Eux et nous - Rencontres Internationales de Genève

Eux et nous
décadence, comme on peut déjà les voir. Ainsi, à Vladivostok les
choses vont très mal ; une sorte de guerre larvée se poursuit entre
maire, gouverneur, autorités et représentant d’Eltsine ; les
citoyens en pâtissent au niveau le plus simple, puisque par
exemple on coupe l’électricité deux jours sur trois. Il n’empêche
que les Russes de Vladivostok ne disent pas qu’ils vont quitter le
pays. Ils ont certes un rêve : si les Japonais investissaient chez
nous, tout irait bien. Mais les Japonais demandent les trois îlots qui
leur reviennent aux termes des accords signés avec Khrouchtchev.
Je présume que le gouvernement russe les céderait volontiers, s’il
ne s’agissait que de ces trois îlots. Mais dans la situation de
poudrière actuelle, ce serait un tel cadeau aux nationalistes et à
Jirinovski qu’il ne saurait en être question.
Y aura-t-il une sorte de séparation molle des différentes parties
de la Russie ? Je crois que la bonne définition du pays est : il y a
Russie partout où vivent des Russes, avec un mode de vie russe.
C’est la définition que donnaient les penseurs eurasiens, auxquels
appartenaient le prince Troubetzkoy et Roman Jakobson. Elle a
l’air extrêmement informe. Elle rend néanmoins compte de
l’extraordinaire attrait de l’émigration. Il y a dans la Russie
d’aujourd’hui un culte de cette Russie hors frontières.
M. DUSAN SIDJANSKI : Vous avez mentionné deux tendances.
L’une est l’interdépendance économique qui liait tous les Etats qui
se sont créés après l’effondrement de l’empire soviétique. L’autre
est l’ensemble des poussées nationalistes, voire régionalistes.
Comment voyez-vous l’aménagement de la vie commune entre ces
deux tendances, qui sont partiellement contradictoires et entrent
souvent en conflit ? La guerre en Tchétchénie illustre cette
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