So Foot Septembre 17
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<strong>So</strong>irée spiritisme à Caracas.<br />
policiers uniquement<br />
sont morts.<br />
Qu’on ne vienne<br />
pas me dire que les<br />
manifestations sont<br />
violentes, j’ai participé à<br />
nombre d’entre elles et<br />
ça n’est pas le cas. Porter<br />
un masque à gaz et un<br />
casque pour se protéger<br />
ne fait pas de vous un<br />
manifestant violent.<br />
C’est vrai, les types de<br />
la résistance se battent,<br />
à coups de pierres et de<br />
cocktails Molotov, mais<br />
ils le font uniquement<br />
quand la garde commence à réprimer. Il n’y<br />
a aucune manifestation où la violence a été<br />
déclenchée par les manifestants. J’en suis<br />
témoin.<br />
“J’aimerais être<br />
le témoin de<br />
ce Venezuela qui<br />
change, où les gens<br />
s’enthousiasment à<br />
l’idée de reconstruire<br />
un pays qui fut<br />
si noble avec nos<br />
ancêtres et avec<br />
nous-mêmes”<br />
En réaction à tout cela, le syndicat des joueurs<br />
de foot a demandé à la fédération vénézuélienne<br />
de football l’autorisation de faire une minute<br />
de silence avant chaque match de première<br />
division. Comme la fédération est fortement<br />
influencée par le gouvernement, la requête a<br />
été rejetée. Les joueurs prirent la courageuse<br />
décision d’effectuer la minute de silence une<br />
fois le match commencé. L’arbitre siffla le<br />
début du match, un joueur<br />
donna le coup d’envoi, puis<br />
aucun joueur ne bougea<br />
pendant une minute. Cet<br />
acte courageux eut une<br />
grande répercussion au<br />
Venezuela et aussi dans le<br />
monde entier. Bien plus que<br />
s’il s’était agi d’une minute<br />
de silence “classique”. Du<br />
coup, la fédération autorise<br />
désormais les minutes de<br />
silence quand la demande<br />
est formulée. Alors que<br />
j’écris ces lignes, Edgar<br />
Rito, joueur de l’équipe<br />
de seconde division Gran<br />
Valencia, est derrière les barreaux pour avoir<br />
protesté contre la dictature. Cette semaine,<br />
Ender Peña, <strong>17</strong> ans, capitaine de l’équipe<br />
Loteria del Tachira, de la première division<br />
des moins de 18 ans, a été assassiné lors d’une<br />
manifestation.<br />
Vous pourriez vous demander pourquoi un<br />
footballeur qui fait carrière en Europe a décidé<br />
de rentrer au Venezuela alors que la situation<br />
est dramatique et que le commun des mortels<br />
ici cherche à fuir le pays. Je me pose souvent<br />
la question. La première des réponses, c’est<br />
que ce que m’offre le Caracas FC, j’aurais<br />
difficilement pu l’obtenir ailleurs. Je ne parle<br />
pas de proposition économique –qui est bien<br />
inférieure à ce que je pourrais continuer à<br />
gagner à l’étranger– mais du projet, qui consiste<br />
à remettre le nom du club au panthéon du<br />
football vénézuélien. Mes années à l’étranger et<br />
mes sélections m’ont apporté une expérience<br />
que je peux mettre à profit pour aider mes<br />
coéquipiers à grandir, pas uniquement sur le<br />
terrain. Surtout, j’ai bon espoir que la situation<br />
change bientôt au Venezuela. La reconstruction<br />
du pays et de sa société est une chose que je<br />
souhaite voir, et à laquelle je veux participer. J’ai<br />
commencé ces lignes en racontant l’histoire de<br />
mes grands-parents. L’Europe d’après-guerre<br />
semble aujourd’hui très loin. Aujourd’hui, nous<br />
voyons l’Europe, malgré ses problèmes, comme<br />
un modèle à suivre. De nombreux exemples de<br />
pays qui sont passés d’une situation critique à<br />
la prospérité en un laps de temps relativement<br />
court existent. Je pense au Japon ou, sans<br />
aller si loin, la Colombie, notre pays frère, qui,<br />
il y a à peine vingt ans, était en guerre contre<br />
le narcotrafic et les paramilitaires, et qui vit<br />
aujourd’hui un très bon moment. J’aimerais être<br />
le témoin de ce Venezuela qui change, où les<br />
gens s’enthousiasment à l’idée de reconstruire<br />
un pays qui fut si noble avec nos ancêtres et<br />
avec nous-mêmes. Malgré la crise humanitaire<br />
et sociale, le Venezuela reste ma terre. • FERNANDO<br />
ARISTEGUIETA