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Opus IX: Abode of Chaos / Demeure du Chaos 1999-2013

Is it to be considered a book? Or is it a magic object, each page of which being an original narrative of the Abode of Chaos rendered in a ground-breaking dreamlike vision. thierry Ehrmann: we put all our passion and folly into preparing this French-English Collector, the book of the decade: 504 pages / 4.5 kg / Square format – Edition bound – 11.8 in. x 11.8 in. and 1.97 inch-thick – includes the Opus IX from 1999 to 2013. A Note to Our Readers All the photographs, video stills, illustrations, handwritings, sketches, 3D modelling images, plans, maps and drawings are all part of the artworks and/or performances produced "in situ" at the Abode of Chaos. The images of artworks included in this book do not cover the Above of Chaos in its entirety but only a small part of it.

Is it to be considered a book? Or is it a magic object, each page of which being an original narrative of the Abode of Chaos rendered in a ground-breaking dreamlike vision. thierry Ehrmann: we put all our passion and folly into preparing this French-English Collector, the book of the decade: 504 pages / 4.5 kg / Square format – Edition bound – 11.8 in. x 11.8 in. and 1.97 inch-thick – includes the Opus IX from 1999 to 2013.
A Note to Our Readers
All the photographs, video stills, illustrations, handwritings, sketches, 3D modelling images, plans, maps and drawings are all part of the artworks and/or performances produced "in situ" at the Abode of Chaos.
The images of artworks included in this book do not cover the Above of Chaos in its entirety but only a small part of it.

