartition des notes relatives à la signification des images révèlent que 7
enfants sur 10 ont compris le sens de 4 ou 5 images sur 8 seulement.
Lors des observations suivies de cinq familles et de l’analyse des interactions verbales, nous
avions conclu qu’une part importante de l’attention des enfants et des accompagnants était
mobilisée autour de la lecture du livret-jeu, des étiquettes enfants et des textes des fac-similés.
Cependant, nous voyons que faire lire ou rechercher des informations factuelles aux enfants au
cours d’un jeu de piste ne garantit pas une bonne compréhension du sens de ce qu’ils voient.
147

Figure 72
Figure 72
La catégorie « compréhension du contenu » regroupe la situation de la période et la compréhension des liens entre
les images du jeu. La catégorie « Mémorisation visuelle » regroupe la reconnaissance des supports des images
populaires et la reconnaissance des éléments du jeu.
148

Conclusion
Notre analyse de la relation entre le jeu et l’apprentissage au musée s’appuie sur l’évaluation
de deux jeux mis en place dans deux musées du réseau de la Conservation des musées du Parc
naturel régional des Vosges du Nord. Cette enquête a été menée parallèlement à un stage effectué
auprès du Service des publics de la Conservation.
Notre étude se propose de tirer un bilan qualitatif de l’expérience des jeunes visiteurs lors de
la pratique familiale de ces deux jeux. Elle s’appuie sur les effets de la pratique des jeux à la fois
sur la socialisation des enfants et l’appropriation du musée et des collections. Nous exposerons
donc ici une synthèse de ces résultats.
- Le jeu À qui est cet uniforme ? (musée de la Bataille de 1870, Woerth) : un jeu réussi
associant à la fois plaisir et apprentissage
Compte tenu des objectifs énoncés pour l’évaluation du jeu et en fonction des résultats de
l’analyse des interventions familiales et des questionnaires, nous pouvons estimer que les effets
attendus pour le jeu À qui est cet uniforme ? sont en grande partie atteints.
Le jeu semble avoir contribué à la socialisation des enfants et à leur appropriation de
l’espace du musée. Les 10 enfants questionnés reconnaissent les lieux et identifient les
comportements spécifiques à adopter au sein du musée. Le recours à des supports tactiles
n’entraîne pas de confusion chez les enfants entre ce qu’ils peuvent toucher et ce qu’ils ne peuvent
pas toucher. Les enfants ont appris à utiliser le musée, puisqu’ils citent les endroits où ils peuvent
lire et s’informer sur les objets et les uniformes du musée.
En outre, les enfants se sont familiarisés de manière approfondie avec les uniformes des
soldats de la guerre de 1870 qui font l’objet du jeu. À l’issue du jeu À qui est cet uniforme ?, les
11 enfants interrogés reconnaissent convenablement les uniformes vus au cours du jeu, les détails
des uniformes (couleurs, matières) et les accessoires des soldats (casques et objets des soldats).
Les enfants ont même obtenu une note moyenne élevée pour l’identification des uniformes sur
d’autres supports (0.78 sur 1). Le jeu est donc une réussite en ce qui concerne la mémorisation
visuelle des uniformes de la guerre de 1870. Les enfants ont également bien saisi les deux nations
opposées pour lesquels ces soldats combattaient : la France et l’Allemagne. Un seul des 11 enfants
149

n’a retenu le nom d’aucun des soldats du musée. Le seul bémol à apporter concerne la situation de
la période historique concernée qui reste difficile pour les enfants.
L’étude des interactions de 7 groupes familiaux a également révélé que les enfants ont
éprouvé un plaisir certain à travers cette activité (11% des interventions des enfants montrent
qu’ils ont pris plaisir au jeu). La faible part des interactions visant à s’assurer de l’adhésion de
l’enfant (7,8% des interventions de coéducation) va aussi dans le sens d’une forte motivation
intrinsèque du jeu pour les enfants le pratiquant. Le jeu suscite en outre des interactions
nombreuses au sein de la famille. Nous avons en effet dénombré 114 interactions de tous types
confondus en moyenne au cours du jeu. La pratique du jeu en famille paraît favoriser la
découverte du patrimoine culturel par les interactions qu’il suscite au sein de la famille. Les
interventions de coéducation étaient principalement destinées à attirer l’attention et à montrer ce
qu’il faut regarder (40% des interventions de coéducation). Il faut remarquer toutefois que les
commentaires interprétatifs (faire des liens et trouver un sens) sont assez peu nombreux aussi bien
de la part des enfants que de celle des accompagnants.
Par contre, les objectifs concernant l’observation des objets dans les vitrines alentours ne
semblent pas vraiment atteints. Les observations suivies et les réponses au questionnaire laissent à
penser que les supports de jeu canalisent et dirigent l’attention des enfants uniquement sur les
uniformes et les accessoires des soldats sur lesquels porte le jeu au détriment du reste des
collections du musée.
- Le jeu La vie mystérieuse de l‟Oncle Hans : des points sont encore à améliorer
En ce qui concerne le jeu La vie mystérieuse de l‟Oncle Hans, nous concluerons que les
objectifs définis au préalable ne sont que partiellement atteints.
La socialisation des enfants et l’appropriation du musée en tant qu’espace par les enfants est
tout à fait satisfaisante. Les enfants ont pleinement conscience des comportements spécifiques à
adopter au sein du musée. Ils ont appris à utiliser l’espace du musée au cours du jeu et savent où
ils peuvent chercher des informations sur les images populaires dans le musée.
Les enfants se sont familiarisés avec les images populaires, puisqu’ils sont capables de
discerner une image populaire d’un tableau expressionniste, d’un collage cubiste, ou d’une
estampe japonaise. Les enfants ont également bien mémorisé les images du livret-jeu ou celles
150

