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Au château de Corinne - E-monsite

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Il <strong>de</strong>meura silencieux. Puis il dit :<br />

– Si je m’exécute, gar<strong>de</strong>rez-vous ceci à l’esprit : je suis conscient que le bonheur <strong>de</strong> cette<br />

jeune dame est constitué <strong>de</strong> quelque chose que Madame Winthrop a mis <strong>de</strong> côté, <strong>de</strong> son<br />

propre chef, comme étant dénué <strong>de</strong> valeur ?<br />

Comme il terminait sa phrase, il se tourna pour la regar<strong>de</strong>r. Mais leurs regards ne se<br />

croisèrent pas.<br />

– Oui, répondit-elle.<br />

Il attendit, mais elle n’ajouta rien.<br />

– Madame Percival, poursuivit-il, est une belle jeune femme, dont le visage ressemble à<br />

une fleur sauvage <strong>de</strong>s bois. Son expression est, à mon sens, merveilleuse, une expression<br />

<strong>de</strong> douceur, <strong>de</strong> bonté simple et <strong>de</strong> gentille confiance. On est reconnaissant d’avoir pu<br />

simplement contempler un tel visage.<br />

– Vous vous exprimez avec chaleur. Je crains que vous ne soyez jaloux <strong>de</strong> ce pauvre<br />

Monsieur Percival.<br />

– Il ne m’a pas paru à plaindre. Et si je suis jaloux, ce n’est pas la première fois. Il m’a<br />

toujours paru chanceux.<br />

– Peut-être qu’il existe d’autres fleurs sauvages <strong>de</strong>s bois. Vous <strong>de</strong>vriez chercher avec<br />

persévérance.<br />

Elle ouvrit le portail, s’avança et fit signe à son palefrenier.<br />

– C’est ce que j’essaie <strong>de</strong> faire, mais en vain. Je me sens très solitaire parfois.<br />

– Quel aveu <strong>de</strong> faiblesse !<br />

Il l’aida à se mettre en selle.<br />

– C’est possible, mais c’est la vérité. Les femmes ne croient jamais qu’on puisse dire la<br />

vérité pour la vérité. Cela leur semble vulgaire.<br />

– Vous voulez dire cruel, répondit Katharine Winthrop.<br />

Et elle s’éloigna. Le palefrenier et Gibbon la suivaient. Ford retourna à la maréchalerie.<br />

Le len<strong>de</strong>main, il partit pour Heil<strong>de</strong>lberg.<br />

Mais ce n’était pas la <strong>de</strong>rnière fois qu’il voyait le vieux <strong>château</strong> <strong>de</strong> <strong>Corinne</strong>. Le 25<br />

octobre, une fois encore, il remontait à cheval l’allée <strong>de</strong> platanes <strong>de</strong> Miolans. Cette fois,<br />

les branches avaient perdu leurs feuilles.<br />

– Oh John ! mon cher John ! s’exclama Ma<strong>de</strong>moiselle Pitcher en se ruant au salon, dès<br />

qu’on lui eut annoncé son arrivée.<br />

– Comme je suis heureuse <strong>de</strong> vous voir ! Mais comment avez-vous su, je veux dire,<br />

comment êtes-vous arrivé ici, à cette pério<strong>de</strong> <strong>de</strong> l’année ?<br />

– Par le train et à cheval, répondit-il. J’aime la campagne à l’automne. Et je suis heureux<br />

<strong>de</strong> vous voir tellement en forme, tante Sylvia.<br />

Mais si Sylvia semblait physiquement en forme, son âme souffrait. Elle commençait <strong>de</strong>s<br />

phrases sans les terminer. Elle portait souvent son petit mouchoir à ses lèvres comme<br />

pour se censurer elle-même. Cousin Walpole était en déplacement à Genève :<br />

– Il s’occupe <strong>de</strong>s affaires <strong>de</strong> Katharine. Non, Katharine n’est pas à la maison. Elle fait<br />

une promena<strong>de</strong> à cheval quelque part dans le voisinage. Elle n’est pas en forme et a<br />

besoin d’exercice.<br />

Katharine aimait également la campagne à l’automne, mais Sylvia trouvait qu’il pleuvait<br />

trop. Après un moment, Ford prit congé et déclara qu’il repasserait dans la soirée. Quand<br />

il eut atteint la route <strong>de</strong> campagne, il s’arrêta. Il leva et baissa les yeux, puis il tourna son<br />

cheval vers le Sud. C’était un jour bien maussa<strong>de</strong> pour une promena<strong>de</strong> à cheval. La pluie<br />

d’automne avait longuement détrempé le sol, <strong>de</strong>s nuages couvraient le ciel, et un vent<br />

froid soufflait. Il avançait vite et quand il arriva près <strong>de</strong> Coppet, il examina <strong>de</strong>rechef les<br />

traces humi<strong>de</strong>s au sol, puis il se dirigea vers le <strong>château</strong>. Il ne s’était pas trompé. Le cheval<br />

<strong>de</strong> Madame Winthrop se trouvait là, sans le palefrenier cette fois. Le cheval était attaché<br />

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