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La lutte contre la mort au XVIII e siècle<br />

légué de Chauny à propos de la nécessité de ces leçons, un problème, avancé par<br />

presque tous, fragilise l’initiative de l’intendant : le coût pour les femmes « de<br />

journaliers […] de malaisance » 19 qui se déplaceraient à Soissons. Ce « leur serait<br />

un dommage qu’elles ne sont pas en l’état de soutenir » 20 .<br />

Les subdélégués favorables au projet soulignent, eux, l’impéritie des<br />

matrones et le disent parfois sans ménagement, tout en faisant toujours une<br />

distinction géographique entre ville et campagne, et une distinction sociale entre<br />

riches et pauvres, distinctions fondées sur l’appel possible à un chirurgien plus<br />

habile. C’est le subdélégué de Guise qui fait le mieux cette distinction :<br />

« Nous avons à Guise une seule sage-femme dont le commun du<br />

peuple se sert ; le chirurgien très entendu et très expérimenté accouche les<br />

personnes en l’état au-dessus et supplée dans bien des occasions dans<br />

lesquelles la sage-femme se trouve embarrassée. Les sages-femmes des<br />

paroisses des environs sont sans grande expérience. » 21<br />

À Crépy-en-Valois, la ville a une sage-femme qui, croit-on, a fait son<br />

apprentissage à Paris ; mais dans les villages environnants, c’est la « Providence »<br />

qui conduit les sages-femmes et la routine qui les instruit tant bien que mal dans<br />

leur art.<br />

Dogny, le médecin-conseil de Laon, décrit bien dans son mémoire la situation<br />

des petites paroisses. Les sages-femmes y agissent par routine, avec<br />

hardiesse et aussi par charité en rendant service « car les pauvres sont visiblement<br />

plus charitables envers les pauvres que ne le sont les riches ». Évidemment, elles<br />

se trouvent dépourvues « dès qu’il survient le moindre embarras ». Dogny juge<br />

d’ailleurs la pauvreté responsable des accouchements « contre nature » 22 . Les<br />

femmes pauvres ne se ménagent pas pendant les derniers jours de leur grossesse<br />

car elles sont astreintes à des travaux rudes et fatigants jusqu’aux premières<br />

douleurs, et, à peine délivrées, forcées à recommencer trop tôt, « cela parce que<br />

nécessité n’a point de loi ». De là les accidents fâcheux : « combien de femmes<br />

estropiées, assassinées, que de citoyens diminués, à charge » 23 !<br />

C’est pourquoi ces subdélégués approuvent sans réserve l’initiative de l’intendant.<br />

Voici la réponse du subdélégué de La Fère :<br />

« Je ne vois rien de plus digne de vos bontés et de vos attentions<br />

obligeantes pour la province que le projet de faire venir à Soissons pendant<br />

quelques mois une sage-femme habile et capable d’enseigner avec supériorité<br />

l’art essentiel des accouchements. Comme la plupart des sages-<br />

19. Arch. dép. Aisne, C 629, lettre du subdélégué de Crépy-en-Valois à l’intendant, le 12 juin 1760.<br />

20. Arch. dép. Aisne, C 629, lettre du subdélégué de Chauny à l’intendant, le 30 mai 1760.<br />

21. Arch. dép. Aisne, C 629, lettre du subdélégué de Guise à l’intendant, le 7 juin 1760.<br />

22. Arch. dép. Aisne, C 629, mémoire accompagnant la lettre du subdélégué de Laon à l’intendant,<br />

le 26 juin 1760.<br />

23. Arch. dép. Aisne, C 629, lettre du subdélégué de Ribemont à l’intendant, le 30 mai 1750<br />

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