eproduites sur les fac-similés. Les supports sur lesquels les images populaires sont peintes ont été
par contre moins bien identifiés par les enfants.
Les résultats concernant la compréhension du sens des images du jeu par les enfants sont en
revanche plus mitigés. Tout d’abord, les enfants ne perçoivent pas le cadre secondaire du jeu et
l’assimilent à la réalité. Le personnage fictif du jeu, l’Oncle Hans, a réellement existé pour les
enfants. Le musée est d’ailleurs pour eux consacré en grande partie à cette « personne célèbre »
qu’ils ne connaissaient pas auparavant. Les enfants mésinterprètent de ce fait les intentions des
concepteurs et pensent que les apprentissages attendus au cours du jeu portent sur la biographie de
l’Oncle Hans. D’autre part, la perception du lien entre les images du jeu et les grandes étapes de la
vie est inégale en fonction des différentes images. Les images figuratives sont en général mieux
comprises par les enfants. Par contre, la compréhension des images comportant des textes et des
motifs symboliques ou décoratifs reste assez laborieuse. De plus, le jeu n’offre pas une mise en
contexte suffisante pour comprendre les liens entre les images et les rites de passage religieux :
baptême et confirmation. Le sens de ces deux images n’a été compris par aucun des dix enfants
interrogés.
La recherche d’informations et le remplissage du texte à trous du livret-jeu ne semblent donc
pas apporter un apprentissage supplémentaire en terme de compréhension du contenu des
collections par rapport à un jeu uniquement basé sur l’observation. De plus, la pratique d’un test
de closure au musée engendre des difficultés pour les enfants dont on ne mesure bien souvent pas
assez l’importance. Nous avons vu grâce à l’observation suivie de cinq familles que les enfants
éprouvent des difficultés pour écrire dans une position debout et cherchent à trouver un appui sur
tous les endroits disponibles du musée. Ils rencontrent aussi des difficultés pour comprendre les
énoncés et orthographier correctement les réponses. L’expression de difficultés ou d’une demande
d’aide représentent 14 % des interventions des enfants, dont 10 % concernent la lecture ou
l’écriture. Une part importante des interactions familales sont destinées à aider à lire ou à écrire
(26% des interventions de coéducation) ou à lire à voix haute et reformuler les textes (24 % des
interventions des enfants). Au regard des efforts déployés par les familles autour de la lecture et de
l’écriture, les résultats en terme de compréhension des images paraissent un peu faibles.
L’expérience s’avère aussi moins satisfaisante au niveau du plaisir et de la motivation des
enfants. Les manifestations de plaisir au cours du jeu ne représentent plus que 5% des
interventions des enfants et les commentaires ayant pour but de motiver ou encourager les enfants
sont plus nombreux (19% des interventions de coéducation).
151

Au vu de l’échantillon réduit sur lequel porte les recherches, les résultats obtenus doivent
être appréhendés avec prudence. Il est aussi difficile de tirer des conclusions générales sur le jeu et
l’apprentissage dans les musées à partir de l’expérience singulière de deux jeux. Nous espérons
cependant que les résultats de cette étude permettront au Service des publics de la Chaîne de la
Découverte de porter un regard affiné sur la pratique de ces deux jeux par les enfants, leur
expérience et les effets en terme d’appropriation du musée et des collections.
Nous espérons également que ces résultats pourront alimenter à leur échelle la recherche
relative aux jeux pédagogiques dans les musées. Il serait nécessaire de recueillir les interventions
verbales et non-verbales de familles plus nombreuses, et d’interroger un plus grand nombre
d’enfants. Lors de la conception des outils de cette recherche, je me suis efforcée d’adapter les
méthodes étudiant l’apprentissage familial dans les musées à partir des interventions verbales à la
problématique spécifique du jeu. J’ai également conçu des questionnaires complémentaires pour
évaluer d’une part la socialisation au musée, et d’autre part la reconnaissance et la compréhension
des œuvres ou objets vus au cours du jeu par les enfants. L’association de ces deux outils (analyse
des interactions familiales et questionnaires) nous ont permis d’approcher au plus près de
l’expérience ludique des jeunes visiteurs. Nous espérons ainsi que cette recherche pourra servir de
base à d’autres études concernant une problématique similaire et impliquant un échantillon plus
important afin de valider ou de pondérer les résultats obtenus ici.
152

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UNIVERSITÉ D’AVIGNON ET DES PAYS DE VAUCLUSE
Master Médiations de la Culture et du Patrimoine
Mention Stratégie du Développement Culturel
Mémoire de master 2 e année
À LA DECOUVERTE DU MUSÉE EN JOUANT :
Analyse théorique et étude appliquée à deux jeux Amuse-musées du réseau de la conservation du
Parc naturel régional des Vosges du Nord
ANNEXES
Claire Barbieux
Sous la direction de Daniel Jacobi
Année universitaire 2009-2010
1

