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Numéro 61 - Le libraire

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CES AUTEURS QUI TIENNENT LA ROUTEJ ACQUESPour l’amourP OULIN© Pierre Filiondes motsAu lendemain de ma folle envie d’écrire sur mon auteur fétiche,Jacques Poulin, j’ai souhaité tout abandonner. Comment pourrais-jedisserter sur cet écrivain chérissant l’essentiel des mots? Jamaisd’adjectifs superflus, jamais de longues phrases truffées d’adverbessoporifiques… que l’essentiel. Mais j’avais accepté : je n’avais doncplus le choix. Et si Jacques Poulin lui-même venait à lire monmodeste article lui rendant hommage? Mon vocabulaire serait-iladéquat? Aurais-je usé de la ponctuation aux bons endroits?Arriverais-je à faire dire à ces mots ce qu’ils veulent réellementdire? « Je n’arriverai jamais à l’écrire, mais je vais essayer! », dixitl’auteur lui-même dans Études Canadiennes. D’ailleurs, s’il y a uneseule phrase que je retiens de tous les livres de monsieur Poulin,c’est celle-ci, tirée de La traduction est une histoire d’amour :« En cas de doute, fonce tête baissée! »ParMarilou Bernier, de la librairie Carcajourencontre avec Jack Waterman, considérécomme l’alter ego de l’écrivain.Pour la première fois, je montais à bordd’un minibus Volkswagen et j’offrais depetites croquettes à des chats. Aprèsavoir parcouru la Piste de l’Oregon avecla Grande Sauterelle et Jack dans le butde retrouver le frère de ce dernier, j’aivoulu repartir avec lui pour une tournéed’automne… Cette histoire, c’est celledu Chauffeur qui, trois saisons parannée, parcourt les régions de Charlevoixet de la Côte-Nord à bord de son bibliobus,transportant avec lui des tonnes de livrespour souligner l’ensemble de l’œuvred’un écrivain de langue française, auQuébec. L’année d’après paraît L’anglaisn’est pas une langue magique, son dernierlivre que j’ai admiré avant d’endéguster chaque mot.Depuis le premier instant passé dansl’univers créé par Jacques Poulin, il y aune douzaine d’années, et dès quej’ouvre un de ses bouquins, je sais qu’enlisant cet auteur je me retrouverai chezmoi, peu importe où il m’entraîneracette fois. Je sais que ce sera chaud,Je sais qu’en lisant cet auteurje me retrouverai chez moi,peu importe où il m’entraînera cette fois.64 • LE LIBRAIRE • OCTOBRE - NOVEMBRE 2010Né à Saint-Gédéon de Beauce en 1937, Jacques Poulin a d’abord complété desétudes classiques aux séminaires de St-Georges et de Nicolet avant d’obtenir,en 1964, une licence en lettres de l’Université Laval. Avant de se consacrerentièrement à son métier d’écrivain, il a été traducteur et conseiller enorientation. Voilà pour l’essentiel des faits. Pour le reste, on n’en sait que trèspeu. Et c’est très bien ainsi. D’ailleurs, ce qui importe, ce sont ses textes.C’est peut-être la raison pour laquelle j’ai l’impression de connaître l’auteur :grâce à ses personnages…Son premier roman, Mon cheval pour un royaume, a été accueilli de façon plutôtmitigée par la critique… Quelques (très) mauvais papiers qui auraient pu fairetaire à tout jamais n’importe quel nouvel écrivain, mais pas Jacques Poulin! Ilrécidive deux ans plus tard avec Jimmy puis, en 1970 avec <strong>Le</strong> cœur de la baleinebleue. En 1974, il reçoit le prix de La Presse pour Faites de beaux rêves, dontl’histoire se situe au Grand Prix de Formule 1 de Montréal.Après <strong>Le</strong>s grandes marées en 1979, il publie ce qui allait devenir son plus grandsuccès ainsi que ce passage obligé de ma génération : en effet, qui n’a pasété fortement invité à lire Volkswagen blues à l’école? C’était ma premièrepouvant être empruntés par tous. Mais leChauffeur se fait vieux et il lui sembleque tout ça tire à sa fin. Puis un jour,dans une foule, il y a Marie. Bien queles personnages ne soient pas toujoursles mêmes, les noms de Jack Watermanet de Marie reviennent souvent. Marie,Mary, Marika… parce que ce nomévoque LA femme, la première, la vraie,l’idéal féminin recherché. On se doutebien qu’encore une fois, l’amourprendra une grande place au sein dutexte. Depuis ces deux livres, je n’ai puabandonner Jacques Poulin…En 2008, Jacques Poulin obtient le prixGilles-Corbeil, attribué tous les troisans par la Fondation Émile-Nelligan,douillet, ensoleillé et plein de livres. Jesais aussi que je dois prendre le tempsde lire les mots, un à un, « ralentirla lecture pour retarder le moment où[on doit] être obligé de quitter lespersonnages » (La tournée d’automne),puisque ces mots sont si importants etchoisis avec tant de soin. Je ne sais passi un jour il considérera qu’il estparvenu à son but, celui de raconter laplus belle histoire d’amour : un bonheurpur, « cette chose indescriptible et platecomme une mer calme », dit-il. Je crois,au fond de moi, que cette histoire, il lavit en silence avec tous ses lecteurs quiattendent impatiemment l’écrivainqui, pour eux, semble le plus lentdu Québec.

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