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Plonger<br />

au tréFonds<br />

<strong>du</strong> <strong>Chaos</strong> :<br />

une esthétIque<br />

de l’ImmersIon en<br />

eauX troubles<br />

L’expérience subjective<br />

de l’altérité organisée<br />

Quoi que l’on sache avant de<br />

s’approcher de l’objectif, pénétrer<br />

la quiétude de cette bourgade au<br />

nom glorieux prend des allures de<br />

ballade doucereuse.<br />

Gravissant la colline,<br />

on découvre un écrin<br />

pittoresque à souhait.<br />

Parcourir les ruelles <strong>du</strong><br />

village revient à<br />

égrener quelques<br />

certitudes de nos<br />

civilisations : lieux<br />

bien entretenus,<br />

maisons repliées sur leurs murs,<br />

cycle aveugle des ordres institués,<br />

inutilité de vies confortables<br />

satisfaites et d’elles-mêmes. Nous<br />

aurions presque oublié que nous<br />

déambulons au cœur d’une mise<br />

en scène contemporaine <strong>du</strong><br />

séculaire… Oh, charme villageois,<br />

idéalisation bonhomme et<br />

rustique, fruit opulent de puissances<br />

implacables, dont les trésors<br />

cachés restent usurpés.<br />

Ce seraient là les derniers repères<br />

rassurants d’un patrimoine<br />

immuable, tissé de logiques<br />

invisibles et implacables, où se<br />

serait logée une <strong>Demeure</strong> sulfureuse,<br />

projet fou, inconcevable,<br />

hérétique. Progressivement,<br />

quelques indices signalent le centre<br />

tellurique : fléchage, murs<br />

dégradés, graffitis. L’esprit s’éveille.<br />

Il se prépare à l’inconnu, se<br />

remémore des images fragmentées,<br />

glanées de-ci, de-là, d’une<br />

promesse subversive. Qui parcourt<br />

ces parages sans raison ne man-<br />

quera pas bientôt d’en trouver.<br />

Chacun s’apercevra alors quel sens<br />

cette initiation aura dans sa<br />

trajectoire existentielle.<br />

À force de longer les flancs abîmés<br />

d’un vaisseau fantôme, s’ouvre<br />

enfin au détour d’un carrefour la<br />

gueule béante et barbelée <strong>du</strong> seuil<br />

inquiétant. Se dévoilent en<br />

arrière-plan de foisonnantes<br />

dimensions acides qui palpitent de<br />

vitalité. Grilles d’aciers retenant<br />

une croissance sauvage et d’apparence<br />

destructrice. Barbelés<br />

militarisant les corps. Caméras<br />

braquées comme des simulacres<br />

prêts à bondir.<br />

Face aux gardiens tutélaires,<br />

l’inquiétude primitive resurgit à<br />

l’approche des contrôles : obéissance<br />

inscrite au creux des épaules,<br />

paranoïa millénaire gage de survie<br />

comme de servilité.<br />

Le rituel de passage pour avoir le<br />

privilège <strong>du</strong> plongeon tient lieu<br />

d’aveu. L’aiguillon de la curiosité<br />

tenaille et ferait signer n’importe<br />

quel pacte. Le seul qui vaille est<br />

d’admettre vouloir ce voyage, celui<br />

qui ne dit pas son nom : la plongée<br />

intérieure dans l’infinitude des<br />

signes…<br />

Bascule dans l’univers brut de la<br />

calcination, <strong>du</strong> démembrement.<br />

Télescopage des forces technologiques<br />

exhibant leurs entrailles.<br />

Gémissement silencieux de la<br />

ferraille éventrée. Saturation des<br />

sens, démultiplication des prismes.<br />

Le regard s’affole de ne pas réussir<br />

à épouser ce capharnaüm. La<br />

pulsion curieuse plonge dans le<br />

labyrinthe, ne sachant sur quels<br />

détails s’arrêter, sur quelles<br />

échelles, niveaux, plans il vaut<br />

mieux accommoder. Minuscules<br />

symboles gravés aux mille recoins.<br />

Immenses installations échouées.<br />

Métal écumant d’impuissance.<br />

Mitraille répan<strong>du</strong>e en invisibles<br />

grappes. Et ses gigantesques<br />

visages silencieux qui observent<br />

nos gestes, étalant leur humanité<br />

singulière, bons ou mauvais génies<br />

d’une autre ère. Ont-ils trouvé<br />

refuge dans cette arche indescriptible<br />

? Quels rituels les ont donc<br />

convoqués sur ces parois déstructurées<br />

?<br />

Reprendre son souffle coupé.<br />

Trouver une posture sereine. La<br />

volonté de maîtrise oblige à<br />

prendre quelques repères : une<br />

carlingue d’avion écrasé, un<br />

bunker prêt à résister à l’apocalypse,<br />

une tente en guise d’impro-<br />

364 365<br />

bable boutique, des stèles<br />

triangulant les sentiers. Les motifs<br />

se répètent ou se substituent les<br />

uns aux autres. Symboles alchimiques<br />

au-delà <strong>du</strong> connaissable.<br />

Surcharge d’objets aux allures de<br />

cadavres. Altération de figures<br />

ailleurs flamboyantes : véhicules<br />

accidentés, matériels abandonnés,<br />

ordinateurs et médias éparpillés.<br />

En pleine navigation aléatoire,<br />

nous assaille une multitude de<br />

visions inquiétantes : cauchemars<br />

de la fin <strong>du</strong> monde toujours<br />

promise, dérèglement généralisé,<br />

fin des utopies, absurdité des rêves<br />

égoïstes.<br />

Progressivement, passé l’inquiétude<br />

des premiers émois, un état<br />

paisible émerge en soi, invitant à la<br />

contemplation. Sommes-nous<br />

morts à une certaine vie pour<br />

renaître à d’autres intuitions<br />

intimes ? Calme cosmique face à<br />

ce désastre post-apocalyptique, qui<br />

dévoile la nature des constances et<br />

régularités faisant la trame de nos<br />

réalités fugaces. Mise en suspension<br />

des parenthèses enchantées.<br />

La tentative démesurée d’agréger<br />

marques de puissance ou épouvantails<br />

de la modernité laisse<br />

songeur. S’agit-il d’un piège tapi<br />

dans l’envers <strong>du</strong> décor de nos<br />

beautés <strong>of</strong>ficielles ? Dans quelles<br />

arrières-coulisses spectaculaires<br />

avons-nous chu ? Finalement, c’est<br />

bien de nos inconscients que la<br />

résonance primordiale surgit :<br />

plaisir des formes tourmentées,<br />

pulsions de destruction, joies des<br />

miracles narquois, inversion des<br />

raisons, anéantissement de la<br />

norme invalidée en creux. Un<br />

vaste champ de manœuvre semble<br />

s’ouvrir sans limites, fils des<br />

conflits secrets qui dirigent notre<br />

monde et de nos imaginations<br />

désirantes et inassouvies.<br />

Vices et vertus d’un art immersif :<br />

éléments d’analyse<br />

Ce témoignage relatif à une<br />

première visite invite à prendre un<br />

certain recul théorique, mûri par<br />

nos recherches en sciences de<br />

l’information et de la communication<br />

sur les environnements<br />

immersifs. Ce sont des milieux,<br />

souvent artificiels, et notamment<br />

informatiques (simulations<br />

audiovisuelles et interactives de<br />

type réalité virtuelle, jeux vidéo,<br />

CAVE, etc.), dont la singularité est<br />

telle que nous y plonger déstabilise<br />

nos repères sensoriels, intellectuels,<br />

psychologiques. Cette référence à<br />

Pages 364/365<br />

[…] Ce monde immersif ne<br />

cesse de poser l’énigme de sa<br />

cosmogenèse[…]<br />

[…]his immersive world<br />

constantly poses the riddle<br />

<strong>of</strong> its cosmogenesis […]<br />

trace

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