Table des annexes
ANNEXE I – Le livret-jeu La Vie mystérieuse de l’Oncle Hans du Musée de l’image populaire à
Pfaffenhoffen .................................................................................................................................. 4
ANNEXE II – Les cartes-indices (recto-verso) contenues dans la Malle de l’Oncle Hans et servant
de compléments visuels aux détails reproduits dans le livret-jeu La vie mystérieuse de l’Oncle Hans
(Pfaffenhoffen) ............................................................................................................................... 8
ANNEXE III – Fiches de corrections (recto-verso) du jeu À qui est cet uniforme ? du musée de la
Bataille de 1870 de Woerth ........................................................................................................... 19
ANNEXE IV – Questionnaire post-jeu pour le musée de la Bataille de 1870, Woerth ................... 25
Support pour les questionnaires avec les enfants de 6 à 10 ans au musée de la Bataille de 1870 à
Woerth ...................................................................................................................................... 26
1. Quel âge as-tu ? ........................................................................................................... 26
2. Dis-moi ce que l’on peut faire ou ne pas faire dans un musée ? Pour chaque question, tu
peux répondre par oui ou par non : ........................................................................................ 26
3. Reconnaissance des lieux (5-7ans): Est-ce que parmi les photographies suivantes, tu
reconnais le musée de Woerth ? Pour chaque photographie, tu peux répondre par oui ou par
non……………………………………………………………………………………………..28
4. Reconnaissance des lieux (8-10 ans) : Est-ce que parmi les photographies suivantes, tu
reconnais le musée de Woerth ? Pour chaque photographie, tu peux répondre par oui ou par
non……………………………………………………………………………………………..33
5. À qui appartenaient les costumes que tu as observés durant le jeu ? [question ouverte] 38
6. Est-ce que tu peux me donner les noms de trois d’entre eux ? [trois noms] .................. 38
7. Quand est-ce que ces soldats ont fait la guerre ? [question à choix multiples] ............. 38
8. Pour quels pays ces soldats combattaient durant cette guerre ? Quels sont les deux pays
qui se faisaient la guerre ? [deux noms] ................................................................................. 38
9. À ton avis, à quoi sert un musée, et plus particulièrement celui de la Bataille de 1870 de
Woerth ? À chaque proposition, tu peux répondre par oui ou par non : .................................. 39
10. Dans quels matériaux étaient réalisés les uniformes que tu as pu observer durant le jeu ?
Je vais te montrer différentes matières. Pour chaque matière, tu peux répondre par oui ou par
non……………………………………………………………………………………………40
11. Quelles sont les couleurs qui étaient utilisées pour les uniformes des soldats de la guerre
de 1870 ? À chaque question, tu peux répondre par oui ou par non. ....................................... 49
12. Je vais te présenter des photos de costumes. Tu vas devoir repérer ceux qui étaient selon
toi dans le musée ? ................................................................................................................ 56
13. Je vais te montrer des photos d’objets et tu vas devoir repérer ceux qui selon toi étaient
dans le musée. Pour chaque objet, tu peux répondre par oui ou par non. ............................... 64
14. Je vais te montrer des photos d’objets. Quels sont, selon toi, les objets qui étaient dans le
musée ? Pour chaque image, tu peux répondre par oui ou par non :........................................ 73
15. Reconnaissance des uniformes sur d’autres supports : Je vais te montrer une série
d’images de bataille. Est-ce que tu peux me dire quels sont les images qui montrent les soldats
que tu as observés durant le jeu ? Pour chaque image, tu peux répondre par oui ou par non : 80
ANNEXE V – Questionnaire post-jeu pour le Musée de l’image populaire de Pfaffenhoffen ........ 85
Support pour les questionnaires avec les enfants de 7 à 10 ans au Musée de l’image populaire à
Pfaffenhoffen ............................................................................................................................ 86
2

1. Quel âge as-tu ? ........................................................................................................... 86
2. Dis-moi ce que l’on peut faire ou ne pas faire dans un musée ? Pour chaque question, tu
peux répondre par oui ou par non : ........................................................................................ 86
3. Reconnaissance des lieux (extérieur) : ......................................................................... 88
4. Reconnaissance des lieux (intérieur) : .......................................................................... 92
5. À ton avis, à quelle époque ont été réalisées les choses que tu as vues dans le musée ?
[question à choix multiples] ................................................................................................... 96
6. À quoi sert un musée, et plus particulièrement celui que tu viens de visiter ? À chaque
proposition, tu peux répondre par oui ou par non : ................................................................. 96
7. D’après toi, dans quelles matières sont réalisées les images que tu as vues dans le
musée ? A chaque proposition, tu peux répondre par oui ou par non : .................................... 97
8. Reconnaissance des images populaires : Je vais te présenter une série d’images. Pour
chaque image, est-ce que tu peux me dire si oui ou non, celle-ci étaient dans le musée ? ..... 105
9. Reconnaissance des images observées lors du jeu : Je vais te présenter une série
d’images. Pour chaque image, est-ce que tu peux me dire si oui ou non, celle-ci faisaient partie
des indices du jeu ? .............................................................................................................. 115
10. Les âges de la vie (signification des images du jeu) : Est-ce que tu peux retrouver à quel
moment de la vie de l’Oncle Hans correspondait chacune des images du jeu ? [questions à
choix multiples] ................................................................................................................... 127
11. À ton avis, est-ce que l’Oncle Hans a réellement existé ? [oui/non] ........................... 135
3

ANNEXE I – Le livret-jeu La Vie mystérieuse de l’Oncle Hans du
Musée de l’image populaire à Pfaffenhoffen
4

Couverture du livret-jeu
5

Pages 1 et 2 du livret-jeu
Pages 3 et 4 du livret-jeu
6

Pages 5 et 6 du livret-jeu
Dernière page du livret-jeu
7

ANNEXE II – Les cartes-indices (recto-verso) contenues dans
la Malle de l’Oncle Hans et servant de compléments visuels
aux détails reproduits dans le livret-jeu La vie mystérieuse de
l’Oncle Hans (Pfaffenhoffen)
8

Carte-indice Service militaire (recto et verso)
9

Carte-indice Voyage (recto et verso)
10

Carte-indice Mariage (recto et verso)
11

Carte-indice Accident (recto et verso)
12

Carte-indice Naissance (recto et verso)
13

Carte-indice Enfance (recto et verso)
14

Carte-indice Confirmation (recto et verso)
15

Carte-indice Famille (recto et verso)
16

Carte-indice Décès
17

Carte-indice Service militaire
18

ANNEXE III – Fiches de corrections (recto-verso) du jeu À qui
est cet uniforme ? du musée de la Bataille de 1870 à Woerth
19

ANNEXE IV – Questionnaire post-jeu pour le musée de la
Bataille de 1870, Woerth
25

