Convoitise - Anges Déchu T1
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— Qu'est-ce que c'est ?<br />
— Un quartier résidentiel de la ville où toutes les rues finissent par « wood». Oakwood, Greenwood,<br />
Pinewood. (Il démarra le moteur.) Les urbanistes devaient être en panne d'inspiration. Je suis même<br />
surpris qu'il n'existe pas de Woodwood Avenue.<br />
Elle s'esclaffa.<br />
— Ça fait un an et demi que j'habite ici. Je devrais savoir où ça se trouve.<br />
— Ce n'est pas loin. A peine une dizaine de minutes. À cinq blocs du club, il s'engagea sur l'autoroute<br />
du Nord pour prendre la première sortie en direction des banlieues nord de Caldwell. Ils longèrent des<br />
rues bordées de terrains aussi minuscules que des timbres-poste, la taille des maisons rapetissant au fur et<br />
à mesure qu'ils avançaient.<br />
Il gardait encore quelques souvenirs de ces quartiers, qui n'avaient cependant rien de l'image proprette<br />
d'une famille heureuse. En fait, il se revoyait plutôt faire le mur pour échapper à ses vieux et rejoindre ses<br />
potes, avec qui il allait boire, fumer et se bastonner, n'importe quoi plutôt que de rester chez lui.<br />
Dieu qu'il avait prié pour qu'ils disparaissent ! Ou qu'il se casse de cet enfer. À l'évidence, il avait été<br />
exaucé au-delà de ses espérances.<br />
— On y est presque, dit-il, même si Marie-Terese avait l'air tout à fait à l'aise à son côté.<br />
Confortablement installée, elle regardait par la fenêtre. Au bout d'un moment, elle murmura:<br />
—Je pourrais rester comme ça pendant des heures, à regarder défiler le monde.<br />
Il lui prit la main et la serra légèrement.<br />
—À quand remontent vos dernières vacances ?<br />
—Je ne m'en souviens même pas.<br />
— Comme je vous comprends...<br />
Arrivé au 116 Crestwood Avenue, i se l gara devant une minuscule bicoque avec une façade en<br />
aluminium et une allée bétonnée menant à l'entrée.<br />
La maison de son enfance ne lui avait jamais paru aussi propre : les buissons étaient parfaitement<br />
taillés, le gros chêne avait été débarrassé de toutes ses branches mortes et la pelouse était tondue toutes<br />
les semaines. Il y a deux ans, il avait aussi fait remplacer le toit avant de refaire la façade et l'allée.<br />
C'était la maison la mieux entretenue de toute la rue, et même de tout le quartier.<br />
— Où sommes-nous ? demanda-t-elle.<br />
Il se sentit soudain embarrassé, mais c'était le but. Divine n'était jamais venue ici. Aucun de ses<br />
collègues de travail ne connaissait cet endroit. Depuis ses débuts dans le métier, il n'avait jamais montré<br />
que ce dont il était fier.<br />
Il ouvrit sa portière.<br />
— C'est... ici que j'ai grandi.<br />
Marie-Terese était déjà sortie de la voiture quand il s'arracha enfin à ses pensées. Ses yeux scrutaient<br />
chaque centimètre de la maison, du perron aux tuiles.<br />
Passant la main sous son bras, il la mena jusqu'à l'entrée. Lorsqu'ils franchirent le seuil, une odeur de<br />
citron artificiel se propagea tel un tapis rouge déroulé en leur honneur, mais cette sensation accueillante<br />
était aussi factice que les produits chimiques utilisés pour reproduire le parfum de l'agrume.<br />
Ensemble, ils pénétrèrent dans le vestibule, puis il alluma la lumière du couloir avant de refermer la<br />
porte et de mettre le chauffage en route.<br />
Froide. Humide. Désordonnée. Alors que la maison semblait coquette de l'extérieur, à l'intérieur, c'était<br />
un vrai taudis. Elle était restée dans le même état depuis le jour où ses vieux étaient tombés dans<br />
l'escalier: l'emblème de la laideur.<br />
— Ouaip, c'est ici que j'ai grandi, répéta-t’il d'une voix rude en contemplant le seul coin de moquette<br />
propre de toute la maison. Au bas des marches. Là où ils avaient atterri après avoir chuté du premier