La fragilité des résultats des premières études qualitatives et la difficulté d’extrapoler au niveau national cesrésultats ont très vite été compensés à partir des années 2000 par une recherche nourrit sur les richesperspectives qu’offre une bonne exploitation des informations qualitatives. Ces dernières sont interprétables à lafois au premier degré (compréhension des déterminants de la pauvreté) et au second degré (déduction des axesd’opérationnalisation de la mise en œuvre des capacités de choix au sens de Sen en partant de ce que les pauvreseux-mêmes valorisent). Les approches qualitatives valideraient ainsi les études quantitatives en plus d’aider dansla formulation des actions à mettre en œuvre en faveur des groupes les plus démunis. Cet important résultat estimputable à l’amélioration des dispositifs de collecte des informations qualitatives, qui sont désormaisdirectement couplés avec des enquêtes quantitatives.Le succès de ces opérations a facilité l’intégration de thématiques nouvelles dans le champ de la productionstatistique courante. Ces nouveaux thèmes, qui répondent à la demande exprimée par les DSRP et la nécessité demieux comprendre les déterminants de la pauvreté, sont essentiellement les suivants :• la gouvernance ;• la démocratie ;• la pauvreté subjective et l’exclusion sociale ;• les dotations en capital (social, financier, etc.) des ménages.La conjonction des approches quantitatives et qualitatives dans l’analyse de la pauvreté permet de définir unesérie d’indicateurs qui peuvent s’inscrire dans un cadre conceptuel susceptible de rendre plus objectives, lestendances subjectives de la pauvreté. Ces indicateurs s’intègrent dans un cadre conceptuel (cf. schéma 2 et 3)dans lequel sont examinées les dotations en capital des ménages, les opportunités qui se présentent à eux et quileurs permettent de convertir leurs dotations en capacités de choix, d’apprécier l’ampleur des risques qu’ils ont àaffronter, et enfin, les capacités de choix stratégiques dont ils disposent.PHENOMENESchéma 2 : Grille d’analyse des déterminants de la pauvretéPAUVRETEINDICATEURSMESURES QUANTITATIVESMESURES QUALITATIVES1. FACTEURSSOCIO-DEMOGRAPHIQUES2. FACTEURSSOCIO-ECONOMIQUES3. SERVICESSOCIAUX DEBASE ETCADRE DE VIE4. FACTEURSPSYCHOSOCIO-LOGIQUES5. FACTEURS GEOCLIMATIQUES ETPEDOLOGIQUES6. AUTRESFACTEURSFACTEURSEXPLICATIFS• Caractéristiquesde ménageset de la population• Fécondité• Mortalité•Migration,urbanisation etpeuplement desespaces•Santé et morbidité• Education etalphabétisation• Etc.• Emploi etchômage• Activitéséconomiques• Revenus•Consommation• Etc.• Accès à l'éducation, àla santé, au moyen decommunication, àl’électricité, etc.• Logement et accès àla propriété foncière• Avoirs et patrimoinesdes ménages•Cadre de vie desménages• Etc.•Rôle desOrganisationssociales (ONG,mouvementsassociatifs, etc.)• Exclusion sociale• Sorcellerie• Etc.• Conditionsclimatiques etdésastresnaturels (pluviométrie,invasionacridienne,sécheresse, etc.)• Localisationgéographique(enclavement,désenclavement)• Etc.• CroissanceEconomique• Bonnegouvernance• Démocratie•Environnement• Guerres, conflits• Etc.Source : AFRISTATAu cœur de ce cadre conceptuel, se trouvent donc les capacités de choix, que l’on peut approcher en tentant derépondre à deux questions liées : tout d’abord, comment les ménages se situent-ils au regard des différentscritères de pauvreté et de «bonne situation»? Ensuite, ces ménages disposent-ils effectivement des capacitésnécessaires à l’amélioration de leur bien-être ? Si oui, quelles stratégies semblent se dessiner de leur point de vue ?Ainsi, le cadre analytique de la pauvreté doit permettre de comprendre la pauvreté d’une manière plus analytiqueen caractérisant les moyens/dotations dont disposent les ménages avec les possibilités de choix (capabilité) queTechniques de mesure et d’analyse de la pauvreté dans les Etats membres d’AFRISTAT 35Support de cours, ISE 3 – ENSEA, Juin 2007
leur offre leur environnement social et économique. Ces éléments offrent aux ménages des capacités à faire faceaux risques. L’importance des risques susceptibles d’affecter les conditions de vie des ménages introduit la notionde vulnérabilité qui traduit bien une situation d’existence où les risques sont élevés et les capacités de choix faibles. Il importe doncde bien mettre en évidence l’importance des risques auxquels sont exposés les ménages et de les confronter àleurs dotations en capital.Pour l’heure, cette richesse analytique transparaît peu dans la plupart des profils de pauvreté élaborés dans lesEtats membres d’AFRISTAT.Les informations fournies par le schéma 2 offrent ainsi la possibilité de réaliser une analyse assez riche de lapauvreté sous les différents angles suivants :• Evaluation de l’ampleur du phénomène ;• Caractérisation et identification des pauvres et des groupes vulnérables ;• Caractérisation et identification des principales causes de la pauvreté du point de vue des pauvres eux(entre autres) ;• Stratégies adaptatives des pauvres et des groupes les plus vulnérables ;• Evaluation par les pauvres des orientations de la politique économique et sociale ;• Attentes des pauvres et des groupes vulnérables par rapport aux priorités de la politique économique etsociale du pays.L’analyse de cette grille montre que la réussite des mesures initiées dépend d’un certain nombre de réalités socioéconomiques(cf. schéma 3) liées aux facteurs suivants :• Les dotations en capital (physique, humain, institutionnel, etc.) ;• Les conditions environnementales (agro-climatiques, évolution de l’économie mondiale, crise sociopolitique,état de la technologie, etc.) ;• Les croyances, attitudes, valeurs et la compréhension de l’ensemble des décisions des ménages et desindividus, comme autant de facteurs qui vont déterminer leur mode de vie respectif ;• L’évaluation des résultats (impacts, performances) des actions entreprises sur les individus et lesménages et leurs interdépendances.Techniques de mesure et d’analyse de la pauvreté dans les Etats membres d’AFRISTATSupport de cours, ISE 3 – ENSEA, Juin 200736