L'Essentiel Prépas n°13_janvier 2018 HD
L'Essentiel Prépas est la publication mensuelle de l'Essentiel du Sup dédiée aux professeurs des classes préparatoires économiques et commerciales. Le dossier de mois-ci sera consacré à la diversité dans les grandes écoles.
L'Essentiel Prépas est la publication mensuelle de l'Essentiel du Sup dédiée aux professeurs des classes préparatoires économiques et commerciales. Le dossier de mois-ci sera consacré à la diversité dans les grandes écoles.
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D O S S I E R<br />
>>> suite de la page 12<br />
tion suivent par exemple leur cursus en apprentissage. « Si on fait<br />
les comptes un étudiant en apprentissage ne paye d’abord que<br />
la moitié des frais de scolarité (l’autre moitié est prise en charge<br />
par son entreprise) soit 13200€ pour trois ans et est rémunéré<br />
en moyenne 1100€ net par mois, soit 26 400€ en deux ans »,<br />
explique le directeur de l’ESC Pau, Sébastien Chantelot.<br />
: Aider les étudiants handicapés<br />
L’accueil des étudiants handicapés est autant un enjeu dans l’enseignement<br />
supérieur que dans les entreprises qui sont soumises<br />
à des quotas dans leur recrutement mais n’ont pas pour autant<br />
l’intention de réserver ces emplois aux personnes peu diplômées.<br />
Un véritable enjeu pour l’enseignement supérieur qui doit mieux<br />
pouvoir recevoir les étudiants souffrant d’handicaps physiques<br />
mais aussi mentaux ou d’apprentissage. Des étudiants souffrant<br />
de troubles « DYS » (troubles spécifiques des apprentissages,<br />
sévères et durables, sans déficience sensorielle ou intellectuelle)<br />
peuvent ainsi être beaucoup mieux être pris en compte à condition<br />
d’adapter les méthodes d’apprentissage (lire ce que fait<br />
Sciences Po).<br />
La CGE et la FEDEEH (Fédération étudiante pour une dynamique<br />
études et emploi avec un handicap) ont signé en 2017 une<br />
convention de partenariat afin de favoriser l’inclusion des étudiants<br />
en situation de handicap. Dans ce cadre la CGE et la FEDEEH<br />
s’engagent mutuellement à agir autant en amont (pour favoriser<br />
la transition vers l’enseignement supérieur des handicapés à<br />
travers la communication autour des projets de tutorats étudiants)<br />
que pendant le cursus mais aussi après la diplomation en facilitant<br />
par exemple la diffusion d’informations et la participation des<br />
entreprises dans les travaux menés par la CGE dans le domaine<br />
du handicap. « Nous sommes même très actifs avec un travail sur<br />
la création d’un « statut international des étudiants en situation de<br />
handicap » qui aidera notamment les étudiants handicapés qui<br />
doivent suivre un stage à l’étranger », confie encore Anne-Lucie<br />
Wack. D’autant qu’il faut réfléchir aux nouvelles formes de handicap.<br />
Par exemple avec des étudiants américains qui rejoignent des<br />
établissements en France accompagnés d’un « EMA », c’est-à-dire<br />
un « emotional material animal » dont ils ont besoin pour étudier.<br />
Une rareté aujourd'hui en France mais de plus en plus courante de<br />
l’autre côté de l’Atlantique. n<br />
Sébastien Gémon<br />
→→<br />
Hommes et femmes<br />
encore inégalement traités<br />
Dans son Baromètre<br />
égalité femmes-hommes<br />
2017, la Conférence des<br />
grandes écoles établit que<br />
si les écoles d’ingénieur<br />
affichent en moyenne un<br />
taux de féminisation 33,3 %<br />
il est de 49,2 % dans les<br />
écoles de management.<br />
Une quasi-égalité qu’on<br />
ne retrouve pas dans les<br />
rémunérations : si on inclut<br />
primes et avantages les<br />
jeunes diplômés managers<br />
hommes gagnent 5600 €<br />
par an de plus que les<br />
femmes (44,5 k€ par an<br />
contre 38,9 k€). Du côté des<br />
ingénieurs la différence est<br />
moins importante : 39,3 k€<br />
contre 36 k€.<br />
>>> suite page 14<br />
Sciences Po ou la « pédagogie du handicap »<br />
« Nous voulons passer d’une stratégie de "compensation"<br />
pour aider nos étudiants handicapés<br />
à des méthodes pédagogiques qui conviennent<br />
à tous nos étudiants », explique la responsable<br />
handicap de Sciences Po, Elsa Geroult à l’occasion<br />
de la signature d’une convention avec<br />
l’Agefiph (Association de gestion du fonds pour<br />
l'insertion des personnes handicapées) et le<br />
FIPHFP (Fonds pour l'insertion des personnes<br />
handicapées dans la fonction publique).<br />
Un travail de recherche<br />
Quand il s’agit d’aider les étudiants souffrant<br />
d’handicaps visibles comme invisibles (autisme,<br />
troubles « dys », troubles psychiques), les<br />
mesures de compensation se situent essentiellement<br />
