observations astrophysiques récentes ont par ailleurs confirmé les prédictions originellement établies dans lesannées 1980, mais il reste <strong>de</strong>s progrès techniques à effectuer pour que nous puissions son<strong>de</strong>r directementl’échelle d’énergie à laquelle l’inflation a eu lieu. Et surtout, il reste à construire une véritable théorie quiren<strong>de</strong> compte <strong>de</strong> cet évènement postulé ici pour “sauver les phénomènes” (pour reprendre l’expression chèreà Duhem). L’inflation possè<strong>de</strong> <strong>de</strong>s critères <strong>de</strong> réfutabilité : une topologie non triviale <strong>de</strong> l’univers, ou uneanisotropie à gran<strong>de</strong> échelle, ainsi qu’une déviation par rapport à l’invariance d’échelle observée dans larépartition <strong>de</strong>s fluctuations seraient <strong>de</strong>s indices permettant <strong>de</strong> la réfuter. Néanmoins ce cadre <strong>de</strong> travailscientifique n’a pas <strong>de</strong> théorie microphysique sous-jacente pour en rendre compte complètement. C’est doncaujourd’hui plus une notion ad hoc qui permet d’expliquer <strong>de</strong> manière simple certains phénomènesrencontrés en cosmologie. <strong>Le</strong>s physiciens théoriques mo<strong>de</strong>rnes ont l’espoir <strong>de</strong> trouver la clé dans unemeilleure compréhension <strong>de</strong> la physique <strong>de</strong>s hautes énergies (puisque, dans le paradigme du Big Bang, ledébut <strong>de</strong> l’univers se caractérise par <strong>de</strong>s températures incroyablement hautes, donc <strong>de</strong>s énergies trèsimportantes), notamment la physique liant l’infiniment petit <strong>de</strong>s particules décrit par la mécanique quantiqueà l’infiniment grand <strong>de</strong> la relativité générale, infinis qui se joignent à la singularité initiale, physique que l’onnomme “ gravité quantique” (quantum gravity). Nous l’avons déjà mentionné, une <strong>de</strong>s théories en voguepour cette <strong>de</strong>scription ultime est la fameuse “théorie <strong>de</strong>s cor<strong>de</strong>s”.- Théorie <strong>de</strong>s cor<strong>de</strong>sLa théorie <strong>de</strong>s cor<strong>de</strong>s pose comme éléments matériels fondamentaux <strong>de</strong>s cor<strong>de</strong>s infinitésimales, caractériséespar leur longueur et leur tension, et dont les mo<strong>de</strong>s <strong>de</strong> vibrations produisent les différentes particules, ainsique leurs caractéristiques (masse, spin, charge, etc.). Ces cor<strong>de</strong>s se déplacent dans un espace à 11dimensions, ce qui est nécessaire à générer les mathématiques les décrivant <strong>de</strong> façon cohérente afin que leurexistence s’accor<strong>de</strong> avec les théories actuelles. Il doit donc exister <strong>de</strong>s dimensions “cachées”, par exempleenroulées sur elles-mêmes à <strong>de</strong>s échelles inaccessibles pour nos moyens d’observation. Dans cet espacesurdimensionné gigantesque, il est possible d’opérer différentes “coupes” pour y générer un espace à 4dimensions (3 spatiales et une temporelle) comme le nôtre. Il y a ainsi <strong>de</strong> nombreux univers possibles, quisont causalement disjoints du nôtre, et qui ont leur propres constantes fondamentales : on parle <strong>de</strong> Landscape(auquel sont donc associés différents types <strong>de</strong> “vi<strong>de</strong>s” ou vacua). Comme nous l’avons déjà vu en section I,le nombre <strong>de</strong> coupes compatibles avec la présence d’observateurs (sous-entendu humains) est souvent cité 93comme égal à 10 500 , et on parle dans ce cas <strong>de</strong> landscape anthropique. On comprend donc que, pour lestenants <strong>de</strong> la théorie <strong>de</strong>s cor<strong>de</strong>s, le <strong>Principe</strong> <strong>Anthropique</strong> se voit être immédiatement résolu par cet apportgigantesque <strong>de</strong> possibles qu’offre le Landscape.93Douglas, M., "The statistics of string / M theory vacua", JHEP 0305, 46 (2003)48
