Bernard <strong>Saladin</strong> d’Anglure, “M<strong>au</strong>ss et l’anthropologie des Inuit” (2004) 52nohistoire ou celle de F. L<strong>au</strong>grand (1997, éditée en 2002) en anthropologiereligieuse. Ce dernier chercheur, après avoir enseigné quelquesannées à la Faculté de théologie et de sciences religieuses del'Université Laval vient d'être intégré <strong>au</strong> Département d'anthropologiede cette même université. Plusieurs chercheurs post-doctor<strong>au</strong>x commeX. Blaisel, M. Nagy, E. Searles, C. Aporta, y sont venus en stage etont collaboré ou collaborent à divers projets. L'Université Laval estdonc devenue un carrefour international pour la recherche et la communicationscientifique sur les Inuit.Si <strong>au</strong>cun d'entre nous n'a jamais pris l'essai de M<strong>au</strong>ss sur les Inuitcomme principal horizon théorique pour ses recherches, j'essayerai demontrer, dans les lignes qui suivent, que celui-ci a constitué un arrière-planthéorique pour plusieurs des mes trav<strong>au</strong>x, comme :- L'étude des noms personnels. On sait que M<strong>au</strong>ss insiste dansson essai sur l'importance des noms personnels et de leurtransmission dans la structuration des groupes inuit. Ce fut dès1961 un de mes grands thèmes de recherche et le sujet d'une dizained'articles (dont <strong>Saladin</strong> <strong>d'Anglure</strong>, 1970,1998). je penseavoir été, avec L. Guemple (1965, 1969), à l'origine de plusieurs<strong>au</strong>tres recherches, thèses et publications sur ce sujet.- L'étude <strong>du</strong> <strong>du</strong>alisme saisonnier <strong>au</strong>ssi, argument principal del'essai, fut l'objet <strong>au</strong> cours des années 1970 de plusieurs de mesenquêtes de terrain, qu'il s'agisse <strong>du</strong> découpage calendaire oudes représentations concernant la Lune et le Soleil, ainsi queleurs déplacements respectifs. Il ressort de ces enquêtes, que le<strong>du</strong>alisme saisonnier était bien ancré dans la cosmographie etdans la cosmologie inuit. Aux latitudes arctiques, en effet, l'oppositionSoleil/Lune est exacerbée, avec un soleil permanent <strong>au</strong>solstice d'été (soleil de minuit) et une pleine lune invisible. Ausolstice d'hiver, c'est l'inverse, la pleine lune tourne en permanencedans le ciel (lune circumpolaire) et le soleil est invisible.M<strong>au</strong>ss ne semble pas avoir été <strong>au</strong> fait de ces particularités polaires,qui pourtant confortent sa thèse. Beuchat, avait parcontre des connaissances avancées en astronomie, et a très certainementfait d'intéressantes observations sur le terrain. D'<strong>au</strong>tantplus qu'il était bien <strong>au</strong>-delà <strong>du</strong> 70° de latitude Nord, où le
Bernard <strong>Saladin</strong> d’Anglure, “M<strong>au</strong>ss et l’anthropologie des Inuit” (2004) 53phénomène est particulièrement visible, et que l'hiver 1914, oùil dériva et mourut sur la banquise, la culmination lunaire étaitdans sa phase d'apogée, à l'intérieur <strong>du</strong> cycle de 19 ans (cyclede Méton) où elle varie 48 .