Support pour les questionnaires avec les enfants de 6 à 10 ans au
musée de la Bataille de 1870 à Woerth
Ce qui est noté entre crochets ne figurait pas dans le support des questionnaires avec les enfants,
mais a été ajouté à titre informatif pour le lecteur. L’administration des questionnaires s’est faite
oralement en face à face. Les réponses des enfants n’étaient pas directement notées sur le support
illustré de photographies et d’échantillons de matériaux. J’inscrivais les réponses sur un document à
part prévu à cet effet.
1. Quel âge as-tu ?
2. Dis-moi ce que l’on peut faire ou ne pas faire dans un musée ? Pour
chaque question, tu peux répondre par oui ou par non :
Est-ce qu’on peut se promener dans le musée ? [oui/non]
Est-ce qu’on peut courir dans les couloirs ou dans les escaliers ? [oui/non]
Est-ce qu’on peut discuter dans le musée ? [oui/non]
Est-ce qu’on peut manger un sandwich dans le musée ? [oui/non]
Est-ce qu’on peut parler fort dans le musée ? [oui/non]
Est-ce qu’on peut observer des choses dans le musée ? [oui/non]
Et toi, est-ce qu’il y a des choses que tu as observé en particulier ? [question
ouverte]
Est-ce qu’on peut s‘amuser dans le musée ? [oui/non]
26

Est-ce qu’on peut poser des questions ? [oui/non]
Est-ce qu’il y a des choses que l’on peut toucher au musée et d’autres pas ? [oui/non]
Qu’est-ce que l’on peut toucher au musée ? Qu’est-ce que l’on ne peut pas
toucher ? [question ouverte]
Est-ce qu’on peut prendre des photos dans le musée ? [oui/non]
Est-ce qu’on peut lire des choses dans le musée ? [oui/non]
Où est-ce qu’on peut lire des choses au musée ? [question ouverte]
Est-ce qu’on peut apprendre des choses nouvelles ? [oui/non]
Et toi, est-ce que tu as appris des choses nouvelles aujourd’hui ? Est-ce que tu
peux me dire lesquelles ? [question ouverte]
Est-ce qu’on peut écrire au musée ? [oui/non]
Sur quoi peut-on s’appuyer pour écrire ? [question ouverte]
Est-ce qu’on peut dessiner au musée ? [oui/non]
Est-ce qu’on peut se reposer au musée ? [oui/non]
Est-ce qu’on peut imaginer des choses au musée ? [oui/non]
27

3. Reconnaissance des lieux (5-7 ans) : Est-ce que parmi les
photographies suivantes, tu reconnais le musée de Woerth ? Pour
chaque photographie, tu peux répondre par oui ou par non :
Est-ce que tu es déjà allé dans ce lieu ? [oui/non]
Est-ce que c’est le musée ou pas ? [oui/non]
28

Est-ce que tu es déjà allé dans ce lieu ? [oui/non]
Est-ce que c’est le musée ou pas ? [oui/non]
29

Est-ce que tu es déjà allé dans ce lieu ? [oui/non]
Est-ce que c’est le musée ou pas ? [oui/non]
30

Est-ce que tu es déjà allé dans ce lieu ? [oui/non]
Est-ce que c’est le musée ou pas ? [oui/non]
31

Est-ce que tu es déjà allé dans ce lieu ? [oui/non]
Est-ce que c’est le musée ou pas ? [oui/non]
32

4. Reconnaissance des lieux (8-10 ans) : Est-ce que parmi les
photographies suivantes, tu reconnais le musée de Woerth ? Pour
chaque photographie, tu peux répondre par oui ou par non :
Est-ce que tu es déjà allé dans ce lieu ? [oui/non]
Est-ce que c’est le musée ou pas ? [oui/non]
33

Est-ce que tu es déjà allé dans ce lieu ? [oui/non]
Est-ce que c’est le musée ou pas ? [oui/non]
34

Est-ce que tu es déjà allé dans ce lieu ? [oui/non]
Est-ce que c’est le musée ou pas ? [oui/non]
35

Est-ce que tu es déjà allé dans ce lieu ? [oui/non]
Est-ce que c’est le musée ou pas ? [oui/non]
36

Est-ce que tu es déjà allé dans ce lieu ? [oui/non]
Est-ce que c’est le musée ou pas ? [oui/non]
37

5. À qui appartenaient les costumes que tu as observés durant le jeu ?
[question ouverte]
6. Est-ce que tu peux me donner les noms de trois d’entre eux ? [trois
noms]
7. Quand est-ce que ces soldats ont fait la guerre ? [question à choix
multiples]
- La guerre de 1870-1871
- La 1 ère guerre mondiale (1914-1918)
- La 2 nde guerre mondiale (1939-1945)
8. Pour quels pays ces soldats combattaient durant cette guerre ? Quels
sont les deux pays qui se faisaient la guerre ? [deux noms]
38

9. À ton avis, à quoi sert un musée, et plus particulièrement celui de la
Bataille de 1870 de Woerth ? À chaque proposition, tu peux répondre
par oui ou par non :
- à exposer et voir des objets militaires [oui/non]
- à connaître plus de choses sur l’histoire [oui/non]
- à gagner de l’argent [oui/non]
- à apprendre des choses sur les uniformes militaires [oui/non]
- à savoir à quoi servaient les choses qui sont exposées [oui/non]
- à entreposer des choses anciennes, à garder des vieilles choses [oui/non]
- à se déguiser en soldat [oui/non]
- à garder des objets rares ou de valeur [oui/non]
- à voir des choses que l’on ne voit pas tous les jours [oui/non]
- à se distraire [oui/non]
39

10. Dans quels matériaux étaient réalisés les uniformes que tu as pu
observer durant le jeu ? Je vais te montrer différentes matières. Pour
chaque matière, tu peux répondre par oui ou par non :
Métal :
[oui/non]
40

