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MOBILITÉ<br />
Peter Goetschi, quelle incidence<br />
la vague verte des<br />
élections fédérales aura sur<br />
la mobilité?<br />
Peter Goetschi: Tout d’abord, la vague<br />
n’était pas seulement verte, mais aussi<br />
jeune et féminine. Le résultat des élections<br />
constitue un message clair de<br />
l’électorat: la politique doit plus s’occuper<br />
des questions environnementales.<br />
La balle est maintenant dans le camp du<br />
nouveau parlement, qui doit proposer<br />
des mesures concrètes pour répondre à<br />
ces attentes. Nous verrons si la population<br />
suisse est prête à suivre réellement<br />
cette voie-là.<br />
Quel rôle le TCS jouera-t-il à cet égard?<br />
Depuis des décennies, le club s’engage<br />
en faveur d’une utilisation responsable<br />
des ressources naturelles et soutient<br />
aussi les objectifs ambitieux de l’Accord<br />
de Paris sur le climat. Mais il est important<br />
de trouver des solutions équilibrées<br />
et globales. Il ne doit pas y avoir d’augmentation<br />
unilatérale ou disproportionnée<br />
du coût de la mobilité. Nous nous<br />
opposons fermement à la création d’une<br />
société à deux vitesses – ceux qui<br />
peuvent encore se permettre d’être mobiles<br />
et ceux qui ne peuvent plus le faire.<br />
Comment le TCS s’engagera-t-il pour<br />
que chacun puisse rester mobile?<br />
Le TCS s’engage afin que chaque individu<br />
soit libre de choisir son moyen de transport<br />
et que sa mobilité personnelle ne soit<br />
pas limitée. Il est primordial de prendre<br />
des décisions transparentes sur le long<br />
terme. Par exemple, chaque mesure proposée<br />
dans la loi sur le CO2 doit être accompagnée<br />
d’un prix. Les gens ont besoin<br />
de savoir ce que vont réellement coûter<br />
ces mesures. Ce n’est qu’en ayant une<br />
idée précise de la situation que nous<br />
pourrons en évaluer les conséquences<br />
économiques et sociales.<br />
Dans l’édition 10 de <strong>Touring</strong>, les Verts<br />
exigeaient qu’à partir de 2025, plus<br />
aucune voiture individuelle alimentée<br />
par des combustibles fossiles ne<br />
soit autorisée. Est-ce réaliste?<br />
Cette exigence est totalement irréaliste<br />
et l’approche n’est pas la bonne. Ce ne<br />
sont pas les interdictions et les rêves illusoires<br />
qui se répercuteront favorablement<br />
sur le climat. En revanche, parlons<br />
plutôt de la manière dont nous pouvons<br />
promouvoir la mobilité électrique, en cofinançant<br />
par exemple des bornes de recharge<br />
dans des bâtiments à usage multiple,<br />
en proposant des amortissements<br />
spéciaux pour l’utilisation commerciale<br />
de véhicules électriques, en équipant les<br />
Park & Ride de bornes de recharge, etc.<br />
Bien entendu, en cas de bonne pénétration<br />
du marché, ces soutiens devraient<br />
être ensuite graduellement abrogés et,<br />
parallèlement, la porte devrait rester<br />
ouverte à d’autres développements.<br />
Les primes à l’achat de voitures<br />
électriques sont-elles nécessaires?<br />
Notre sondage sur l’électromobilité a<br />
démontré que le prix, les craintes liées à<br />
l’autonomie et le manque d’infrastructures<br />
de recharge sont à l’heure actuelle<br />
les principaux obstacles à l’achat d’un véhicule<br />
électrique. Ce qui parle, à premier<br />
abord, en faveur de primes à l’achat. Je<br />
suis néanmoins sceptique. Ces primes<br />
peuvent avoir un effet local. Mais nous<br />
devons aborder cette question dans sa<br />
globalité. Il est absurde de promouvoir<br />
les voitures électriques sur le marché<br />
suisse avec des primes à l’achat et d’envoyer<br />
en Afrique nos anciens véhicules à<br />
énergie fossile. Car les gaz à effet de serre<br />
ne connaissent, eux, pas de frontières.<br />