- L'adoption, <strong>au</strong>tre grand thème que M<strong>au</strong>ss a le mérite d'avoirmis en lumière. Eue est en effet très fréquente chez les Inuit.M<strong>au</strong>ss insiste sur l'importance de cette pratique qui prend toutson sens <strong>du</strong>rant la période estivale et « indivi<strong>du</strong>aliste » <strong>du</strong> cycleannuel. En effet, le « communisme » hivernal, s'il <strong>du</strong>rait toutel'année, rendrait l'adoption inutile, puisqu'on y partage tout...Comme plusieurs <strong>au</strong>tres anthropologues (Rousse<strong>au</strong> 1970,Guemple 1979), j'ai étudié l'adoption (1988) de façon exh<strong>au</strong>stivesur le terrain. Cela m'a permis de faire apparaître que, danschaque fratrie, il y avait en moyenne un enfant donné en adoptionet un enfant reçu en adoption. On a donc avec cette coutumeune des clés de l'organisation sociale inuit, mais plus dansle sens m<strong>au</strong>ssien de l'échange que dans celui <strong>du</strong> <strong>du</strong>alisme saisonnier.À déf<strong>au</strong>t d'un principe de filiation unilinéaire, elle resserreen effet les liens soci<strong>au</strong>x entre les unités domestiques eninst<strong>au</strong>rant une sorte d'échange généralisé des enfants.- L'approche holiste des systèmes soci<strong>au</strong>x, si bien illustrée par lesessais de M<strong>au</strong>ss, a été relayée par le structuralisme lévistr<strong>au</strong>ssiendans le sillage <strong>du</strong>quel se situent plusieurs de mes trav<strong>au</strong>x,ainsi que ceux de L<strong>au</strong>grand et de quelques <strong>au</strong>tres chercheursde notre groupe. J'ai ainsi pu montrer que le système depensée inuit établissait des analogies très explicites entre l'utérus(la vie intra-utérine), l'iglou (la vie humaine) et la voûte céleste(le monde des esprits), en changeant d'échelle, et que lacosmogenèse était conçue comme une ontogenèse (<strong>Saladin</strong><strong>d'Anglure</strong>, 1978, 1980, 1981 ; voir <strong>au</strong>ssi Therrien, 1987). Làs'exprime un aspect <strong>du</strong> <strong>du</strong>alisme qui n'a pas retenu l'attention deM<strong>au</strong>ss, le <strong>du</strong>alisme sexualisé. Dans la pensée inuit, le sexe estconçu comme instable, <strong>au</strong>ssi bien lorsqu'il s'agit <strong>du</strong> mythed'origine des premiers humains qu'à l'occasion de chaque nais-48 Voir mes trav<strong>au</strong>x d'ethnoastronomie (B. <strong>Saladin</strong> <strong>d'Anglure</strong>, 1990 et 1992), et ceux de J. MacDonald (1998).
- Page 4: Bernard Saladin d’Anglure, “Mau
- Page 10 and 11: Bernard Saladin d’Anglure, “Mau
- Page 12 and 13: Bernard Saladin d’Anglure, “Mau
- Page 14 and 15: Bernard Saladin d’Anglure, “Mau
- Page 16 and 17: Bernard Saladin d’Anglure, “Mau
- Page 18 and 19: Bernard Saladin d’Anglure, “Mau
- Page 20 and 21: Bernard Saladin d’Anglure, “Mau
- Page 22 and 23: Bernard Saladin d’Anglure, “Mau
- Page 24 and 25: Bernard Saladin d’Anglure, “Mau
- Page 26 and 27: Bernard Saladin d’Anglure, “Mau
- Page 28 and 29: Bernard Saladin d’Anglure, “Mau
- Page 30 and 31: Bernard Saladin d’Anglure, “Mau
- Page 32 and 33: Bernard Saladin d’Anglure, “Mau
- Page 34 and 35: Bernard Saladin d’Anglure, “Mau
- Page 36 and 37: Bernard Saladin d’Anglure, “Mau
- Page 38 and 39: Bernard Saladin d’Anglure, “Mau
- Page 40 and 41: Bernard Saladin d’Anglure, “Mau
- Page 42 and 43: Bernard Saladin d’Anglure, “Mau
- Page 44 and 45: Bernard Saladin d’Anglure, “Mau
- Page 46 and 47: Bernard Saladin d’Anglure, “Mau
- Page 48 and 49: Bernard Saladin d’Anglure, “Mau
- Page 50 and 51: Bernard Saladin d’Anglure, “Mau
- Page 54 and 55: Bernard Saladin d’Anglure, “Mau
- Page 56 and 57: Bernard Saladin d’Anglure, “Mau
- Page 58 and 59: Bernard Saladin d’Anglure, “Mau
- Page 60 and 61: Bernard Saladin d’Anglure, “Mau
- Page 62 and 63: Bernard Saladin d’Anglure, “Mau
- Page 64 and 65: Bernard Saladin d’Anglure, “Mau
- Page 66 and 67: Bernard Saladin d’Anglure, “Mau