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Asie du Sud-Est

RDM le magazine de Rivages du monde vous propose de partir à la découverte de l'Asie du Sud-Est et de la Patagonie pour ce premier numéro.

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CAMBODGE<br />

ESCALES<br />

© DR<br />

S’arrêter place de la Poste centrale à Phnom Penh, c’est faire un saut dans le temps, à une époque où<br />

la France exerçait sa tutelle sur le Cambodge. Malgré les affres <strong>du</strong> temps et quelques ajouts postérieurs,<br />

le quartier a conservé l’essentiel de son architecture coloniale. Ses bâtisses solennelles aux<br />

teintes jaunes et aux stucs en chaux évoquent de loin quelque préfecture provençale. Les constructions<br />

ont été réalisées entre 1890 et 1920, période charnière au cours de laquelle le protectorat français<br />

façonne la capitale cambodgienne autour de boulevards ombragés qui lui valent le surnom de<br />

« Paris de l’Orient ». Phnom Penh est alors divisée entre un quartier cambodgien, près <strong>du</strong> Palais<br />

royal, un quartier chinois, autour <strong>du</strong> marché central, et enfin, le quartier européen, où l’administration<br />

coloniale se concentre autour de la colline <strong>du</strong> Wat Phnom, site légendaire de fondation de la<br />

cité. « C’est l’endroit en ville où se concentrent les plus beaux bâtiments d’époque », explique dans un français<br />

impeccable, Su Do, 47 ans, dont la boutique, à la fois agence de voyages et échoppe de souvenirs,<br />

donne de plain-pied sur la place.<br />

UNE PLACE CHARGÉE D’HISTOIRES<br />

La Poste, de son imposante stature, domine la place avec ses ailes<br />

et son corps central coiffé d’une horloge. À l’intérieur de l’édifice,<br />

quelques photos en noir et blanc, sur lesquelles les usagers qui se<br />

pressent aux guichets posent un œil à peine intéressé, rappellent<br />

son passé. Règne ici une atmosphère compassée dont la fraîcheur<br />

tranche agréablement avec la lourdeur <strong>du</strong> climat tropical au dehors.<br />

À l’extérieur, au nord, le regard est attiré par la silhouette austère<br />

d’un bâtiment aujourd’hui désert, mais qui abritait un commissariat<br />

de police sous le protectorat. C’est dans ses murs, ainsi que<br />

dans le restaurant qui lui fait face, que fut tourné en 2002 City of<br />

Ghosts, film de l’acteur et réalisateur américain Matt Dillon, venu<br />

capter l’atmosphère convalescente <strong>du</strong> Cambodge à peine remis<br />

de longues années de guerre civile. Gérard Depardieu y interprétait<br />

un rôle de tenancier d’hôtel un brin fantasque.<br />

ANDRÉ MALRAUX, CLIENT INDÉLICAT<br />

Juste en face de la Poste, on aperçoit la façade décrépite de l’hôtel<br />

Manolis, qui fut pourtant dans les années 1920 un lieu de grand<br />

standing. En piteux état, il est aujourd’hui divisé en habitations.<br />

André Malraux fut en 1924 son résident le plus illustre. Le futur ministre de la Culture <strong>du</strong> général De<br />

Gaulle était alors un jeune dandy peu scrupuleux, à l’origine d’une expédition rocambolesque en Indochine<br />

visant à s’emparer des bas-reliefs d’un temple angkorien près de Siem Reap. Pris sur le fait, il<br />

<strong>du</strong>t séjourner quatre mois à l’hôtel en compagnie de sa femme, Clara, dans l’attente de son procès.<br />

Condamné d’abord à six mois de prison ferme, puis à <strong>du</strong> sursis en appel, l’écrivain put repartir libre.<br />

Les mauvaises langues prétendent qu’il ne régla pas la note à son départ...<br />

Enfin, au numéro 5, à l’entrée de la place, se trouve une superbe villa occupée autrefois par une succursale<br />

de la banque d’Indochine. Une riche famille cambodgienne, les Van, était entrée en possession<br />

des lieux dans les années 1960, avant de se réfugier en France <strong>du</strong>rant la guerre. Leurs enfants<br />

ont pu cependant racheter les murs en 2003 et y ouvrir un élégant restaurant, le Van’s. Le cadre<br />

parfait pour renouer le temps d’un dîner avec les fantômes évanouis de l’histoire tumultueuse de la<br />

RdM<br />

capitale cambodgienne. Par S. B.<br />

Place<br />

de la Poste,<br />

Phnom Penh<br />

à l’heure<br />

française<br />

071 N° 1 / 2015

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