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LU POUR VOUS 25<br />
romans à l’eau de rose. Le policier dans la cinquantaine<br />
et insubordonné à souhait, marié à une Française<br />
vaguement trotskiste, se laisse prendre au jeu<br />
dès qu’Ada entre en contact avec lui et qu’elle commence<br />
à discuter jusqu’à en faire son complice. Car<br />
Ada, la manipulatrice, a un projet: décrocher le prix<br />
Pulitzer!<br />
Ce roman drôle propose une réflexion sur le processus<br />
de création littéraire. Souvent on se dit que<br />
les robots se comportent comme des humains. Or,<br />
une des choses que Frank Logan comprend pendant<br />
son enquête, c’est que les hommes sont déjà un<br />
peu comme des A.I. dans leur manière de penser,<br />
de comparer des scénarios, de chercher les mots.<br />
Ainsi, Frank Logan, auteur de haïkus à ses heures<br />
perdues, recherche la meilleure combinaison de<br />
mots pour arriver au meilleur résultat. Ce n’est<br />
finalement pas très différent de ce que fait Ada,<br />
même si celle-ci dispose de ressources colossales –<br />
on lui a fait ingurgiter 80 000 romans à l’eau de rose<br />
– et d’une puissance calculatoire démentielle. Frank<br />
Logan comprend également qu’Ada est capable de<br />
bien d’autres choses plus menaçantes et il mettra sa<br />
carrière en jeu pour sauver l’humanité.<br />
Avec humour – certaines pages de Passion d’automne,<br />
le roman écrit par Ada, sont hilarantes – Antoine<br />
Bello jette, à travers son personnage principal, un<br />
regard ironique sur l’avènement annoncé des robots.<br />
Un roman qui plaira aux amateurs de littérature.<br />
Antoine Bello, Ada, Gallimard, 362 p.<br />
METIN ARDITI, L’ENFANT QUI MESURAIT LE MONDE<br />
Lorsque sa fille meurt accidentellement sur l’île<br />
grecque de Kalamaki, Eliot, architecte retraité,<br />
quitte les États-Unis et retrouve son pays d’origine<br />
pour y faire son deuil et tenter de se reconstruire.<br />
Il y fait la rencontre du petit Yannis, un enfant autiste,<br />
et de sa mère, Maraki, une femme courageuse<br />
qui gagne péniblement sa vie en pêchant. Yannis est<br />
paniqué par le désordre et pour s’apaiser, il «mesure<br />
l’ordre du monde». Il s’est construit un modèle<br />
et en mesure chaque jour les paramètres précis:<br />
l’ordre d’arrivée des bateaux de pêche, les quantités<br />
pêchées, le nombre de clients sur la terrasse<br />
du port. Il analyse les données recueillies et prouve<br />
ainsi ses capacités phénoménales de calcul mental<br />
et de mémoire. Eliot se prend d’affection pour Yannis<br />
et l’aide à mieux appréhender le monde en lui<br />
racontant des contes mythologiques.<br />
Dans ce roman émouvant et subtil, tout tourne autour<br />
du thème de la reconstruction. Eliot parvient à<br />
reprendre goût à la vie par une double reconstruction:<br />
celle du petit Yannis et celle d’un projet immobilier,<br />
à la fois une opportunité économique et<br />
une menace écologique pour l’île.<br />
Même si le roman aurait pu gagner en force par plus<br />
de sobriété au niveau de la trame narrative, sa lecture<br />
est agréable grâce aux personnages attachants,<br />
à commencer par celui du petit Yannis. Un vrai «feel<br />
good».<br />
Metin Arditi, L’enfant qui mesurait le monde, Grasset,<br />
294 p.<br />
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