DE L'INSTRUCTION PRIMAIRE - INRP

11 Nov. 33 ÉDUCATION MORALE ET CIVIQUE 103
Kf y EDUCATION MORiÀLEM
L'ordre et l'exactitude.
Signalons d'abord quelques exercices pratiques
susceptibles d'aider à l acquisition de ces deux précieuses
qualités. A l'appui de la causerie sur l'ordre,
faire ranger le contenu d'un casier, d'un cartable, sans
" omettre d'indiquer pour quelle raison chaque objet
est mis à tel endroit plutôt qu'à tel autre; montrer
comment on suspend à une patère un cache-nez,
un chapeau, un capuchon, comment on lace ses
souliers, comment on plie ses vêlements avant de se
mettre au lit; attirer l'allenlion des enfants sur la
place de chacun des meubles scolaires, en justifiant
cette place. A propos de l'exactitude, on demandera
aux élèves de déterminer le temps qu'il faut pour
aller de chez eux à l'école, à la mairie, à la gare;
il sera bon aussi de leur faire examiner l'emploi
du temps, de façon qu'ils en découvrent la raison
d'être et les avantages.
I
COURS ÉLÉMENTAIRE. — I. Ayons de
l'ordre. — 1° Récit. — Trois petits lutins : Kim,
Kom et Kam, se promenaient, une nuit, sur un rayon
de lune, au hasard du vent. « Qu'est-ce que c'est que
cela ? . demanda soudain Kim, en montrant au-dessous
d'eux une grosse masse noire. —- Cela ? c'est une maison,
dit Kom. — Une maison ! s'écria Kam. Allons
voir ce qu'il y a dedans ! » Alors, d'une seule glissade,
pfuit ! les trois petits bonshommes dégringolèrent
jusqu'à terre, sans se faire du mal, bien entendu, et
ils s'approchèrent du logis. Comme ils n'étaient pas
plus , grands que le pouce et à peine plus gros qu'un
brin d'herbe, ils se coulèrent facilement sous la porte.
Puis ils commencèrent à fureter partout.
Or, cette maison-là était celle de la petite Joseline.
Et il se trouvait que la petite Joseline, qui dormait à
poings fermés à côté de sa maman et de son papa, avait,
la veille au soir, totalement oublié de remettre en place
ce qui lui avait servi à faire sa page d'écriture : son cahier
neuf, sa plume et sa bouteille d'encre. Kim, Kom et
Kam, en voyant ces objets sur la table de la cuisine,
eurent une bonne pensée : « Nous allons ranger tout cela,
dirent-ils en chœur. C'est la petite Joseline qui sera
contente demain matin ! »
Kim et Kom saisirent la bouteille et la juchèrent sur
leurs épaules. Vous pensez si c'était lourd pour eux !
Ils n'avaient pas fait trois pas qu'ils n'en pouvaient plus
et qu'ils la laissèrent tomber. Ce fut une catastrophe :
toute l'encre se déversa au milieu du beau cahier neuf,
sur la page d'écriture à laquelle Joseline s'était tant
appliquée. Kam, de son côté, avait empoigné le porteplume;
pour avoir plus vite fait, il le jeta du haut en
bas delà table; la plume, en cette aventure, se cassa
net et finit par le glisser dans le tiroir de la cuisine,
avec les petites cuillers. Puis il alla au secours de Kim
et de Kom. Les trois lutins n'osèrent plus se frotter
à la bouteille, mais ils fermèrent le cahier, le tirèrent, et
après avoir hésité longtemps, l'introduisirent jusqu'au
fond du panier au pain. Très satisfaits d'eux-mêmes, ils
s'essuyèrent le front avec leur petit mouchoir : o Nous
avons assez travaillé, dirent-ils; continuons notre promenade
». Et ils partirent comme ils étaient venus.
Le lendemain matin, vous vous en doutez, Joseline,
ayant perdu plus d'une demi-heure à retrouver son
cahier et son porte-plume, arriva en retard à l'école ;
elle fut punie. Et elle le fut une seconde fois quand elle
montra sa page d'écriture et sa plume cassée à sa maîtresse.
