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«La glace a été brisée»<br />
Pour Pascal Vaucouleur, directeur associé, responsable IT Advisory chez EY Luxembourg,<br />
le Luxembourg va enfin pouvoir profiter de ses atouts réglementaires et d’expertise<br />
métier pour se positionner à moyen terme comme une place incontournable du BPO et<br />
conserver son savoir-faire dans le domaine du back-office.<br />
“<br />
Le déclic tant attendu<br />
est peut-être aujourd’hui<br />
en train de voir le jour<br />
”<br />
L’outsourcing informatique existe depuis<br />
de nombreuses années. Pourquoi en<br />
parle-t-on plus particulièrement aujourd’hui?<br />
On distingue généralement trois niveaux<br />
d’outsourcing. L’ITO (Information Technology<br />
Outsourcing) dont la finalité est la prise en<br />
charge de l’infrastructure, et potentiellement<br />
de son administration, par un tiers; le SaaS<br />
(Software as a Service) qui offre en plus la possibilité<br />
“d’outsourcer” les applications ainsi<br />
que leur maintenance et leur administration; et<br />
enfin le BPO (Business Process Outsourcing)<br />
qui, en plus d’englober les deux précédents,<br />
confie les processus ainsi que les personnes qui<br />
les opèrent à une société externe.<br />
La tendance ITO est apparue au<br />
Luxembourg au début des années 2000.<br />
Quelques banques de taille importante ont<br />
sous-traité leur infrastructure à des sociétés,<br />
non financières, spécialisées dans ce<br />
domaine. Ceci à rapidement conduit à la<br />
création des PSF de support, qui, grâce à leur<br />
nouveau statut, unique en Europe, ont favorisé<br />
le développement de ce type d’outsourcing.<br />
PSF est aujourd’hui un véritable label<br />
qui permet à la Place luxembourgeoise de se<br />
différencier en proposant des services IT dans<br />
un cadre législatif régulé par la CSSF, tout en<br />
rassurant les acteurs cédant une partie de<br />
leurs fonctions à ces sociétés.<br />
Le Software as a Service, a lui vu le jour en<br />
2004-2005. Surfant sur la vague ITO, un<br />
vendeur de logiciel bancaire intégré implanté<br />
au Luxembourg, s’est allié à un acteur ITO<br />
pour proposer une offre SaaS qui a<br />
rapidement séduit deux banques. Ce démarrage<br />
rapide s’est malheureusement rapidement<br />
essoufflé. Cette plateforme a vu ses<br />
deux clients partir vers d’autres modèles sans<br />
pouvoir en capter de nouveaux. Les raisons<br />
majeures: un modèle arrivé certainement un<br />
peu trop tôt au Luxembourg, les banques<br />
n’étant pas encore prêtes à céder leurs applications<br />
à un tiers et à en perdre la maitrise;<br />
des coûts trop élevés ne permettant pas de<br />
trouver un rapide retour sur investissement.<br />
La troisième tendance, qui se développe<br />
actuellement, est le Business Process<br />
Outsourcing. Dans un contexte économique<br />
où les banques subissent une pression croissante<br />
sur les coûts, une forte pression réglementaire,<br />
des difficultés croissantes à capter<br />
et à retenir les clients ou encore une évolution<br />
technologique de plus en plus rapide, les<br />
nouveaux modèles opérationnels et économiques,<br />
tels que le BPO, peuvent présenter<br />
l’avantage pour les banques de “variabiliser”<br />
une partie de leurs coûts tout en se recentrant<br />
sur leurs métiers.<br />
L’offre BPO peut-être très ciblée et spécialisée<br />
sur une fonction particulière (par exemple<br />
la production de relevés fiscaux pour le<br />
compte des banques) ou, à plus grande<br />
échelle, la mise à disposition d’un back-office<br />
bancaire complet (infrastructure technique,<br />
applications, processus bancaires et personnel<br />
pour traiter les opérations). Au travers de<br />
l’offre BPO, une banque pourrait ne conserver<br />
que les fonctions dites de “Front Office”,<br />
qui lui permettent d’interagir avec, et pour<br />
son client.<br />
Pourquoi parle-t-on alors d’accélération?<br />
Le BPO, au Luxembourg, était, encore il y a<br />
quelques mois, davantage un mythe qu’une<br />
réalité. Nombre de banques avaient au moins<br />
