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E_1928_Zeitung_Nr.078

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78 - <strong>1928</strong> AUTOMÖBiL-REVUE - REVUE AUTOMOBILE 21<br />

Le gendarme franps „surveille 44 la route<br />

et de Paris a Vichy, pas une contravention.<br />

De notre confrere oubert Bouchet, dans<br />

Le Journal de Paris, ce recit vif et typique<br />

dont nos autorites de police feraient bfen de<br />

tirer profit:<br />

On se souvient encore des Päcrues et Pentecöte<br />

rouges du 14<br />

juillet a marque son premier essai.<br />

Donc, en la caserne des Minimes, rendez-vous<br />

fut pris avec le capitaine de gendarmerie Burtey,<br />

dötache au ministere de la* guerre, chef ä ibord; le<br />

marechal des logis-chef Marie, as du macaron, et<br />

le gendarme Gorre, nanti d'un sifflet ßour freiner<br />

l'ardeur des näophytes et rappeler ä une juste mesure<br />

les fawteura de desordre.<br />

On ne r£agit pas dans le brocard.<br />

II est midi exactement. Nous demarrans rue de<br />

Bearn. Un Chauffeur de taxi nous croise — nous<br />

croise est un euphemisme ; il a failli nous emboutir!<br />

1! — La vue du kepi de mes compagnons ne<br />

l'intimide pas. «Eh! ballot, venez apprendre ä<br />

conduire 1 ><br />

G'est vexant pour notre amour-,propre, mais<br />

nous roulons depuis trente secondes. et notre miseion<br />

est sur la grande route blanche et non dans<br />

les rues bitumees ou pavees de la capitale. Nous<br />

sortons par la porte d'Italie ; notre conducteur va<br />

ä une allure raisonnable; les kepis sombres galonnös<br />

d'argent nous attirent le respect des automobilistes.<br />

Tout le monde est sage. Seul, Phebus nous gratifie<br />

de rayons par trop puissants en calories. Le<br />

capitaine Durfey est de cette jeune gäneration<br />

d'officiers qui s'appliquent dans les differente commandenients<br />

qu'ils assurent ä etudier la psycliologie<br />

humaine et ä en tirer des renseignements precieux.<br />

«Voyez-vous, me dit-il, il faut que cette legende<br />

du gendarme croquemitaine nous apporte un<br />

role d'educateur et les gens qui veulent bien raisonner<br />

en conviennent. De plus, nous devons rendre<br />

service. Les circulaires que nous envoyons ä<br />

nos brigades ont pour base cette unit£ de principe<br />

et surtout nous nous appliquons ä en inoulquer ä<br />

nos hommes l'esprit et non la lettre.<br />

Tenez, voyez cet energumene. Gorre; un coup<br />

de sifflet.»<br />

Un Chauffeur nous croise ä 100 ä l'heure et<br />

ralentit immediatement.<br />

Le gendarme n'est pas saus pitie\<br />

^^ü^äppliquäW-€?lä äppliquänt" v r "Tee'" Iött^^^^<br />

[«ä-öMres^pYescritB<br />

on devrait lui coller ua.,proces-verbal. Mais la<br />

route est belle, libre. Roulant admirablement, il ne<br />

resiste pas ä son dfeir d'appuyer sur l'accelerateur.<br />

On serait beaucoup moins tolerant si quantite<br />

de voitures se croisaient dans ces parages car,<br />

et lä intervient cette Philosophie Inen humaiue,<br />

qui veut se casser la figure le peut tout ä son<br />

aise. Mais beaucoup de personnes tiennent encore<br />

ä leur guenille et aJors il faut. on doit les proteger.<br />

«Pouvons-nous vouis etre utile, clame le capitaine<br />

Burtey ? ><br />

« Oh I mon capitaine, quel service, quel service<br />

vous me rendez! La bielle de mon moteur est fondue,<br />

c'est irreparable. Voulez-vous alerter le Premier<br />

garagiste que vous rencontrerez.»<br />

« G'est entendu.»<br />

Le monsieur tres heureux nous grätifie d'une<br />

reverence louis-philliparde; il n'a iamais vu ca I<br />

A temps nouveaux, möthodes neuves.<br />

Finalement, Fontainebleau: la! gendarmerie.<br />

Quelques conseils ä ceux charges de la Police routiere<br />

et nous repartons narguant l'etouffante et<br />

deprimante chaleux.<br />

Et les accidents...<br />

Nemours : une voiture plaiquee contre un arbre.<br />

Tout est tordu et la belle mecanique n'eat plus que<br />

de la ferraille: exces de vitesse 1<br />

Mais qu'est ceci? Une file de voitures immoibiles,<br />

comme a Paris. Nous avancons difficilement.<br />

Horreur ! Au beau milieu de la route, pres de Fontenay,<br />

