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Faculté de Philosophie et Lettres - Jean-Philippe Toussaint

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vécu les mêmes événements historiques – la fin <strong>de</strong>s Trente Glorieuses – <strong>Toussaint</strong> <strong>et</strong><br />

Houellebecq sont propulsés « chef <strong>de</strong> file » <strong>de</strong> <strong>de</strong>ux générations littéraires distinctes.<br />

Nous sommes au milieu <strong>de</strong>s années quatre-vingt, le Belge <strong>de</strong> « vingt-sept ans<br />

bientôt vingt-neuf » représente le renouveau <strong>de</strong>s éditions <strong>de</strong> Minuit <strong>et</strong> du champ littéraire<br />

en général, quelque peu à bout <strong>de</strong> souffle après <strong>de</strong>ux décennies dominées par le Nouveau<br />

Roman. Autour <strong>de</strong> lui gravitent <strong>de</strong> jeunes auteurs dont les choix esthétiques similaires<br />

perm<strong>et</strong>tent à l’instar <strong>de</strong>s Nouveaux Romanciers, l’étiqu<strong>et</strong>age d’une nouvelle génération<br />

d’écrivains : les Minimalistes (Impassibles, Nouveaux Nouveaux Romanciers...) 1 .<br />

Qu’ont-ils <strong>de</strong> nouveau ces jeunes auteurs <strong>de</strong> Minuit, <strong>Toussaint</strong>, Echenoz, Deville<br />

qui commencent à publier dans les années 80 <strong>et</strong> qu’on désigne comme la<br />

« nouvelle génération », « les auteurs du Nouveau Nouveau Roman »? Puisque<br />

c’est là l’épithète dont on les honore, en quoi se distinguent-ils <strong>de</strong> leurs aînés?<br />

Dans les années 60, Robbe-Grill<strong>et</strong> mène campagne contre le personnage<br />

balzacien <strong>et</strong> la profon<strong>de</strong>ur psychologique, celle encore <strong>de</strong> l’intrigue dont la<br />

linéarité <strong>et</strong> la cohérence sont perçues comme d’artificielles conventions. […]<br />

Après la critique du suj<strong>et</strong>, c’est donc, aujourd’hui, le r<strong>et</strong>our au suj<strong>et</strong> qui<br />

s’accompagne évi<strong>de</strong>mment du r<strong>et</strong>our au récit, un récit certes très éloigné du<br />

modèle balzacien. 2<br />

Derrière ce propos générationnel, on voit que pour la critique 3 , <strong>Toussaint</strong> <strong>et</strong> sa<br />

briga<strong>de</strong> sont les héritiers du Nouveau Roman <strong>et</strong> représentent une nouvelle mouvance.<br />

Ceux-ci produiraient une « synthèse dialectique » <strong>de</strong> leur style en reconstruisant le récit<br />

que les Beck<strong>et</strong>t, Robbe-Grill<strong>et</strong> <strong>et</strong> Sarraute avaient délaissé au profit du travail sur la forme,<br />

sur le signifiant. Ils détournent cependant l’illusion réaliste, la linéarité, grâce à la mise en<br />

paragraphes <strong>de</strong> leur récit <strong>et</strong> à l’insertion <strong>de</strong> ce que l’on a appelé « fausses anecdotes » 4 .<br />

C’est aussi le r<strong>et</strong>our à une syntaxe simple – « dix-huitièmiste » précise Jan<br />

Ba<strong>et</strong>ens 5 – avec <strong>de</strong>s phrases courtes <strong>et</strong> <strong>de</strong>nses, à la rhétorique ludique. D’aucuns les ont<br />

surnommés « Impassibles » car l’une <strong>de</strong> leurs caractéristiques est aussi <strong>de</strong> minimiser la<br />

psychologie <strong>de</strong>s personnages <strong>et</strong> leurs émotions. L’humour est leur fer <strong>de</strong> lance, sorte <strong>de</strong><br />

























































<br />

1<br />

Pour ces étiqu<strong>et</strong>tes, voir La salle <strong>de</strong> bain, revue <strong>de</strong> presse établie par Laurent Demoulin, Paris, Minuit,<br />

2005.<br />

2<br />

BERTHO (Sophie), « <strong>Jean</strong>-<strong>Philippe</strong> <strong>Toussaint</strong> <strong>et</strong> la métaphysique » in AMMOUCHE-KREMERS,<br />

HILLENAAR (éd.), Jeunes auteurs <strong>de</strong> Minuit, Paris, Minuit, 1994, p. 15. C’est nous qui soulignons.<br />

3<br />

Nous paraphrasons ici l’article <strong>de</strong> Laurent Demoulin – « Génération Innommable » in Textyles n° 14,<br />

Bruxelles, Textyles-édition, 1997, pp. 7-17.<br />

4 
Voir l’article <strong>de</strong> Laurent Demoulin « La fougère dans le frigo », lors <strong>de</strong> sa communication à l’occasion du<br />

colloque organisé par le CCIC <strong>de</strong> Cerisy-la-Salle du 21 au 31 juill<strong>et</strong> 2003.
<br />

5<br />

BAETENS (Jan), « Un nouveau romancier qui s’ignore ? » in BERTRAND (<strong>Jean</strong>-Pierre), BIRON<br />

(Michel), DENIS (Benoît), sous la direction <strong>de</strong> GRUTMAN (Rainier), (dir.), Histoire <strong>de</strong> la littérature belge<br />

1830-2000, Paris, Fayard, 2003, p. 520.<br />

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