rapport mondial sur les drogues - United Nations Office on Drugs ...

2. Estimation de la valeur des marchés des
<strong>drogues</strong> illicites
2.1 Historique
L'industrie des <strong>drogues</strong> illicites fonctionne en dehors de
la loi. Ses "sociétés" ne sont pas cotées en bourse; leurs
comptes d'exploitation ne sont pas vérifiés par des cabinets
d'experts-comptab<strong>les</strong>; enfin, la vitalité du marché
des <strong>drogues</strong> n'est pas constamment évaluée et soumise
aux regards scrutateurs des analystes financiers, des
économistes et des prévisionnistes. Et pourtant, l'on sait
que l'industrie des <strong>drogues</strong> illicites est considérable et
représente donc, en raison des flux financiers impliqués,
une menace pour un certain nombre d'économies
nationa<strong>les</strong>. Les fonds générés par le trafic de <strong>drogues</strong>
peuvent servir à intimider (notamment par le recours à
la violence) ou à corrompre <strong>les</strong> fonctionnaires de gouvernements
ou, comme c'est parfois le cas, des régimes
politiques tout entiers - et même à supplanter des activités
économiques licites, compromettant ainsi l'avenir
du pays. Si l'on veut réellement contrôler l'industrie des
<strong>drogues</strong> illicites, il importe absolument de savoir quels
sont <strong>les</strong> montants impliqués et d'où ils proviennent.
L'utilité d'un tel exercice est évidente, tant pour la définition
des politiques à suivre que pour l'analyse des
tendances. Connaître la valeur de ce marché est incontestablement
utile à la formulation des politiques. Une
estimation judicieuse de la taille du marché des stupéfiants
doit également permettre aux analystes d'évaluer
l'importance relative des marchés des <strong>drogues</strong> par <strong>rapport</strong>
aux économies loca<strong>les</strong>; cela permettra aussi de comparer
le poids économique des différentes <strong>drogues</strong>. En
outre, connaître la taille de ces marchés nous fournira
un élément de comparaison avec d'autres marchés
illicites; la question prend toute son importance dès lors
qu'il s'agit d'affecter une partie des minces ressources
dont on dispose à la lutte contre diverses activités illéga<strong>les</strong>.
Le caractère occulte du marché <strong>mondial</strong> des <strong>drogues</strong>
illicites complique singulièrement la tâche de ceux qui
s'efforcent d'en estimer l'importance. Mais que l'on
n'aille pas croire que c'est parce le marché des <strong>drogues</strong>
n'est pas régi, comme tous <strong>les</strong> autres, par <strong>les</strong> lois de l'offre
et de la demande - car on reconnaît désormais qu'il
l'est. C'est plutôt parce que <strong>les</strong> intrants fondamentaux
dont on aurait besoin pour procéder à une telle estimation
(données relatives à la production, aux prix, aux
quantités exportées, importées et consommées) sont
souvent eux-mêmes des estimations, fréquemment
fondées <strong>sur</strong> des données incomplètes ou défectueuses.
Un certain nombre de tentatives ont déjà été faites dans
le passé pour évaluer la taille de l'industrie des <strong>drogues</strong>
illicites, notamment par le GAFI (Groupe d'action
financière internationale) et <strong>les</strong> <strong>Nations</strong> Unies. Le GAFI
estimait qu'à la fin des années 80, <strong>les</strong> ventes de cocaïne,
d'héroïne et de cannabis représentaient chaque année,
aux États-Unis et en Europe 1 , quelque 124 milliards de
$ É.-U. Sur ce montant, on considérait que 85 milliards
de $ É.-U., soit 70% du total, étaient "blanchis" ou
investis 2 . Compte tenu de l'inflation, le GAFI estime
que la taille de l'industrie des <strong>drogues</strong> illicites de la fin
des années 80 équivaudrait aujourd'hui à quelque 200
milliards de $ É.-U. (au cours de 2005) 3 .
1 Le GAFI estimait le volume annuel des ventes de <strong>drogues</strong> au détail dans <strong>les</strong> années 80 à 108 milliards de $ aux Etats-Unis et à 16,3 milliards de $
en Europe, soit un total de 124,3 milliards de $. Le montant le plus important était représenté par le cannabis (74,7 milliards de $); venaient ensuite
la cocaïne (28,8 milliards de $) et l'héroïne (12 milliards de $). OCDE, Groupe d'action financière internationale, Working Group on Statistics and
Methods, Narcotics Money Laudering - Assessment of the scale of the Problem, 1989, <strong>rapport</strong> du Groupe d'action financière internationale <strong>sur</strong> le
blanchiment d'argent, du 7 février 1990.
2 OCDE, Groupe d'action financière internationale <strong>sur</strong> le blanchiment d'argent, Paris, 1990, p.6, cité dans le document du PNUCID intitulé :
Economic and Social Consequences of Drug Abuse and Illicit Trafficking, Vienna, 1997, p. 27.
3 Ces 124 milliards de $ se <strong>rapport</strong>ent aux estimations de 1988; en se fondant <strong>sur</strong> l'indice américain des prix à la consommation, ce montant
équivaudrait en 2005 à 201milliards de $ (cf. http://data/bls.gov/cgi-bin/cpicalc.pl).
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