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54 Dossier : L'Europe sera laïque ou...
Populismes :
que fait l’Europe ?
Depuis les années 80, les accidents démocratiques
se multiplient en Europe, avec la percée de partis et
mouvements dits « populistes », identifiés comme tels par
leur opposition au « système », leurs relents xénophobes et
leur appel au peuple. Face à cette tendance qui menace les
valeurs mêmes du projet d’intégration communautaire, les
institutions européennes restent curieusement silencieuses.
À l’Ouest comme à l’Est de l’Europe,
les populismes (essentiellement de
droite) se sont progressivement imposés
au sein des paysages politiques
nationaux. Parti des Vrais Finlandais,
Parti populaire danois, Vlaams Belang
flamand, PVV néerlandais, Front
national français, Parti autrichien de
la Liberté, Jobbik hongrois, Ataka
bulgare, UKIP britannique, Aube
dorée grecque : tous comptabilisent
aujourd’hui des scores électoraux entre
10 et 25%. L’Italie n’est pas épargnée
avec le retour en 2013 de la démagogie
fiscale berlusconienne et l’explosion
électorale et médiatique du Mouvement
5 étoiles de Beppe Grillo.
Menace civilisationnelle
Par Julie Pernet
Centre d’Action Laïque
La liste des populismes en Europe est
longue et leurs développements ne
sont pas en tous points comparables.
Ces mouvements sont nés dans des
contextes nationaux différents et ont
embrassé des idéologies et stratégies
politiques diverses. Nés avant le 11 septembre
2001 ou enfants de la crise des
subprimes, ils ont cependant en commun
d’avoir bénéficié du discrédit des
formations politiques traditionnelles,
de la crise économique et des politiques
d’austérité. Nichés au cœur des démocraties
qu’ils dénoncent, ils attaquent
aujourd’hui le projet européen en profondeur
: en glorifiant les frontières
nationales, seules à même d’empêcher
la « menace civilisationnelle » que
représenterait l’immigration. Le tout
en distillant insidieusement la xénophobie,
le racisme et pour certains l’homophobie,
dans les consciences populaires.
En proposant des raisonnements
binaires et des solutions démagogiques
à des peuples appauvris et fatigués des
promesses non tenues. En privilégiant
l’émotion à la raison, la colère à l’esprit
critique.
Autre élément d’inquiétude dans le paysage
européen, celui de la contagion de
la rhétorique populiste aux partis politiques
« traditionnels ». Par opportunisme
électoral ou alliance stratégique,
Par opportunisme
électoral certains partis
modérés ont banalisé
les thèses simplistes
et radicales des partis
d’extrême droite.
certains partis modérés ont en effet
banalisé les thèses simplistes et radicales
des partis d’extrême droite. En
France, on se souvient des dérives ultradroitières
du président puis candidat
Sarkozy dont le débat politique français
porte encore les marques. « Identité
nationale », « danger » de l’immigration,
stigmatisation des assistés sociaux, instrumentalisation
de la laïcité, remise en
cause de Schengen : autant de thèmes
du FN repris par l’UMP pour élargir sa
base électorale.
Qui s’oppose ?
Les Pays-Bas, autrefois modèle d’ouverture
et d’europhilie, se sont également
progressivement refermés sous
l’influence du médiatique et populaire
Geert Wilders (PVV), soutien du gouvernement
minoritaire du libéral Mark
Rutte d’octobre 2010 à avril 2012.
Influence qui s’est notamment vérifiée
par un durcissement de la politique
d’immigration et d’intégration néerlandaise
et par un raidissement des
partis libéraux et travaillistes vis-à-vis
de l’UE pendant la campagne législative
de septembre 2012.
En Hongrie, le parti du Premier
ministre Viktor Orbán marche depuis
plusieurs années dans les pas du Jobbik
1 : citons pêle-mêle le culte national
rendu à Miklós Horthy, régent autoritaire
de l’entre-deux-guerres puis allié
1 Parti hongrois
nationaliste
radical.