Jaguar Magazine 02/2017 – French

INTERVIEW
LE SEIGNEUR
DU TEMPS
Jean-Claude Biver est réputé pour sa volonté de fer et ses stratégies
créatrices éblouissantes. Notre magazine a réussi à s’entretenir
avec ce patron atypique et cet enfant terrible de l’horlogerie pour
une conversation sur ses inspirations – et sur l’âme des montres.
TEXTE ORIGINAL : Michelle Mussler
PHOTOGRAPHIE : Dirk Bruniecki
Jean-Claude Biver est le grand provocateur de l’horlogerie,
celui qui a accroché au poignet de stars tels Cristiano Ronaldo
ou Cara Delevingne les montres prestigieuses que sont Hublot,
TAG Heuer ou Zenith, toutes réunies au sein du groupe LVMH.
À l’heure où l’on consulte son smartphone plutôt qu’une
montre, Jean-Claude Biver est parvenu non seulement à
maintenir ce secteur au sein du groupe, mais de surcroît à
augmenter ses ventes : alors que les marques concurrentes
sont en perte de vitesse (-15 % en 2016), Tag Heuer a vu son
chiffre d’affaires progresser de 12 %.
Maintenant, le fantasque patron relève un nouveau défi –
reprendre la marque Zenith qu’Aldo Magada a quittée début
2017. Tout comme une mécanique de précision, Jean-Claude
Biver, qui se lève à 3 h du matin pour mettre ses 80 heures
de travail hebdomadaires au service de la perfection, n’a
aucune intention de lever le pied. Quel est donc son secret ?
Pour lever ce voile, nous avons rencontré ce génie créatif à
Bâle, la capitale mondiale de l’horlogerie.
Afin de mettre en place sa
stratégie pour la nouvelle
smartwatch TAG Heuer Modular
45, Jean-Claude Biver a décidé
de rapatrier toute la production
en interne. Pour cela, il a fait
construire une manufacture
entièrement nouvelle au
siège de TAG Heuer à La Chauxde-Fonds,
en Suisse.
M. Biver, cela fait 40 ans que vous vous impliquez dans
ce domaine, et, à 68 ans, vous envoyez encore des
e-mails alors que tout le monde dort. Quelle est donc
votre motivation ?
Je suis passionné, tout simplement. Sans cela, je me serais mis
en retraite depuis longtemps. Si mon métier n’était pas si
captivant, j’aurais tout laissé tomber pour me balader au pôle
Nord ou au Bhoutan. Ou bien j’aurais étudié l’art à l’université,
je me serais plongé dans les livres, j’aurais repris le sport,
j’aurais gardé des vaches ou je ne sais quoi d’autre encore…
Et vous allez participer à un marathon !
Pas avant mes 70 ans ! Pour le moment, je ne fais que
m’entraîner car j’ai plein d’autres casseroles sur le feu.
42 THE JAGUAR