Spécial internationalLa compétitivité<strong>des</strong> entreprisesalleman<strong>des</strong> estsoutenue par <strong>des</strong>mécanismes qui sontinhérents au modèlesocio-économiqueallemand et qui sontancrés dansl’histoire du pays.Des investissements en rechercheet développement, ce qui renforcela compétitivité…Une visite du «Deutsches Museum» à Munichmontre clairement comment ce «musée»consacré à la technologie allemande décrit enfait l'évolution de l'économie allemande. Ony admire le premier moteur de Carl Benz quiallait plus tard donner naissance à l'entrepriseMerce<strong>des</strong>-Benz. Le nombre de brevets peutservir comme baromètre de l'innovation. En2011, les entreprises belges ont déposé, auprèsde l'Office européen <strong>des</strong> brevets, 2 brevets parmilliard d'euros de produit intérieur brut belge.Avec cinq brevets par milliard d'euros de produitintérieur brut, l'Allemagne faisait deux foismieux. Ce n’est pas le fruit du hasard: les grandsgroupes industriels allemands collaborent pourleurs projets de recherche et de développement.L’entreprise BMW développe, par exemple, unmoteur hybride à hydrogène en collaborationavec Linde, le géant du gaz industriel qui a aussison quartier général à Munich. Et puis, le pouvoirpolitique stimule certaines orientations de larecherche. Le gouvernement fédéral allemanda par exemple libéré 3,5 milliards d’euros <strong>des</strong>ubsi<strong>des</strong> pour la sixième tranche de projetsde recherche dans le domaine de l’énergie. Legouvernement a multiplié les efforts de recherchedans le domaine énergétique après avoir décidéla sortie nucléaire de l’Allemagne à l’horizon2022. La sixième tranche de projets de recherchedans le domaine de l’énergie est ouverte àtoute entreprise qui produit en Allemagne,particulièrement les PME. Il faut que le projetsoit réalisé en Allemagne. Le subside est versé àl’entreprise allemande.Vous l’aurez compris: les entreprises belgespeuvent profiter de ces initiatives en nouant <strong>des</strong>coopérations avec <strong>des</strong> entreprises alleman<strong>des</strong> ouen créant une entreprise en Allemagne.Une autre explication n’est-ellepas à chercher aussi du côté de lamasse critique du marché allemandet par <strong>des</strong> effets d'échelle ?Avec 82 millions d'habitants et 3,5 millionsd’entreprises, l'Allemagne possède un grandmarché intérieur, unilingue et pourvu d’excellentsservices logistiques. En Allemagne, 5.245entreprises employaient plus de 500 personnesen 2008. Leur chiffre d'affaires cumuléreprésentait 38% du chiffre d'affaires total <strong>des</strong> 3,5millions d'assujettis à la TVA. En Belgique, 488entreprises employaient plus de 500 personnesen 2008. Il convient de se demander pourquoi,toutes proportions gardées, les entreprisesbelges ne se développent pas à la même échelleque leurs confrères allemands. Il est doncessentiel que les entreprises belges considèrentl'Europe comme leur marché domestique.Le rayonnement de l’Allemagnea certainement une influence :on assiste à l’internationalisationde son économie dans un contextegéopolitique favorable et avec lesoutien de l’Etat fédéral…L’Etat fédéral allemand mène une diplomatieéconomique active qui réagit aux évolutionsgéopolitiques. Ainsi, l'Allemagne est le paysqui a conclu le plus grand nombre d'accordsd'investissement bilatéraux. Ces accordsprotègent les investissements <strong>des</strong> entreprisesalleman<strong>des</strong> à l'étranger.38. <strong>Dynamisme</strong> Décembre 2012
L'Allemagne est aujourd'hui le deuxième plusgrand investisseur à l'étranger, après les États-Unis d'Amérique. L'entreprise familiale Bosch,qui a célébré son 125e anniversaire en 2011et qui est l'un <strong>des</strong> plus grands sous-traitantsdu secteur automobile, a racheté, au courant<strong>des</strong> dernières années, <strong>des</strong> dizaines de sociétésétrangères. Ces reprises ont contribuées à lacroissance du chiffre d'affaires de Bosch de 24%en 2010 pour le porter à plus de 50 milliardsd'euros. Si la Chine est devenue le deuxième plusgrand fournisseur de l'Allemagne, une partie dece commerce international se déroule au sein degroupes allemands. La diplomatie économique del'Allemagne se confirme aujourd'hui, notammentvia <strong>des</strong> stratégies garantissant les matièrespremières pour l'industrie et en collaborationavec l’industrie allemande qui construit, enGrèce et en Afrique, <strong>des</strong> projets visionnaires pourl'approvisionnement en énergie renouvelable.La compétitivité allemanden’est-elle pas le résultat du choixclair d’une orientation industrielle ?Avec la construction d'automobiles, de