. Niveau I : variation <strong>de</strong>s paramètres cosmologiques (régions hors <strong>de</strong> notrehorizon)Voici notre premier type <strong>de</strong> multivers, peut-être le plus simple et le plus proche <strong>de</strong> ce qui a déjà pu êtreintroduit chez les atomistes grecs. L’espace est ici infini, et la matière y est distribuée <strong>de</strong> façon homogène àgran<strong>de</strong> échelle. Tous les évènements possibles, en accord avec les lois <strong>de</strong> la nature, doivent donc avoir lieuquelque part. En particulier, il y a une infinité d’autres planètes habitées, hébergeant une infinité <strong>de</strong> copies àl’i<strong>de</strong>ntique <strong>de</strong> chacun d’entre nous. Des calculs d’ordre <strong>de</strong> gran<strong>de</strong>urs établissent ainsi que nous avons unecopie à l’i<strong>de</strong>ntique <strong>de</strong> nous à m, et une copie <strong>de</strong> notre univers à m. Ce sont <strong>de</strong>s nombresgigantesques, mais finis.Ce premier type <strong>de</strong> multivers évacue donc la finalité par l’introduction d’un infini cosmologique. Cette idéeremonte notamment à Lucrèce, qui ne pouvait concevoir qu’une lance jetée hors d’un univers fini ne soitplus pensable comme étant dans un lieu (ce que pensait Aristote, partisan d’un Univers clos) : pour lui, cettesituation était semblable à celle d’un navire échappant à l’horizon mais ne perdant pas pour autant <strong>de</strong> réalitéontologique ni <strong>de</strong> localisation spatiale. Il semble, en tout cas pour ce qui est <strong>de</strong> l’intuition, qu’un universinfini est plus facile à penser qu’un univers fini par-<strong>de</strong>là duquel aucun lieu n’existerait. Notons néanmoinsque l’introduction <strong>de</strong>s géométries non euclidiennes a pu modifier cette notion : il est notamment possibled’avoir un Univers fini mais illimité, exactement <strong>de</strong> la même manière que la surface <strong>de</strong> notre Terre est finiemais peut se parcourir <strong>de</strong> manière illimitée.Pour ce qui est <strong>de</strong>s données observationnelles, la courbure <strong>de</strong> l’Univers nous apparaît quasi-nulle, favorisantun espace euclidien infini, et la répartition <strong>de</strong> matière est homogène à gran<strong>de</strong> échelle, ce que <strong>de</strong>s argumentscoperniciens peuvent pousser à étendre à l’espace entier.La vision est alors proche <strong>de</strong> celle <strong>de</strong> David <strong>Le</strong>wis, mais ici les différents univers sont juste spatialementséparés du nôtre. <strong>Le</strong>s lois <strong>de</strong> la physique sont imposées, et les conditions initiales sont vues comme <strong>de</strong>scontingences : elles sont établies par le principe d’incertitu<strong>de</strong> d’Heisenberg, qui génère les fluctuationsquantiques primordiales que l’inflation portera au niveau macroscopique.Ainsi, ce qui peut arriver, et qui est conforme aux lois <strong>de</strong> la physique que nous découvrons, arrivera quelquepart dans ce multivers. Pour Barrow et Tipler, il y a là une forme <strong>de</strong> “sélection naturelle étendue” (exten<strong>de</strong>dform of natural selection). Cette expression semble un peu forte, car il n’y a ici aucune notion <strong>de</strong> mortd’univers, et donc <strong>de</strong> “sélection”, il y a juste une auto-sélection <strong>de</strong>s univers observés (cognizable) assurée parla présence d’observateurs (ce qu’on appelle sélection anthropique). Nous préférons gar<strong>de</strong>r l’expression <strong>de</strong>Robert Nozick, “<strong>Principe</strong> <strong>de</strong> fécondité”, pour cette idée que “tous” les possibles se réalisent. Et là encore,nous prenons <strong>de</strong>s précautions quant à la soi-disante infinité <strong>de</strong> ces possibles : ils restent contraints par <strong>de</strong> trèsrestrictives lois physiques, imposées à nous mais pas expliquées par elles-mêmes, comme les axiomesmathématiques s’imposent aux théories qui en découlent sans explication aucune. Cet infini pourrait en faitêtre aussi grand que l’infini d’un plan dans un volume infini, c’est-à-dire n’être qu’un “petit” infini. Nousreviendrons sur ces considérations en section III.49
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niveaux, des particules subatomique
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éductionnistes peuvent le laisser
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ConclusionNous voici arrivés au te
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Nous avons pour cela tenté de rend
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l’homme. Certains voudraient voir
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