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jurisprudence administrative - Gestion et Finances Publiques La revue

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chronique de <strong>jurisprudence</strong> <strong>administrative</strong><br />

En ce qui concerne les autres fondements de<br />

responsabilité :<br />

Considérant qu’en estimant que ni la délibération<br />

du 19 juill<strong>et</strong> 1991 du conseil de la communauté<br />

urbaine, relative à la constitution de la<br />

future société concessionnaire, ni les divers courriers<br />

du président de la communauté, notamment<br />

ses l<strong>et</strong>tres du 27 juill<strong>et</strong> 1992 <strong>et</strong> du 12 août<br />

1994, ne perm<strong>et</strong>taient à M e M d’invoquer une<br />

décision ou un engagement de la communauté<br />

urbaine de prendre en charge l’ensemble des<br />

dépenses de la société MB2 en cas d’abandon<br />

du proj<strong>et</strong> du métro, la cour <strong>administrative</strong><br />

d’appel de Bordeaux n’a pas dénaturé les<br />

pièces du dossier ;<br />

Considérant que la Cour n’a pas davantage<br />

dénaturé les pièces du dossier en estimant,<br />

d’une part, que la société MB2 avait, avant la<br />

signature de la convention du 13 novembre<br />

1992, fourni des prestations en dehors de toute<br />

relation contractuelle, d’autre part, que c<strong>et</strong>te<br />

convention avait pour obj<strong>et</strong> de payer des prestations<br />

déjà exécutées ; qu’elle n’a pas non plus<br />

fait d’erreur de droit en jugeant qu’en exécutant<br />

dans ces circonstances des prestations demandées<br />

par la communauté urbaine, la société<br />

avait commis une faute de nature à exonérer<br />

c<strong>et</strong>te communauté d’une partie de la responsabilité<br />

qu’elle encourait en raison de la faute<br />

qu’elle avait elle-même commise en passant<br />

une convention entachée de nullité ;<br />

En ce qui concerne le préjudice :<br />

Considérant, en premier lieu, qu’il appartient au<br />

cocontractant de l’Administration qui entend<br />

obtenir l’indemnisation du préjudice que lui a<br />

causé la faute commise par c<strong>et</strong>te administration<br />

en signant un contrat entaché de nullité, de justifier<br />

de la réalité de son préjudice, <strong>et</strong> notamment<br />

des dépenses <strong>et</strong> des charges qu’il a supportées<br />

pour exécuter ce contrat ainsi que de sa perte<br />

de bénéfice ; qu’ainsi, la Cour n’a pas commis<br />

d’erreur de droit en jugeant qu’il appartenait à<br />

M e M de justifier de la réalité des dépenses <strong>et</strong> des<br />

charges que la société MB2 avait spécialement<br />

engagées pour l’exécution du contrat ;<br />

Considérant, en deuxième lieu, que, dans le dernier<br />

état de ses écritures devant le tribunal administratif,<br />

la société MB2 ne demandait plus le<br />

paiement des sommes prévues par la convention<br />

du 13 novembre 1992 <strong>et</strong> ayant fait en partie<br />

l’obj<strong>et</strong> de provision, mais réclamait l’indemnisation<br />

des préjudices qu’elle avait subis du fait de<br />

la nullité de c<strong>et</strong>te convention <strong>et</strong> de l’abandon<br />

