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Q
l i t t é r a t u r e Q U É B É C O I S E
BARBE
Julie Demers, Héliotrope, 138 p., 20,95$
Années 40 : une jeune fille à la
pilosité anormalement abondante
s’enfuit lorsque les villageois
défoncent la porte de sa maison.
En forêt, elle apprivoise ses
instincts de survie et se débrouille
pour semer ses poursuivants. Elle
écrit, emportée par l’urgence de
vivre, de préserver son humanité,
de se libérer du poids de la
différence dans un monde obtus, à l’affût de ce que la
vie pourrait lui offrir tout en se condamnant d’avance
à l’errance. Quasi poétique, la prose effrénée et livrée
dans un élan sauvage est savoureuse, colorant le récit
d’une teinte brute, authentique. Julie Demers signe un
premier roman sur le besoin viscéral de faire partie de la
meute, sur la fragilité de chacun face au jugement de sa
communauté, voire de son époque.
Chantal Fontaine Moderne (Saint-Jean-sur-Richelieu)
LE PARFUM DE JANIS
Corinne Larochelle, Le Cheval d’août
152 p., 19,95$
Le parfum
de Janis
Corinne Larochelle
Roman
C’est avec beaucoup de justesse dans
le ton que se dévoile le kaléidoscope
des souvenirs d’une femme, partie
au Portugal seule, laissant derrière
elle une relation trouble à laquelle
elle n’a pas su mettre fin. Au fil de ses
promenades à Lisbonne, elle revisite
son enfance imprégnée des humeurs
dépressives de sa mère, de toutes
ces heures passées à la soutenir sans
espoir d’avoir, juste un peu, le droit de vivre légèrement.
Le texte, ici, n’est pas furieux ni revendicateur; la narratrice
énonce plutôt des bribes de sa vie et cherche à saisir tout
l’amour qu’elle n’a pas eu pour mieux comprendre ses
propres démons actuels. C’est avec une plume de poète
que Corinne Larochelle nous convie à ce texte intime,
tendre et impitoyable à la fois.
Chantal Fontaine Moderne (Saint-Jean-sur-Richelieu)
SOLEIL
David Bouchet, La Peuplade, 350 p., 25,95$
Magnifique récit portant sur
l’immigration et présenté à travers
les yeux d’un préado, Soleil se
savoure dès les premières pages.
Souleye, affectueusement appelé
Soleil par sa nouvelle amie, arrive
du Sénégal avec sa famille. Ses
parents désirent plus que tout
passer inaperçus, s’intégrer sans
faire de vagues. Lorsque son
père, incapable de s’adapter, se fait interner, Soleil
cherche les réponses dans sa culture sénégalaise
tout en essayant d’appréhender l’univers dans lequel
il vit. Le regard à la fois naïf et lucide que porte le
garçon sur la société québécoise est sensible et
ses réflexions, pleines d’une sagesse qu’il ignore,
éclairent les gens qui l’entourent. Roman sur
l’adaptation, sur la résilience, Soleil s’avère remuant,
touchant et pertinent.
Chantal Fontaine Moderne (Saint-Jean-sur-Richelieu)
LE FLEUVE
Sylvie Drapeau, Leméac, 72 p., 11,95$
La comédienne Sylvie Drapeau
signe un court roman qui amène
le lecteur à hauteur d’enfant, dans
la tête d’une petite fille de 5 ans
qui a tout pour s’épanouir, dans
un contexte où les rituels religieux
sont source d’apaisement et non
d’emprise, dans un lieu où la
nature est le terrain de tous les jeux
et espiègleries. Cette innocence
trop bien préservée cédera sa
place à la souffrance, à une manière d’appréhender
le monde qui la changera à jamais. La mer, sa beauté
comme sa présence inquiétante, a été le sujet de
bien des hommages dans la littérature, et celui-ci se
démarque par sa prose sensible et épurée.
Véronique Grondin Du Centre (Ottawa)
LA FEMME QUI FUIT
Anaïs Barbeau-Lavalette, Marchand de feuilles
360 p., 23,95$
La romancière et cinéaste Anaïs
Barbeau-Lavalette utilise la forme
romanesque pour raconter l’histoire
de sa grand-mère, Suzanne Meloche,
poète qui, dans les années 50, peu de
temps après la signature du manifeste
Refus global, a abandonné ses enfants,
alors âgés de 1 et 3 ans. Suzanne
n’a jamais voulu dire pourquoi elle
avait agi ainsi et a toujours refusé de
reprendre contact. L’auteure a donc
engagé une détective privée pour enquêter sur la
mère de sa mère et a ensuite comblé les blancs avec
son écriture bouleversante, poétique et sensible. Ça
donne un roman intense, avec une forme rythmée,
en brefs chapitres, qui s’accorde admirablement au
propos. Un roman vif et bouleversant, comme pour
renouer des liens invisibles.
Manon Trépanier Alire (Longueuil)
HÔZUKI
Aki Shimazaki, Leméac/Actes Sud, 144 p., 17,95$
C’est s’octroyer une petite douceur
que s’offrir la lecture d’une œuvre
d’Aki Shimazaki. L’expérience
rappelle la texture du velours ou
encore la sensation de la paume
d’une main qui caresse une eau
douce et calme. On découvre cette
fois l’histoire de Mitsuko, qui tient
une librairie d’occasion tout en
élevant son précieux fils Tarô, sourd
et muet. Cet équilibre de vie sereine
pourrait cependant être ébranlé par la venue d’une
nouvelle cliente… Une fois de plus, on se laisse bercer
par des personnages humbles et porteurs de secrets
à travers une écriture et une histoire empreintes
de délicatesse, de profondeur et de douceur! Une
auteure à découvrir si ce n’est pas déjà fait!
Valérie Lavoie Lu-Lu (Mascouche)
12 • LES LIBRAIRES • NOVEMBRE - DÉCEMBRE 2015
Également disponible
en version numérique
www.editionsxyz.com
Une histoire de
fin du monde
AVANT QUE TOUT S'EFFONDRE
LIZ WORTH