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Michelle Sapori<br />
la première à voir le jour. Notre propos ne sera donc pas ici de retracer la totalité<br />
de l’histoire de l’Académie de Soissons, son évolution au XVIII e siècle jusqu’à<br />
la suppression par la Révolution de l’institution académique ne différant guère de<br />
celle des autres académies, mais d’apporter à travers Soissons des éclairages sur<br />
l’implantation en province de la république des lettres au XVII e siècle 5 . L’essentiel<br />
de la réflexion sera circonscrit au « siècle de Louis XIV », allant du stade<br />
embryonnaire de l’Académie à la fin du règne en 1715, où précisément un changement<br />
s’opéra à l’Académie de Soissons qui entra à cette date en léthargie pour<br />
une vingtaine d’années.<br />
Le mouvement académique européen<br />
L’Académie de Soissons s’inscrit dans une mouvance académique européenne<br />
qu’il importe de retracer pour mieux comprendre le contexte de sa création.<br />
Les académies nous viennent d’Italie où fut fondée au milieu du XV e<br />
siècle à Florence la première de toutes et également la plus fameuse, l’Académie<br />
platonicienne, sous l’impulsion de Marsile Ficin (1433-1799). Sous la protection<br />
de Laurent de Médicis, des hommes tels que Ange Poliziano et Pic de la Mirandole<br />
lui donnèrent un lustre exceptionnel. Cette académie se proposait en particulier<br />
de renouveler les études philosophiques en cherchant à concilier Platon et<br />
Plotin avec les idéaux humanistes et religieux de l’époque.<br />
Le mouvement académique prit une telle ampleur en Italie que le XVI e<br />
siècle italien a pu être qualifié de « siècle des académies ». En France, ce fut<br />
encore sous les auspices des descendants de la branche féminine des Médicis que<br />
les académies commencèrent à voir le jour. Charles IX et Henri III, tout comme<br />
la cour des derniers Valois, étaient imprégnés de cette tradition. La Pléiade,<br />
groupe poétique dirigé par Pierre de Ronsard, et auquel est étroitement associé le<br />
nom de Jean Dorat, personnalité éminente considérée par les autres poètes 6<br />
5. Si les différents ouvrages sur l’histoire de Soissons évoquent ce sujet – cf. par exemple Henri<br />
Martin et Paul L. Jacob, Histoire de Soissons, Paris, Arnould libraire, 1837, et Leroux, Histoire de<br />
Soissons, Soissons, imp. Fossé Darcosse, t II, 1839 –, il n’existe aucune étude exhaustive sur l’histoire<br />
de son académie. L’idée courante selon laquelle les archives la concernant auraient disparu lors<br />
de la Révolution ou de l’incendie du bailliage en 1814 a probablement découragé les chercheurs<br />
potentiels, obligés dès lors de rassembler des sources éparses et lacunaires. Un document important<br />
dont l’existence est sérieusement avérée par un contemporain n’a ainsi jamais été retrouvé : il s’agit<br />
d’un ouvrage en deux volumes de l’ensemble des écrits des quatre fondateurs de l’Académie de Soissons.<br />
À ce jour le travail le plus complet sur cette académie provinciale est l’excellent article du capitaine<br />
de Buttet, « Notice sur l’Académie de Soissons », Bulletin de la Société archéologique,<br />
historique et scientifique de Soissons, Soissons, imp. G. Nougarède, 1921, t. 20, 3 e sér., 1913-1921,<br />
p. 79-249, lui-même précédé par celui de Virgile Calland, « De l’Académie de Soissons », Mélanges<br />
pour servir à l’histoire du Soissonnais, recueillis et publiés par E. Fossé Darcosse., Soissons,<br />
imp. Fossé d’Arcosse, 1844, p. 1-61.<br />
6. Parmi les sept membres de La Pléiade figurait Joachim Du Bellay qui rédigea en 1549 une Défense<br />
et illustration de la langue française.<br />
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