équivalent énergétique, ces cor<strong>de</strong>s se trouveraient à une énergie <strong>de</strong> 10 19 GeV, 4 à comparer aux 10 6 GeVaccessibles avec les meilleurs accélérateurs <strong>de</strong> particules… Cette limite observationnelle, qui est aussi pourle moment une limite théorique marquant la frontière <strong>de</strong> notre connaissance <strong>de</strong> la nature, est appelée “Mur <strong>de</strong>Planck”, en hommage à Planck qui le premier construisit <strong>de</strong>s longueurs, temps, masse et énergie typiques àpartir <strong>de</strong>s constantes fondamentales.iii. Indéterminés en physique <strong>de</strong>s particules et en cosmologieNous venons <strong>de</strong> le voir, l’enjeu <strong>de</strong> la physique théorique mo<strong>de</strong>rne est l’unification. Il faut bien comprendreque l’approche est réductionniste : on considère que le substrat fondamental que la physique théorique secharge <strong>de</strong> découvrir (pour donner l’exemple <strong>de</strong> la théorie <strong>de</strong>s cor<strong>de</strong>s, théorie réductionniste par excellence,ce sont <strong>de</strong>s cor<strong>de</strong>s infiniment petites associées à une certaine structure géométrique) permet d’expliquer <strong>de</strong>façon déductive l’ensemble <strong>de</strong>s phénomènes physiques (comme <strong>de</strong>s ‘axiomes’ <strong>de</strong> la physique en quelquesorte) 5 . Pour expliquer la “brisure <strong>de</strong> symétrie” qui mène d’un champ unifié à une dissociation <strong>de</strong>s forcesfondamentales, les physiciens doivent introduire <strong>de</strong>s “paramètres libres” dans le modèle standard décrivant laphysique <strong>de</strong>s particules : ce sont les indéterminés. Parmi eux se rangent les masses <strong>de</strong>s particulesélémentaires, les constantes <strong>de</strong> couplage <strong>de</strong>s interactions etc. La physique <strong>de</strong>s particules possè<strong>de</strong> plus <strong>de</strong>vingt indéterminés, et la cosmologie une quinzaine (nous en avons donné <strong>de</strong>s exemples précé<strong>de</strong>mment avecles <strong>de</strong>nsités d’énergie <strong>de</strong> matière et <strong>de</strong> rayonnement ou la constante cosmologique). Ce sont <strong>de</strong>s gran<strong>de</strong>ursqui ne sont pas déjà déterminées dans le modèle dont elles font parties, mais qui sont ajustées <strong>de</strong> façon à ceque le modèle soit en adéquation avec les mesures. <strong>Le</strong>e Smolin, physicien théorique contemporain connupour s’être dressé à <strong>de</strong> multiples reprises contre la théorie <strong>de</strong>s cor<strong>de</strong>s, évoque <strong>de</strong>ux aspects troublants <strong>de</strong> ladémarche consistant à chercher l’origine <strong>de</strong> la valeur <strong>de</strong> ces paramètres. 6 <strong>Le</strong> premier est celui <strong>de</strong> lanaturalité : exprimés sous la forme <strong>de</strong> rapports dans dimension, les paramètres se voient affligés <strong>de</strong> valeurss’écartant <strong>de</strong> beaucoup <strong>de</strong> l’unité. <strong>Le</strong> second est celui <strong>de</strong> la complexité : notre univers est structuré etorganisé, <strong>de</strong>puis la cellule jusqu’à l’amas <strong>de</strong> galaxies. Mais cet agencement extraordinaire dépend pourbeaucoup <strong>de</strong>s valeurs <strong>de</strong> certaines constantes fondamentales : un neutron d’une masse supérieure <strong>de</strong> 1% àcelle qu’il possè<strong>de</strong> actuellement rendrait les noyaux instables, l’univers gazeux et non structuré. Ces <strong>de</strong>uxaspects sont à la base, nous le verrons, <strong>de</strong> l’idée du <strong>Principe</strong> <strong>Anthropique</strong>.La notion d'indéterminé prend même une nouvelle dimension avec la théorie <strong>de</strong>s cor<strong>de</strong>s. Historiquement, lanotion d’unification était liée à la réduction du nombre <strong>de</strong> paramètres (ce fut le cas lorsque Maxwell liaélectricité et magnétisme dans la théorie <strong>de</strong> la lumière, par exemple). Aujourd'hui, les théories cherchant à4<strong>Le</strong> GeV est une unité <strong>de</strong> mesure typique <strong>de</strong> la physique <strong>de</strong>s particules, il signifie GigaElectronVolt.5Dans son mémoire Quelques éléments <strong>de</strong> physique et <strong>de</strong> philosophie <strong>de</strong>s multivers, le physicien théorique AurélienBarrau précise (p 59) que l’idée d’unification est liée au “présupposé philosophique que la découverte <strong>de</strong> la théorieultime s’accompagne nécessairement d’un élan réductionniste”. Cependant, “les avancées contemporaines necorroborent plus cette évolution. La tendance s’inverse » (il fait ici référence à la notion d’émergence dont nousparlerons en section III).6<strong>Le</strong>e Smolin, “Scientific alternative to the anthropic principle”, arxiv hep-th/0407213, 200416
