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Chapitre 27<br />
Le cimetière de Fines Creek. Comme je m’y attendais, toute la ville était là. Du maire en passant par la<br />
serveuse du rest<strong>au</strong>rant, la bibliothécaire, ainsi que mes amis et leur famille.<br />
Nous étions tous <strong>au</strong>tour d’un grand trou, surplombés par deux <strong>ce</strong>rcueils vides. Comme d’habitude, le<br />
temps était lugubre et il pleuvait des cordes. Tous <strong>ce</strong>s gens, habillés en noir et pleurant ne rendaient le<br />
moment qu’encore plus pénible. Le Père Ewan récitait ses litanies les p<strong>au</strong>mes de mains tournées vers le<br />
ciel, comme s’il s’attendait à re<strong>ce</strong>voir quelque chose. Tout <strong>ce</strong>la n’était qu’une vaste comédie. Le monde<br />
dans lequel mes parents vivaient n’avait pas de pla<strong>ce</strong> pour des croyan<strong>ce</strong>s illusoires. Dieu, le Paradis, le<br />
Jugement Dernier, tout <strong>ce</strong>la n’était que foutaise et tromperie. Vampires, démons, métamorphes et <strong>au</strong>tres<br />
créatures de c<strong>au</strong>chemars, ça, c’était la vérité. Ma vérité, notre vérité, à nous, les Élus… J’écoutais <strong>ce</strong>s<br />
mensonges, impassible, les yeux perdus dans le vide. J’avais refusé de m’abriter sous le parapluie que<br />
m’avait offert Riley et je dégoulinais, dans tous les sens du terme. Mes cheveux collaient à mon visage et<br />
mon mascara laissait de longues traînées noires sur mes joues. Ma poitrine me faisait atro<strong>ce</strong>ment souffrir.<br />
Un trou béant se trouvait là où <strong>au</strong>rait dû être mon cœur, et une main invisible compressait mes poumons à<br />
tel point qu’il m’était insupportable de respirer. Mes yeux vides et inexpressifs observaient <strong>ce</strong>tte plaie<br />
ouverte creusée dans la terre tandis que mon esprit vagabondait. Soudain, il se raccrocha à une éviden<strong>ce</strong><br />
comme un n<strong>au</strong>fragé à sa bouée. Je les tuerais tous. Je vengerais mes parents et je les exterminerais tous,<br />
jusqu’<strong>au</strong> dernier.<br />
J’étais assoiffée de vengean<strong>ce</strong>. Je voulais que le sang coule de mes mains, mais ça ne serait plus le mien,<br />
<strong>ce</strong>lui des McKanaghan. Je mesurais soudainement l’ampleur de ma Destinée, et pris conscien<strong>ce</strong> que je<br />
l’assumerais jusqu’à ma mort. Ensuite, je crois que je m’évanouis.<br />
Je me réveillai apparemment plusieurs heures plus tard, et chez moi, dans mon lit. J’étais seule dans la<br />
chambre. Je me levai. Morgan et Riley firent irruption et me demandèrent comment je me sentais. Je me<br />
retins de leur cracher mon venin car leur question débile s’insupportait. J’étais furieuse et en rage contre<br />
le monde entier. Je leur répondis de manière à les rassurer pour qu’ils me laissent tranquille. Cela<br />
fonctionna car ils prirent congé.<br />
Au bout de quelques minutes à tourner en rond, le silen<strong>ce</strong> de la maison me rendait folle. Je me dirigeais<br />
vers ma chaîne hi-fi et mit un album de mon groupe préféré, les 30 Seconds to Mars. Je me sentis<br />
légèrement apaisée lorsque la musique débuta, mais <strong>ce</strong> répit fut de courte durée… A revolution has<br />
begun today for me inside. The ultimate defense is to pretend.<br />
Revolve around yourself just like an ordinary man. The only other option is to forget. Dœs it feel like<br />
we’ve never been alive ? Dœs it seem like it’s only just begun… La profondeur des paroles qui<br />
s’envolaient des en<strong>ce</strong>intes me transperça comme un coup de poignard, et je sus <strong>ce</strong> que je devais faire.<br />
J’allai dans la salle de bains en titubant. La vive lumière du plafonnier me fit mal <strong>au</strong>x yeux. Je me plantai<br />
devant le grand miroir et fus choquée par l’image qu’il me renvoyait. Mon propre visage me faisait peur.<br />
Ce n’était plus le mien, mais <strong>ce</strong>lui d’un cadavre ambulant, maculé de traînées de maquillage. Ma pe<strong>au</strong><br />
était pâle et cireuse, mes yeux rouges et bouffis. De profondes <strong>ce</strong>rnes violettes, presque noires, creusaient<br />
mon regard. Les tra<strong>ce</strong>s couleur charbon sur mes joues, mes lèvres sèches et exsangues… je faisais<br />
vraiment peur à voir. Je n’étais plus que l’ombre de moi-même. Mes longs cheveux étaient ébouriffés et<br />
viraient <strong>au</strong> gris sale tellement leur couleur était devenue terne. Il me semble avoir poussé un cri. Un de