Quelle serait donc l’alternative<br />
aux primes à l’achat?<br />
Nous devons dissiper les craintes des<br />
gens liées à l’autonomie et au manque<br />
d’infrastructures de recharge. La meilleure<br />
façon d’y parvenir, c’est par l’information<br />
et l’expérimentation. Je roule<br />
moi-même depuis quelques mois à l’électricité<br />
et je suis non seulement enchanté<br />
du plaisir de conduite que cela procure,<br />
mais j’ai aussi évacué rapidement toutes<br />
les réserves que j’avais concernant l’autonomie<br />
du véhicule. Bien sûr, je dois<br />
m’organiser un peu plus et être prévoyant,<br />
mais, pour notre quotidien en<br />
Suisse, les gammes déjà disponibles sont<br />
absolument suffisantes en terme d’autonomie.<br />
En ce qui concerne les bornes de<br />
recharge, je pense qu’il est particulièrement<br />
important d’encourager leur installation<br />
à domicile et au travail, car<br />
seules 5% des recharges sont effectuées<br />
durant le trajet.<br />
Les Verts et les Verts Libéraux veulent<br />
réduire et déplacer le trafic, en prenant<br />
pour exemple les métropoles<br />
européennes. Que valent ces recettes?<br />
Il est indéniable que nous devons réorganiser<br />
la mobilité dans les villes en raison<br />
de l’espace limité disponible et de leur<br />
densité croissante. Il existe de bons<br />
exemples à l’étranger, mais ils ne<br />
peuvent pas toujours être transférés à<br />
l’identique dans d’autres villes et une répartition<br />
modale fixe, en particulier, ne<br />
saurait faire office de boussole. Le fonctionnement<br />
de la mobilité doit plutôt intégrer<br />
tous les moyens de transport et<br />
l’accès aux villes doit être facilité à tous<br />
les usagers des transports. Outre les infrastructures<br />
routières et ferroviaires,<br />
cela nécessite une gestion intelligente du<br />
trafic, des facilités de stationnement et<br />
de correspondance, ainsi que des transports<br />
publics attrayants et conviviaux.<br />
Dans les centres-villes, l’espace à<br />
disposition fera l’objet d’une lutte<br />
acharnée. La voiture sera-t-elle<br />
poussée hors de l’espace urbain?<br />
La voiture ne doit pas être diabolisée.<br />
Elle se justifie aussi dans les zones urbaines.<br />
Et comme nous l’avons déjà<br />
mentionné, le TCS s’engage en faveur<br />
du libre choix des moyens de transport<br />
et s’oppose aux restrictions liées à la<br />
mobilité. Au lieu d’interdire, trouvons<br />
des offres et des solutions attractives,<br />
telles qu’une judicieuse interconnexion<br />
des différents moyens de transport.<br />
Les solutions d’autopartage peuvent<br />
constituer des options dans les quartiers<br />
urbains.<br />
L’infrastructure existante est-elle prête<br />
à accueillir les véhicules électriques et<br />
les engins automatisés?<br />
Non, parce que les véhicules électriques<br />
ont besoin d’une infrastructure de recharge,<br />
et l’automatisation exige qu’une<br />
infrastructure de réseaux mobiles soit<br />
mise en place en conséquence et que<br />
l’infrastructure routière soit signalée<br />
selon des critères uniformes. Il est en<br />
outre probable que les revêtements routiers,<br />
souvent conçus et peints avec<br />
fantaisie, ne soient pas identifiables par<br />
de nombreux systèmes et deviennent<br />
ainsi un obstacle majeur à l’automatisation.<br />
Les politiciens doivent être particulièrement<br />
clairvoyants à cet égard.<br />
Ils doivent fixer des limites et des lignes<br />
directrices, mais sans restreindre les<br />
développements futurs, car les travaux<br />
d’aménagement risqueraient d’être encore<br />
plus longs.<br />
De nouvelles formes de mobilité et de<br />
véhicules se frayent un chemin sur<br />
nos routes déjà bien encombrées.<br />
Comment cohabiter?<br />
28 touring | déc <strong>2019</strong> / jan 2020