un homme git: la boxte cranienne a saut6.<br />

La figure, partagee en deux, n'a plus rien d'humain.<br />

Ges hommes contemplent le cadavre. Les<br />

prejuges subsistent toujours •. ne pas d&placer le<br />

corps avant l'arrivße des gendarmes.<br />

Nous le deposons sür l'herbe jaune. G'est un<br />

malheureux motocycliste qui voulait däpasser une<br />

voiture. Une mare de sang teint le bitume, les conducteurs<br />

avancent doucement, leurs passageres<br />

poussent des petits cris d'effroi.<br />

La legon porte, du moins sur le moment: ib<br />

poursuivent leur voyage tout doucement.<br />

Mes compagnons fönt l'enquete d'usage. Elle est<br />

terminee quand les gendarmes de la brigade voisine<br />

arrivent et nous repartons.<br />

Meme «tombereau» reste inchati6.<br />

La' nuit tombe. Les phares poignardent l'ombre<br />

de leura mille flammes d'or. Un insolent en bonne<br />

fortune nous depasse en trombe. «G'est pas une<br />

bagnole, c'est un tombereau», nous dit-il. On le<br />

laisse dire. Une demi-heure apres, ä La Bussiere,<br />

r^^v?r**fr!£ "S^F^T<br />

il fait le plein d'essence. Nous nous arretons pres<br />

de lui pour faire la meme chose. L'homme voit 1<br />

gendarme qu'il a nargue. On ne lui fait aucune<br />

öbservatio'n. Mais il a eu chaud!<br />

II fait nuit noire, quelques nuages masquent la<br />

palpitation des 6toiles. On sent bon. le foin, l'herbe<br />

humide, le vent pur de la campagne nivernaise.<br />

Et le charretier saus feu arriere.<br />

Une aniserable voiture, tramee par un vieux<br />

chevaJ bringuebale devant nous. Pas de feux arriete.<br />

On l'arrete. L'homme montre ses papiers<br />

Dans sa face deux yeux luisent de fievre ; le profil<br />

est peu regulier,, une belle barbe blonde donne<br />

ä ses traits certaine noblesse.<br />

« Avez-vous des enf^nts ? »<br />

— iTen ai cinqf j'en ai encore eu un avanthier.<br />

La voix ©st dme et triste ä la fois.<br />

«Que voulez-vous? Je ne voyage, iamais de<br />

nuit. Aujourd'hui, avec cette chaleur. G'est pour<br />

cela que je suis en faute.»<br />

On l'admoneste patemellement. II promet de se<br />

mettre en regle.<br />

Deux chiens-Ioups inqui6tants, aauvages, tournent<br />

autour de nous. On entend leur souffle haletant.<br />

Leur maitre les chasse rudement: «Allez<br />

coucher, Mirza, Boude. »<br />

Souples, les betes s'^loignent.<br />

II est une heure, la nuit est froide. Go&ne va accueillir<br />

nos membres las, nos corps rompus.<br />

La manie de verbaliser.<br />

«Nous somrnes en France 30.000 gendarmes,<br />

repartis en 4000 brigades. Nous sommes la force,<br />

nous sommes le nombre: nous pouvons assurer un<br />

contröle routier impeccable. Pour ce faire, quelques<br />

moyens materiels nous manquent et quelques<br />

löformes s'imposent: supprimer les brigades ä<br />

cheval, les doter, dans les secteurs oü le trafic est<br />

intense, d'autos qui leur permettront un deplacement<br />

rapide et surtout que certaines municipalites,<br />

avec leurs reglements desuets et rigides, n'obligent<br />

pas nos hommes ä operer, chronometre en main, ä<br />

l'affüt du proces-verbal qui temperera les excites. »<br />

; Ainsi parlait l'autre jour, ä Vichy (continue notre<br />

confrere du Journal de Paris), le colonel Viet,<br />

inspecteur general de la Garde republicaine mobile.<br />

$<br />

Les possed^s.<br />

Gette profession de foi avait ete provoquee par<br />

le compte-rendu du capitaine Burtey, policant et<br />

contrölant Chauffeurs et chauffards sur 1'« autostrade.<br />

Gar, vraiment, en toute sinceritö, si le iparcours<br />

Paris-^Iosne fut exempt ou presque d'incidents<br />

graves, on se demande quel but poursuivent certains<br />

criminels qui prenaient la route pour une<br />

piste et vous obligeaient, tant leur temerite est<br />

grande, ä une tension d'esprit continuelle et ä ne<br />

goüter aucun plaisir ä la contemplation du paysage<br />

magnifique qu'offrent les bords de la Loire et les<br />

cöteaux du Sancerrois.<br />

Vache du raatin: chagrin.<br />

On est matinal dans la gendarmerie et on ne<br />

dort guere lorsqu'on fait le chien de berger sur<br />

les chemins de France.<br />

