2016-04

LU POUR EUX 27
LA VOYEUSE
Dimanche 5 avril,
23 h
François à Iris
Iris,
Je viens d’arriver
chez moi. Comme
tu peux
l’imaginer, je
suis furieux. Je
ne comprends
pas. Tu n’es pas
venue et tu ne
t’es pas excusée.
Pourtant,
je t’avais donné
mon numéro de
portable. J’espère que tu as une bonne excuse et que
tu n’es pas une de ces allumeuses qui s’amuse avec les
sentiments des autres. J’attends une explication.
François.
Voilà la première page de ce bref roman (59 p.)
épistolaire. On est d’emblée au cœur du sujet. Iris
et François s’étaient donné rendez-vous au café de
Montparnasse et Iris n’est pas venue. En fait, Iris,
qui ne s’appelle pas ainsi, était au rendez-vous mais
elle n’a pas osé se manifester, préférant voir, observer
sans être vue. Jusqu’ici, elle a toujours mené une
existence dans l’ombre, n’osant pas faire de vrais
choix. Petit à petit, les deux personnages vont, en
trois semaines, entamer une relation épistolaire
faite de timidité et de pudeur, où ils vont se révéler
progressivement jusqu’à se donner une deuxième
chance. Et le roman s’arrêtera là.
Ce beau petit roman parle avec sensibilité de la solitude,
de la pudeur, de la timidité, de la difficulté de
trouver sa place dans notre société assez froide et
où il est difficile de trouver le bonheur. Un roman
facile à lire mais qui, par sa thématique et son développement,
semble plus approprié pour une 5e aso
et tso-commerce.
C’est vrai, qui a envie de pousser un cri de joie, en pleine
rue, à Paris? Surtout un vrai cri de joie triomphal.
Karine, jeune femme d’origine camerounaise vivant
à Paris, vit un moment de bonheur intense: elle a pu
s’acheter un appartement à Paris! Pour elle, c’est
la preuve qu’elle a réussi son intégration, que ses
efforts n’ont pas été vains. La jeune Africaine a dû
subir, toute sa vie, un feu de questions sur ses origines,
les unes plus idiotes que les autres: «On dit que
35% des gens ont le sida dans certains pays d’Afrique.
Alors il y en a combien dans ta famille?». Mais pour
Karine, Paris est devenu sa ville: «Mais chez moi,
c’est ici! Alors progressivement, Karine a construit un
mur invisible pour échapper aux étonnements ou aux
jugements.»
Mais au moment de partager sa joie avec les siens,
elle est submergée par une sorte de malaise. Cet
appartement, c’est son nid, son refuge. Mais, dans
la tradition africaine, ce qui est à moi, est aussi aux
autres: on partage avec la famille. Karine comprend
alors qu’elle s’est européanisée, qu’elle est devenue
culturellement française. Ou du moins qu’elle va se
trouver en conflit avec sa culture familiale, qu’elle
est prise entre plusieurs appartenances.
L’auteur, Kidi Bebey, elle-même d’origine camerounaise,
décrit avec une grande sensibilité non dénuée
d’humour cette quête d’identité, qu’elle a vécue
elle-même. Aujourd’hui, elle se sent chez elle à Paris,
à Douala, à Cotonou, à Bamako ou à Dakar.
Auteur d’un grand nombre de romans et d’albums
pour la jeunesse, elle nous offre ici un livre très bien
écrit et accessible à une 5e aso et tso-commerce,
et abordant la thématique de l’intégration interculturelle.
Un ouvrage accompagné, bien sûr, d’un appareil
pédagogique en ligne.
Kidi Bebey, Enfin
chez moi!, Paris,
Didier, coll. Mondes
en VF, 117 p.
Fantah Touré, La voyeuse, Paris, Didier, coll. Mondes
en VF, 59 p.
ENFIN CHEZ MOI!
Karine a envie de hurler. Elle veut pousser un grand cri,
de toute la force de ses poumons. Mais c’est impossible.
Elle passera pour folle ou malade, si elle essaye. (…)
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