Étoffe en laine : [le questionnaire original comportait un échantillon de tissu au lieu
d’une photographie] [oui/non]
41

Tissu en coton : [le questionnaire original comportait un échantillon de tissu au lieu
d’une photographie] [oui/non]
42

Soie : [le questionnaire original comportait un échantillon de tissu au lieu d’une
photographie.] [oui/non] [matière intrus]
43

Velours : [Le questionnaire original comportait un échantillon de tissu au lieu d’une
photographie.] [oui/non] [matière intrus]
44

Cuir : [le questionnaire original comportait un échantillon de cuir noir au lieu d’une
photographie.] [oui/non]
45

Caoutchouc : [Le questionnaire original comportait un échantillon de caoutchouc au
lieu d’une photographie.] [oui/non] [matière intrus]
46

Plumes : [Le questionnaire original comportait un échantillon de plumes rouges au
lieu d’une photographie.] [oui/non]
47

Crins de chevaux : [oui/non]
48

11. Quelles sont les couleurs qui étaient utilisées pour les uniformes des
soldats de la guerre de 1870 ? À chaque question, tu peux répondre par
oui ou par non.
rouge vif : [oui/non]
49

Bleu foncé : [oui/non]
50

Vert kaki : [oui/non] [couleur intrus]
51

Jaune : [oui/non]
52

Blanc : [oui/non]
53

Noir : [oui/non]
54

Violet : [oui/non] [couleur intrus]
55

12. Je vais te présenter des photos de costumes. Tu vas devoir repérer
ceux qui étaient selon toi dans le musée ?
À ton avis, est-ce que ce costume était dans le musée ? [oui/non]
Est-ce que tu l’as vu ou pas ? [oui/non] À quoi tu le reconnais ? [question ouverte]
Si oui : Est-ce que tu te souviens à qui appartenait cet uniforme ? [cuirassier français]
56

À ton avis, est-ce que ce costume était dans le musée ? [oui/non]
Est-ce que tu l’as vu ou pas ? [oui/non] À quoi tu le reconnais ? [question ouverte]
Si oui : Est-ce que tu te souviens à qui appartenait cet uniforme ? [turco]
57

À ton avis, est-ce que ce costume était dans le musée ? [oui/non]
Est-ce que tu l’as vu ou pas ? [oui/non] À quoi tu le reconnais ? [question ouverte]
Si oui, est-ce que tu te souviens, à qui appartenait ce costume ? [intrus]
58

À ton avis, est-ce que ce costume était dans le musée ? [oui/non]
Est-ce que tu l’as vu ou pas ? [oui/non] À quoi tu le reconnais ? [question ouverte]
Si oui : Est-ce que tu te souviens à qui appartenait cet uniforme ? [artilleur]
59

À ton avis, est-ce que ce costume était dans le musée ? [oui/non]
Est-ce que tu l’as vu ou pas ? [oui/non] À quoi tu le reconnais ? [question ouverte]
Si oui : Est-ce que tu te souviens à qui appartenait cet uniforme ? [intrus]
60

À ton avis, est-ce que ce costume était dans le musée ? [oui/non]
Est-ce que tu l’as vu ou pas ? [oui/non] À quoi tu le reconnais ? [question ouverte]
Si oui : Est-ce que tu te souviens à qui appartenait cet uniforme ? [hussard français]
61

À ton avis, est-ce que ce costume était dans le musée ? [oui/non]
Est-ce que tu l’as vu ou pas ? [oui/non] À quoi tu le reconnais ? [question ouverte]
Si oui : Est-ce que tu te souviens à qui appartenait cet uniforme ? [intrus]
62

À ton avis, est-ce que ce costume était dans le musée ? [oui/non]
Est-ce que tu l’as vu ou pas ? [oui/non] À quoi tu le reconnais ? [question ouverte]
Si oui : Est-ce que tu te souviens à qui appartenait cet uniforme ? [zouave]
63

13. Je vais te montrer des photos d’objets et tu vas devoir repérer ceux qui
selon toi étaient dans le musée. Pour chaque objet, tu peux répondre
par oui ou par non.
À ton avis, est-ce que ce casque était dans le musée ? [oui/non]
Est-ce que tu l’as vu ou pas ? [oui/non] À quoi tu le reconnais ? [question ouverte]
Si oui : Est-ce que tu te souviens à qui appartenait ce casque ? [cuirassier]
64

À ton avis, est-ce que ce chapeau était dans le musée ? [oui/non]
Est-ce que tu l’as vu ou pas ? [oui/non] À quoi tu le reconnais ? [question ouverte]
Si oui : Est-ce que tu te souviens à qui appartenait ce chapeau ? [zouave et turco]
65

À ton avis, est-ce que ce casque était dans le musée ? [oui/non]
Est-ce que tu l’as vu ou pas ? [oui/non] À quoi tu le reconnais ? [question ouverte]
Si oui : Est-ce que tu te souviens à qui appartenait ce casque ? [intrus]
66

À ton avis, est-ce que ce casque était dans le musée ? [oui/non]
Est-ce que tu l’as vu ou pas ? [oui/non] À quoi tu le reconnais ? [question ouverte]
Si oui : Est-ce que tu te souviens à qui appartenait ce casque ? [infanterie bavaroise]
67

À ton avis, est-ce ce casque était dans le musée ? [oui/non]
Est-ce que tu l’as vu ou pas ? [oui/non] À quoi tu le reconnais ? [question ouverte]
Si oui : Est-ce que tu te souviens à qui appartenait ce casque ? [lancier français]
68

À ton avis, est-ce que cet objet était dans le musée ? [oui/non]
Est-ce que tu l’as vu ou pas ? [oui/non] À quoi tu le reconnais ? [oui/non]
Si oui : Est-ce que tu te souviens à qui appartenait cet objet ? [intrus]
69