Ce qui s'était passé pendant qu'elle dormait, la
petite Joseline ne l'a jamais su; mais depuis ce jour-là,
elle ne veut absolument plus laisser rien traîner do ce
qui lui appartient. C'est pourquoi je trouve que, malgré
A I ' p r n i P D PI I M A D R {
A LbtuLb hkimaikc É%Êxê£Ê$Émàîi
leurs maladresses, Kim, Kom et Kam lui ont rendu un
fameux service.
2° Commentaire. — Voyez-vous maintenant
pourquoi il faut avoir de l'ordre ? Si vous avez
donné à chaque chose une place précise et si vous
veillez à remettre immédiatement à cette place les
objets dont vous ne vous servez plus (outils d'écolier,
jouets, vêtements) :
a) Vous savez toujours où les prendre, de sorte
que vous ne perdez pas votre temps à les chercher
quand vous en avez besoin;
b) Vous ne risquez pas de les retrouver salis ou
abîmés, ce qui vous permet de les conserver plus
longtemps et vous évite des dépenses inutiles.
COMPLÉMENTS POUR LES COURS
MOYEN E T SUPÉRIEUR. — II. Nécessité
de l'ordre. — L'ordre ne présente pas seulement
l'avantage de nous faire faire des économies de
temps et d'argent.
1° C'est lui qui donne du prix à notre activité. —
Aucun travail n'est bon s'il n'est exécuté suivant
un plan rigoureux et avec méthode. (Ex. : commencez-vous
un problème par la fin ? Construit-on la
charpente d'une maison avant d'en édifier les murs ? )
Le désordre, en effet, disperse nos efforts et les rend
inutiles (application au labeur scolaire), outre qu'il
est souvent la cause de très graves accidents (combien
d'enfants, par exemple, se blessent avec des
ciseaux ou se brûlent avec des allumettes qu'on a
laissé traîner).
2° De plus, l'ordre engendre la beauté et l'harmonie;
l'intérieur le plus humble peut devenir charmant si
tout y est en place; et les grandes œuvres d'art
(poésie, peinture, musique) ne seraient pas ce
qu'elles sont si elles n'étaient composées, c'est-àdire
si leurs auteurs n'en avaient ordonné la matière.
III. L'exactitude. — C'est l'ordre conçu, non
plus dans l'espace, mais dans le temps. Qu'est-ce,
en effet, qu'être exact ? C'est se trouver à l'heure
fixée là où l'on doit être, c'est exécuter ce qu'on est
tenu de faire au moment voulu.
1° Il y a, vous le savez, des gens qui en sont incapables
; ils arrivent toujours en retard partout
(à la gare aussi bien qu'à l'atelier ou aux réunions
auxquelles ils doivent se rendre); de ce fait, ils
sont en proie à des ennuis continuels, et ne fournissent
jamais que du travail médiocre, parce qu'ils
ne parviennent pas à s'y mettre à temps et sont
contraints de l'achever en hâte. A l'école, les retardataires
ne sont pas moins blâmables : ils manquent
des leçons, troublent la classe, distraient
leurs camarades; ils font à la fois du tort à euxmêmes
et aux autres.
2° Ayons donc à cœur d'être exacts.
Un écrivain anglais, John Lubbock, estime que « la
grand secret de tout progrès est de ne jamais se hâter
et de ne jamais flâner. » D'après lui, l'amiral Nelson, le
vainqueur de Trafalgar, attribuait sa haute fortune à
ce que, dans toute affaire, il était toujours arrivé quinze
minutes avant l'heure.
J. ARNOUX. (La Morale d'après les fables.)
Astreignons-nous à ne point perdre un seul des instants
qui doivent être consacrés à des occupations
sérieuses. C'est parfois difficile, bien sûr. Mais ce
que, moralement et matériellement, vous gagnerez
à procéder ainsi vous récompensera largement da
votre peine.
Maxime. — Le temps, c'est de l'argent.
Lectures. — LA BRUYÈRE : Les Caractères (portrait
de Ménalque, XI, §7); LA FONTAINE: La
Lièvre et la Tortue.
F. FERRÉ.
GABET et GILLARD. Vocabulaire et Méthode d'Orthographe. clu?,°moy!!J. r -c°E.p: 7-20i
' .JH