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Rapport du jury 2006 - Département d'études anglophones

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Espagnols, même après avoir per<strong>du</strong> la Louisiane, ont toujours des possessions au Sud-Ouest<br />

(Nouveau-Mexique). Les Anglais ont des intérêts au Nord (dans la « Nouvelle France », c’est-à-dire le<br />

Canada). Les Russes, eux, revendiquent des régions au nord de l’embouchure de la Columbia,<br />

régions revendiquées aussi par les Anglais et les Américains après le voyage de Vancouver. Il y a<br />

donc un certain flou dans les frontières géographiques qui délimitent les possessions de chaque<br />

nation. L’expédition de Lewis et Clark doit préciser ces frontières, et surtout étendre au maximum<br />

celles des Etats-Unis, et également découvrir de nouveaux territoires pour pouvoir les revendiquer<br />

ultérieurement. Les cérémonies avec les Indiens où Lewis et Clark décernent des médailles de<br />

Jefferson et des drapeaux des Etats-Unis vont dans ce sens-là. Le geste est d’autant plus symbolique<br />

lorsque les capitaines s’adressent à des Indiens qui ne sont pas en territoire américain (comme les<br />

Chinooks, les Clatsops ou les Nez Percés). A travers ces discours, c’est bien la souveraineté des<br />

Etats-Unis qui est affirmée, et la volonté de la jeune nation de se faire une place dans le concert des<br />

nations puissantes, des « empires nationaux » cités par Ronda.<br />

Pourtant, il est intéressant de noter que Ronda place les Indiens parmi ces nations qui se<br />

disputent la conquête de l’Ouest.<br />

On peut donc finalement s’interroger sur la place des Indiens qui semble différente à la lecture<br />

des Journaux et sur le rôle « fondamental » de l’expédition de Lewis et Clark sur les connaissances<br />

de l’Ouest qui a été récemment relativisé par un groupe d’historiens faisant partie de la « New<br />

Western History ». Quand on lit le récit de Lewis et Clark, l’impression (basée sur des stéréotypes)<br />

que l’on a des Indiens est celle d’un peuple assez faible, ignorant (que les Américains infantilisent),<br />

prêt à écouter les conseils <strong>du</strong> « Bon père » (« Great Father ») de Washington, et à se soumettre. Cela<br />

s’applique surtout aux premières tribus indiennes rencontrées : Otos, Mandans, Arikaras ...à<br />

l’exception des Sioux Tetons, qui eux, expriment une hostilité certaine. L’objectif est clair et formulé de<br />

façon précise par Jefferson : il faut s’allier les Indiens afin de pouvoir accroître l’influence<br />

commerciale, et donc politique, des Etats-Unis. Or Ronda nous présente les Indiens comme un de<br />

ces empires nationaux, qui ont aussi des intérêts dans l’Ouest. Dans cette perspective, les Indiens ne<br />

sont pas une nation dominée, qui s’agenouille devant l’arrivée de nations « civilisées », mais une<br />

nation dominante, prête à défendre ses intérêts. Et, d’ailleurs, les tribus indiennes les plus à l’ouest<br />

ont l’habitude de commercer avec les Européens, et ne vont pas aisément se plier aux conditions<br />

proposées par les Etats-Unis, d’autant que ceux-ci sont en dehors de leurs territoires ! La tribu des<br />

« Blackfeet » au Nord, que Lewis rencontre sur le chemin <strong>du</strong> retour, est même ouvertement hostile.<br />

Ceci contribue bien à montrer le décalage entre la vision utopique et fausse de Jefferson et les<br />

réalités, constituées d’un réseau intertribal complexe que Lewis et Clark ont bien <strong>du</strong> mal à<br />

comprendre. L’intérêt des propos de Ronda est de remettre sur le devant de la scène ces<br />

« Américains natifs » dans l’histoire de l’Ouest américain.<br />

Cela nous con<strong>du</strong>it à nous interroger sur les limites de l’expédition de Lewis et Clark à l’apport<br />

des connaissances sur l’Ouest. D’un point de vue ethnographique, les connaissances apportées par<br />

les deux capitaines sont imparfaites et souvent fondées sur des stéréotypes. Par ailleurs, les<br />

historiens de l’école « New Western History » font remarquer que l’exploration de Lewis et Clark,<br />

comme les autres explorations de la période, n’ont pas eu d’impact majeur sur l’histoire de l’Ouest. La<br />

raison étant que celle-ci était une histoire qui avait évolué au cours des millions d’années<br />

précédentes. L’Ouest n’était pas une région inconnue, mais au contraire familière des Indiens. Cela<br />

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