À ton avis, est-ce que ce casque était dans le musée ? [oui/non]
Est-ce que tu l’as vu ou pas ? [oui/non] À quoi tu le reconnais ? [question ouverte]
Si oui : Est-ce que tu te souviens à qui appartenait ce casque ? [prussien]
70

À ton avis, est-ce que ce casque était dans le musée ? [oui/non]
Est-ce que tu l’as vu ou pas ? [oui/non] À quoi tu le reconnais ? [question ouverte]
Si oui : Est-ce que tu te souviens à qui appartenait ce casque ? [dragon français : casque
appartenant collections du musée, mais ne figure pas parmi les éléments à rechercher pour le
jeu]
71

À ton avis, est-ce que ce casque était dans le musée ? [oui/non]
Est-ce que tu l’as vu ou pas ? [oui/non] À quoi tu le reconnais ? [question ouverte]
Si oui, est-ce que tu te souviens à qui appartenait ce casque ? [intrus]
72

14. Je vais te montrer des photos d’objets. Quels sont, selon toi, les objets
qui étaient dans le musée ? Pour chaque image, tu peux répondre par
oui ou par non :
À ton avis, est-ce que cet objet était dans le musée ? [oui/non]
Est-ce que tu l’as vu ou pas ? [oui/non]
Si oui : Est-ce que tu peux me dire qu’est-ce que c’est ? [fusil]
73

À ton avis, est-ce que cet objet était dans le musée ? [oui/non]
Est-ce que tu l’as vu ou pas ? [oui/non]
Si oui : Est-ce que tu peux me dire qu’est-ce que c’est que c’est ? [intrus]
74

À ton avis, est-ce que ces objets étaient dans le musée ? [oui/non]
Est-ce que tu les as vus ou pas ? [oui/non]
Si oui : Est-ce que tu peux me dire qu’est-ce que c’est ? [sabres]
75

À ton avis, est-ce que cet objet était dans le musée ? [oui/non]
Est-ce que tu l’as vu ou pas ? [oui/non]
Si oui : Est-ce que tu peux me dire qu’est-ce que c’est ? [intrus]
76

À ton avis, est-ce que ces objets étaient dans le musée ? [oui/non]
Est-ce que tu les as vus ou pas ? [oui/non]
Si oui : Est-ce que tu peux me dire qu’est-ce que c’est ? [obus français]
77

À ton avis, est-ce que cet objet était dans le musée ? [oui/non]
Est-ce que tu l’as vu ou pas ? [oui/non]
Si oui : Est-ce que tu peux me dire, qu’est-ce que c’est ? [selle]
78

À ton avis, est-ce que cet objet était dans le musée ? [oui/non]
Est-ce que tu l’as vu ou pas ? [oui/non]
Si oui : Est-ce que tu peux me dire, qu’est-ce que c’est ? [trompette pour sonner la charge]
79

15. Reconnaissance des uniformes sur d’autres supports : Je vais te
montrer une série d’images de bataille. Est-ce que tu peux me dire quels
sont les images qui montrent les soldats que tu as observés durant le
jeu ? Pour chaque image, tu peux répondre par oui ou par non :
À ton avis, est-ce que cette image montre les soldats que tu as observés durant le jeu ?
[oui/non]
Si oui : À quoi tu reconnais les soldats que tu as vus dans le musée ? [question ouverte]
80

À ton avis, est-ce que cette image montre les soldats que tu as observés durant le jeu ?
[oui/non]
Si oui : À quoi tu reconnais les soldats que tu as vus dans le musée ? [question ouverte]
81

À ton avis, est-ce que cette image montre les soldats que tu as observés durant le jeu ?
[oui/non]
Si oui : À quoi tu reconnais les soldats que tu as vus dans le musée ? [intrus]
82

À ton avis, est-ce que cette image montre les soldats que tu as observés durant le jeu ?
[oui/non]
Si oui : À quoi tu reconnais les soldats que tu as vus dans le musée ? [question ouverte]
83

À ton avis, est-ce que cette image montre les soldats que tu as observés durant le jeu ?
[oui/non]
Si oui : À quoi tu reconnais les soldats que tu as vus dans le musée ? [intrus]
84

ANNEXE V – Questionnaire post-jeu pour le Musée de l’image
populaire de Pfaffenhoffen
85

Support pour les questionnaires avec les enfants de 7 à 10 ans au
Musée de l’image populaire à Pfaffenhoffen
Ce qui est noté entre crochets ne figurait pas dans le support des questionnaires avec les enfants,
mais a été ajouté à titre informatif pour le lecteur. L’administration des questionnaires s’est faite
oralement en face à face. Les réponses des enfants n’étaient pas directement notées sur le support
illustré de photographies. J’inscrivais les réponses sur un document à part prévu à cet effet.
1. Quel âge as-tu ?
2. Dis-moi ce que l’on peut faire ou ne pas faire dans un musée ? Pour
chaque question, tu peux répondre par oui ou par non :
Est-ce qu’on peut se promener dans le musée ? [oui/non]
Est-ce qu’on peut courir dans les couloirs ou dans les escaliers ? [oui/non]
Est-ce qu’on peut discuter dans le musée ? [oui/non]
Est-ce qu’on peut manger un sandwich dans le musée ? [oui/non]
Est-ce qu’on peut parler fort dans le musée ? [oui/non]
Est-ce qu’on peut observer des choses dans le musée ? [oui/non]
Et toi, est-ce qu’il y a des choses que tu as observé en particulier ? [question
ouverte]
Est-ce qu’on peut s‘amuser dans le musée ? [oui/non]
Est-ce qu’on peut poser des questions ? [oui/non]
86

