Le sens de la vie Deux œuvres de « Natura Verde » 38 De l’obscurité lumineuse
L’obscurité dans la mythologie Un soleil éclatant brille aujourd’hui <strong>à</strong> ma fenêtre ; c’est l’été, il fait, chaud, ici, tout le monde ne rêve que de glaces et de piscine. Si j’adore la nuit, plus calme et plus fraîche, les hommes lui ont pourtant toujours préféré la chaleur bienfaisante du soleil, un symbole, un emblème dominant de bien des cultures. Dans l’Égypte antique, Rê, le créateur, personnifie notre étoile ; dans le panthéon grec c’est le bel Apollon qui endosse le lumineux rôle, et pour les Aztèques le maître du monde n’est autre que l’imprononçable « Huitzilopochtli » incarnation du soleil et de la guerre. De même que la lumière est joie, idéal, ordre, fertilité… L’obscurité est associée au froid et au chaos. La mythologie persane est une illustration évidente de cette dualité : les dieux principaux sont deux frères : Ormazd – la lumière - et Ahriman – l’obscurité. Ormazd est le maître et le créateur du monde ; il est souverain, omniscient, dieu de l’ordre, de la construction. Ahriman, symbolisé par un serpent, incarne la destruction, la stérilité, la mort. Ils sont en conflit permanent. La mythologie grecque ne prête qu’un petit rôle <strong>à</strong> l’obscurité ; qui a entendu parler d’Érèbe ? Divinité infernale issue du Chaos, époux de Nyx (la nuit), il représente les Ténèbres, l’obscurité des enfers. Encore un charmant individu. Le paradoxe du mythe ? Il est père Huitzilopochtli en personne des cieux et du jour. La nuit et l’obscurité engendrent les cieux et la lumière… Aussi malfaisants soient-ils, ils constituent l’origine de l’éclat divin du soleil ! On retrouve également cette idée de genèse dans les vieux récits scandinaves, qui racontent que la toute première vie est née de la rencontre des deux entités originelles, le feu et la glace, dans un immense abîme obscur. De la même façon, il est écrit que le Ragnarök, la fin de l’univers, se déroulera dans les ténèbres, d’où jaillira ultimement la lumière, pour la création d’un nouveau monde… Ainsi, la clarté, et intrinsèquement la vie, trouvent leur source dans l’obscurité. Une vision bien rassurante ! Même s’il nous faut passer une sombre nuit, le soleil se lèvera pour dispenser sa lumière ; « demain est un autre jour ». Quoi de mieux que cette certitude pour endurer les frayeurs que véhicule l’obscurité ? Car toutes ces légendes n’ont qu’une origine chez l’homme, la plus naturelle, la plus enfantine des origines : la peur du noir. La peur de cette obscurité dans laquelle les objets se confondent et se cachent, se dérobent <strong>à</strong> notre vue, dans laquelle le moindre bruissement a un timbre spectral et inquiétant. Le même frisson qui dressait, sous vos couvertures, vos poils d’enfants sur vos bras puérils, a parcouru des kilomètres carrés de peau humaine. Après avoir lu cet article, vous pouvez vous féliciter d’avoir su dominer une crainte aussi aguerrie. 39 L’Obscurité