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L’Académie royale de Soissons<br />

chacun prenait sa place sans distinction de rang social mais suivant l’ordre d’arrivée,<br />

sans interdit protocolaire. Le système de vote des dirigeants confirmait<br />

cette indifférence de principe au rang social : le directeur et le chancelier, recrutés<br />

parmi « académiciens demeurant à Soissons », étaient tirés au sort tous les six<br />

mois alors que le secrétaire perpétuel était élu. Tous égaux à l’intérieur, mais pour<br />

mieux séparer l’homme académique de l’homme vulgaire, la distinction se<br />

faisant suivant un critère intellectuel plus que de naissance ou de richesse. Selon<br />

Héricourt, « l'entrée dans ces réunions académiques n'est ouverte qu'à ceux qui<br />

nourris aux lettres dès leur enfance, cherchent à se distinguer de la foule par la<br />

supériorité de leur science et l'éclat de leur éloquence ». Le droit académique de<br />

Soissons au XVII e siècle fondait un esprit de corps et renforçait l'homogénéité<br />

interne du groupe.<br />

Les lettres patentes furent obtenues mais à la condition expresse d’une<br />

soumission totale aux orientations parisiennes et sous la surveillance d’un protecteur<br />

membre de l’Académie française, un des « illustres » comme on disait<br />

alors 67 . L’Académie de Soissons se plaçait ainsi totalement sous le patronage de<br />

l’Académie française, et le symbole de cette allégeance fut le choix de son<br />

emblème : un aigle qui s’élance d’un vol rapide vers le soleil et montre la route à<br />

un aiglon avec la devise Maternis ausibus audax, allusion à la qualité de fille de<br />

l’Académie française que prit l’Académie de Soissons. L’aigle et l’aiglon volent<br />

vers le soleil, emblème de Louis le Grand, ce qui indique clairement que les<br />

travaux des académiciens n’avaient qu’un seul but et une seule fin : le roi. L’Académie<br />

d’Arles elle aussi avait choisi une devise qui rappelait son association avec<br />

l’Académie française : par allusion au laurier, devise de l’académie mère, elle<br />

avait gravé sur son sceau deux lauriers réchauffés par les rayons du soleil audessus<br />

des mots Sole foventur eodem.<br />

Institution vouée à l’utilité publique et à la célébration du prestige local,<br />

l’Académie de Soissons participait à la célébration de la grandeur urbaine. Lors des<br />

grandes fêtes, l’institution académique avait son rang comme les autres « ordres ».<br />

Lorsque Louis Le Grand, allant au devant de la princesse de Bavière, future épouse<br />

du dauphin, s’arrêta à Soissons, le maître des cérémonies invita les ordres à venir<br />

présenter leurs hommages. Les magistrats municipaux furent appelés les premiers,<br />

suivis du clergé puis de l’académie, ce qui était un grand honneur car elle passait<br />

avant les magistrats et les autres corporations. Tous les académiciens de Paris et de<br />

province avaient le privilège de haranguer les souverains debout et non à genoux<br />

comme les députés des villes et de la plupart des autres compagnies. On sait les<br />

académiciens étaient autorisés, privilège extraordinaire, à demeurer assis en<br />

présence des personnes royales. Ainsi Hébert, député de la ville et de l’Académie<br />

de Soissons, eut certainement le choix entre haranguer le roi debout en tant que<br />

député de l’académie, ou à genoux en tant que député de la ville : il prit la parole<br />

67. Pendant plusieurs années la société d’Arras, constituée en 1737, ne put obtenir ses lettres patentes<br />

faute de se présenter avec un protecteur de l’Académie française. À cause de ce motif et aussi<br />

pour n’avoir pas suivi le règlement de l’Académie de Soissons qui lui avait été proposé pour modèle,<br />

elle n’obtint ses lettres patentes qu’en 1773. Cf. Van Drival, Histoire de l’Académie d’Arras, 1872.<br />

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