Est-ce qu’il y a des choses que l’on peut toucher au musée et d’autres pas ? [oui/non]
Qu’est-ce que l’on peut toucher au musée ? Qu’est-ce que l’on ne peut pas
toucher ? [question ouverte]
Est-ce qu’on peut prendre des photos dans le musée ? [oui/non]
Est-ce qu’on peut lire des choses dans le musée ? [oui/non]
Où est-ce qu’on peut lire des choses au musée ? [question ouverte]
Est-ce qu’on peut apprendre des choses nouvelles ? [oui/non]
Et toi, est-ce que tu as appris des choses nouvelles aujourd’hui ? Est-ce que tu
peux me dire lesquelles ? [question ouverte]
Est-ce qu’on peut écrire au musée ? [oui/non]
Sur quoi peut-on s’appuyer pour écrire ? [question ouverte]
Est-ce qu’on peut dessiner au musée ? [oui/non]
Est-ce qu’on peut se reposer au musée ? [oui/non]
Est-ce qu’on peut imaginer des choses au musée ? [oui/non]
87

3. Reconnaissance des lieux (extérieur) :
Est-ce que tu as déjà vu cet endroit ? [oui/non]
Est-ce que c’est le musée ou pas ? [oui/non]
88

Est-ce que tu as déjà vu cet endroit ? [oui/non]
Est-ce que c’est le musée ou pas ? [oui/non]
89

Est-ce que tu as déjà vu cet endroit ? [oui/non]
Est-ce que c’est le musée ou pas ? [oui/non]
90

Est-ce que tu as déjà vu cet endroit ? [oui/non]
Est-ce que c’est le musée ou pas ? [oui/non]
91

4. Reconnaissance des lieux (intérieur) :
Est-ce que tu es déjà allé dans ce lieu ? [oui/non]
Est-ce que c’est le musée ou pas ? [oui/non]
92

Est-ce que tu es déjà allé dans ce lieu ? [oui/non]
Est-ce que c’est le musée ou pas ? [oui/non]
93

Est-ce que tu es déjà allé dans ce lieu ? [oui/non]
Est-ce que c’est le musée ou pas ? [oui/non]
94

Est-ce que tu es déjà allé dans ce lieu ? [oui/non]
Est-ce que c’est le musée ou pas ? [oui/non]
95

5. À ton avis, à quelle époque ont été réalisées les choses que tu as vues
dans le musée ? [question à choix multiples]
pendant l'Antiquité
(à l'époque des
gallo-romains)
au Moyen-Âge (à
l'époque des
châteaux-forts et
des chevaliers)
au 19eS et au début
du 20eS (à l'époque
de tes arrièresgrands-parents)
période
contemporaine
(aujourd'hui)
6. À quoi sert un musée, et plus particulièrement celui que tu viens de
visiter ? À chaque proposition, tu peux répondre par oui ou par non :
- à exposer des images [oui/non]
- à savoir à quoi elles servaient autrefois [oui/non]
- à garder des vieilles choses [oui/non]
- à découvrir comment les gens faisaient ces images autrefois [oui/non]
- à garder des objets rares [oui/non]
- à apprendre à dessiner et peindre des images [oui/non]
- à connaître plus de choses sur la vie d’autrefois [oui/non]
- à voir des choses que l’on ne voit pas tous les jours [oui/non]
- à vendre des images [oui/non]
96

7. D’après toi, dans quelles matières sont réalisées les images que tu as
vues dans le musée ? A chaque proposition, tu peux répondre par oui
ou par non :
- Sur du papier [oui/non]
97

- En canevas (broderie) [oui/non]
98

- Sur une toile [oui/non]
99

- Sur du verre [oui/non]
100

- Sur du bois [oui/non]
101

- Peintes sur du métal [oui/non]
102

- Sur du cuir [oui/non]
103

- Sculptées dans de la pierre
104

8. Reconnaissance des images populaires : Je vais te présenter une série
d’images. Pour chaque image, est-ce que tu peux me dire si oui ou non,
celle-ci étaient dans le musée ?
- À ton avis, est-ce que cette image était dans le musée ? [oui/non]
- Est-ce que tu as vu des images semblables dans le musée ? [oui/non]
105

- À ton avis, est-ce que cette image était dans le musée ? [oui/non]
- Est-ce que tu as vu des images semblables dans le musée ? [oui/non]
106

- À ton avis, Est-ce que cette image était dans le musée ? [oui/non]
- Est-ce que tu as vu des images semblables dans le musée ? [oui/non] [intrus]
107

- À ton avis, est-ce que cette image était dans le musée ? [oui/non]
- Est-ce que tu as vu des images semblables dans le musée ? [oui/non] [intrus]
108

- À ton avis, est-ce que cette image était dans le musée ? [oui/non]
- Est-ce que tu as vu des images semblables dans le musée ? [oui/non] [intrus]
109

- À ton avis, est-ce que cette image était dans le musée ? [oui/non]
- Est-ce que tu as vu des images semblables dans le musée ? [oui/non]
110

- À ton avis, est-ce que cette image était dans le musée ? [oui/non]
- Est-ce que tu as vu des images semblables dans le musée ? [oui/non]
111

- À ton avis, est-ce que cette image était dans le musée ? [oui/non]
- Est-ce que tu as vu des images semblables dans le musée ? [oui/non] [intrus]
112

- À ton avis, est-ce que cette image était dans le musée ? [oui/non]
- Est-ce que tu as vu des images semblables dans le musée ? [oui/non]
113

- À ton avis, est-ce que cette image était dans le musée ? [oui/non]
- Est-ce que tu as vu des images semblables dans le musée ? [oui/non] [intrus]
114

9. Reconnaissance des images observées lors du jeu : Je vais te
présenter une série d’images. Pour chaque image, est-ce que tu peux
me dire si oui ou non, celle-ci faisaient partie des indices du jeu ?
Est-ce que cette image est un élément du jeu ? [oui/non]
Si oui : À quoi tu le reconnais ? [question ouverte]
Que veux dire cette image ? [question ouverte]
Comment s’appelle cette image ? [Ex-voto]
115