aujourd'hui en périphérie de la salle de<br />
cours (attribution de tiers-temps, compensations<br />
humaines ou techniques…) mais encore<br />
peu de réponses concernent les modalités de<br />
transmission et d’évaluation des savoirs. « Depuis<br />
2016 et à partir d’expérimentations menées<br />
par d’autres universités, notamment canadiennes,<br />
Sciences Po a développé des méthodologies<br />
exploitables en interne comme en dehors de<br />
ses murs », explique le directeur de Sciences Po,<br />
Frédéric Mion.<br />
En tout 249 étudiants de Sciences Po - huit fois<br />
plus qu’il y a 10 ans - souffrent aujourd'hui<br />
d’une forme ou d’une autre de handicap.<br />
Certains peuvent avoir passé les épreuves en<br />
profitant de conditions particulières mais ne<br />
plus vouloir en parler ensuite. Au risque de ne<br />
pas pouvoir bien suivre des cours pas adaptés<br />
sachant que la démarche leur revient totalement<br />
sans que l’institution qui les reçoit puisse<br />
l’exiger. D’après les premières évaluations menées<br />
en 2017 à Sciences Po dans plus de 95 %<br />
des cas rencontrés, la phase de décrochage est<br />
en lien avec une situation de handicap invisible.<br />
« Prenons l’exemple du professeur qui demande<br />
de "tracer la frontière" entre les PIB de la France<br />
et de la Suisse dans un diagramme, donc une<br />
courbe, ce sera impossible pour un autiste qui ne<br />
peut pas imaginer qu’une frontière ne soit pas<br />
droite. Alors qu’en parlant de courbe il réussira<br />
parfaitement l’exercice », assure Elsa Geroult.<br />
Des méthodes parfois toutes simples<br />
Sciences Po a réalisé toute une série de petits<br />
films pour montrer aux enseignants comment<br />
adapter leur pédagogie. Diffusés sur le blog<br />
de son pôle handicap à partir de <strong>janvier</strong> <strong>2018</strong><br />
ils seront accessibles à tous ceux qui se demandent<br />
par exemple comment permettre à un<br />
dyslexique de bien lire un cours. Un handicap<br />
relativement facile à surmonter pour peu<br />
qu’on prenne le soin de diviser son cours en de<br />
nombreux paragraphes, de souligner les points<br />
importants ou… d’utiliser une typographie<br />
très lisible type Arial. Mais bien sûr d’autres<br />
pathologies sont beaucoup plus difficiles à traiter<br />
comme la bipolarité ou la dyspraxie.<br />
Sciences Po, l’Agefiph et le FIPHFP ambitionnent<br />
aujourd'hui de se positionner au-delà<br />
du critère d’accessibilité stricte, en analysant les<br />
besoins des étudiants en situation de handicap<br />
et en cherchant, à travers le recours à l’innovation<br />
pédagogique, des solutions adaptées. Il<br />
s’agit de comprendre les besoins des personnes<br />
souffrant de troubles des apprentissages ou<br />
de handicaps favorisant le décrochage ou<br />
des difficultés d’insertion professionnelle<br />
pour « concevoir un enseignement inclusif et<br />
profitable à tous ». « Nous voulons promouvoir<br />
l’universalité de nos méthodes plutôt que des actions<br />
spécifiques pour chaque public », reprend<br />
Elsa Geroult.<br />
Comprendre les compétences<br />
cognitives<br />
Les actions de Sciences Po sur les personnes<br />
atteintes de handicap ont amené l’école à<br />
s’interroger sur les modes d’apprentissage.<br />
Dans le cadre d’un partenariat avec l’Université<br />
McGill (Canada) un « atelier de métacognition<br />
» permet depuis septembre à des étudiants<br />
de première année de mieux connaître le<br />
fonctionnement de leur cerveau. « Nous leur<br />
demandons d’analyser leurs stratégies d’apprentissage<br />
et comment les améliorer avec des<br />
neuropsychologues, des psycho-pédagogistes et<br />
même un philosophe », explique Elsa Geroult.<br />
Autant de réflexions qui vont aussi permettre<br />
de se tourner vers les entreprises. « Nous<br />
travaillons à la mise au point de dispositifs de<br />
travaux collaboratifs avec de grandes entreprises<br />
pour mieux accueillir les diplômés.<br />
Aujourd'hui ce sont des grandes entreprises<br />
qui disposent de structures adaptées, demain<br />
ce sera avec toutes », assure Frédéric Mion.<br />
Aujourd'hui 80 cadres de Canal Plus sont ainsi<br />
formés à la « neurodiversité » afin de comprendre<br />
comment recevoir des salariés un peu<br />
différents mais souvent très créatifs, innovants,<br />
travailleurs dont il serait absurde de se priver.<br />
La Harvard Business Review a même publié en<br />
2017 un article intitulé « Neurodiversity as a<br />
competitive advantage »… n<br />
→ Voir le film de présentation de l’atelier.<br />
L’ESSENTIEL DU SUP | PRÉPAS 13 JANVIER <strong>2018</strong> | N°13