Louise Desjardins
Lettres boréales, revue littéraire des finissants en Arts et Lettres du Cégep de l'Abitibi-Témiscamingue. Revue littéraire portant sur cinq romans de Louise Desjardins.
Lettres boréales, revue littéraire des finissants en Arts et Lettres
du Cégep de l'Abitibi-Témiscamingue.
Revue littéraire portant sur cinq romans de Louise Desjardins.
Create successful ePaper yourself
Turn your PDF publications into a flip-book with our unique Google optimized e-Paper software.
De retour à Montréal, elle fait entendre ses compositions à Carlo qui lui propose de les interpréter en spectacle<br />
à sa place. Elle refuse catégoriquement et convainc les Blues Kids, groupe de Montréal, de l’intégrer<br />
dans leur band. Finalement, elle monte sur scène pour chanter : « Toute la vie se tient devant moi / Je ne suis<br />
plus derrière toi / Je ne suis plus la dernière / Vois-tu je serai la première » (<strong>Desjardins</strong>, 1998, p. 233). Carlo<br />
est dans la foule et la regarde. Ces paroles qu’elle a écrites semblent lui être destinées. En résumé, Pauline<br />
atteste, dans cette chanson, qu’elle est maintenant forte et indépendante et qu’elle envisage l’avenir avec<br />
optimisme. La musique sauve Pauline, dans tous les sens du terme, d’une mort, ou d’une existence, triste<br />
et lente. Dans le même ordre d’idées, dans So long, le père de Katie, la narratrice, vit entièrement avec la<br />
musique. James subvient aux besoins de sa famille grâce aux revenus du McLeod Music Store, dont il est<br />
propriétaire. De plus, il est lui-même musicien et joue du violon dans un orchestre au Look-Out Country<br />
Club. Le couple qu’il forme avec Gracia est d’ailleurs maintenu vivant, en quelque sorte, par les cordes de<br />
son violon. Même si ces dernières ne sont plus effleurées par l’archet du désir, les cœurs vibrent à l’unisson<br />
dès l’instant où il prend son instrument : « Il jouait du violon comme il respirait, raconte Katie, et, à cause<br />
de ce talent fou qu’il avait de nous extraire du monde dès que son archet glissait sur une corde, [ma mère]<br />
l’aimait sans doute à sa façon. » (<strong>Desjardins</strong>, 2005, p. 13). Pour Katie, la musique est associée à l’un des<br />
seuls souvenirs heureux qu’elle garde de son enfance : celui d’une soirée au cours de laquelle les membres<br />
de sa famille sont tous réunis pour interpréter Greensleeves sur la scène du Look-Out. James fait frémir son<br />
violon, ses fils l’accompagnent à la guitare et au piano, alors qu’elle chante avec sa mère. Ce moment lui<br />
revient plusieurs fois en mémoire une fois adulte, comme le fantôme du bonheur qui la hante après la mort<br />
de ses parents.<br />
Bref, la musique donne une raison d’exister aux personnages tout en les rendant plus réels, plus proches du<br />
lecteur. Nous avons vu que non seulement la musique sert à refléter et à exprimer ce que les personnages<br />
de <strong>Louise</strong> <strong>Desjardins</strong> ressentent, mais aussi qu’elle les aide à vivre, au sens propre et au sens figuré. Les<br />
personnages prennent goût à ce que le monde a à leur offrir au son de la musique, et celle-ci leur permet<br />
de gagner leur vie. Le métier de Pauline est celui de chanteuse, et la famille McLeod survit grâce aux<br />
revenus qu’elle rapporte. La musique est le reflet de l’âme. On peut comprendre que <strong>Louise</strong> <strong>Desjardins</strong> a<br />
elle aussi l’habitude d’être immergée dans la musique. Son écriture témoigne de cette passion pour l’art<br />
et, comme elle, d’autres auteurs ont la chance de mettre leur bagage musical au service de leurs oeuvres.<br />
C’est le cas notamment du romancier allemand Thomas Bernhard. Dans Le Naufragé, le narrateur et ses<br />
deux compagnons se consacrent à leur carrière musicale en Allemagne. La musique peut donc faire vivre<br />
un personnage autant qu’elle peut nourrir l’imaginaire d’un écrivain.<br />
Bibliographie<br />
<strong>Desjardins</strong>, <strong>Louise</strong> (2005), So long, Montréal, Boréal, 160 p.<br />
<strong>Desjardins</strong>, <strong>Louise</strong> (2000), La love, Montréal, Bibliothèque québécoise, 155 p.<br />
<strong>Desjardins</strong>, <strong>Louise</strong> (1998), Darling, Montréal, Leméac, 233 p.<br />
34