la rencontre Karen Chataîgner Karen Chataîgner, humoriste alsacienne, s’est lancée dans le one woman show la saison dernière avec son spectacle Ça pique. Un spectacle où elle se dévoile en toute sincérité. ☛ Par Sandrine Bavard Si certains tâtonnent des années et des années avant de trouver leur voie, Karen Chataîgner avait-elle une intuition depuis toute petite : elle serait actrice. L’intuition s’est transformée en révélation en voyant Muriel Robin au Palais des Congrès quand elle avait 9 ans : « Ça, je veux le faire ! » La révélation est devenue concrétisation quand elle a assistée à un match d’improvisation aux alentours de ses 20 printemps : « Ça, je peux le faire ! » Pendant 15 ans, elle s’est ainsi <strong>fr</strong>ottée à cet exercice de scène particulier, qui nécessite créativité, spontanéité, réactivité, interactivité, à l’association Lolita, au Théâtre de l’Oignon puis dans sa propre compagnie Déclic d’impro à Strasbourg : « J’ai appris à lâcher prise et découvert qu’on peut très vite dépasser les barrières que l’on se pose », préciset-elle. À l’école de l’impro L’impro lui a fait un tel bien qu’elle a décidé d’en faire profiter les autres en montant sa propre entreprise avec son associé et manager Stéphane Burckel, IDC Training qui donne des stages de formations basées sur l’improvisation théâtrale pour mieux communiquer en entreprise. Mais Karen Chataîgner avait un défi plus fou encore : se lancer seule en scène. « En théâtre d’impro, le groupe nous emmène dans une direction, bonne pour le collectif, pas forcément pour l’individu. Je souhaitais maintenant aller là où j’avais envie, de me sentir libre de le faire jusqu’au bout. » Mais pour cette perfectionniste, il fallait faire les choses proprement. Elle améliore son jeu de scène en accumulant les stages de théâtre, elle rôde son spectacle en enchaînant les représentations : « J’avais besoin de trouver mon clown de scène. Je n’y arrivais pas, le public ne comprenait pas. Et puis j’ai eu un déclic : je me suis dit qu’il fallait que je traite d’un sujet dont les gens n’ont pas l’habitude de parler, et j’ai pensé à mon homosexualité. Au début du spectacle, je fais mon coming out très fort, donc les gens rient parce qu’ils sont surpris, j’en perds aussi certains à ce moment là. Mais, comme je me dévoile, les gens m’écoutent en général. Et à la fin, ils se rendent compte qu’ils en ont rien à faire de mon homosexualité, c’est complètement banalisé, c’est mon but. Je trouve que les humoristes ont une force particulière : ils peuvent changer les choses, combattre les préjugés. » Karen Chataîgner dans son one woman show Ca pique Une combattante Après son spectacle, Karen Chataîgner aime poursuivre la conversation avec son public. « Je me souviens d’une mère de famille qui est venue me voir après un spectacle qui me dit, comme un ami me l’aurait dit : retournez voir votre père ! Voilà, tout le monde peut donner son avis en toute sincérité. » Ce père, avec qui elle a coupé les ponts aujourd’hui, l’a poussée à faire du karaté à un niveau de compétition quand elle était enfant et tenait absolument à ce qu’elle gagne : « C’est le genre de personne qui pense avoir les réponses pour les autres. Mais j’ai acquis une chose grâce au karaté : je ne me laisse jamais abattre. » Vainqueur du grand tremplin de l’humour en 2011 aux Tanzmatten à Sélestat, programmée dans plusieurs salles d’Alsace et même à Bruxelles, l’humoriste concrétise le rêve d’une vie : « Avec la scène, c’est une histoire d’amour qui ne se finit jamais. D’ailleurs, quand j’arrive sur une scène, je touche le sol de ma main, ça vit, ça vibre, je ressens quelque chose de très fort ! » On dirait que son intuition d’enfant était la bonne… Son actu Dans son one woman show, Ça pique, Karen Chataîgner interprète une dizaine de sketches avec une énergie un peu folle. Un spectacle personnel où elle se dévoile : son homosexualité et les codes de séduction, son papa qui l’encourageait un peu trop fortement à devenir une championne de karaté… Mais aussi des postulats fantaisistes, sans doute hérité du théâtre d’impro où tout est permis, comme ce personnage qui a peur du… beurre ! Un spectacle qui évolue en permanence : « Je suis très dynamique, je donne tout sur scène, mais là j’essaye de trouver plus de douceur, plus de simplicité et de justesse », déclare-t-elle. Ça pique avait été présenté en avant-première au Rive Rhin à Village Neuf la saison dernière, et Karen Chataîgner reviendra le 11 septembre <strong>2012</strong> pour présenter la saison, une carte blanche qu’elle promet « pleine de surprises, d’humour et de sensualité. » Elle donnera plusieurs représentations de son spectacle à Strasbourg en septembre: à la galerie No Smoking (le 14 et 15), à La Salamandre (le 26). Elle reviendra dans le Haut-Rhin à Sausheim le 6 mars 2013 à l’Espace Dollfus et Noack. Des goûts et des couleurs En boucle sur votre Ipod? En rouge et noir de Jeanne Mas. Je suis fan des années 80. Votre livre de chevet ? Un merveilleux malheur de Boris Cyrulnik. Un spectacle à ne pas manquer ? Le one woman show d’Antonia de Rendinger. Une personnalité que vous admirez ? Coluche, qui a toujours cassé les codes, dépassé les limites imposées aux artistes, ce qui lui a permis de faire les Restos du cœur. Un endroit où vous sentez bien ? Mon salon. Votre bar ou resto préféré dans le coin ? Le restaurant La Corde à linge à Strasbourg. Le truc que vous appréciez chez les autres? L’autodérision. Le truc qui vous énerve chez les autres ? Le fait de juger. 18
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