unifier les interactions fondamentales, comme la théorie <strong>de</strong>s cor<strong>de</strong>s, ont <strong>de</strong>s indéterminés irréductibles dansleurs équations. Une nouvelle symétrie, la “supersymétrie” a été introduite pour palier à ces indéterminés,mais elle ne fait que les renforcer en incluant <strong>de</strong> nouveaux paramètres libres. Dans <strong>de</strong>s approches plusrécentes <strong>de</strong> Ashok et Douglas 7 , le nombre <strong>de</strong> théories distinctes compatibles avec l’existence d’un univers àquatre dimensions présentant une énergie du vi<strong>de</strong> légèrement positive (comme l’observation semble leconfirmer) est 10 500 ! C’est ce que l’on nomme le “paysage”, ou landscape <strong>de</strong> la théorie <strong>de</strong>s cor<strong>de</strong>s. <strong>Le</strong>sthéories <strong>de</strong> ce landscape voient varier leur physique <strong>de</strong>s particules, leurs paramètres fondamentaux etc.. Cenombre est pour <strong>Le</strong>e Smolin un argument en défaveur <strong>de</strong> la falsifiabilité <strong>de</strong> la théorie <strong>de</strong>s cor<strong>de</strong>s, car quellesque soient les futures découvertes, elles pourront être expliquées par la théorie <strong>de</strong>s cor<strong>de</strong>s… Selon AurélienBarrau, “il est bien clair que cette structure en paysage renforce considérablement le raisonnementanthropiste. Il lui confère même une dimension prédictive (en termes probabilistes)” 8 . Nous irons plus loindans ces considérations en section II.Nous voilà maintenant bien armés pour comprendre la problématique du fine-tuning. Nous avons vucomment l’apparition <strong>de</strong> constantes fondamentales et <strong>de</strong> paramètres libres dans les théories pouvait mener à<strong>de</strong>s interrogations sur la possibilité qu’elles ait pu être autres. Examinons maintenant <strong>de</strong> plus près cettequestion.b. <strong>Le</strong> fine-tuningLa vision d’un Univers finement ajusté (on parle <strong>de</strong> fine-tuned Universe) provient <strong>de</strong> l’idée selon laquelle lesconditions permettant à la vie d’exister au sein <strong>de</strong> l’Univers ne sont réunies que pour un ensemble restreint<strong>de</strong>s valeurs <strong>de</strong>s divers paramètres cosmologiques et constantes physiques universelles 9 , si restreint en fait quesi l’une <strong>de</strong> ces valeurs était même très légèrement différente, l’univers ne pourrait mener au développement<strong>de</strong> structures astrophysiques, à la diversité <strong>de</strong>s particules élémentaires, et in fine à la vie telle que nous laconnaissons. <strong>Le</strong> fine-tuning provoque l’étonnement <strong>de</strong>vant ces remarquables coïnci<strong>de</strong>nces qui ren<strong>de</strong>nt notresituation improbable <strong>de</strong>vant l’ensemble <strong>de</strong>s possibles que l’on peut obtenir par la variation <strong>de</strong>s paramètresfondamentaux <strong>de</strong> notre Univers. Nous allons voir quelles coïnci<strong>de</strong>nces sont le plus souvent mises en avant, etcomment elles mènent rapi<strong>de</strong>ment à l’introduction <strong>de</strong> nécessité et <strong>de</strong> finalité dans l’interprétation qu’on leurdonne.i. Des coïnci<strong>de</strong>nces remarquables...Dans son article “<strong>Principe</strong> <strong>Anthropique</strong>” du Dictionnaire d’histoire et philosophie <strong>de</strong>s sciences, Dominique<strong>Le</strong>court évoque la façon dont les physiciens <strong>de</strong>s particules ont pu s’étonner <strong>de</strong>vant la série <strong>de</strong> coïnci<strong>de</strong>nces7S.K. Ashok & M. Douglas, JHEP, 0401 p 60, 20048Aurélien Barrau, op.cit, pp. 70-71.9Pour un exposé complet sur l’origine et la signification <strong>de</strong>s constantes fondamentales, on pourra se référer à Cohen-Tannoudji, G., <strong>Le</strong>s constantes universelles, Hachette, Paris, 1998. La thèse <strong>de</strong> l’auteur est notamment que les constantesfondamentales exhibent un “horizon” <strong>de</strong> connaissance qui contraint fondamentalement l’exploration du physicien.17
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ConclusionNous voici arrivés au te
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Nous avons pour cela tenté de rend
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