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PIGISTES<br />
Pauvres pigistes !<br />
Salauds de patrons !<br />
Pauvres pigistes!<br />
Ils (ou elles) sont de plus<br />
en plus malmené(e)s par<br />
les employeurs. Parfois,<br />
aussi, par les rédactions.<br />
Ce sont les « sans papiers »<br />
de la profession. Ils (ou<br />
elles) sont souvent ceux<br />
(ou celles) qui font les<br />
journaux (écrits ou<br />
audiovisuels). À quand<br />
leur « régularisation » ?<br />
8<br />
Michel Diard<br />
Les patrons se conduisent trop<br />
souvent comme des voyous avec<br />
les pigistes. Ils sont souvent<br />
condamnés par la justice pour<br />
non-respect du code du travail et de la<br />
convention collective. Alors, ces<br />
patrons-voyous cherchent à échapper<br />
aux (lourdes) condamnations infligées<br />
par les juges.<br />
Les motifs des jugements portent sur<br />
les rémunérations en droits d’auteurs<br />
(voire en honoraires), sur l’absence de<br />
paiement de la prime d’ancienneté, sur<br />
le refus de licencier un pigiste dont ils<br />
ont stoppé la collaboration, etc. Les<br />
sentences sont toutes identiques, à peu<br />
de chose près.<br />
Par exemple, un reporter-photographe<br />
collaborant avec les Éditions Larivière<br />
était rémunéré en droits d’auteur et soumis<br />
aux cotisations de l’AGESSA (l’employeur<br />
faisant plus de 40 % d’économies<br />
sur les cotisations sociales). La cour<br />
de cassation a jugé que ce photographe<br />
« fournissait des photographies en rapport<br />
TÉMOINS<br />
N° 34 / JUILLET 2008<br />
avec des sujets d’actualité ; il tirait de cette<br />
activité le principal de ses ressources; il recevait<br />
des instructions pour la réalisation des<br />
clichés ; la subordination était démontrée et il<br />
pouvait prétendre au statut de journaliste».<br />
Une journaliste collaborant à<br />
Malesherbes Publications de façon régulière<br />
recevait une pige de 3000francs par<br />
semaine. La cour de cassation a jugé<br />
qu’elle «apportait à la publication une collaboration<br />
intellectuelle et permanente en vue<br />
de l’information des lecteurs ; elle devait se<br />
conformer à des instructions précises ; son travail<br />
était soumis à un contrôle de la part de<br />
son employeur. La cour d’appel en a nécessairement<br />
déduit que l’intéressée était liée à la<br />
société par un contrat de travail et qu’elle<br />
avait la qualité de journaliste professionnelle<br />
permanente et non celle de pigiste.»<br />
Évidemment, ces jugements reconnaissent<br />
aux journalistes pigistes le droit au<br />
treizième mois, aux congés payés, à être<br />
électeur et éligible, à la prime d’ancienneté,<br />
au maintien du salaire en cas de<br />
maladie ou de maternité, à la formation,<br />
etc.<br />
Pour ce qui concerne la prime d’ancienneté,<br />
les arrêts de la cour de cassation<br />
sont constants : «En l’absence de barème<br />
minimum, la prime d’ancienneté est calculée<br />
sur le salaire réel.»<br />
C’en est trop pour les patrons ! Ils ont<br />
proposé aux syndicats de journalistes<br />
engagés dans la négociation d’un accord<br />
sur la formation professionnelle des<br />
pigistes de se donner «la boîte à outils»<br />
pour éviter toutes les complications. Ils<br />
estiment en effet que s’ils sont aussi souvent<br />
condamnés, c’est en raison de la<br />
méconnaissance des règles de la profession<br />
par les juges et les conseillers prud’homaux.