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Le Principe Anthropique - Laboratoire de Physique Statistique

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a. Mon<strong>de</strong>s multiples en Grèce AntiqueLa pensée <strong>de</strong>s mon<strong>de</strong>s multiples remonte sans doute au philosophe grec Anaximandre (c’en est du moins lepenseur le plus lointain dont nous ayons une trace). C’est à travers le commentateur Simplicius que nous enconnaissons la substance : “Anaximandre […] a dit que l’illimité est le principe et l’élément <strong>de</strong>s choses quisont. […] Ce dont la génération procè<strong>de</strong> pour les choses qui sont est aussi ce vers quoi elles retournent sousl’effet <strong>de</strong> la corruption, selon la nécessité; car elles se ren<strong>de</strong>nt mutuellement justice et réparent leursinjustices selon l’ordre du temps” 71 . La pluralité <strong>de</strong>s mon<strong>de</strong>s est donc, chez Anaximandre, la perpétuellenaissance <strong>de</strong> mon<strong>de</strong>s venant rendre justice à la mort d’autres mon<strong>de</strong>s. Ce mouvement est éternel car seul lemouvement permet <strong>de</strong> penser la génération et la corruption, et il se réalise dans l’apeiron (απειρον), que l’onpeut traduire par “illimité”, ou “indéfini”, fournissant ainsi une détermination (ou plutôt une indétermination)<strong>de</strong> la trame du “multivers”. La philosophie d’Anaximandre est donc fondée sur un principe (αρχή)déterminant l’ordre du Mon<strong>de</strong>. Ce principe est dégagé <strong>de</strong> ce qui constitue notre mon<strong>de</strong> matériel : temps,espace, qualités. Il est immortel et unique, contrairement aux mon<strong>de</strong>s engendrés selon lui. Bien qu’ici liée àun sens moral <strong>de</strong> justice, la notion <strong>de</strong>s mon<strong>de</strong>s multiples d’Anaximandre se trouvera avoir <strong>de</strong>s analogiesnombreuses avec le fond <strong>de</strong> la pensée mo<strong>de</strong>rne <strong>de</strong>s multivers (notamment dans l’indétermination quantiquedu champ d’inflaton initial).<strong>Le</strong>s atomistes, tels Démocrite et Lucrèce, vont quant à eux remettre au pur hasard ce qu’Anaximandreremettait à la justice. Ils pensent qu’il y a une limitation à la division <strong>de</strong> la matière : ce sont les atomes (dugrec atomos, littéralement “que l’on ne peut couper”). Ces atomes, en nombre infini, ont <strong>de</strong>s formes variées,qui sont quant à elles d’un nombre indéfini (au sens <strong>de</strong> l’apeiron). Ils chutent selon la verticale, et sontaffligés <strong>de</strong> manière aléatoire <strong>de</strong> légères déviations, ce que traduit la notion <strong>de</strong> clinamen. Fondé sur unenécessité première, celle <strong>de</strong> la chute verticale <strong>de</strong>s atomes, l’atomisme délègue donc au hasard lacomplexification du mon<strong>de</strong> : <strong>de</strong> l’aléatoire introduit par le clinamen peuvent naître <strong>de</strong>s mon<strong>de</strong>s organisés,dans l’infinité <strong>de</strong>s agencements possibles que permet l’infinité <strong>de</strong>s atomes. De cette façon, tout évènementimprobable, par exemple l’apparition <strong>de</strong> l’homme, se produira quelque part dans l’Univers et cet évènementpourra se produire une infinité <strong>de</strong> fois.b. Mon<strong>de</strong>s multiples du Moyen-âge à l’âge classiquePour le théologien Thomas d’Aquin (1225-74), les atomistes grecs ont tort lorsqu’ils refusent l’unicité dumon<strong>de</strong>, car ils ne pensent pas en termes finaux : “c’est pourquoi ceux-là seuls ont pu admettre une pluralité<strong>de</strong>s mon<strong>de</strong>s, qui n’assignaient pas pour cause à ce mon<strong>de</strong>-ci une sagesse ordonnatrice, mais le hasard. AinsiDémocrite disait que la rencontre <strong>de</strong>s atomes produit non seulement ce mon<strong>de</strong>, mais une infinité d’autres »,et “la raison pour laquelle le mon<strong>de</strong> est unique, c’est que toutes choses doivent être ordonnées à un but71Simplicius, Commentaire sur la physique d’Aristote (1121, 5-9), cité dans <strong>Le</strong>s Présocratiques, coll. “Philosophies”,éd. France Loisirs, 2000, p 30. <strong>Le</strong>s passages en italiques sont <strong>de</strong>s citations orginales d’Anaximandre.40

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