une fois songé à recourir à ces services et<br />
plusieurs acteurs (banques, vendeurs de logiciels<br />
bancaires, acteur ITO) ont tenté de lancer<br />
une offre BPO. Cependant, aucune offre<br />
n’avait vu le jour.<br />
Pour qu’une offre BPO soit économiquement<br />
viable, il faut qu’elle accueille plusieurs clients<br />
sur une plateforme unique, avec un niveau de<br />
standardisation (ou de souplesse) permettant<br />
de réaliser des économies d’échelle. Pour les<br />
banques privées au Luxembourg, d’origines<br />
géographiques très diverses, ce niveau de<br />
standardisation est difficile à atteindre en raison<br />
de la diversité et de la spécificité de leurs<br />
processus, des produits financiers à gérer ainsi<br />
que des réglementations à couvrir, pour les<br />
principales divergences. Plus largement, un<br />
retour sur investissement est difficile à atteindre<br />
car les fonctions Back-Office que l’on<br />
trouve dans les banques au Luxembourg sont<br />
déjà très optimisées. La peur d’être le premier,<br />
avec tous les aléas que cela induit, est également<br />
un frein non négligeable.<br />
Nous constatons néanmoins depuis ces deux<br />
dernières années une accélération des intentions<br />
d’outsourcing vers des offres de type BPO. Sur<br />
les missions de revue stratégique ou de refonte<br />
de systèmes d’information que nous conduisons<br />
pour des banques, celles-ci souhaitent systématiquement<br />
étudier la possibilité d’externaliser<br />
tout ou partie des fonctions Back-Office.<br />
Malgré cette volonté affichée, aucun projet<br />
concret BPO vers une société externe, hormis<br />
quelques tentatives avortées, n’a vu le jour au<br />
Luxembourg jusqu’à ces derniers mois. Ne trouvant<br />
pas d’offres répondant à leurs besoins, les<br />
banques ont privilégié, depuis plusieurs années,<br />
une externalisation de leurs opérations au sein de<br />
leurs groupes respectifs, hors du Luxembourg.<br />
Les acteurs IT sont-ils pour autant prêts?<br />
Les acteurs historiques du secteur IT de la<br />
Place ont conforté leur positionnement sur<br />
l’offre ITO et à moindre échelle pour certains<br />
sur une offre SaaS très spécialisée.<br />
Toutefois, aucun ne propose d’offre BPO<br />
aujourd’hui. Toutes les tentatives venant des<br />
banques ou des vendeurs de logiciel bancaire,<br />
ont avorté.<br />
Pascal Vaucouleur<br />
Aussi, ces dernières années, tous les regards se<br />
sont tournés vers la Suisse. Alors que rien ne se<br />
passait sur le BPO au Luxembourg, cette tendance<br />
y prenait son essor. Une offre de services<br />
diversifiée et aujourd’hui mature qui, s’adressant<br />
initialement aux banques de détail (banques cantonales),<br />
s’est tournée ensuite avec succès vers les<br />
banques privées. Si les banques implantées au<br />
Luxembourg ne se sont pas tournées vers ces<br />
offres matures, c’est principalement dû à la complexité<br />
technique à mettre en place pour répondre<br />
aux exigences locales en termes de confidentialité<br />
des données, celles-ci ne devant pas sortir<br />
du territoire sans l’autorisation formelle du client.<br />
Le déclic tant attendu est peut-être aujourd’hui<br />
en train de voir le jour. Une première offre BPO<br />
est en cours d’implémentation, fruit d’un partenariat<br />
entre un acteur mature du monde<br />
BPO et d’une banque importante de la place.<br />
La véritable accélération au Luxembourg se joue<br />
maintenant. Il n’y a plus de barrières mentales à<br />
ces nouveaux modèles, le premier succès d’externalisation<br />
sera le véritable déclic et va ouvrir -<br />
ou ré-ouvrir - la porte à d’autres acteurs du<br />
monde BPO et certainement désinhiber les banques<br />
qui ont maintenant l’opportunité, au<br />
Luxembourg, de passer de la phase de réflexion<br />
stratégique à la phase de réalisation.<br />
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LG - <strong>Hors</strong>-<strong>série</strong> <strong>Banque</strong> & <strong>finance</strong><br />
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