Est-ce que cette image est un élément du jeu ? [oui/non]
Si oui : À quoi tu le reconnais ? [question ouverte]
Que veux dire cette image ? [question ouverte]
Comment s’appelle-t-elle ? [Souvenir funéraire]
116

Est-ce que cette image est un élément du jeu ? [oui/non]
Si oui : À quoi tu la reconnais ? [question ouverte]
Que veux dire cette image ? [intrus]
Comment s’appelle-t-elle ? [intrus]
117

Est-ce que cette image est un élément du jeu ? [oui/non]
Si oui : À quoi tu la reconnais ? [question ouverte]
Que veux dire cette image ? [oui/non]
Comment s’appelle-t-elle ? [Souvenir de mariage]
118

Est-ce que cette image est un élément du jeu ? [oui/non]
Si oui : À quoi tu la reconnais ? [question ouverte]
Que veux dire cette image ? [intrus]
Comment s’appelle-t-elle ? [intrus]
119

Est-ce que cette image est un élément du jeu ? [oui/non]
Si oui : À quoi tu la reconnais ? [question ouverte]
Que veux dire cette image ? [question ouverte]
Comment s’appelle-t-elle ? [souvenir funéraire]
120

Est-ce que cette image est un élément du jeu ? [oui/non]
Si oui : À quoi tu la reconnais ? [question ouverte]
Que veux dire cette image ? [question ouverte]
Comment s’appelle-t-elle ? [Souvenir militaire ou Souvenir de régiment]
121

Est-ce que cette image est un élément du jeu ? [oui/non]
Si oui : À quoi tu la reconnais ? [question ouverte]
Que veux dire cette image ? [question ouverte]
Comment s’appelle-t-elle ? [jeu de l’oie]
122

Est-ce que cette image est un élément du jeu ? [oui/non]
Si oui : À quoi tu la reconnais ? [question ouverte]
Que veux dire cette image ? [question ouverte]
Comment s’appelle-t-elle ? [Souvenir de baptême]
123

Est-ce que cette image est un élément du jeu ? [oui/non]
Si oui : À quoi tu la reconnais ? [question ouverte]
Que veux dire cette image ? [intrus]
Comment s’appelle-t-elle ? [intrus]
124

Est-ce que cette image est un élément du jeu ? [oui/non]
Si oui : À quoi tu la reconnais ? [question ouverte]
Que veux dire cette image cette image ? [intrus]
Comment s’appelle-t-elle ? [intrus]
125

Est-ce que cette image est un élément du jeu ? [oui/non]
Si oui : À quoi tu la reconnais ? [question ouverte]
Que veux dire cette image cette image ? [question ouverte]
Comment s’appelle-t-elle ? [Ex-voto]
126

10. Les âges de la vie (signification des images du jeu) : Est-ce que tu peux
retrouver à quel moment de la vie de l’Oncle Hans correspondait
chacune des images du jeu ? [questions à choix multiples]
Est-ce que tu peux retrouver à quelle période de la vie de l’Oncle Hans correspondait cette
image? [question à choix multiples]
naissance
• baptême
enfance
• jeux
adolescence
• confirmation
âge adulte
• service militaire
• mariage
• avoir des enfants
âge adulte
• accident (incendie)
mort
• funérailles
127

Est-ce que tu peux retrouver à quelle période de la vie de l’Oncle Hans correspondait cette
image ? [question à choix multiples]
naissance
• baptême
enfance
• jeux
adolescence
• confirmation
âge adulte
• service militaire
• mariage
• avoir des enfants
âge adulte
• accident (incendie)
mort
• funérailles
128

Est-ce que tu peux retrouver à quelle période de la vie de l’Oncle Hans correspondait cette
image ? [question à choix multiples]
naissance
• baptême
enfance
• jeux
adolescence
• confirmation
âge adulte
• service militaire
• mariage
• avoir des enfants
âge adulte
• accident (incendie)
mort
• funérailles
129

Est-ce que tu peux retrouver à quelle période de la vie de l’Oncle Hans correspondait cette
image ? [question à choix multiples]
naissance
• baptême
enfance
• jeux
adolescence
• confirmation
âge adulte
• service militaire
• mariage
• avoir des enfants
âge adulte
• accident (incendie)
mort
• funérailles
130

Est-ce que tu peux retrouver à quelle période de la vie de l’Oncle Hans correspondait cette
image ? [question à choix multiples]
naissance
• baptême
enfance
• jeux
adolescence
• confirmation
âge adulte
• service militaire
• mariage
• avoir des
enfants
âge adulte
• accident
(incendie)
mort
• funérailles
131

Est-ce que tu peux retrouver à quelle période de la vie de l’Oncle Hans correspondait cette
image ? [question à choix multiples]
naissance
• baptême
enfance
• jeux
adolescence
• confirmation
âge adulte
• service militaire
• mariage
• avoir des enfants
âge adulte
• accident (incendie)
mort
• funérailles
132

Est-ce que tu peux retrouver à quelle période de la vie de l’Oncle Hans correspondait cette
image ? [question à choix multiples]
naissance
• baptême
enfance
• jeux
adolescence
• confirmation
âge adulte
• service militaire
• mariage
• avoir des enfants
âge adulte
• accident (incendie)
mort
• funérailles
133

Est-ce que tu peux retrouver à quelle période de la vie de l’Oncle Hans correspondait cette
image ? [question à choix multiples]
naissance
• baptême
enfance
• jeux
adolescence
• confirmation
âge adulte
• service militaire
• mariage
• avoir des enfants
âge adulte
• accident (incendie)
mort
• funérailles
134

11. À ton avis, est-ce que l’Oncle Hans a réellement existé ? [oui/non]
135