du proj<strong>et</strong> de métro ; que la Cour, en estimant que<br />

la société ne pouvait pas obtenir le remboursement<br />

de la taxe sur la valeur ajoutée ayant grevé<br />

ses dépenses au motif que la société avait présenté<br />

à la communauté urbaine ses demandes<br />

de paiement de provision sans mentionner la<br />

taxe <strong>et</strong> qu’en conséquence ces demandes<br />

étaient réputées toutes taxes comprises, a dénaturé<br />

les conclusions de la société ; que M e A est<br />

ainsi fondée à demander l’annulation de c<strong>et</strong><br />

arrêt en tant qu’il a statué sur ce chef de préjudice<br />

;<br />

Considérant qu’en application des dispositions<br />

de l’article L. 821-2 du Code de justice<br />

<strong>administrative</strong>, il y a lieu pour le Conseil d’Etat,<br />

dans les circonstances de l’espèce, de statuer<br />

sur les conclusions présentées par M e M devant<br />

la cour <strong>administrative</strong> d’appel de Bordeaux en<br />

tant seulement qu’elles tendent au remboursement<br />

de la taxe sur la valeur ajoutée ;<br />

Considérant qu’il résulte de ce qui précède que<br />

M e M est fondée à soutenir que c’est à tort que<br />

le tribunal administratif de Bordeaux a rej<strong>et</strong>é sa<br />

demande tendant au paiement de la taxe sur la<br />

valeur ajoutée au motif que ses demandes de<br />

paiement de provisions ne mentionnaient pas<br />

ladite taxe ; qu’il y a lieu, par l’eff<strong>et</strong> dévolutif de<br />

l’appel, d’examiner les moyens présentés par la<br />

société MB2 à l’appui de ses conclusions tendant<br />

au remboursement de c<strong>et</strong>te taxe ;<br />

Considérant que, lorsque la victime qui est,<br />

comme en l’espèce, une société commerciale,<br />

relève d’un régime fiscal qui lui perm<strong>et</strong> de<br />

déduire tout ou partie de la taxe sur la valeur<br />

ajoutée, le montant de l’indemnisation ne doit<br />

pas comprendre le montant de la taxe ainsi<br />

déductible ou remboursable ; qu’il appartient<br />

ainsi à la société MB2, à laquelle incombe la<br />

charge de prouver avec exactitude son préjudice,<br />

de démontrer qu’elle n’est pas en mesure<br />

de déduire ou de se faire rembourser ladite taxe ;<br />

que c<strong>et</strong>te société, qui est assuj<strong>et</strong>tie à la taxe sur<br />

la valeur ajoutée, établit qu’en raison de<br />

l’abandon du proj<strong>et</strong> de métro <strong>et</strong> de sa liquidation,<br />

elle ne percevra aucune rec<strong>et</strong>te <strong>et</strong><br />

n’encaissera pas de taxe sur la valeur ajoutée ;<br />

qu’elle est ainsi dans l’incapacité de déduire la<br />

taxe qu’elle a payée aux entreprises qui lui ont<br />

fourni diverses prestations ; qu’elle est, dès lors,<br />

fondée à demander que le montant de c<strong>et</strong>te<br />

taxe ayant grevé les dépenses prises en compte<br />

au titre du préjudice indemnisable soit compris<br />

dans ce préjudice ; qu’il résulte des pièces du<br />

dossier que, compte tenu du redressement fiscal<br />

portant sur la restitution des crédits de taxe dont<br />

elle avait bénéficié avant l’abandon du proj<strong>et</strong><br />

de métro ainsi que sur des intérêts de r<strong>et</strong>ard <strong>et</strong><br />

dont la communauté urbaine ne conteste pas<br />

qu’il soit afférent aux dépenses r<strong>et</strong>enues pour le<br />

calcul du préjudice indemnisable de la société,<br />

il sera fait, dans les circonstances de l’espèce,<br />

une juste appréciation du préjudice total subi par<br />

la société en portant l’indemnité mise à la<br />

charge de la communauté urbaine de Bordeaux<br />

de la somme de 10 020 407 c à la somme de<br />

11 530 000 c ; qu’il y a lieu, en conséquence de<br />

réformer sur ce point le jugement du tribunal<br />

administratif de Bordeaux ; (...).<br />

Observations<br />

L’arrêt Société MB2 du 24 novembre 2006, qui<br />

sera publié au Recueil Lebon, contribue à illustrer<br />

la <strong>jurisprudence</strong> <strong>administrative</strong> relative à<br />