machines,de moteurs électriques et avec son industriesidérurgique et chimique, l'Allemagne a conservéune part importante d’activités industrielles. Lesacheteurs <strong>des</strong> économies émergentes se ruentsur les biens d'investissements fabriqués enAllemagne. Certaines entreprises sont tellementvieilles qu'elles ont survécu à deux guerresmondiales, une dictature national-socialiste et uneinvasion communiste. Siemens a été fondée en1847 par Werner von Siemens, à Berlin. L'atelieremployait à l'époque dix personnes et fabriquait<strong>des</strong> télégraphes. Aujourd'hui, l'entreprise compte360.000 travailleurs et réalise, avec un conseild'administration formé d'une dizaine de personnestout au plus, un chiffre d'affaires de 73,5 milliardsd'euros. À l'heure actuelle, le plus grand défi pourl’industrie allemande n'est pas l'euro, mais bien sacapacité de gérer l'abandon de l'énergie nucléairedécidé par le gouvernement allemand.On entend parfois les spécialistesparler de l’influence <strong>des</strong> chocsexogènes…La réunification de l'Allemagne de l'Est et de l'Allemagnede l'Ouest a eu lieu en 1990. L'économieoccidentale a ainsi intégré un appareil de productiontotalement suranné. L'équivalence d'un DeutscheMark ouest-allemand avec un Mark est-allemandpartait d'une bonne intention, mais rendait lesusines est-alleman<strong>des</strong> qui étaient moins productives,trop chères. Malgré <strong>des</strong> transferts financiersde plus d’un billion d’euros, il en a découlé <strong>des</strong>fermetures d'usines massives et un chômageimportant. Mais ce bouleversement a aussi crééde nouvelles opportunités. Au terme d'importantesrestructurations, la Bun<strong>des</strong>bahn ouest-allemandeet la Reichsbahn est-allemande ont fusionné en1994 pour former la nouvelle Deutsche Bahn AG.Depuis lors, le volume de voyageurs a crû de 28,8%et le transport de marchandises de 51,8%.l'Allemagne est le pays qui a conclu le plus grand nombred'accords d'investissement bilatéraux. accords qui protègentles investissements <strong>des</strong> entreprises alleman<strong>des</strong> à l'étranger.Il y a aussi la réforme du marchédu travail : Agenda 2010 et Hartz IV…«Agenda 2010» est le nom donné à un ensemblede réformes menées par la coalition rouge/vertede l’ancien Chancelier Schröder. Avec cesmesures, l'Allemagne entendait consolider saréunification et mettre en pratique les objectifs dela stratégie européenne de Lisbonne. Une partiede l'"Agenda 2010» concerne les lois Hartz IV.Ces lois établissent entre autres une distinctionentre l'allocation de chômage I, limitée à un an,et l'allocation de chômage II, qui est versée àpartir de la deuxième année et qui combine uneallocation de chômage et une aide du «CPAS».Une autre mesure spectaculaire de l'Agenda 2010est le relèvement progressif de l'âge de la retraiteà 67 ans. Le taux d’activé en Allemagne atteintaujourd’hui 50% de la population allemande.Les réformes ont également abaissé les chargessalariales pour les employeurs. GermanyTrade and Invest, l'Agence fédérale allemandede promotion du commerce extérieur et <strong>des</strong>investissements, a observé récemment que laBelgique possède les charges salariales les plusélevées de l'<strong>Union</strong> européenne.Une autre particularité,c’est le système <strong>des</strong> impôtsdifférenciés : composante fédéraleet communale…L'impôt allemand <strong>des</strong> sociétés s'articule en effetautour de deux composantes : la composantefédérale (Körperschaftsteuer) et la composantecommunale (Gewerbesteuer). En 2008, l'Allemagnea ramené la composante fédérale de 25% à15%. La «Gewerbesteuer» est restée commecompétence communale. Cette composante esttrès variable. Munich applique un coefficientqui est deux fois plus élevé que la commune deGrünwald, qui se trouve à 15 kilomètres de Munich.Curieusement, c'est précisément la communela plus riche qui prélève la «Gewerbesteuer»la plus basse. Toutefois, le système peut aussiservir à rehausser l'attractivité de communeséconomiquement moins développées. Le tauxeffectif d’imposition <strong>des</strong> sociétés en Allemagneégale en moyenne 28,7%.En conclusion ?La compétitivité <strong>des</strong> entreprises alleman<strong>des</strong> estdonc soutenue par <strong>des</strong> mécanismes qui sontinhérents au modèle socio-économique allemandet qui sont ancrés dans l’histoire du pays. Cesatouts ne sont pas passés inaperçus. Notre basede données dénombre 1.348 entreprises belgesqui ont <strong>des</strong> participations dans <strong>des</strong> entreprisesalleman<strong>des</strong>. Autant d’exemples à suivre…<strong>Dynamisme</strong> Décembre 2012 .39