Vol. 15 - Deutsches Primatenzentrum
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Lemur News <strong>Vol</strong>. <strong>15</strong>, 2010 Page 47<br />
Effet de la dégradation de l’habitat sur la<br />
consommation alimentaire d’Eulemur<br />
rubriventer dans deux sites: Talatakely et<br />
Vatoharanana,du Parc National de Ranomafana<br />
Laingoniaina H.Rakotonirina 1,2*,Germain J.Spiral 1,2,<br />
Jonah H. Ratsimbazafy 1,2, Soanorolalao Ravelonjanahary<br />
1,Raharizelina Ralaiarison 1,2,Stacey Tecot 3,Alex<br />
Hall 4, Tricia Calhoon 4, Gisèle R. Randria 1,2<br />
1Département de Paléontologie et d’Anthropologie Biologique,<br />
Faculté des Sciences, B.P. 906, Université d’Antananarivo,<br />
Madagascar<br />
2Groupe d’Etudes et de Recherche sur les Primates de Madagascar<br />
(GERP)<br />
3Department of Anthropology, University of Stony Brook,<br />
USA<br />
4<strong>Vol</strong>untary field assistant<br />
*Contact de l’auteur principal: laingoniaina2000@yahoo.fr<br />
Mots clés:Eulemur rubriventer,dégradation,habitat,consommation<br />
alimentaire, Ranomafana, Madagascar<br />
Introduction<br />
La grande île est potentiellement riche en matière de biodiversité<br />
et est par conséquent renommée pour sa remarquable<br />
richesse écologique, biologique et génétique (Ganzhorn<br />
et al.,2001).Cette richesse qui est gravement menacée<br />
par la diminution et la destruction immuables des habitats<br />
naturels de nombreuses espèces fait de Madagascar un des<br />
huit "hotspots" les plus considérés de notre planète (Ganzhorn<br />
et al., 2001).<br />
A l’échelle mondiale, la menace la plus grave pour la population<br />
des primates est la destruction et la dégradation de leur<br />
habitat, notamment les forêts tropicales qui hébergent aujourd’hui<br />
environ 90 % des primates non humains du monde<br />
(Mittermeier et al., 2006, 2010). Les lémuriens malgaches ne<br />
font pas exception à cette constatation. La dégradation des<br />
forêts affecte la biologie générale des lémuriens car non<br />
seulement elles leur fournissent des abris et de la nourriture,<br />
mais aussi elles servent de supports à la locomotion et aux<br />
différentes activités de ces animaux (Razafimahazo, 2001).<br />
Selon Randriatahina en 2001, la fragmentation de l’habitat<br />
affecte en premier lieu la distribution et la dispersion de la<br />
nourriture.Certains facteurs influencent le rythme d’activité<br />
et le budget-temps des primates:il s’agit surtout des facteurs<br />
écologiques majeurs tels que la structure de l’habitat,le type<br />
d’alimentation (Zaonarivelo, 1999). Par ailleurs, Dunbar<br />
(1988) affirme que les primates pourraient augmenter leur<br />
déplacement journalier pour trouver de la nourriture ou<br />
inversement en vue d’économiser leur énergie.<br />
Notre présent travail est axé sur la corrélation entre l’habitat<br />
et l’alimentation des lémuriens.Les lémuriformes montrent<br />
un degré de variabilité en ce qui concerne la spécialisation<br />
aux régimes alimentaires.La plupart d’entre-eux (les<br />
Lémuridés,les Mégaladapidés,les Indridés) se spécialisent au<br />
régime végétarien. Cependant, la proportion de feuilles, de<br />
fleurs, et de fruits consommés varie suivant les espèces et<br />
sous-espèces,d’une région à une autre,et de saison en saison<br />
(Richard, 1978). Selon Zaonarivelo (1999), des facteurs écologiques<br />
influencent les comportements des lémuriens et la<br />
perturbation de leur habitat affecte leur organisation sociale<br />
et l’exploitation des ressources alimentaires.<br />
En tenant compte de toutes ces observations, nous avons<br />
effectué une étude concernant l’effet de la dégradation de<br />
l’habitat sur la consommation alimentaire d’Eulemur rubriventer<br />
dans deux sites: Talatakely et Vatoharanana du Parc National<br />
