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Chapitre 6<br />
Je me déhanchais comme une démente entourée de Jeremy et Cristina lorsque je sentis mon cœur louper<br />
un ou deux battements. Au milieu d’une masse de fêtards, je le vis. Il se tenait là, un verre à la main,<br />
tentateur, appuyé contre le bar, les yeux rivés sur moi, un fan-club féminin essayant vainement d’attirer<br />
son attention. Il portait une chemise noire <strong>au</strong>x reflets irisés, un pantalon en cuir noir, et me fixait<br />
effrontément. Prise d’une pulsion, j’abandonnai mes amis, fendis la foule pour me précipiter vers lui. Je<br />
sus qu’il avait compris mes intentions à ses yeux ronds. Aussitôt, il tenta de fuir, mais il lui fut plus<br />
difficile de disparaître car la foule le ralentissait.<br />
Il sortit et je le suivis dans la rue. J’arrivai dehors quelques instants après lui, et je fus malgré moi témoin<br />
d’une scène indescriptible. Près de la discothèque, <strong>au</strong> croisement d’une melle, dans une obscurité presque<br />
totale, une fille se faisait agresser par un monstre. Enfin, par quelqu’un déguisé en monstre. Elle hurlait de<br />
terreur. Personne n’y prêtait attention évidemment. C’était l’inconvénient d’Halloween. Rien n’était pris<br />
<strong>au</strong> sérieux. Soudain, je vis mon inconnu se précipiter à son secours.<br />
Sortant de nulle part, il se rua sur l’agresseur, avec une sorte de grand coute<strong>au</strong> à la main. La fille se s<strong>au</strong>va<br />
et je restais là, à les regarder se battre. Le combat était d’une rare violen<strong>ce</strong>. Une danse macabre se jouait<br />
sous mes yeux. Les deux protagonistes se frappaient, se déchiraient la pe<strong>au</strong>, l’un avec une arme blanche,<br />
l’<strong>au</strong>tre avec des griffes. Je voyais des giclées de <strong>ce</strong> qui devait être du sang et des mor<strong>ce</strong><strong>au</strong>x de chair<br />
jaillir de tous les côtés, des cris de douleur et de fureur entremêlés me parvenaient. Mon inconnu s<strong>au</strong>tait,<br />
virevoltait <strong>au</strong>tour de la chose et maniait son arme avec une virtuosité mortelle. Je restais là, figée,<br />
impuissante et terrorisée par <strong>ce</strong> que je voyais. Je ne voulais pas croire à <strong>ce</strong> que je voyais. Le monstre<br />
hurlait dans une langue étrange mais son adversaire semblait le comprendre car il lui répondait avec le<br />
même langage. Chacun continuait de frapper l’<strong>au</strong>tre. Soudain, l’arme de mon inconnu se déploya en trois<br />
pics meurtriers et il l’enfonça <strong>au</strong>ssi loin que possible à l’empla<strong>ce</strong>ment du cœur. Dans un gargouillis<br />
horrible, la chose tomba sur le sol et les cris <strong>ce</strong>ssèrent. Elle me fixa un instant en montrant les dents et se<br />
désintégra dans un nuage puant. Un genou à terre, le buste légèrement penché en avant, les bras tombant le<br />
long de son corps, l’inconnu releva la tête et se tourna vers moi. Son regard me fit froid le dos. C’était<br />
<strong>ce</strong>lui d’un fou meurtrier. Ses cheveux étaient souillés et son visage… mon dieu… Ses prunelles rouge<br />
cramoisi projetaient une haine furieuse. Un rictus m<strong>au</strong>vais salissait sa bouche sensuelle, un liquide<br />
poisseux parsemait sa pe<strong>au</strong>, mais le pire, c’était son air satisfait. Et moi j’étais là, à quelques mètres de<br />
lui, bouche bée et les bras pendants, à le regarder massacrer <strong>ce</strong>tte chose.<br />
En me voyant, il se releva dou<strong>ce</strong>ment. Son expression avait changé. Il avait l’air… coupable.<br />
Son regard s’était radoucit mais il exprimait toujours sa folie meurtrière.<br />
Le temps que je reprenne mes esprits, il avait commencé à se détourner. Il me lança un dernier regard,<br />
triste et furieux en même temps. Qu’est <strong>ce</strong> que… je rêve ! Ses yeux étaient devenus verts ! Il disparut dans<br />
l’obscurité.