02.05.2015 Views

LA PAIX À PETITS PAS - International Alert

LA PAIX À PETITS PAS - International Alert

LA PAIX À PETITS PAS - International Alert

SHOW MORE
SHOW LESS

You also want an ePaper? Increase the reach of your titles

YUMPU automatically turns print PDFs into web optimized ePapers that Google loves.

La Paix à Petits Pas<br />

17<br />

Durant ces deux périodes, la société civile a joué un rôle primordial sur la scène politique<br />

congolaise, rôle qui l’a profondément affaiblie et divisée. Les principales raisons qui ont conduit à<br />

la division de la société civile sont d’une part les positionnements politiques divergents des acteurs<br />

de la composante « société civile » qui représentaient la société civile à ces deux événements et,<br />

d’autre part, la cooptation politique de délégués de la société civile dont certains ont, en 2003,<br />

rejoint le gouvernement de transition et intégré le Parlement au titre de « représentants de la<br />

société civile » 18 .<br />

Si la définition que nous avions adoptée en début d’analyse marque la distinction entre la société<br />

civile et le gouvernement, il est nécessaire ici de relever les liens qui unissent, dans la pratique, les<br />

organisations de la société civile congolaise et la sphère politique.<br />

Ces liens sont de deux ordres :<br />

• La société civile est un tremplin pour accéder au pouvoir, nous venons de le montrer avec le cas<br />

de la Conférence nationale souveraine et du processus de paix qui a conduit à la cooptation<br />

de certains leaders. Si la pratique n’est pas unique à la RDC, elle prend dans ce contexte une<br />

dimension spécifique par son importance et sa nature : la société civile est une composante<br />

politique au même titre que les partis politiques.<br />

• La société civile est une base de mobilisation pour les acteurs politiques. Certains ont créé leur<br />

propre organisation, et notamment dans le secteur de la paix. Au Nord-Kivu, Eugène Serufuli,<br />

gouverneur du Nord-Kivu de 2000 à 2007, avait son organisation Tous pour la paix et le<br />

développement (TPD). De même, lors de nos entretiens, un responsable de la Commission<br />

pacification et réconciliation du programme STAREC 19 a très naturellement indiqué que<br />

les trois organisations qui avaient été retenues pour la mise en œuvre des activités de ce<br />

programme étaient des organisations proches ou présidées par l’actuel vice-gouverneur de la<br />

même province, Maître Feller.<br />

Au-delà des politiques et des bailleurs, la volonté de coordination a gagné la société civile ellemême.<br />

En 1992, à la suite de la Conférence nationale souveraine, des bureaux de coordination de<br />

la société civile ont été mis en place dans les différentes provinces du pays, le Sud-Kivu devenant la<br />

première province dotée d’un bureau de coordination. Ces structures sont organisées autour d’une<br />

dizaine de représentants élus par les membres des organisations qui composent la société civile<br />

selon leur secteur d’intervention ou leur identité (les confessions religieuses, les organisations de<br />

développement, féminines, de droits humains, les syndicats, les jeunes…).<br />

Ces structures ont été largement critiquées car elles sont marquées par de profondes divisions (au<br />

niveau national, quatre différentes composantes se disputaient encore récemment la représentation<br />

des organisations féminines 20 ). Elles sont considérées comme servant les intérêts politiques de<br />

leurs membres plutôt que les intérêts des organisations qu’elles représentent mais restent malgré<br />

tout une structure de référence pour une majorité des organisations rencontrées.<br />

Toutefois, selon nos observations, la multiplicité des réseaux contraste avec les échanges réalisés<br />

avec ces organisations qui ignorent très largement le travail des autres intervenants, même s’ils<br />

interviennent dans le même secteur et dans la même zone. Cette observation semble refléter une<br />

tendance, qui a été soulignée par de nombreux intervenants (et notamment des membres des<br />

réseaux) : la tendance de certains réseaux à se transformer en association autonome, dotée de<br />

statuts, d’un conseil d’administration et agissant en dehors des structures qui la composent. La mise<br />

en place d’un réseau devient alors un nouveau moyen d’attirer des financements en s’appropriant<br />

les réussites de ses organisations membres.<br />

18 Gouzou, (J.) et Van der Schoot (Y.). Analysis of Civil Society during the Transition Period in DRC. Étude commissionée par ASDI/SIDA,<br />

Stockholm. 2006. p. 52-53.<br />

19 Le programme STAREC (Programme de stabilisation et de reconstruction des zones sortant des conflits armés) vise à consolider la<br />

situation sécuritaire, contribuer à la restauration de l’autorité de l’Etat, aider le retour des populations déplacées et réfugiés ainsi que la<br />

relance de l’économie locale. Le STAREC a été conçu par les autorités congolaises et est soutenu par la communauté internationale selon<br />

la stratégie de stabilisation des Nations-Unies.<br />

20 World Bank. Civil Society and Extractive Industries in the Democratic Republic of Congo. Washington. Mai 2010. p. 6.

Hooray! Your file is uploaded and ready to be published.

Saved successfully!

Ooh no, something went wrong!