Gouches ä 2 heures, levds ä 6, nous reprenions<br />

immiudiatement le harnois, et quel harnois. Soleil<br />

de feu, bouffees d'air chaud, corps ruisselants et<br />

soif ardente, nous roulions, protegeant nos freres<br />

automobilistes contre les embüches de la route et<br />

les incartades de troupeaux de ruminants ä l'ordinaire<br />

paisibles.<br />

Stop! Une reunion de vaches barrent la route.<br />

Elles ont l'air de se concerter sur la n6cessit6 de<br />

ceder le pas ou non.<br />

Dix voitures attendent, non pas leur bon vouloir,<br />

mais que le gardien, goguenard, s'en mele.<br />

Notre arrivee le rappelle ä la saine r6alite. II court,<br />

s'affaire, tape, hurle, pendant qu'on l'interpelle et<br />

ce deblaiement laborieux est fetö ä coups de trompe<br />

joyeux.<br />

Ce qui pend au pneu des cent-ä-1'heure.<br />

L'incident suivant est plus grave: deux autos<br />

nous passent ä cent ä l'heure : c'est legal, paraitil...<br />

Prudemment, nous avons emprunt§ les bascotes<br />

de la route, car les bolides nous ont fröle.<br />

Plus loin, a quelque cinq cents mötres. Tun passe<br />

l'autre. A cette allure, je vous laisse ä penser la<br />

vitesse du vainqueur. Une pente nous aspire, une<br />

lampe nous freine. A droite, un calvaire, en face,<br />

une auto. Mais est-ce bien une auto ou un amas<br />

de ferraille ? Un monsieur, pantalon blanc macule<br />

de taches d'huile et de sang, contemple ce spectacle.<br />

G'est un des deux fous de tout ä l'heure. En<br />

voulant « gratter» son concurrent, il avait heurte"<br />

le garde-fou d'un pont. Durant cent metres, la voiture,<br />

lancee comme une balle, avait fait. aux dires<br />

des . temoins, deux retournements comiplets, s'etait<br />

emboutie comme le mür'de ßoutenement d'un<br />

champ, exactement en face le caivaite-miij^jadis,<br />

vit semblables accidents. L'homme etait ä peine<br />

blessö...<br />

II avoua son imprudence. Son rival s'etait<br />

eclipse. La perte de sa voiture etait une punition<br />

qui avait l'air de le laisser fort sensible. Nous<br />

n'aioutämes rien ä son ennui.<br />

Amende? non pas: entr'aide.<br />

Un camion en panne, plus loin, barrait en<br />

Partie la route. Gomme le gendarme lui demandait<br />

son nom, il pleurnicha: « Vous allez me dresser<br />

contravention. > Encore un qui ne croyait qu'a la<br />

severite de Pandore. G'6tait pour lui envoyer du<br />

secours et avertir son patron. II doit s'en etonner<br />

encore.<br />

Carrefours et passages de la mort.<br />

La Gharite-sur-Loire! mauvais croisement. II<br />

est soigneusement reper6 par le capitaine Burtey<br />

qui note, note, inlassablement, les imperfections a<br />

supprimer et les reformes ä accomplir.<br />

Les passages a niveau fönt son desespoir.<br />

— On ne powvait pas les installer de facon<br />

plus dangereuse pour ne rien voir des trains.<br />

G'est exact. Leur abordage est particulierement<br />

difficile et les accidents nombreux.<br />

Mais ca, c'est de l'ouvrage ipour plus tard. Un<br />

rapport signalera ces imperfeetions notoires et<br />

sources de graves ennuis.<br />

Le lang ruban s'etale devant nou® inagnifiquement<br />

noir et luisant. Le goudron fond sous le soleil<br />

marocain. G'est le seul reproche qu'on «peut faire<br />

a l'administration des ponts et ohaussees de dispenser<br />

trop abondamment ä certains endroits ce<br />

revetement idöal.<br />

A part cela, la route est splendide. Pas une<br />

secousse, pas un cahot entre Paris et Gosne. G'est<br />

tout ä l'honneur de nos ponts et chaussees si solvent<br />

critiques.<br />

II fallait le dire: c'est fait.<br />

Une sagesse genärale.<br />

Gomme ils sont sages, d'une facon gßnerale, oes<br />

usagers de la voie Paris-Vichy. Tout est en regle<br />

avec l'administration, tous les numeros sont apparents,<br />

les autos tiennent bien leur droite: prudemment<br />

ils cornent quand ils vous dßpassent ou<br />

vous croisent, pas d'observation ou si peu qu'il<br />

vaut mieux ne pas en parier. Par exempie, ils<br />

pratiquent rarement la charite onvers leur prochain.<br />

Le panniste — c'est affreux comme neologisme<br />

— est livre

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