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pourquoi le pen arrange tout le monde - Archives du MRAP

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IlLyon, <strong>le</strong> 12 mai 1987. Leprocès de Klaus Barbie s'estouvert depuis vingt-quatreheures et déjà <strong>le</strong>s bouquetsde roses déposés par <strong>le</strong>s communautésjuives à la mémoiredes victimes se fanent sur <strong>le</strong>smarèhes <strong>du</strong> palais de justice.Déjà de nombreux journalistesont déserté la sal<strong>le</strong>d'audience et papotent aucentre de presse installé aupalais Saint-Jean. Polémique<strong>du</strong> jour: la réf<strong>le</strong>xion deClaude Sérillon, la veil<strong>le</strong> aujournal de 20 heures, jugeantde «pas très bon goût» lama<strong>le</strong>tte de bonnes adressesoffertes par la municipalité,suivie par un communiquéLe palais de justice de Lyon remodelé pour la circonstance.LYON, SOUS BARBIEviru<strong>le</strong>nt et indigné de FrancisCollomb, maire de Lyon ...Les vedettes médiatiques etpolitiques, qui ont fait uneapparition remarquée à l'ouverture<strong>du</strong> procès sont, parail<strong>le</strong>urs, aujourd'hui invisib<strong>le</strong>s.Le long <strong>du</strong> périmètrede sécurité entourant <strong>le</strong> palais,<strong>le</strong>s passants et <strong>le</strong>s habitants<strong>du</strong> quartier vaquent à<strong>le</strong>urs occupations coutumières,marquant <strong>tout</strong> demême un temps d'arrêt devantl'entrée de la courd'assises, cherchant à devinerce qui se passe, là-bas, derrière<strong>le</strong>s murs.Pourtant, dans <strong>le</strong>s rangs clairsemésde la sal<strong>le</strong> <strong>du</strong> tribunal,l'émotion, impalpab<strong>le</strong> et discrète,est présente dans <strong>le</strong>syeux des anciens déportés,lovée, prête à jaillir. Ils sontlà, fidè<strong>le</strong>s au rendez-vousavec <strong>le</strong>ur bourreau, impeccab<strong>le</strong>set droits sur <strong>le</strong>urssièges, calmes et attentifs. Ilsn'ont rien oublié, aucun détail: Esther Majerowitz, déportéeà Auschwitz à dixneufans, entend encore <strong>le</strong>son de la voix de Barbiequand il l'a arrêtée en p<strong>le</strong>incentre vil<strong>le</strong>. Henri Troussier,66 ans, résistant déporté àRavensbrück, a immédiatementreconnu <strong>le</strong> sourire deson tortionnaire. Insensib<strong>le</strong>sau show médiatico-judiciairesavamment orchestré autourd'eux, ils sont ici pour témoignerd'un passé vivant,main dans la main avec« l'armée des ombres». Ilsn'en peuvent plus de regarderl'oiseau <strong>du</strong> malheur, aucostume noir et au visageblafard, recroquevillé dans <strong>le</strong>box des accusés. Ils regardentcet homme qui ne veut toujoursrien voir, et sur<strong>tout</strong> pas<strong>le</strong>urs visages, cet être vieux,décrépit et malade qui ne<strong>le</strong>ur fait plus peur, mais qui<strong>le</strong>s glace toujours autant.Qu'ils se rassasient de cetteimage, car dès <strong>le</strong> sur<strong>le</strong>ndemain,14 mai, Klaus Barbiese réfugiera dans sa cellu<strong>le</strong> etn'en voudra plus sortir.Au fond de la sal<strong>le</strong> d'audience,dans l'étroit périmètrequi lui est réservé, unepetite fou<strong>le</strong> si<strong>le</strong>ncieuse s'estmassée: quelques badaudsdésœuvrés, plusieurs immigrésà l'air grave, peu defemmes mais beaucoup dejeunes. Ils écoutent la <strong>le</strong>cturede l'acte d'accusation qui relataitce jour-là par <strong>le</strong> menu,entre autres atrocités, <strong>le</strong>stortures infligées à Lise Lesèvre.Ni murmures ni frémissements,mais unegrande, très grande attention.Ils ne sont, fina<strong>le</strong>ment,qu'un petit nombre à s'êtredéplacés. Mais tous <strong>le</strong>s Lyonnais,à plus ou moindredegré, s'en cachant ou l'affichant,s'informent et suiventde près <strong>le</strong> procès. Selon unsondage réalisé dans <strong>le</strong>s premiersjours de mai, il ressortque 78 % des habitantsétaient favorab<strong>le</strong>s au jugementde Barbie pour crimescontre l'humanité et que75 % n'hésiteraient pas àjuger éga<strong>le</strong>ment des Françaissi, par hasard, l'on découvraitde nouveaux responsab<strong>le</strong>s.« Cela montre <strong>le</strong>ur maturité,dit Marc Aron, responsab<strong>le</strong><strong>du</strong> Comité de coordinationpas douter, certains s'en félicitentdans <strong>le</strong>urs grands appartementsfeutrés. D'autantplus que René Hardy a eul'élégance de mourir à pointnommé. Mais d'autresfantômes vont resurgir.Tout se passe comme si, envil<strong>le</strong>, on hésitait entre l'orgueilde voir Lyon devenir,pour près de deux mois, lacapita<strong>le</strong> de la consciencemoderne et l'envie d'en finirau plus vite sans que remonteà la surface de la mémoirel'intégralité de la période,avec <strong>le</strong> cortège de contradictionset de déchirures qu'el<strong>le</strong>a amenées.D'où <strong>le</strong>s réactions comp<strong>le</strong>xeset ambiguës des Lyonnais quiapprouvent <strong>le</strong> procès <strong>tout</strong> endes organisations juives de

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