de Ranomafana, dans la province de Fianarantsoa.<br />
Il y a lieu de souligner qu’Eulemur rubriventer, une espèce<br />
hautement frugivore (Overdorff, 1993), dispose d’une haute<br />
importance écologique car elle participe activement à la dispersion<br />
des graines dans la région du Sud-Est de Madagascar,<br />
en particulier dans le Parc National de Ranomafana. A cet<br />
égard, bien que l’animal soit encore classé dans la catégorie<br />
vulnérable selon la liste rouge de l’UICN (Mittermeier et al.,<br />
1994,2006,2010),il a besoin d’ une action de conservation.<br />
C’est la raison pour laquelle le parc national de Ranomafana a<br />
été choisi comme notre station de recherche car par rapport<br />
aux autres régions de l’île, les lémurs à ventre roux y<br />
sont les plus répandus (Mittermeier et al.,2006);et leur habitat<br />
présente un degré variable de dégradation.<br />
Compte tenu de cette variation du degré de dégradation et<br />
de perturbation du milieu de vie d’Eulemur rubriventer dans le<br />
Parc National de Ranomafana, nous pouvons avancer une<br />
hypothèse selon laquelle la consommation alimentaire n’est<br />
pas statistiquement différente entre celle de Vatoharanana<br />
et celle de Talatakely.<br />
Ce projet a été réalisé dans le cadre de la collaboration interdépartementale<br />
entre l’Université d’Antananarivo, l’ICTE/<br />
MICET,le MNP et l’Université de Texas.Ainsi,le présent travail<br />
qui vise en la conservation des lémurs à ventre roux a<br />
comme objectifs d’inventorier les différentes espèces de<br />
plantes consommées par Eulemur rubriventer,de comparer le<br />
régime alimentaire adopté dans chaque site d’étude, de<br />
déterminer les caractéristiques des plantes consommées<br />
dans les deux sites d’études à dégradations différentes.<br />
Site d’études<br />
Le parc National de Ranomafana se trouve dans le Sud Est de<br />
Madagascar.Sa superficie est de 41.600 ha.Ce parc se localise<br />
au Nord-Est de Fianarantsoa, à 70 km à l’Ouest de l’Océan<br />
Indien et à 400 km d’Antananarivo.Il est situé entre 47°18’ à<br />
47°37’ Est de longitude et 21°2’ à 21°25’ Sud de latitude. La<br />
température moyenne annuelle est de l’ordre de 21°C selon<br />
Turk en 1995. Quant à la pluviosité, Overdorff a affirmé en<br />
1996 que la pluie y est saisonnière avec une précipitation<br />
moyenne de 2000 mm. Deux sites ont été choisis pour<br />
effectuer notre travail de recherche. Il s’agit de:<br />
Talatakely:milieu perturbé et plus dégradé.Il est situé à environ<br />
10 mn de marche de la poste de garde et de contrôle<br />
du Parc d’Ambodiamontana. Ce site de 1020 m d’altitude<br />
(Brady et al., 1996), est caractérisé par une visite fréquente<br />
de touristes. Notons également que, à cause des abattages<br />
intensifs des arbres par les bûcherons (Kremen, 1992), la<br />
forêt de Talatakely se trouve fortement dégradée.<br />
Vatoharanana: un milieu moins perturbé et moins dégradé.<br />
Cet endroit est à 1090 m d’altitude et se trouve à 2<br />
heures de marche de Talatakely. Ce champ de forêt était exploité<br />
par les bûcherons il y a 25 ans (Brady et al.,1996).Mais,<br />
la dégradation était moins intense que celle de Talatakely<br />
(Kremen, 1992). La visite des touristes dans cette station<br />
d’études est également moins fréquente. Vatoharanana est<br />
donc un site moins perturbé par rapport à Talatakely.<br />
Les deux stations de recherche sont représentées dans la<br />
figure 1.<br />
Espèces étudiées<br />
Afin de répondre à toutes nos questions, une espèce hautement<br />
frugivore, qui participe activement à la dispersion des<br />
graines (Overdorff,1993),a fait l’objet de notre étude.Il s’agit<br />
du Lémur à ventre roux ou Eulemur rubriventer. Généralement,cette<br />
espèce de taille moyenne vit en petit groupe de 2