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Aimants et boussoles - Palais de la découverte

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DÉCOUVERTE N°346 MARS 2007<br />

57<br />

terrestre sur <strong>la</strong> boussole germe dans l’esprit <strong>de</strong><br />

Gilbert vers 1580, à peu près à <strong>la</strong> même date<br />

que chez Robert Norman. Cependant, alors<br />

que ce <strong>de</strong>rnier s’appuie sur <strong>de</strong>s mesures d’inclinaisons,<br />

<strong>la</strong> motivation <strong>de</strong> Gilbert pour<br />

défendre c<strong>et</strong>te thèse est ailleurs : dans <strong>la</strong><br />

nouvelle philosophie <strong>de</strong> <strong>la</strong> nature qu’il est en<br />

train <strong>de</strong> m<strong>et</strong>tre sur pied. Copernicien dans<br />

l’âme, <strong>et</strong> l’un <strong>de</strong>s rares à défendre l’héliocentrisme,<br />

son raisonnement est à peu près le<br />

suivant : puisque Copernic a remp<strong>la</strong>cé le<br />

mouvement céleste par un mouvement<br />

terrestre (fig. 10), il serait raisonnable <strong>de</strong><br />

remp<strong>la</strong>cer l’action céleste (sur <strong>la</strong> boussole)<br />

par une action terrestre. Ainsi, entre ses<br />

mains, le globe aimanté <strong>de</strong> Pierre <strong>de</strong><br />

Maricourt n’imite pas <strong>la</strong> voûte céleste comme<br />

le croyait le Français, mais imite le globe<br />

terrestre dont il constitue un véritable modèle<br />

qu’il nomme, terrel<strong>la</strong> ou microgé. Aux yeux<br />

<strong>de</strong> Gilbert, dans ce contexte, il est c<strong>la</strong>ir qu’il<br />

faut considérer <strong>la</strong> Terre comme un gigantesque<br />

aimant. C<strong>et</strong>te thèse, véritable révolution<br />

copernicienne, est exposée pour <strong>la</strong><br />

première fois dans De Magn<strong>et</strong>e, soit en 1600.<br />

Personne avant Gilbert n’aurait osé prétendre<br />

que <strong>la</strong> Terre est un aimant, pas même Pierre <strong>de</strong><br />

Maricourt qui avait pourtant imaginé le globe<br />

aimanté. Il ne faudrait donc pas croire que le<br />

Français est passé tout près d’une <strong>découverte</strong><br />

qu’il a manquée <strong>de</strong> peu, sous le simple<br />

prétexte qu’il avait imaginé le globe aimanté<br />

ainsi qu’une métho<strong>de</strong> pour déterminer l’emp<strong>la</strong>cement<br />

<strong>de</strong> ses pôles. Malgré c<strong>et</strong>te proximité<br />

apparente, Pierre <strong>de</strong> Maricourt était à<br />

mille lieux d’imaginer que son globe pouvait<br />

être considéré comme une mini-Terre.<br />

Conceptuellement, il se situait en fait quasiment<br />

aux antipo<strong>de</strong>s <strong>de</strong> Gilbert. Ainsi, ce qui<br />

est presque évi<strong>de</strong>nt pour ce <strong>de</strong>rnier (<strong>et</strong> pour<br />

nous) était totalement impensable pour son<br />

prédécesseur. On saisit bien, ici, l’importance<br />

cruciale <strong>de</strong> l’état d’esprit, <strong>de</strong> <strong>la</strong> philosophie,<br />

dans l’é<strong>la</strong>boration d’une nouvelle idée (<strong>et</strong> <strong>de</strong><br />

son acceptation). On sait aujourd’hui que le<br />

champ magnétique terrestre n’est pas dû à une<br />

aimantation <strong>de</strong> <strong>la</strong> Terre, mais résulte <strong>de</strong><br />

mouvements <strong>de</strong> matière électriquement<br />

FIGURE 11<br />

L’inclinaison selon Gilbert<br />

Selon Gilbert une aiguille <strong>de</strong> boussole <strong>de</strong>vrait<br />

rester à l’horizontale à l‘équateur, verticale aux<br />

pôles, <strong>et</strong> prendre une inclinaison intermédiaire<br />

aux autres <strong>la</strong>titu<strong>de</strong>s. Henry Hudson (1565-1611)<br />

montre cependant que les prédictions <strong>de</strong> Gilbert<br />

ne sont pas vérifiées.<br />

© William Gilbert « De Magn<strong>et</strong>ic »/Dover<br />

Publications.<br />

chargée (courants électriques) dans les<br />

profon<strong>de</strong>urs <strong>de</strong> notre p<strong>la</strong>nète.<br />

L’inclinaison <strong>et</strong> <strong>la</strong> déclinaison<br />

dans l’œuvre <strong>de</strong> Gilbert<br />

Bien sûr, l’hypothèse <strong>de</strong> <strong>la</strong> terre aimantée<br />

<strong>de</strong>vait rendre compte <strong>de</strong>s <strong>de</strong>ux anomalies que<br />

manifestait <strong>la</strong> boussole, à savoir <strong>la</strong> déclinaison<br />

<strong>et</strong> l’inclinaison. Gilbert attribue <strong>la</strong> première <strong>de</strong><br />

ces anomalies aux irrégu<strong>la</strong>rités <strong>de</strong> <strong>la</strong> surface<br />

<strong>de</strong> <strong>la</strong> Terre. Il croit avoir observé une déclinaison<br />

sur une terrel<strong>la</strong> dont il a déprimé <strong>la</strong><br />

surface localement pour représenter l’océan<br />

At<strong>la</strong>ntique. Pour ce qui concerne l’inclinaison,<br />

l’explication était plus simple.<br />

L’aimantation <strong>de</strong> <strong>la</strong> Terre, supposée s’affirmer<br />

le long <strong>de</strong> son axe <strong>de</strong> rotation, impliquait qu’à<br />

l’équateur l’inclinaison <strong>de</strong>vait être nulle<br />

(aiguille horizontale) <strong>et</strong> qu’aux pôles géographiques<br />

elle <strong>de</strong>vait être <strong>de</strong> 90° ; autrement dit,<br />

en Arctique <strong>et</strong> en Antarctique, l’aiguille d’une<br />

boussole <strong>de</strong>vait se tenir à <strong>la</strong> verticale (fig. 11).

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