l’enrichissement sans cause, quasi-contrat peu<br />

fréquemment mis en œuvre dans le contentieux<br />

administratif ; c’est là son principal intérêt.<br />

Liminairement, il convient de rappeler brièvement<br />

les faits de l’espèce <strong>et</strong> la procédure<br />

suivie.<br />

Par une délibération de son conseil du 19 juill<strong>et</strong><br />

1991, la communauté urbaine de Bordeaux<br />

(CUB), qui avait en proj<strong>et</strong> la construction d’un<br />

métro, a notamment décidé de r<strong>et</strong>enir la candidature<br />

d’un groupement de sociétés devant<br />

constituer avec d’autres sociétés la future<br />

société concessionnaire, de lui demander de<br />

préparer le proj<strong>et</strong> de traité de concession,<br />

d’établir le dispositif contractuel devant lier<br />

c<strong>et</strong>te société avec la maîtrise d’œuvre, de<br />

l’inviter à procéder aux consultations des<br />

entreprises, <strong>et</strong> d’établir les conditions de prise<br />

en charge des dépenses exposées dans c<strong>et</strong>te<br />

phase préparatoire à la concession. Par une<br />

deuxième délibération du 6 novembre 1992, le<br />

conseil de la CUB a adopté le réseau à long<br />

terme des transports en commun ; il a également<br />

décidé de la construction d’une première<br />

tranche opérationnelle, <strong>et</strong> autorisé le<br />

président de la communauté, d’une part, à<br />

poursuivre les négociations du traité de<br />

concession avec le concessionnaire désigné,<br />

la société pour la concession du métro <strong>et</strong> du<br />

réseau de bus de l’agglomération bordelaise<br />

(la société MB2), d’autre part, à confier à c<strong>et</strong>te<br />

société les travaux préparatoires nécessaires à<br />

la passation du traité de concession à intervenir<br />

; il a enfin autorisé son président à signer<br />

la convention relative à ces travaux préparatoires.<br />

C<strong>et</strong>te convention a été effectivement<br />

signée avec la société MB2 le 13 novembre<br />

1992. Mais, par un jugement du 23 décembre<br />

1993, le tribunal administratif de Bordeaux a<br />

annulé la délibération du 6 novembre 1992.<br />

<strong>La</strong> CUB a alors pris le 10 janvier 1994 une nouvelle<br />

délibération ayant pour obj<strong>et</strong> notamment<br />

de réitérer les eff<strong>et</strong>s de la convention du<br />

13 novembre 1992 ; mais c<strong>et</strong>te dernière délibération<br />

a été elle aussi annulée par un jugement<br />

du tribunal administratif de Bordeaux en<br />

date du 4 octobre 1994.<br />

Dans la mesure où, entre temps, le proj<strong>et</strong> de<br />

concession du métro avait été abandonné par<br />

une délibération du 22 juill<strong>et</strong> 1994, la communauté<br />

urbaine de Bordeaux a dès lors saisi le<br />

tribunal administratif d’une action en résiliation<br />

de la convention du 13 novembre 1992, étant<br />

précisé que la société MB2 a présenté au<br />

même tribunal une demande de condamnation<br />

de la communauté urbaine qui, dans le<br />

dernier état de ses écritures, portait sur une<br />

somme de 122 039 185 F. Par un premier jugement<br />

du 31 décembre 1998, devenu définitif,<br />

le tribunal administratif de Bordeaux a déclaré<br />

nulle la convention du 13 novembre 1992, <strong>et</strong><br />

par un second jugement du 10 juin 1999, il a<br />

condamné la communauté urbaine à payer à<br />

la société une indemnité d’un montant de<br />

65 729 558,97 F, sur laquelle devaient s’imputer<br />

les versements déjà effectués, le solde étant<br />

de 3 212 587,60 F. <strong>La</strong> société MB2, représentée<br />

par son mandataire liquidateur M e M, a fait<br />

appel de ce dernier jugement en tant qu’il<br />

n’avait pas fait intégralement droit à sa<br />

demande. <strong>La</strong> cour <strong>administrative</strong> d’appel de<br />

Bordeaux a rej<strong>et</strong>é c<strong>et</strong>te requête par un arrêt<br />

du 30 mars 2004 contre lequel M e M s’est donc<br />

pourvu en cassation.<br />

Alors que, dès 1892 (cf. Cass., req., 15 juin 1892,<br />

Boudier, D. 1892.1.596, S. 1893.1.181, note<br />

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